• il y a 3 mois
Pour Patricia Le Cadre, directrice du Cereopa et spécialiste des marchés des matières premières agricoles, le marché du blé est plutôt haussier sur 2024/25. En cause, notamment : une demande boostée par la croissance démographique, par le manque de riz à l’échelle mondiale, par les besoins en alimentation animale et par des politiques monétaires plus souples.

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Transcription
00:00Alors sur le blé, on est à peu près aujourd'hui quand on regarde les 12 mois de la campagne
00:08sur une moyenne qui est assez proche de l'année dernière, mais qui est plus élevée en fait
00:12que ce qu'on a connu sur les 10 dernières années puisqu'on est à peu près à 210
00:14euros automne en moyenne sur les 10 dernières années et qu'on est aux alentours de 225
00:19euros automne.
00:20Donc globalement on est à peu près sur le même niveau que l'année dernière.
00:23Alors moi je suis plutôt haussière sur le prix du blé en tout cas pour différentes
00:29raisons.
00:30On se focalise beaucoup sur l'offre, mais finalement l'offre elle est plus ou moins
00:33actée, en tout cas sur la première partie de campagne et donc ce qui est à disposition
00:37sur l'hémisphère nord.
00:38L'hémisphère sud qui va arriver en deuxième partie de campagne, il y a encore plein de
00:41choses qui peuvent se passer, notamment en termes de météo, géopolitique, etc.
00:45Mais ce dont on ne parle pas beaucoup c'est la demande et il me semble que la demande
00:49est complètement sous-estimée dans les différents bilans.
00:51On a même des bilans où on fait reculer l'utilisation du blé globalement au niveau
00:56mondial et puis d'autres où on est sur une évolution mais assez timide.
01:00Or en fait il y a plein de raisons pour se dire que finalement on sous-estime cette demande.
01:06La première des choses c'est qu'en fait déjà on a une augmentation de la démographie
01:09chaque année qui fait que comme on est à peu près 80 millions de personnes en plus
01:12chaque année, on a quand même besoin de 8 à 10 millions de blés par an supplémentaires.
01:17Déjà c'est la première raison.
01:18Alors quand on me dit qu'on va diminuer de 3 millions de tonnes ou d'augmenter que
01:21de 5 millions de tonnes, ça me paraît un peu juste, sachant que chaque année dans
01:25les bilans on révise à la hausse et même souvent à postériori sur l'ancienne campagne
01:29la consommation de blé au niveau mondial.
01:31Donc on a cette augmentation démographique, on a l'augmentation aussi ou la variation
01:42en fait dans les usages alimentaires puisque on sait qu'on passe souvent du riz au blé
01:47etc.
01:48Et il se trouve qu'il y a un deuxième élément très important c'est qu'on manque de riz
01:51dans le marché mondial et que c'est quelque chose qui est en train de s'aggraver.
01:54Donc on ne peut pas dire que globalement on va baisser la consommation de riz et qu'on
01:58va aussi baisser celle de blé.
01:59À un moment donné il faut quand même nourrir les gens, qu'on le veuille ou non.
02:03Donc il y a déjà deux éléments qui plaident là-dessus.
02:05Après la troisième chose c'est qu'il y a une tonne sur cinq dans le monde de blé
02:10qui est destinée à l'alimentation animale.
02:12Or l'alimentation animale elle continue à progresser fortement dans le monde, notamment
02:16le poulet et on a des pays comme l'Indonésie qui est un très gros importateur de blé,
02:20qui utilise beaucoup de blé pour nourrir ses poulets par exemple, donc en fait on a
02:24des dynamiques haussières quand même un peu partout.
02:25La limite de l'exercice au niveau mondial c'est possiblement des épices aussi qui
02:29feraient qu'effectivement on recule en termes de demande.
02:32Après ce qu'on peut dire aussi et ce qu'on a tendance à oublier c'est que les gros
02:39importateurs, les gros pays importateurs sont des pays qui achètent à crédit et donc
02:44en fait là ils ont été relativement limités dans leurs achats parce que les taux d'intérêt
02:48étaient très élevés.
02:49Or on rentre dans une dynamique de baisse des taux d'intérêt, ça veut dire que ça
02:52va alléger le poids de la dette pour un certain nombre de pays qui achètent de toute façon
02:57ces céréales à crédit.
02:58Et puis la dernière chose aussi, c'est que cette baisse des taux, notamment américaine,
03:03elle va sans doute faire baisser le dollar et que quand on baisse le taux de change du
03:10dollar avec les autres monnaies, assez mécaniquement ça fait remonter les prix en dollars sur
03:15le marché de Chicago.
03:16Donc il y a pas mal d'éléments qui expliquent que globalement on puisse s'étausser sur
03:20ce marché.
03:21Et en termes de demandes, il y a plein d'autres éléments qui rentrent en ligne de compte
03:24et notamment sur la partie alimentation animale, le ratio de prix entre le blé et le maïs
03:29c'est quelque chose de très important à observer et donc au niveau mondial il n'est
03:33pas tellement en faveur du blé pour l'instant mais on sait qu'on a beaucoup de blé de
03:35pas très bonne qualité cette année donc il faudra bien qu'ils trouvent un débouché
03:38en alimentation animale.
03:39Sur l'offre il y a quelque chose de très important, c'est qu'on sait que la première
03:48partie de campagne, donc c'est l'hémisphère nord qui arrive au marché, on sait qu'on
03:52va perdre à peu près 11 millions de tonnes entre la baisse de la Russie, de l'Ukraine,
03:55de l'Union Européenne, la montée des Etats-Unis, du Canada, donc ça c'est relativement acté.
04:00Ce qu'on ne sait pas bien et ce qu'il faut vraiment regarder c'est le timing, c'est-à-dire
04:02la vitesse à laquelle notamment la Russie et même l'Ukraine met au marché ces disponibilités.
04:07Or ça va très très vite puisque les deux pays en deux mois ont dépassé 20% de leurs
04:12objectifs donc c'est énorme.
04:14Donc ça veut juste dire qu'on peut très bien avoir deux campagnes avec le même prix
04:19moyen mais qu'en fait la cinétique ne va pas du tout être la même et moi je pense
04:23vraiment qu'on va être beaucoup plus proche de ce qui s'est passé en 2021-2022, c'est-à-dire
04:27qu'en fait on avait un début de campagne relativement bas et puis on a commencé à
04:32progresser et puis après on a eu une accélération d'augmentation des prix sur la deuxième
04:35partie de campagne.
04:36Donc moi je verrais assez bien la campagne céréalière se profiler sous cette forme-là.
04:45Sur la France ce qu'on peut dire c'est qu'effectivement si on regarde que la France, on peut imaginer
04:48qu'on est dans un marché un peu haussier puisqu'on a une baisse de la récolte mais
04:52il ne faut pas oublier qu'on avait une augmentation des stocks de report notamment parce qu'en
04:55fait les prix n'étaient pas rémunérateurs pour les agriculteurs et qu'ils ont gardé
04:59beaucoup de marchandises en fait en fin de campagne.
05:01Donc là effectivement la question c'est est-ce qu'on attend un peu et est-ce qu'on
05:05mise sur une augmentation des prix sur la deuxième partie de campagne et est-ce qu'on
05:08peut garder un peu plus son blé sachant qu'effectivement on a un peu plus de place finalement ou pas.
05:13Alors ce qu'il faut savoir c'est qu'il y a aussi le maïs qui va arriver même s'il
05:15est un peu en retard et que le maïs globalement on est sur un marché français qui est plutôt
05:20très correct, qui sera peut-être un petit peu plus tendu au niveau mondial mais en tout
05:24cas pas au début.
05:25Donc ça c'est voilà et il y a toujours en fait cette compétition entre le blé et
05:28le maïs qui est importante à suivre.
05:30Et après sur le blé en France effectivement on a quand même des qualités qui ne sont
05:36pas super bonnes et qui vont surtout obliger les organismes stockers à faire un gros travail
05:41d'allottement, de mélange etc.
05:43Donc ça coûte de l'argent et donc on peut comprendre aussi qu'on attend un prix un peu
05:47plus rémunérateur alors on est suiveur, on a une parité euro-dollar qui ne nous aide
05:51pas beaucoup et donc il y a beaucoup de choses qui vont se passer je pense après les élections
05:56américaines au mois de novembre où effectivement il y a pas mal de choses qui peuvent bouger
06:01et même en termes de taux de change potentiellement et donc voilà on peut jouer la montre mais
06:07pour l'instant voilà ce qu'on peut dire.

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