• il y a 2 mois

Pascal Praud revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité.

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Transcription
00:0011h14, et si vous avez vous-même été agressé dans les transports en commun, si vous êtes une femme,
00:11mais peut-être aussi si vous êtes un homme, ce qui paraît plus étonnant, mais on ne sait jamais.
00:17Vous pouvez être agressé d'ailleurs un homme par un autre homme, et ça peut également arriver.
00:22Vous nous appelez, on rappelle évidemment le numéro.
00:2501 80 20 39 21
00:27Alors je voudrais qu'on réécoute ce que vous disiez, Géraldine, hier.
00:32J'ai senti un monsieur, un jeune homme, me frotter, voilà.
00:36Et qu'est-ce que vous faites dans ce cas-là ?
00:37Alors en fait c'est très bizarre, parce qu'on en est sûre, mais sans être vraiment certaine de ce qui se passe,
00:44donc je me suis décalée, je l'ai regardée avec des yeux méchants,
00:47j'ai voulu, je voulais l'afficher et lui dire d'arrêter, je n'ai pas osé, j'ai arrêté,
00:52et je me suis écartée, et après il n'arrêtait pas de me regarder, et j'ai trouvé ça immonde en fait,
00:56et donc voilà, c'est le quotidien de beaucoup de personnes malheureusement.
00:59Mais c'est le quotidien de beaucoup de personnes effectivement,
01:03et c'est peut-être le quotidien d'Éloïse Goua que vous écoutez, que vous entendez dans l'émission Culture Média.
01:09Bonjour Éloïse.
01:10Bonjour Pascal.
01:11Je vous entendais parler tout à l'heure avec Géraldine, en entrant dans le studio,
01:17et la première chose que vous lui avez demandé, est-ce que c'est la première fois que ça t'est arrivé ?
01:23Je lui ai demandé ça parce que moi j'ai 31 ans, ça fait 15 ans que je prends les transports en commun en région parisienne et à Paris,
01:30et que moi j'ai déjà été victime de deux frotteurs et d'une main aux fesses dans le métro,
01:38et en fait je cherchais dans mes souvenirs, je crois qu'il y a encore d'autres choses que j'ai presque écartées de mon cerveau,
01:45tant ce que vous disiez Géraldine, c'est ça, c'est le quotidien des femmes.
01:50Et ce que je tenais à dire aussi, ce que ne savent pas forcément les hommes,
01:54c'est que j'en suis venue, comme beaucoup de femmes autour de moi, à éviter de montrer mes jambes dans le métro,
02:00même quand il fait 40 degrés à Paris, je mets un pantalon, à éviter de montrer mes bras, je ne mets plus un débardeur, je mets une veste,
02:07pour éviter de, ce mot est terrible, mais tenter, entre guillemets, certains agresseurs sexuels.
02:15Est-ce qu'il y a un profil type de celui qui va vous ennuyer dans un métro ?
02:22Je ne pense pas du tout, en l'occurrence, j'ai regardé dans les yeux ces hommes qui se sont frottés à moi,
02:29et je m'en rappelle d'un en particulier, c'était, j'ai envie de vous dire, un homme d'affaires,
02:34il était en costume, une petite mallette, très propre sur lui, certainement père de famille, la quarantaine,
02:41et il n'a pas non plus hésité à me regarder dans les yeux, un peu comme vous hier Géraldine,
02:48parce qu'il avait compris que j'avais compris, et ce qui m'a le plus frappée, c'est qu'il ne semblait pas avoir honte, même quand je le regardais dans les yeux.
02:58Ça, ça s'est passé il y a combien de temps ?
03:00Il y a 2-3 ans.
03:01Est-ce que vous avez engagé la conversation avec lui pour lui reprocher son attitude, ou est-ce que vous n'avez rien fait ?
03:09C'était la deuxième fois que ça m'arrivait, et la première fois j'avais été très frustrée à près coûte de ne rien en avoir dit.
03:15Donc là oui, je lui ai parlé directement, j'ai été un peu insultante, je répéterai pas les mots ici,
03:23mais je lui ai un petit peu crié dessus, également pour alerter les gens autour de moi,
03:27parce que comme souvent, les scènes de ces frotteurs se passent dans des métros, dans des rames bondées.
03:32Donc j'ai parlé très fort en lui disant « ça va, je te dérange pas », et lui continuait à sourire,
03:38et évidemment à nier ce qu'il s'était passé, je rentre pas dans les détails, mais je sais ce qu'il s'est passé,
03:45je sais ce qu'il faisait, et je sais que ça lui procurait du plaisir, voilà, si vous voyez ce que je veux dire.
03:52Et il m'a souri, les gens autour de moi n'ont rien dit, je voyais que tout le monde était un petit peu gêné,
03:58il est simplement sorti à l'arrêt d'après.
04:01Parce qu'il avait effectivement, il ne voulait pas prolonger ce moment.
04:05À votre avis, qu'est-ce qu'il faut faire ? Alors bon, vous, vous n'avez pas 20 ans,
04:10donc déjà vous pouvez répondre, ça ne veut pas dire que d'ailleurs les gens qui ont 20 ans ne peuvent pas répondre,
04:15mais peut-être qu'ils sont plus en difficulté parce qu'ils sont plus jeunes,
04:18et notamment je pense aux très jeunes filles qui ont 14 ans, 15 ans, 16 ans,
04:21qui commencent à aller dans le métro un peu toutes seules, qui sont démunies, votre fille Géraldine,
04:27je ne la laisse pas prendre le métro toute seule.
04:29Elle a 11 ans aujourd'hui.
04:31À son âge, je le prenais toute seule.
04:33Ah oui, ça c'est intéressant.
04:35Et je n'avais pas de téléphone portable, alors est-ce que c'était l'insouciance, je ne sais pas.
04:38Non, c'est que l'époque était, je pense, différente.
04:41Ça, ce que vous dites est décisif.
04:43J'allais sur les Champs-Elysées toute seule, je travaillais avec des copines, tout se passait bien quoi.
04:46Et c'est-à-dire que la jeunesse que vous avez eue, jamais vous n'avez été apportinée.
04:52Non, c'est vrai, jamais, à son âge, non vraiment.
04:54Or, aujourd'hui, si je me permets, je témoigne aujourd'hui,
04:57mais vous regardez autour de vous, j'en parle avec mes amis de mon âge,
05:02je ne connais quasiment pas une seule personne à qui ce genre d'événement n'est pas arrivé.
05:06C'est-à-dire que c'est devenu quelque chose qui fait partie du quotidien des femmes.
05:10Et pour vous répondre, Pascal...
05:12Qu'est-ce que vous feriez si ça arrive demain ?
05:14Alors, bon, comme vous le disiez, moi aujourd'hui, je crois que j'ai suffisamment d'épaule pour répondre,
05:20mais je pense que c'est une question d'âge, c'est aussi une question de caractère.
05:23Ce qu'il est important de faire, c'est, comme pour les pickpockets,
05:26aller prévenir le conducteur de la rame.
05:28Car, quand le conducteur de la rame est au courant,
05:31si la personne est plutôt informée sur ce qu'est un frotteur,
05:35il peut parler directement à toute la rame pour humilier cette personne-là qui se reconnaîtra.
05:42Oui, mais comment vous parlez à un conducteur si vous êtes dans une voiture qui est loin du chauffeur, c'est pas facile ?
05:47Au prochain arrêt, vous vous attendez d'aller le voir.
05:49Mais en fait, je lisais ça, que la RATP mettait de plus en plus de mesures en place,
05:55et il disait qu'on pouvait en parler à des agents de sécurité RATP ou au conducteur de la rame,
06:01et si besoin, on peut également porter plainte, mais bon, difficile de retrouver l'identité de la personne.
06:06Géraldine parlait hier de ce sentiment d'être souillé, d'être sali,
06:11est-ce que c'est quelque chose que vous avez également éprouvé ?
06:14Sur le moment, on ressent un vrai dégoût.
06:17Je ne vais pas vous dire que ça m'a traumatisée, marquée à vie,
06:21et heureusement pour moi, ce serait peut-être le cas de personnes plus fragiles
06:26qui ont potentiellement vécu d'autres agressions sexuelles dans leur vie,
06:29ça il faut le prendre en compte, il peut y avoir des retombées psychiques,
06:32ça n'a pas été mon cas.
06:33Sur le moment, on ne passe pas une bonne journée, je vous l'assure.
06:38Est-ce que, par exemple, ça peut changer le regard que vous avez sur les hommes ?
06:43Alors, moi je fais quand même une grande différence entre ces gens qui font ça
06:49et les hommes de ma vie que j'adore et j'ose espérer,
06:53mais je trouve qu'il est important pour les femmes d'en informer les hommes de ce genre de situation,
06:58d'informer mon père, mon fiancé, voilà ce qui se passe pour une femme dans le métro,
07:02parce que je pense que la plupart des hommes ne voient pas ce que vivent les femmes.
07:06Souvent, j'ai dit ça, on ne sait pas, on ne connaît pas la vie que vous avez,
07:11et la séquence Me Too a levé le voile de ça.
07:14Pourtant, on a des sœurs parfois, on a des fiancés, on a des filles,
07:18mais il n'empêche que votre quotidien, on ne le connaît pas,
07:21parce que par définition, on est des hommes,
07:23et la séquence Me Too a révélé des comportements que moi-même,
07:29alors que je vis avec les hommes depuis toujours, je n'imaginais pas.
07:32Pourquoi ? Parce que je sais moins comment je me conduis,
07:35mais je ne sais pas comment un homme se conduit,
07:37je ne sais pas comment un homme vous parle,
07:38je ne sais pas comment un homme dans l'intimité se conduit avec vous,
07:41je ne suis jamais présent, je ne le sais pas.
07:44Donc ça, ça peut nous surprendre,
07:47et quand on a entendu des témoignages ahurissants de femmes,
07:51avec parfois des personnalités d'ailleurs, racontant des scènes d'humiliation,
07:55on reste évidemment coin face à cela.
08:00Que voulait nous dire Olivier Guenet, qui est en train de nous parler, cher Olivier ?
08:05Il y a Lucas qui nous a appelé, il a 40 ans,
08:07il a été victime également de faits similaires dans les transports en commun.
08:11On va pouvoir l'écouter si vous voulez,
08:13alors c'est plus rare forcément qu'un homme soit agressé sexuellement,
08:18je crois que, je n'ai pas de statistiques à vous donner,
08:22mais évidemment les viols, le plus souvent et le plus majoritairement,
08:28un homme qui viole une femme,
08:29et une agression sexuelle, c'est toujours un homme,
08:32toujours le plus souvent et plus que cela sans doute,
08:35un homme qui agresse une femme.
08:36Mais là Lucas, vous voulez témoigner, vous avez 40 ans ?
08:40C'est ça oui, c'était juste pour témoigner,
08:43il y a quelques années j'avais perdu beaucoup de poids,
08:45parce que j'ai eu des petits soucis de santé, donc j'étais assez faible,
08:48et comme la dame qui parlait, c'était un métro bondé,
08:52et un soir je rentrais au travail,
08:54et là il y a un monsieur qui me tripote le sexe,
08:57alors au début je me suis dit bon le train est bondé,
09:00c'est un peu, c'est un geste malheureux.
09:02Donc je repousse sa main, et puis en fait sa main revient avec insistance,
09:05et puis plus je la repousse, plus je sens de l'excitation en faire ce monsieur,
09:10et exactement comme la dame, c'est à dire c'est un monsieur d'une cinquantaine d'années,
09:15grisonnant, lunettes, très chic, cadre supérieur, voilà.
09:21Et ça touche manifestement effectivement toutes les catégories sociales,
09:26peut-être pas tous les âges quand même,
09:28on imagine que ça touche plus des gens, si j'ose dire, plus jeunes que des gens plus âgés.
09:35Vous voulez dire pour les victimes ?
09:37Non, pour les agresseurs.
09:40Je sais pas, là Lucas parle d'un homme d'une cinquantaine d'années.
09:43Oui, mais ça reste un homme jeune,
09:46mais bon moi j'ai pas de statistiques là-dessus,
09:48mais je vous laisse terminer surtout Lucas.
09:50Non mais voilà c'était témoignage, parce que c'est vrai que moi je suis un homme,
09:55je pensais pas un jour être victime de ça.
09:58On est dans la stupeur sur le moment présent,
10:00et un peu, alors moi ce qui m'est arrivé c'était quand même anecdotique,
10:03moi je m'en suis remis, heureusement,
10:05mais sur le moment on se sent sale,
10:09dès qu'on rentre le premier réflexe qu'on a c'est de se doucher,
10:12se dire mince j'ai mal réagi, et de s'en vouloir.
10:17Une forme de culpabilité, Géraldine confirme d'ailleurs.
10:21De n'avoir pas parlé, de n'avoir rien fait, moi j'ai changé de wagon,
10:24en fait j'avais peur de passer pour une menteuse en fait,
10:26vous voyez ce que je veux dire ?
10:27C'est malheureusement le processus classique, le petit kick des victimes.
10:31Alors que normalement je sais me défendre, mais là j'étais en fait démunie.
10:32Héloïse Gouin et Géraldine Hamon sont deux jeunes femmes qui travaillent à Europe 1,
10:36vous travaillez à Europe 1 depuis combien de temps ?
10:38C'est ma quatrième année.
10:39Bon, est-ce que par exemple dans l'entreprise,
10:41et un jour vous avez été, ou est-ce qu'on vous a mal parlé,
10:47est-ce qu'un homme a été indélicat, a eu un comportement indélicat,
10:51dans l'entreprise, ce qui pouvait exister jadis,
10:54ou est-ce que, alors je parle pas de l'aspect professionnel,
10:57où on peut avoir un échange vif avec celui qui vous dirige,
11:00et à ce moment-là c'est tout à fait autre chose,
11:04mais est-ce que vous avez eu affaire dans cette entreprise,
11:07par exemple à des comportements que vous diriez déplacés ?
11:10Pas, pour être très honnête, pas à Europe 1,
11:13mais ça m'est arrivé avant dans une autre entreprise,
11:16pareil, rien de très grave,
11:19mais je sais que cette personne n'aurait pas fait la même chose avec un homme,
11:22j'étais en réunion dans une conférence de rédaction,
11:25j'étais toute jeune stagiaire,
11:27et j'étais là depuis très peu de temps, ça faisait 4-5 jours,
11:30et une personne derrière moi, un rédacteur en chef,
11:33s'est mis à me masser les épaules devant tout le monde,
11:35je ne le connaissais pas, je l'avais vu deux fois dans ma vie,
11:39forcément j'étais très mal à l'aise,
11:40Mais c'est parfaitement inadmissible.
11:42Voilà.
11:43C'est-à-dire que ça c'est très intéressant,
11:45c'est pour ça que je trouve que les exemples sont les plus intéressants.
11:49Comment peut-on toucher une femme
11:54avec qui on n'a pas de rapport d'amitié ou d'intimité,
11:59ou d'un rapport amoureux,
12:01dans une réunion devant tout le monde,
12:03pour masser en l'occurrence ses épaules ?
12:06Il y avait combien de personnes dans la salle ?
12:088-9.
12:10Il y avait des hommes, des femmes ?
12:11Des hommes et des femmes.
12:12Personne n'a réagi ?
12:15Non.
12:15Ça a duré combien de temps ce massage ?
12:17Pas longtemps, je dirais une minute.
12:19Est-ce que c'est très long ?
12:20Oui, peut-être un peu moins d'une minute.
12:22Qu'est-ce qu'il a dit cet homme ?
12:25Rien, il a continué à faire comme si de rien n'était,
12:28parce que ça arrivait en plein milieu d'une discussion professionnelle,
12:31il s'est juste placé derrière moi.
12:33Il était chef ?
12:34Oui, sachant très bien que c'était un des rédacteurs en chef d'un service.
12:39Et qu'est-ce que vous avez fait ?
12:41Rien.
12:42Et vous lui avez dit après ?
12:43Non.
12:44Pascal, j'avais 23 ans, je sortais de mon école de journalisme,
12:48j'étais en stage, c'était mon boss,
12:51j'ai été très mal à l'aise, je me rappelle de mes muscles qui se sont raidis,
12:55de mon regard un peu apeuré, j'avais même honte vis-à-vis du reste des gens,
12:59parce que j'avais peur, un peu comme vous, c'est terrible que la victime ait honte,
13:03j'avais peur que les gens pensent que j'avais une intimité avec lui
13:06que je n'avais absolument pas puisque je ne le connaissais pas.
13:08Donc j'ai été un peu tétanisée.
13:11C'est intéressant, c'est-à-dire qu'il vous met effectivement dans une situation...
13:15Et il avait quel âge cet homme ?
13:17La quarantaine.
13:18Et il n'y a pas eu de débrief après ?
13:20Non, je ne le sais pas.
13:20Et vous êtes restée combien de temps dans cette entreprise ?
13:23Je suis restée en stage de trois mois.
13:25Et c'est arrivé une seule fois ?
13:27Oui.
13:28Et il n'a pas cherché après à avoir un lien avec vous ?
13:33Il y avait des textos, mais là j'ai envie de vous dire que c'était de la drague,
13:36et quand j'ai dit non, c'était OK.
13:38D'accord.
13:39Et ça n'a rien à voir pour le coup.
13:42Je trouve ça formidable.
13:46Mais c'est vrai que je pourrais écouter des heures, des témoignages de ce type,
13:52de ce qui se passe dans l'entreprise.
13:54Je pense qu'il y a la phrase de Camus qu'on cite souvent,
13:58un homme ça s'empêche.
13:59Je pense qu'effectivement dans l'entreprise,
14:02chacun doit rester à sa place.
14:05Et ça n'empêche pas d'ailleurs qu'on puisse avoir des rapports cordiaux, amicaux.
14:10Quand j'entends dire qu'on ne peut pas dire à une femme « t'es belle »,
14:12ce n'est pas vrai.
14:13On peut le dire à une femme dans l'entreprise « t'es belle ».
14:15Bien évidemment.
14:16Il faut savoir quand le dire, comment le dire,
14:21à quel moment de la relation le dire.
14:23On n'arrive pas dans une entreprise le premier jour en disant « t'es belle » à tout le monde.
14:27Il peut se créer évidemment des liens sinon d'amitié,
14:31en tout cas de forte camaraderie.
14:32C'est notre cas ici.
14:33Mais effectivement, il ne peut pas y avoir de sous-entendu
14:39dans ce type d'échange.
14:42Il écoute M. Laffitte avec intérêt.
14:46Vous écoutez avec intérêt tout ce qui se dit.
14:49Oui, d'autant qu'à Europe, on est un petit peu en pointe sur ce sujet
14:52puisqu'on a une référente harcèlement dans l'entreprise.
14:56Écoutez, vous avez vu la liberté de question que j'ai aujourd'hui
15:00avec ces deux jeunes femmes
15:01où je pose des questions sur ce qui se passe dans cette entreprise.
15:03Vous avez raison.
15:04Mais bien sûr, en l'espèce, oui.
15:07Pas toujours, mais en l'espèce, oui.
15:10Bon, allez, la pause et ça va être Émilie Dès.
15:13Vous restez encore avec nous ou on change de sujet ?
15:15Vous restez avec nous.
15:16Allez, oui, parce que c'est vraiment très intéressant.
15:18Si vous nous rejoignez à l'instant sur Europe,
15:21nous parlons d'un sujet qui sont ou que sont
15:25les agressions sexuelles dans les transports en commun.
15:28Et tout était parti du témoignage de Géraldine hier.
15:31Nous avons parlé des frotteurs et nous sommes avec Héloïse Gouin
15:34que vous pouvez écouter le matin, entendre le matin
15:37avec notre amie Thomaïlle dans Culture Média.
15:42Et puis avec Géraldine Hamon que vous connaissez bien maintenant
15:45et qui est avec nous depuis plus d'un an dans cette émission.
15:48Thierry, bonjour.
15:49Bonjour Pascal.
15:51Thierry, vous vous habitez Nantes
15:53et vous êtes affecté à la brigade de surveillance
15:56des transports en commun de Nantes, c'est bien ça ?
15:59Oui, et je pense que vous connaissez aussi bien Nantes.
16:01Puisque à un moment j'étais affecté dans un quartier que vous connaissiez,
16:05j'étais illudié, le quartier Saint-Félix.
16:08Alors bien sûr, Saint-Félix, vous connaissez.
16:11J'ai connu Nantes il y a longtemps évidemment, j'ai quitté Nantes en 86,
16:14j'étais jeune étudiant donc forcément la ville a beaucoup changé.
16:17Alors, je suis à la retraite là maintenant depuis un an, deux ans maintenant
16:23et bon ben je suis bien content.
16:25Mais ce qu'il y a c'est qu'au niveau des frotteurs, des agressions sexuelles,
16:31alors moi je travaillais dans le métro parisien, métro, bus
16:35et ainsi qu'à la BSTC qui s'appelle la brigade de surveillance des transports en commun.
16:41Autant j'ai pu traiter des affaires d'agressions,
16:45agressions vraiment physiques suite à des ivoignes, ce qu'elle veut dire,
16:51sur Nantes, là les affaires ont été traitées.
16:56Mais en ce qui concerne une personne qui va se frotter à une autre personne,
17:01c'était rarement, très rarement traité en fin de compte.
17:05Il faut apporter la preuve, c'est ça qui est difficile.
17:08Par exemple, Géraldine, apporter la preuve dans un transport en commun
17:12qui est bondé, que l'homme intentionnellement est en train de frotter...
17:17Surtout si c'est fait très discrètement.
17:18Mais bien sûr, tout le monde sait dans ces cas-là, vous, vous savez, lui il sait.
17:22Mais la charge de la preuve, j'imagine, n'est pas facile à apporter.
17:25Peut-être que filmer discrètement n'est pas une mauvaise idée,
17:28si la personne ne le voit pas, parce que souvent les frotteurs sont derrière nous.
17:32Peut-être que filmer à hauteur de nos hanches discrètement le portable à la main
17:38n'est pas une mauvaise idée pour montrer quelque chose.
17:40Quand c'est bondé, t'attends ça...
17:41Bien sûr, c'est compliqué.
17:42Bon, les frotteurs, ce que vous voulez dire, c'est que les frotteurs ne sont pas sanctionnés.
17:46C'est ça que vous dites...
17:48Non, non, non, ah bah non !
17:50Bah non, qu'est-ce qu'un procureur va amener une autre personne dans un tribunal
17:56parce qu'il leur a frotté ?
17:58Il va dire, ah bah non, c'est un volontaire !
18:00Il leur a frotté, donc bah non, c'est rarement frotté.
18:04Moi, ce que je conseille souvent aux victimes,
18:07excusez-moi, je parle crudemment parce que j'ai toujours été dans la rue,
18:10c'est, elle lui colle une baffe en pleine tronche devant tout le monde...
18:16Je les vois réagir, je soumets cela.
18:20C'est difficile de frapper quelqu'un, je pense, Héloïse, c'est compliqué.
18:26Et puis, je pense que ça dépend des personnes,
18:28mais moi, même quand j'ai de la colère en moi, je n'ai pas de violence.
18:31Et comme vous dites, frapper quelqu'un, je ne crois pas que ce soit un acte qui me soulage.
18:37Et puis, par ailleurs, je parle pour moi,
18:40je pense que ça concerne aussi beaucoup de femmes,
18:42mais on se sent quand même dans une situation de fragilité
18:47quand on est victime de quelque chose,
18:49et on peut avoir peur de la réaction de l'autre.
18:53Que vous vous fassiez agresser dans le métro ou dans la rue,
18:55vous vous dites pour que l'homme se permette de faire ça.
18:58Comment est-ce qu'il va réagir si je lui donne une claque ?
19:01Géraldine Hamon ?
19:02C'est la même chose, on ne sait pas comment.
19:03Moi, je sais que même verbalement, je me suis fait agresser aussi,
19:07verbalement, j'étais même avec ma fille ce jour-là,
19:10et bien, je n'ai pas osé faire quoi que ce soit,
19:14parce que comment aurait réagi cet homme en fait ?
19:17J'avais ma fille à côté qui avait peur.
19:20Je leur dirais, tu ne réponds pas.
19:22Je pense que le père que je suis,
19:25je leur dirais, si t'arrives à ça,
19:27et à une heure du matin, tu te fais insulter,
19:28tu ne réponds pas, tu traces ton chemin.
19:30Ce n'est peut-être pas très noble,
19:32mais vous voyez quand même, Thierry,
19:34votre solution, elle n'est pas approuvée par ni Héloïse, ni Géraldine.
19:39Vous dites bien sûr, mais c'est important,
19:41parce qu'elles n'ont pas envie de donner une claque à quelqu'un.
19:44Parce qu'elles peuvent avoir peur,
19:46ce qu'elles disent est très intéressant.
19:49Parce que vous, vous réagissez,
19:50en fait, c'est toujours pareil, on réagit comme un homme.
19:53Vous faites de la projection psy, comme dit l'autre.
19:56C'est-à-dire, vous dites, si moi, homme,
19:57j'étais touché par un autre homme,
20:00je lui mettrais ma main dans la figure.
20:01Mais vous êtes un homme.
20:03Alors, bien sûr, bien sûr.
20:06Mais je me mets, je suis marié, j'ai trois enfants,
20:10je comprends les choses.
20:11Mais ça, c'est des trucs qu'il faut bondir,
20:14dans le sens que je me mets à la place de la femme.
20:17La femme se fait affronter par un homme.
20:19Donc, si elle veut qu'il y ait une procédure judiciaire derrière,
20:24il faut que l'homme soit interpellé,
20:26il faut que la femme dépose plainte,
20:28il faut qu'il y ait une audition et ainsi de suite.
20:31Le bon fonctionnaire de police, il va traiter, ça.
20:35Mais il n'y a aucune suite judiciaire derrière.
20:37Voilà, la difficulté d'imprève, c'est ce qu'on disait.
20:40En fait, on est dans un cas où les solutions,
20:45elles ne sont pas très nombreuses.
20:47Il y a une solution immédiate,
20:48c'est effectivement de prendre à partie
20:51tous les spectateurs avec la parole et de dire
20:55« Qu'est-ce que vous êtes en train de faire, monsieur ? »
20:57Ce genre d'attitude.
20:59Donc, de le mettre en difficulté.
21:01Et là, on peut imaginer que dans une rame
21:05ou en tout cas autour de certaines personnes,
21:07il y a une forme d'efficacité
21:09puisque le jugement social de tous ceux qui sont là
21:14sera quand même sur cet homme.
21:16Je ne sais pas ce que vous en pensez,
21:17donc ça c'est une possibilité.
21:19L'autre possibilité, c'est ce que vous avez fait,
21:21c'est de ne pas, de rien dire finalement.
21:24De changer de wagon, tout simplement.
21:26Je pense que répondre physiquement,
21:29c'est ce que vous avez dit Héloïse,
21:31je vous comprends,
21:32parce que quand tu commences à frapper quelqu'un,
21:34tu ne sais pas, la personne peut après...
21:37En fait, la personne peut dire « mais il m'a frappé »
21:39et d'une certaine manière se retourner contre vous
21:42parce que la frappe, il pourra la prouver,
21:46mais vous ne pourrez pas la prouver.
21:48Donc vous vous retrouvez dans une situation très difficile.
21:52Alors peut-être les caméras, effectivement,
21:54si tout était filmé dans les wagons,
21:56il est possible que là, il y ait des choses qui changent.
21:59Héloïse Gouin ?
22:00Et je pense que les frotteurs, en l'occurrence,
22:03le savent qu'on manque de solutions.
22:05Parce que ce qui m'a frappé,
22:06j'ai l'impression que c'était pareil pour vous Géraldine,
22:08dans le regard de cet homme,
22:10c'était son sentiment d'impunité.
22:12Le sourire.
22:13Même s'il avait capté que j'avais capté.
22:15Bien sûr, c'est ça.
22:16Le sourire qu'il me tendait,
22:17alors même que je venais de le dénoncer,
22:20de le repousser, etc.
22:22C'est peut-être ce qui m'a le plus glacé le sang,
22:24c'est le côté « je sais que je te fais du mal,
22:27mais je m'en fiche puisqu'il ne m'a rien fait ».
22:29Et c'est ça qui est très compliqué
22:31à vivre en tant que femme au quotidien.
22:35Bon Thierry, je vous remercie grandement.
22:37Vous êtes jeune pour être à la retraite ?
22:39Vous avez 56 ans, vous êtes déjà à la retraite ?
22:41Oui, parce que j'ai fait 3 ans d'armée,
22:444 ans d'amnistiation prétentiaire,
22:46je suis rentré dans la police en 90, je crois.
22:48Et rien n'est trop important,
22:50donc j'avais mon quota.
22:52Mais là, vous êtes de quelle année ?
22:53Vous êtes de 68, 69 ?
22:55Oui, voilà, c'est ça, 66.
22:57Et vous n'ennuyez pas ?
22:59Qu'est-ce que vous faites dans la journée ?
23:01J'habite en Vendée.
23:03Si vous habitez en Vendée, effectivement,
23:05on ne s'ennuie jamais.
23:07Et vous habitez où en Vendée ?
23:11Secteur Montaigu.
23:13Montaigu. Mais alors qu'est-ce que vous faites
23:15dans une journée ? Votre épouse elle travaille peut-être ?
23:17Non, à la retraite aussi,
23:19fonction publique.
23:21Qu'est-ce que vous avez fait aujourd'hui ?
23:23J'ai été chercher
23:25des aiguillettes de canard.
23:27J'ai un potager,
23:29j'ai plein de choses, puis j'ai encore des copains
23:31qui sont encore, je trompe, des collègues,
23:33qui me disent un peu ce qu'ils font
23:35sur la plante.
23:37Vous avez 56 ans, généralement,
23:39la mortalité ne frappe pas
23:41les cinquantenaires, à priori.
23:43Si, si.
23:45Mais j'ai vu pas mal de choses.
23:47On ne dit pas les cinquantenaires, c'est M. Boubou qui m'a repris,
23:49donc il a parfaitement raison.
23:51Bravo !
23:53Les cinquantenaires !
23:55Bravo M. Boubou !
23:57Non mais c'est vrai,
23:59ça ne vous manque pas du tout de travailler ?
24:01Jamais une fois, vous vous trouvez un peu,
24:03vous vous dites, l'activité professionnelle,
24:05elle me manque ?
24:07Non, écoutez, je suis
24:09content de vous entendre
24:11parce que je vous suis
24:13depuis presque La Beaujoire.
24:15Non, c'est vrai que
24:17j'étais un grand joueur à La Beaujoire, tout le monde le sait.
24:19J'étais international.
24:21Je vous suis depuis très longtemps, même lorsque vous étiez
24:24dans une autre chaîne concurrente,
24:26je vous écoutais parce que je sais que
24:28vous êtes un pro-police.
24:30Vous défendez...
24:32Non mais c'est vrai qu'il faut défendre
24:34les policiers et parfois ils sont très mal traités dans l'espace public.

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