Xerfi Canal a reçu Serge Perrot, professeur agrégé des universités à l’Université Paris-Dauphine, pour parler de l'animation d'une communauté.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00Bonjour Serge Perrault, vous êtes professeur à Paris Dauphine, vous êtes professeur de
00:13management des ressources humaines. Vous êtes un spécialiste de la question de l'engagement.
00:18Rapport que vous avez co-écrit avec Lionel Garraud, maître de conférence à l'université
00:22Paris Dauphine, pour l'observatoire de l'engagement. Première question, c'est dans toutes les
00:27têtes la question de l'engagement, parce que tout le monde se plaint d'un désengagement.
00:30Donc très intéressant de reprendre la question de l'engagement. L'entreprise c'est d'abord
00:35une communauté aussi, on s'engage. Est-ce qu'il y a finalement, je sais que vous allez
00:41me répondre non, mais c'est par là que je vous pose quand même la question, un one
00:44best way en matière d'engagement et de manière d'engager des communautés ?
00:47Alors effectivement, nous on s'est intéressé plus spécifiquement à l'engagement dans
00:52une communauté professionnelle, sous ses différentes formes. Et donc effectivement,
00:58il n'y a pas de one best way, tout simplement parce que c'est une constante. Mais ce qui
01:03est intéressant dans ce terrain spécifique des communautés professionnelles, c'est
01:07qu'à partir des huit leviers ou ressorts d'engagement qu'on avait identifiés, on
01:13met en évidence le fait que finalement chaque communauté professionnelle est singulière,
01:19qu'elle constitue un modèle unique qui est en fait une combinaison spécifique de
01:23ces huit leviers.
01:24Oui, ça c'est très intéressant. C'est-à-dire que vous identifiez effectivement un certain
01:28nombre de leviers et vous dites, ce n'est pas la présence, on ne va pas en chercher
01:33d'autres, c'est la manière dont on va articuler ces leviers qui va créer une identité
01:38et une singularité.
01:39C'est ça. Et il y a des leviers qui comptent beaucoup plus que d'autres selon les communautés.
01:44Je vais donner deux exemples.
01:47Dans la communauté qui était un écosystème collaboratif dans un lieu physique donné,
01:55ce qui était très marquant comme ressort de l'engagement, c'était une auto-gouvernance
02:00extrêmement marquée qui fait que les membres de cette communauté se sentaient acteurs
02:06et non pas consommateurs de ce lieu. Il y avait également un état d'esprit partagé
02:15assez prégnant et des liens interpersonnels forts qui ont aussi lié au fait qu'il y
02:20a des interactions quasi quotidiennes.
02:22Si je prends le réseau de formateurs, là on est vraiment sur un modèle assez différent.
02:27C'est-à-dire que le ressort principal, c'est le « deal » entre les membres de la communauté
02:36et chacun des membres de cette communauté avec l'idée d'engagement réciproque.
02:40En gros, qu'est-ce que j'apporte et qu'est-ce que je reçois de cette communauté ? C'était
02:44vraiment un élément important, l'identité de marque et une ouverture assez maîtrisée
02:50à l'extérieur de manière à renforcer cette idée de marque. Ces deux communautés
02:54différentes se bâtissent sur un triptyque de ressorts assez différents, de combinaisons
03:00spécifiques parmi les huit qu'on avait identifiées.
03:03Derrière cette idée se joue l'idée de curseur, une idée que j'aime bien, ça dépend
03:08où on place le curseur, mais aussi l'idée de paradoxe.
03:10C'est ça.
03:12On peut voir bien sûr ces huit ressorts comme des curseurs, des leviers, mais c'est
03:20évidemment pas aussi simple, d'abord parce qu'il y a le sujet de la singularité de
03:26la communauté, de la manière dont elle combine, comme on l'a évoqué, ces différents ressorts,
03:33mais aussi le fait que derrière ces ressorts, il y a parfois des paradoxes. Pour qu'une
03:39communauté professionnelle fonctionne, il faut qu'elle soit à la fois ouverte et fermée.
03:44Typiquement.
03:45Typiquement. Et donc, cela dit, on peut résoudre ces paradoxes-là. Par exemple, si je reprends
03:52le cas de l'écosystème, la manière qu'ils avaient de résoudre ce paradoxe, c'est qu'il
03:58y avait une ouverture au sens d'interaction avec l'extérieur extrêmement régulière,
04:06fréquente, etc. Et en même temps, une intégration dans cet écosystème, au sens où une entreprise
04:14venait faire partie de ce lieu-là, évidemment beaucoup plus mesurée, ne serait-ce que par
04:18les contraintes du lieu physique. Donc, on pouvait, par exemple, gérer ce paradoxe par
04:23cette notion d'ouverture qui était à la fois en distinguant les interactions et l'admission.
04:28Puis, on avait identifié d'autres paradoxes. Il faut que les relations soient à la fois
04:32affinitaires et utilitaires. Et puis, que les membres d'une communauté aient à la fois
04:39assez de liberté et assez de structuration pour que ça fonctionne.
04:43Bien sûr. Être membre d'une communauté, c'est quelque part penser nous, se penser
04:47comme dans une communauté. Et par définition, il faut qu'il y ait une forme de frontière.
04:51Donc, eux, les autres. Voilà, c'est ça une communauté. Merci à vous Serge Perrault.
04:55Merci Jean-Philippe Denis.