• il y a 2 ans
Xerfi Canal a reçu François Grima, professeur des universités à l’Université Paris-Est Créteil, pour parler de l'identification professionnelle.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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Transcription
00:00 Bonjour François Grima, professeur des universités, Université Paris S. Créteil, co-auteur avec
00:16 Pauline Debec de Lièvre, NS Paris-Saclay et Ludovic Tafanel, co-PGS, d'un article
00:22 d'un management international "Faire face à la mauvaise identification professionnelle,
00:26 le cas des slasheurs en France". La question du slashing qui occupe de plus en plus de
00:31 monde aujourd'hui. François Grima, votre point d'entrée c'est l'identification
00:37 professionnelle, précisément. Et ce malaise quelque part que peuvent ressentir les slasheurs
00:42 en termes d'identité professionnelle, puisqu'ils ont plusieurs, ils sont pluri-activités.
00:46 On est plus dans, on est très loin de l'image, un emploi, une entreprise, une carrière,
00:52 tout au long de sa carrière. Là on est dans le pluri-activité. Ça va croissant ?
00:56 Ça va croissant. Il y a surtout aussi cette idée, cette volonté des individus de reprendre
01:05 le contrôle de leur identité et de construire l'identité pour soi, véritablement la construire
01:13 de manière très forte. Et donc d'être prêt à rentrer dans un conflit plus ou moins
01:21 accepté avec autrui, dans l'idée, ce que autrui perçoit de moi est différent de ce
01:28 que je suis. Donc il y a une mauvaise identification et comment je suis prêt à rentrer en négociation
01:34 entre l'identité pour soi et l'identité pour autrui. Alors il y a plein de travaux
01:38 en France, des sociologues très très connus, qui, M. Dubard notamment, qui ont beaucoup
01:44 travaillé sur ça. Là, quand on travaille sur la misidentification en anglais, les travaux
01:51 de Maierst, on voit bien qu'il y a une volonté, en tout cas dans le slashing, de négocier,
01:59 mais pas tant que ça. C'est-à-dire qu'on est prêt à négocier ce que l'on est par
02:05 rapport à ce que l'autrui perçoit de nous, mais on va quand même maintenir ce que l'on
02:10 est. Et on est prêt à en accepter les conséquences.
02:14 François-Alain Grima, le grand absent du débat sur les retraites, ça a été le travail,
02:19 finalement, au fond. Aujourd'hui, le slashing, on sent que ça devient en puissance, c'est-à-dire
02:26 que ça s'institue. C'est où va le travail, finalement ? Est-ce que c'est ça l'avenir
02:34 du travail ? C'est cette reprise en main de son identité, de son existence, de son
02:40 projet, ce qui aboutirait à une sorte de forme extrême du capitalisme que nous annonçait
02:44 un certain Michel Foucault, le gouvernement de soi ? Est-ce que c'est de ça dont c'est
02:50 le signal ? Est-ce que c'est le signal d'une vie en organisation qu'on supporte
02:54 de moins en moins, avec le lien de subordination ?
02:56 Alors, très clairement, les travaux que j'ai faits avec Pauline de Baigues-de-Lievre
03:02 sur le thème du choc de carrière témoignent aussi de cette difficulté croissante de la
03:11 main d'œuvre en général à supporter la vie organisationnelle. Et prise de conscience
03:19 qu'il est peut-être possible d'intégrer dans mon travail une passion, et de vivre,
03:26 de ne pas nier le travail, car le travail est essentiel à la réalisation de l'homme,
03:29 tous les schlashers que j'ai rencontrés en témoignent, mais de ne plus être dans
03:34 une logique de segmentation. C'est-à-dire l'idée de « je travaille pour vivre,
03:40 et puis je vis à côté du travail », non. Beaucoup de schlashers ne sont absolument
03:45 plus prêts à cela. Et moi, j'invite beaucoup les organisations à bien réfléchir à cette
03:50 idée de se dire que la main d'œuvre, alors je parle en plus de certaines parties
03:57 des jeunes, n'est pas prête véritablement à faire ce qu'ont fait peut-être leurs
04:03 parents et leurs grands-parents, cette logique de segmentation. Il y a une attente très
04:07 forte de vivre au travail. Il y a des attentes donc ici de pouvoir articuler dans le travail
04:15 ce que l'on est, ce que l'on aime être, et ce que l'organisation nous propose de
04:19 faire. Une liberté individuelle qui renvoie aussi
04:23 à toutes les questions de création, de désir d'un travail créateur.
04:27 Exactement, de réalisation de soi dans la tâche.
04:29 Voilà, donc le slash ligne « avenir du travail », on attendra l'avenir pour répondre
04:34 définitivement à cette question. Merci François Grima.
04:37 Merci beaucoup.
04:37 Merci à vous.
04:39 [Musique]

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