Pascal Praud - Le père de Kamilya, renversé mortellement par un motard à Vallauris, témoigne : «On a eu plus de soutien des Français que de la justice»

  • il y a 3 jours

Pascal Praud revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité. Aujourd'hui Pascal Praud reçoit Slim, le papa de la petite Kamilya, fauchée par un motard à Vallauris, qui témoigne en exclusivité dans l'émission.

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Transcript
00:00Nous sommes, et c'est toujours délicat dans ces cas-là d'engager la conversation, mais je le remercie grandement, nous sommes avec Slim
00:07qui est le père de Camilia. Bonjour Slim.
00:12Bonjour. Et merci d'être avec nous parce que j'imagine ce qu'il faut de courage et de tempérance
00:19pour venir parler aujourd'hui à ce micro.
00:24Dans quel état d'esprit
00:26aujourd'hui êtes-vous
00:29après ce drame qui a touché votre famille Slim ?
00:33Dans quel état d'esprit ?
00:36Je ne sais même pas s'il y a un état d'esprit en ce moment. Vu le comportement de la justice, en fait, je ne comprends pas.
00:43J'ai juste une question à poser.
00:46Imaginons que demain, moi, je me balade à Antibes ou dans des endroits où ce Matéo, je vais le croiser,
00:53que par malheur il y a un accident.
00:55On ne va pas dire que je l'ai fait exprès, que je me suis vengé pour ma fille.
00:59Est-ce que la justice, elle prend ce point-là en considération ou pas ?
01:04Qu'ils mettent ma vie et la vie de ma famille en danger.
01:10Quand ton fils, il te demande le matin, il te dit mais papa, comment ça se fait qu'il n'est pas en présent ?
01:14Qu'est-ce que vous lui répondez ?
01:18Qu'est-ce qu'on doit répondre à ça ?
01:20Et c'est quoi le message qu'ils sont en train de passer à la justice à ce moment-là ?
01:24Ils sont en train de passer la justice à cette jeunesse, en fait.
01:27En fait, on a des policiers qui se cassent le cul pour mettre l'ordre sur la voie publique.
01:33Et on a d'un autre côté la justice, en fait, qui emmerde tout le monde.
01:37Parce qu'elle n'en a rien à foutre, en fait.
01:43J'entends évidemment ce que vous dites.
01:49Camilia repose en Tunisie.
01:55Ouais, elle repose à côté de tes arrière-grands-parents.
01:59C'est un bel endroit, en fait, pour une gamine de 7 ans.
02:03Et effectivement, et c'est ce que je disais tout à l'heure,
02:07combien c'est difficile de vous poser des questions, Slim, pour cette raison.
02:12Parce que le drame que vous vivez, personne ne peut ressentir ce que vous ressentez.
02:18Et je vous remercie une nouvelle fois, d'ailleurs, de prendre la parole.
02:21Vous êtes revenu depuis de Tunisie, et vous êtes aujourd'hui en France, et de nouveau à Vallauris ?
02:29Oui, on est revenu le lendemain. J'ai dû revenir le lendemain pour m'occuper de mon fils.
02:33Parce qu'on voulait, on fait tout pour qu'il continue sa vie, en fait.
02:37Pour qu'il ne soit pas impacté, pour qu'il ne devienne pas un délinquant un autre jour, de plus, sur la route, en fait.
02:43Et cette décision qui a été prise ce matin, vous avez appris cette décision peut-être par votre avocat ?
02:53Oui.
02:55Et qu'est-ce que vous a dit votre avocat, Slim ? Qu'est-ce qu'il vous conseille de dire ou de faire ?
03:02Honnêtement, il n'y a personne qui me conseille, en fait.
03:06Il n'y a personne qui me conseille parce que je fais ce qu'il me semble de bien faire.
03:11Mais mon avocat, il m'a averti déjà. Il m'a averti concernant la justice.
03:19Dès le départ, il m'a dit, ne t'attends pas à des miracles. C'est ce qu'il m'a dit, en fait.
03:25Apparemment, prendre la bonne décision de la part de la justice, c'est devenu un miracle maintenant, en fait.
03:32Protéger les citoyens français, c'est un miracle.
03:35On s'inquiète plus pour les délinquants et pour les fautifs que les victimes, en fait.
03:41C'est ce qu'on est en train de vivre en ce moment en France.
03:44Slim, j'imagine que vous recevez beaucoup de témoignages actuellement,
03:48beaucoup de témoignages d'ailleurs d'affection, de sympathie, de gens qui viennent vers vous.
03:53Que vous disent ces gens ?
03:56Il suffit d'aller sur ma page et lire les commentaires. Vous allez voir.
04:02On vit dans deux mondes différents entre la justice et le peuple.
04:07On n'est pas dans le même monde, apparemment.
04:11On est plus préoccupés par ce qui se passe en dehors de la France que par le bien-être du peuple français, en fait.
04:20Maintenant, le système français s'inquiète plus pour les étrangers et pour les autres pays que pour son peuple.
04:30Je pense qu'aujourd'hui, il y avait le policier, le gendarme.
04:34Il y avait après ma fille.
04:36Après, il y a eu le cycliste.
04:39Après, il y a eu l'agent qui s'est fait tirer dessus.
04:45Hier, il y a eu un jeune encore mort par une voiture.
04:49En fait, on est quoi ?
04:51On est en France ou on est sur GTA, en fait ?
04:53Qu'est-ce qui se passe, en fait ?
04:55Et tout ça, tout à fait normal.
04:57Pourquoi ? Parce qu'il n'y a aucune loi qui est stricte et ferme.
05:02Parce que tout le monde fait n'importe quoi, parce qu'on sait qu'on ne risque rien.
05:08J'ai l'impression que c'est plus dangereux en ce moment en France.
05:12On a plus peur de ne pas payer un stationnement que de rouler comme un fou sur la route ou griller un feu.
05:19Parce que là, si on oublie de payer les 50 centimes ou 1 euro de stationnement, on est majoré x 17.
05:27Là, on a mis les lois pour récupérer l'argent.
05:33Slim, le père de Camilia, est avec nous à 12h31.
05:37Vous êtes sur l'antenne d'Europe 1.
05:39C'est un témoignage, évidemment, bouleversant que vous apportez.
05:46Là encore, et j'espère que ma question ne va pas vous choquer,
05:51est-ce que la famille de ce jeune homme a voulu entrer en contact avec vous ?
05:58Oui. Oui.
06:00Et j'aurais dû, en fait. Parce que s'il y aurait été...
06:04Je ne veux pas dire des grands mots parce que tout le monde l'entend.
06:06Mais s'il y aurait été...
06:08J'aurais pensé à mon bien. Ce jour-là, j'aurais accepté l'enveloppe qu'ils m'ont donnée, qu'ils m'ont envoyée avec un X.
06:15Et j'aurais porté plainte contre eux.
06:18J'aurais préféré leur rendre l'enveloppe plutôt que de leur demander de ne plus rentrer en contact.
06:22Mais apparemment, tout ce qui les intéresse, tout ce qu'ils ont montré, en fait,
06:26ils n'avaient pas de la peine pour ma fille. Ils s'inquiétaient pour leur fils.
06:29Ils avaient juste peur que leur enfant parte en prison.
06:33C'est tout à fait logique, en fait.
06:37Et quoi d'autre ? Qu'est-ce qu'on va dire d'autre ?
06:39Que la moto, elle se conduise toute seule ?
06:43C'est-à-dire que ce que vous nous dites, et que j'ai compris,
06:48la famille de Mathéo vous a proposé de l'argent pour...
06:55Peut-être que vous ne parliez pas ?
06:57Non, je ne crois pas. Je ne sais pas pourquoi.
07:00Mais voilà, ils pensaient bien faire, en fait.
07:02D'accord, c'était...
07:04J'ai rien contre les parents.
07:06C'est bien que vous le disiez comme ça.
07:08C'était une manière maladroite, évidemment, et inconvenante,
07:13et même déplacée de vouloir entrer en contact avec vous
07:19que de vous proposer de l'argent.
07:23Mais ces gens-là, vous les avez rencontrés ?
07:26Vous avez échangé au téléphone avec eux ?
07:28Oui, et le soir même, ils étaient à côté de moi à l'hôpital.
07:32Mais bon, vous voyez qu'ils étaient inquiets pour l'état de ma fille,
07:35mais à l'impression que je vois maintenant, avec les réactions,
07:39et on est plus inquiets pour qu'il ne fasse pas de la prison,
07:42qu'il n'assume pas ses responsabilités,
07:44que ma fille qui est morte à 7 ans, en fait.
07:49Voilà, je ne sais pas.
07:51On appelle ça...
07:52Il y en a qui disent que c'est une bêtise,
07:54ou que c'est un accident de la route.
07:56Pour moi, non, ce n'est pas un accident de la route.
07:58Un accident de la route, c'est au moment...
08:00Si on respecte le code de la route, de A à Z,
08:03que là, il arrive un accident de la route,
08:05oui, c'est un accident de la route.
08:07Mais du moment qu'on s'en fout du code de la route,
08:12alors pourquoi on passe des permis ?
08:15Pourquoi on paye autant cher le permis
08:17pour derrière faire ce qu'on veut sur la route
08:19et on n'est pas punis, en fait ?
08:22Slim, il y aura un procès.
08:27Je ne sais pas quand aura lieu ce procès.
08:30Entre-temps, il continue de vivre sa vie.
08:32Le procès peut durer même deux ans, en fait.
08:37Entre-temps, nous, on a assumé à supporter ça, en fait.
08:43C'est vrai qu'on est maltraités dans la garde à vue,
08:47on est maltraités en présent.
08:48Logé, nourri et blanchi avec l'argent du peuple, en fait.
08:52Et quoi d'autre ?
08:54Slim, je disais tout à l'heure, je vous demandais
08:56si les parents étaient entrés en contact avec vous.
08:59Est-ce que la justice, d'une certaine manière,
09:03soit par le procureur, soit par un juge,
09:06est entrée en contact avec vous
09:08pour essayer de vous expliquer
09:11le pourquoi, du comment de cette décision ?
09:15Non, ils n'en ont rien à foutre, non.
09:20Ils sont plus préoccupés par l'état d'esprit de Matteo.
09:23C'est vrai que le pauvre, il ne mange pas apparemment, c'est ça.
09:26Parce que nous, on se tape des bouteilles de vin
09:29et des caviar tous les soirs sur la plage.
09:35Et l'explication juridique qui était donnée,
09:38et c'est ça la très grande difficulté de ce sujet,
09:43c'est-à-dire que les magistrats vont se retrancher
09:46derrière la loi, et ils diront à partir du moment
09:49où l'ordre public, le trouble à l'ordre public,
09:52n'est plus un des critères qui permet la détention provisoire,
09:56les magistrats vont évidemment se retrancher
09:58vers le droit pur, vers la loi pure.
10:01Et ça, c'est insupportable pour vous, Slim ?
10:06Comme je vous le disais au départ,
10:08est-ce que la loi, ça va me protéger, cette loi ?
10:11Si par malheur, ça lui arrive un accident,
10:13que demain, moi, je fais un accident, d'accord ?
10:15Est-ce qu'on ne va pas me reprocher
10:17et on ne va pas me dire que je l'ai fait exprès ?
10:20Ça a été ma fille.
10:22Il a écrit ça à ma fille, non ?
10:23C'était un hasard.
10:24Mais si l'hasard se répète que ça soit lui devant ma voiture,
10:28on ne va pas me dire, on ne va pas me mettre en cause ?
10:31On ne va pas dire que je me suis vengé ?
10:34Est-ce que la loi, elle a pris ça en compte, en fait ?
10:37Parce que là, en fait, ce qu'ils sont en train de faire,
10:40c'est un risque que je le prends, en fait.
10:43Est-ce que je dois éviter de vivre ?
10:45Parce que moi, je ne suis pas interdit de me balader à Antibes,
10:47ou à Cannes, ou à tout ce qu'il fait.
10:49Parce que je travaille, je suis obligé de...
10:51Même par rapport au procès, par rapport à tout ce qui se passe,
10:54je suis obligé de me déplacer.
10:56Est-ce que moi aussi, je vais être obligé d'être torturé chez moi ?
11:03Votre petit garçon a repris l'école, le chemin de l'école, Slim ?
11:07Oui.
11:09Et comment, j'allais dire, comment va-t-il ?
11:12Comment peut-on aller, lorsqu'on était le témoin, le présent,
11:17avec sa petite sœur, et cette difficulté avec laquelle il va vivre aujourd'hui ?
11:25C'est la question, comment ça se fait ?
11:27Tout ce qu'il nous pose comme question, comment ça se fait qu'il n'est pas en présent ?
11:31Quand je lui ai dit, moi, ça ne va pas changer la vie, tout ça,
11:34je lui ai dit, papa, mais comment, quand on fait un truc comme ça,
11:37on n'est pas en présent ?
11:38Je n'ai pas de réponse à donner.
11:41Il a 11 ans, votre petit garçon.
11:43Il a 11 ans, oui.
11:48On s'interroge toujours, aujourd'hui,
11:51il y a parfois des professionnels qui suivent dans ces cas-là,
11:55les enfants, les parents, est-ce que c'est le cas ?
11:57Est-ce qu'aujourd'hui vous êtes accompagné ?
11:59C'est obligatoire.
12:02Si vous laissez un enfant comme ça, que vous banalisez la chose,
12:04que vous le laissez avec un traumatisme comme ça,
12:07même s'il arrive, et on arrive à l'occuper,
12:09parce que tant qu'il est occupé, il ne pense pas,
12:12et dès qu'il y a un vide, il revient sur ce qui s'est passé.
12:15Et ce qu'il nous dit, c'est que les images se répètent dans sa tête.
12:21Et vous habitez évidemment à quelques mètres ?
12:24Non, en face de l'accident.
12:27Ce que vous ne savez pas, quand on dit ma fille et mon fils,
12:31ce trajet, ils le faisaient depuis un petit moment,
12:34c'est un trajet de 300 mètres aller-retour,
12:37avec un seul passage piéton à traverser.
12:40Parce que parfois les gens se demandent, mais pourquoi ils étaient seuls ?
12:42Ils avaient 300 mètres aller-retour.
12:45Vous comprenez ce que ça veut dire 300 mètres ?
12:47Ce n'est même pas un tour sur un terrain de foot.
12:51En France, on n'est même pas capable de faire 300 mètres à pied,
12:55en étant en sécurité.
13:00Et vous imaginez peut-être ne pas rester précisément à cet endroit,
13:04qui est un endroit pour vous dramatique ?
13:13Est-ce que vous préférez, si jamais, je ne vous le souhaite pas,
13:16mais que vous perdez un proche en dessous de votre fenêtre,
13:20préférez rester ?
13:23C'est pourquoi j'imagine que vous ayez envie
13:26de ne pas rester précisément dans cette...
13:30Non, on ne le souhaite plus.
13:32Non, on ne le souhaite plus.
13:34Il n'y a rien qui change.
13:37Souvent, j'ai envie de dire parfois
13:40la question la plus simple du monde
13:42à ceux qui peuvent traverser un drame,
13:45qu'est-ce qu'on peut faire pour vous ?
13:47Comment on peut vous aider, Slim ?
13:50Il n'y a rien qui...
13:52Honnêtement, il n'y a rien qui peut nous aider dans ce cas-là.
13:55Surtout quand tu vois que la justice
13:58n'est même pas capable de faire son travail correctement
14:02et les lois ne sont pas faites pour nous protéger.
14:07Quand vous recevez des commentaires
14:09« il faut se faire des justices soi-même »,
14:11vous leur dites « non, ce n'est pas la solution »,
14:13mais en fait, quand vous avez une justice comme ça,
14:15qu'est-ce que vous allez voir comme commentaire maintenant ?
14:18« Ah, on vous a dit, mais il n'y a plus de justice,
14:21ce n'est plus la France, c'est comme ça,
14:23il faut se faire justice soi-même ».
14:26Mais non, ce n'est pas la solution.
14:28La loi...
14:30Quand il n'y a pas d'intérêt derrière la loi financière,
14:33j'ai l'impression qu'elle peut traîner des années,
14:35on ne la changera pas.
14:38Parce qu'on était capable de changer les lois
14:40pour la retraite, on était capable de taxer plus,
14:42on était capable de faire tout ça.
14:44Ça a été fait.
14:47Contre la volonté de tout le monde.
14:49Mais ça a été fait, parce qu'il y a un intérêt d'argent.
14:51Mais là, quand il s'agit de jus humain,
14:53qu'est-ce qu'on en a à foutre ?
14:55Ça ne change rien du tout.
14:58Je vous remercie.
15:00Je vous remercie d'être venu au micro d'Europe 1,
15:03témoigné.
15:05Je vous remercie et je redis ce que je disais tout à l'heure,
15:10c'est impossible de se mettre à votre place.
15:13Absolument impossible.
15:15Vous savez, on a eu plus de soutien et plus d'aide
15:18des Français
15:20qu'au côté de la justice,
15:22qu'au côté de la politique.
15:24On a eu plus de soutien par des sociétés,
15:26par des assurances, par ci, par ça,
15:29qui n'arrêtent pas de nous demander
15:31comment on peut vous aider.
15:35Cette énorme solidarité, d'ailleurs,
15:38est intéressante,
15:40cette énorme solidarité,
15:42mais c'est vrai que je regrette et on regrette
15:44dans ces cas-là que la justice
15:46n'est pas auprès
15:48de ceux qui souffrent,
15:50qui ont du mal à, évidemment,
15:52comprendre une décision
15:54qu'il n'y ait pas
15:56dans la justice française
15:58des personnes
16:00qui puissent venir vers vous
16:02et, en tout cas, avoir un échange
16:04avec vous.
16:06Et ça, je le regrette
16:08et c'est ce que vous nous dites à ce micro.
16:10Merci beaucoup, Slim,
16:12je ne peux que vous souhaiter
16:14tous les courages possibles.
16:16Les mots sont inutiles,
16:18bien sûr, les mots sont inutiles
16:20devant votre souffrance,
16:22mais
16:24on ne peut que vous assurer, évidemment,
16:26de nos pensées affectueuses.
16:28Et je vous remercie grandement
16:31d'être venu à ce micro.

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