• il y a 4 mois

Olivier de Lagarde revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité. Aujourd'hui, retour sur le "monument français" qu'était Alain Delon, célèbre acteur décédé dimanche 18 août 2024. Vous voulez réagir ? Appelez-le 01.80.20.39.21 (numéro non surtaxé) ou rendez-vous sur les réseaux sociaux d’Europe 1 pour livrer votre opinion et débattre sur les grandes thématiques développées dans l'émission du jour.
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00:00Et en revoyant une nouvelle fois Le Samouraï dans la musique de Melville, hier à la télévision,
00:10une musique de François Droubet bien sûr, je me faisais cette réflexion que plus encore que
00:14ses mots, que sa voix, c'est sans doute son silence qui était le plus impressionnant,
00:19qui mettait peut-être le mieux en valeur sa présence, son incroyable et insondable beauté.
00:26Hommage à Alain Delon aujourd'hui dans Europe 1 et vous, Estelle.
00:30Et pour en parler avec vous, nous avons un invité très spécial aujourd'hui,
00:33Jérôme Béglé qui est le directeur général de Paris Match.
00:36Bonjour, merci Jérôme. Qu'est-ce que représentait Alain Delon à votre avis
00:41dans l'imaginaire collectif des Français ?
00:43Un bout de France. Par les films qu'il a tournés, par ses prises de position,
00:48par sa vie, ses plaints et ses déliés, les bons moments, les mauvais moments,
00:54on a tous grandi, vécu, pleuré, rit avec Alain Delon, jusque dans ses derniers mois
01:00qui ne sont pas forcément les plus glorieux. Mais voilà, c'est une part de nous qui s'est
01:04éteinte dans la nuit de samedi à dimanche et c'est pour ça qu'il était si mythique,
01:09en tout cas qu'il incarnait aussi bien la France. Il restait de ce grand cinéma des années 60-70,
01:16en France deux personnes, lui et Brigitte Bardot, et je pense que Brigitte Bardot doit
01:21se sentir un peu seule ces jours-ci.
01:23Bon, c'est une vieille histoire d'amour entre Paris Match et Alain Delon.
01:28Vous avez une idée du nombre de unes qui a été consacrée à Alain Delon ?
01:32Plus de 50, plus de 100 interviews. Donc évidemment on a un matériel à disposition
01:39qui est exceptionnel. On a des papiers merveilleux de Jean Cot, il y en a deux qu'on reproduit
01:44dans le numéro qui sera en vendredi.
01:46Jean Cot, extraordinaire écrivain, Jean Cot.
01:50Je dis ça pour les jeunes qui ne connaissent pas forcément Jean Cot.
01:54Excellent écrivain, il a été le secrétaire de Jean-Paul Sartre, un formidable romancier.
01:58Croquis de mémoire.
01:59Croquis de mémoire, extraordinaire journaliste. Vous allez voir, il fait un portrait d'Alain
02:04Delon qu'on reproduit dans le journal de demain. On a l'impression qu'Alain Delon
02:09est à côté de nous, on a l'impression qu'on est presque sur ses genoux tellement
02:11il le fait vivre merveilleusement. Donc on a un matériel à disposition incroyable,
02:16des photos absolument insensées. Et donc la difficulté, on fait à la fin 67 pages,
02:21ce qui peut paraître beaucoup, mais en fait 67 pages pour résumer 67 années et même
02:25presque plus de la vie d'Alain Delon, c'est presque trouver frustré. Il y a des choses
02:29qu'on aurait voulu mettre et qu'on mettra peut-être la semaine prochaine, mais la place
02:33nous a presque manqué.
02:34Oui, parce qu'il y a les textes, mais il y a évidemment les photos aussi. Alors là,
02:39des photos d'Alain Delon...
02:40Des photos d'Alain Delon, il y en a tant et plus. On peut voir cent fois des photos
02:45du samouraï, du guépard, de plein soleil. On se dit mais qu'est-ce qu'il était beau
02:49et plus que la beauté, il y avait un magnétisme, il y avait quelque chose qui passait, il y
02:54avait une forme de sauvagerie, de mélancolie, plein de choses qui passaient de la tête
02:58aux pieds. Donc les photos, on a essayé de faire rentrer le plus possible de photos
03:02sans les mettre trop petites évidemment, un match c'est d'abord des doubles pages.
03:05Vous verrez des photos magnifiques de sa gloire et même des photos de la dernière période
03:10de sa vie, je n'en dis pas plus, où il est encore Alain Delon, mais où on voit que,
03:15comme il le disait lui-même dans de nombreuses interviews, selon le général de Gaulle,
03:21la VDS est peut-être un naufrage. Vous verrez vraiment de très belles photos de lui. Alors
03:25on a choisi en une, ça a été alors là aussi, j'ai dû regarder une quarantaine de unes.
03:30Le grand débat de savoir laquelle on met.
03:32Alors d'abord c'est une photo de lui en couleur, c'est une photo de lui qui a été prise au
03:35mois de septembre 1972 à Belle-Île-en-Mer, il est sur le tournage de Traitement de Choc.
03:40Avec Annie Girardot.
03:42C'est très intéressant parce qu'il fait le second rôle. Le premier rôle de Traitement de Choc,
03:48c'est effectivement Annie Girardot, il accepte d'être un second rôle, alors que c'est déjà une
03:51superstar. Bon il est très beau, il est magnétique, c'est une photo pleine de soleil, il fait beau,
03:55il a un visage et des yeux qui viennent nous chercher. Il n'est pas souriant parce que vous
04:00pouvez regarder, rares sont les photos d'Alain Delon où il est vraiment souriant, mais il y a
04:04cette mélancolie, ce magnétisme qui lui est propre, qu'on a essayé de reproduire et c'est
04:09donc cette photo qui sera en une de match demain.
04:12Il aimait la presse ?
04:14Il n'aimait pas beaucoup les journalistes mais il aimait la presse.
04:16En tout cas, il a aimé follement Paris Matchs parce qu'il est venu des dizaines de fois dans notre rédaction.
04:20Ça veut dire qu'il n'y a pas de journalistes à Paris Matchs ?
04:22Non, ça veut dire qu'il se méfiait des journalistes, mais l'histoire d'amour avec le match a toujours existé.
04:27La critique n'a pas toujours été très tendre avec lui.
04:30Il y a deux choses. Le métier, comme il le disait lui-même, il a toujours été un peu en marge du métier,
04:36donc on ne lui a jamais couvert des loges. Il a eu, il y a simplement 5 ans, une palme d'or d'honneur à Cade.
04:44Il l'aurait mérité il y a 25 ans. Il a eu un César pour notre histoire, le film de Bertrand Blier.
04:50Il l'aurait mérité 10 ans avant.
04:52Donc effectivement, ses confrères, consoeurs, comédiens, comédiennes, réalisateurs, réalisatrices
04:58ne l'ont jamais mis au pinacle.
05:00Pourtant, c'est un immense acteur. Il a toujours vécu un petit peu en marge.
05:03Il n'a jamais fait partie de cette association, le Blic, le Bloc, l'association de protection des acteurs, des réalisateurs, des trucs.
05:09Donc ça, il s'en tenait éloigné et on lui a un peu rendu de la monnaie de sa pièce.
05:13Côté presse, regardez cette apparition de télé ou radio, regardez l'émission qu'il a fait avec Bernard Pivot.
05:20Regardez quand il faisait des photos pour Matchs. Il savait exactement ce qu'il voulait dire.
05:23Il savait exactement comment prendre la lumière. Il savait exactement jusqu'où il pouvait aller et ne pas trop aller.
05:29Donc c'était une bête de communication.
05:31Après, ne lui reprochez pas d'avoir trop parlé ou pas assez parlé.
05:35Il utilisait la presse comme il est de bon ton de l'utiliser quand on s'appelle Alain Delon.
05:38Vous restez avec nous, Jean-Michel, le directeur général de Paris Matchs.
05:42Vous connaissez aussi le principe de cette émission, c'est de laisser les auditeurs d'Europe 1 s'exprimer.
05:48Nous sommes avec Jeanne, bonjour.
05:50Bonjour Olivier Delagarde et bonjour à votre invité.
05:53Merci de me laisser m'exprimer.
05:55Mais je vous en prie, on est là pour ça.
05:57Qu'est-ce que vous avez ressenti en apprenant la mort d'Alain Delon hier ?
06:01Et bien comme beaucoup de Français, je me suis sentie orpheline d'un acteur et d'une époque.
06:08Et surtout d'un courage, une franchise dans les choix.
06:13J'ai été très frappée par la constance de cet homme qui effectivement, Jérôme Béglé le disait très bien,
06:21savait assumer ses opinions et rester en marge et en a payé le prix.
06:27Mais c'était aussi un très grand acteur capable de beaucoup de nuances.
06:31Passant de Monsieur Klein à La Piscine, j'avais été très marquée par ces deux films.
06:40C'était un homme à la fois de film d'action et de film de huis clos.
06:46Et en fait, il me faisait penser par son aspect félin à Charles Branson par moment.
06:54Il y a ce côté félin que tout le monde a remarqué, ce côté nippon,
06:59qui effectivement est dans la trame des analyses qui sont faites aujourd'hui.
07:07Et je pense que traversant une époque tumultueuse, pour lui, il part au moment où il avait beaucoup de chagrin, je pense, pour son pays.
07:19Il s'était exprimé.
07:21Nous, il va beaucoup nous manquer.
07:24Mais il a très bien servi aussi la France et les Français par sa maestria et par son rôle d'ambassadeur.
07:34Et il avait cette part de mystère qui faisait de lui une véritable vedette, comme on en voyait dans les années 30.
07:43Voilà ce que j'éprouve.
07:46Son image était celle d'un homme entier, qui mâchait pas ses mots, qui avait des opinions parfois extrêmement tranchées.
07:52Tout ça ne vous dérangeait pas ?
07:54Non, parce que c'était un homme follement généreux.
07:58Il se donnait dans son jeu et la vie ne lui avait rien apporté sur un plateau d'argent.
08:03Ce n'était pas un héritier.
08:05Il avait donc une légitimité qui devait gêner quelques bonnes âmes et quelques bons esprits, bien en cours à une certaine époque.
08:16Et pour ça, c'est vrai qu'il avait un côté mauvais garçon, mais il a frayé son chemin.
08:27Il a dû se débrouiller.
08:29Et comme vous le disiez très bien, ainsi que M. Béglé, il y avait les souffrances.
08:34Et Pascal Procy l'a dit de l'enfance.
08:37On est du pays de son enfance, disait quelqu'un.
08:40Il en a gardé effectivement des cicatrices.
08:43Et ça a forgé un très bel homme.
08:45Ah oui, d'une grande beauté à un mauvais garçon.
08:48Vous étiez un peu amoureuse de lui ?
08:51Pardon de cette question, vous êtes un peu embarrassante.
08:56C'était un être qui pour moi symbolisait une forme de virilité tout à fait remarquable.
09:07Mais parce que justement, il y avait un contraste entre la majesté d'un corps très bien sculpté, c'est vrai, un visage, une gueule, et des failles dans le psychisme.
09:25Et il y a une chose aussi qui m'a beaucoup touchée.
09:27Je trouvais qu'avec Romu Schneider, ils avaient quelque chose tous les deux d'un frère et d'une sœur.
09:33Parce que Romu Schneider avait un regard sénat aussi.
09:36Et il y a quelque chose que je me suis toujours dit.
09:40Il y a comme une sororité, une fraternité entre ces deux-là, derrière l'histoire d'amour magnifique qu'ils ont eue.
09:47Je trouve qu'ils se ressemblaient physiquement.
09:49Ils auraient dû se marier d'ailleurs, ils étaient fiancés, ils avaient prévu de se marier.
09:54Et puis la vie fait que ça n'a pas eu lieu.
09:57Merci beaucoup Jeanne d'avoir témoigné avec des mots aussi choisis.
10:02Merci d'avoir été en direct sur l'antenne d'Europe 1.
10:07Cette émission se poursuit.
10:09On est toujours avec Jérôme Béglé, le directeur général de Paris Match.
10:11Mais on est également avec Alain Terzion.
10:13Bonjour.
10:14Bonjour.
10:15Producteur.
10:16Je crois que vous avez fait six films avec Delon.
10:18Absolument.
10:1979, 80, 82.
10:22Oui absolument.
10:23C'était facile de travailler avec Alain Delon ?
10:27Je vais vous dire, c'était tellement agréable de travailler avec lui que c'en était très facile.
10:32Il fallait bien connaître sa partition.
10:35Mais Alain, il connaissait par cœur tout son scénario, tout le texte de ses partenaires.
10:43Il arrivait avec les costumes raccords.
10:45C'était un bonheur.
10:47En plus, il ne se maquillait jamais.
10:49Donc il ne pensait pas au maquillage.
10:51Comment ça, il ne se maquillait jamais ?
10:53Je redis, il se maquillait jamais.
10:58Il était prêt et il arrivait en costume, ce qu'on appelle les costumes raccords,
11:02c'est-à-dire de la séquence tournée la veille.
11:04Il arrivait en costume raccords, prêt, il ne se maquillait jamais.
11:08Et il connaissait son texte par cœur et le texte de ses partenaires à qui il pouvait souffler s'ils avaient une absence.
11:15Donc c'était un acteur d'une immense générosité.
11:18Et il imprimait avec cette espèce de magie que vous avez sur 25 chefs-d'oeuvre qu'il nous laissera,
11:28de Ronco et ses frères à la piscine, du guépard à Monsieur Klein.
11:35C'est le seul acteur pour moi, avec toute l'estime que j'ai pour les auteurs,
11:41c'est le seul acteur qui laissera son image, sa présence, son charisme, son génie artistique dans 25 chefs-d'oeuvre.
11:51Vous restez avec nous à l'intérieur, vous allez continuer à aigrainer vos souvenirs.
11:57Six films faits avec Alain Delon, évidemment, ça laisse pas mal de souvenirs.
12:01On est également avec Jérôme Béglé, le directeur général de Paris Bunch.
12:0411h46 dans Europe 1 & Vous, restez avec nous, on continue cet hommage à Alain Delon dans Europe 1 & Vous.
12:09Et le standard vous est toujours ouvert, je le rappelle, l'appel est non surtaxé, c'est au 01 80 20 39 21.
12:14A tout de suite.
12:16Europe 1 & Vous, 11h13, Olivier Delagarde.
12:31C'est l'un des rôles probablement les plus emblématiques du début de la carrière d'Alain Delon, le guépard de Luchino Visconti.
12:38Toujours avec Jérôme Béglé.
12:40Et puis avec vous, Alain Terzion, producteur, vous avez fait six films avec Delon.
12:44Vous nous disiez que c'était facile de travailler avec lui.
12:49Il fallait pas faire de l'à peu près.
12:52Il fallait pas faire de l'à peu près.
12:54Parce qu'il attendait en retour un professionnalisme, une autorité réelle et profonde et une détermination.
13:03Je me souviens sur à peu près tous les films qu'on a fait d'ailleurs.
13:07On regardait un plan de travail au départ, en préparation.
13:10Puis on se disait, voilà, on commence tel jour à telle heure.
13:13Et puis des gens comme Jacques Deray, Grenier Lefer disaient,
13:16bon, on termine, à l'époque, on faisait les films en huit ou neuf semaines.
13:20Et on termine tel jour à telle heure.
13:23Je peux vous dire que les metteurs en scène avec qui j'ai eu le bonheur de travailler,
13:27je vous cite les très grands, ont terminé tel jour à telle heure.
13:32C'était pas de l'à peu près.
13:33C'était pas, j'ai oublié une séquence.
13:35Il fallait être extrêmement professionnel.
13:38Moyennant quoi, en retour, vous aviez, entre guillemets, un monstre sacré
13:43qui quoi qu'il fasse, à tout bobant, était absolument superbe et magique à l'écran
13:50et extrêmement bienveillant et extrêmement généreux avec ses partenaires.
13:57C'est le septième.
13:59Il se pliait facilement aux désidératas des directeurs ?
14:05Il pliait facilement.
14:07Il avait deux, trois russes pour montrer son point de vue.
14:11Quand on lui disait, alors vous comprenez Alain, comme dans tel film,
14:15vous allez, les metteurs en scène, à part Deray et Grenier en général,
14:18le vous voyait.
14:20Ah oui, on le voyait, c'était un type qu'on vous voyait quand même.
14:23Oui, beaucoup.
14:26Il regardait le metteur en scène avec un air assez calme,
14:30mais en même temps, avec son regard perçant, il disait,
14:33« Montrez-moi ! »
14:35Il devait se décomposer parce que jouer devant Alain Delon,
14:38ce n'était pas terrible comme idée.
14:40Il se décomposait et il enchaînait très vite.
14:42Donc ça, c'était sa russe pour montrer de temps en temps
14:45qu'il était quand Grenier ou Deray ou trois autres,
14:51enfin ceux avec qui on a travaillé.
14:53Et puis sinon, on a travaillé avec lui-même.
14:55Un jour, il est passé à la mise en scène,
14:57et honnêtement, c'était très bien.
14:59Ce qu'il avait fait, ça s'appelait « Le Bâton »,
15:01ça s'appelait, pour la preuve d'un flic,
15:03ça a été des très gros succès qu'il avait réalisés lui-même.
15:07Donc c'était un énorme travailleur.
15:11C'était un énorme, d'autant plus que, comme il venait,
15:15il était autodidacte, il venait de nulle part.
15:17Il venait d'un beau-père qui voulait l'enrouler dans sa charcuterie,
15:24puisque c'était sa vie, son métier.
15:27Et donc, il avait préféré, par patriotisme profond,
15:31partir et s'engager, je crois que c'était sur la Jeanne d'Arc.
15:35On a entendu ça dans le podcast de Pascal Praud tout à l'heure à l'interzion.
15:40Vous parliez des gros succès.
15:42Vous, comme producteur, faire un film avec Alain Delon,
15:45c'était l'assurance d'un succès au cinéma ?
15:48Il faut être très clair.
15:50Moi, je suis arrivé justement parce qu'il y a eu toute une série de films
15:54qu'il avait fait avec un très grand producteur,
15:56qui était Raymond Danon à l'époque,
15:58qui avait fait Le Sondage, Les Choses de la Vie et quelques autres.
16:01Mais il avait sans doute d'autres problèmes que je n'ai pas connus,
16:06puisque je n'étais pas du tout concerné, ni dans son intimité.
16:10Et il avait poussé à enchaîner des films.
16:14Il avait enchaîné cinq films dans l'année, pratiquement.
16:17Et quand vous enchaînez des films et que vous êtes un monstre sacré,
16:20et bien petit à petit, vous n'êtes plus un monstre sacré.
16:23Et les cinq, c'était planté.
16:25Et donc, il était, soyons honnêtes, dans une sorte de dépression
16:29parce qu'il n'arrivait plus à démarrer un film.
16:31Le film qui s'appelait Le Toubib à l'époque,
16:34qui s'est appelé Le Toubib,
16:35qui s'appelait Harmonie ou les Erreurs de la Guerre,
16:38d'après Jean Fourachetier,
16:40était un film de granier de ferme et il était en panne.
16:43C'est Belmondo qui me dit
16:46« Tu devras aller voir mon ami Delon parce qu'il est en rade
16:50et il ne sait plus comment y arriver
16:52parce qu'il a tellement enchaîné des trucs
16:54pour des raisons extra-professionnelles
16:57qu'aujourd'hui, il est un peu cassé.
17:00Va le voir. »
17:01Et donc, c'est comme ça que Belmondo me prend un rendez-vous
17:04chez Alain Delon, 42 Té-Kennedy,
17:07en face de la maison de la radio.
17:09Et donc, je débarque là un jour
17:11pour lui expliquer ma vision
17:13de comment remettre les choses en ordre.
17:15Et à partir de là, on ne s'est plus quittés pendant 10 ans
17:18et ma vision, entre nous,
17:20j'avais un ami qui devait être
17:23directeur général d'Antenne 2 à l'époque
17:25et on a inventé ensemble.
17:27J'ai pris Alain, je l'ai emmené chez Antenne 2
17:29et il y avait toutes les assistantes, les secrétaires,
17:31tout le monde qui était dans les couloirs
17:33et il faisait l'équivalent des selfies aujourd'hui
17:36et des photos et des autographes.
17:38C'était un moment de pur bonheur, de pur délire.
17:41Et on a inventé les coproductions cinéma.
17:45On a écrit, j'ai écrit
17:47le premier contrat
17:49de coproductions cinéma-télé
17:52et donc, ça a été le Toubib
17:54qui a été ce...
17:56A l'intérieur, vous parliez de Jean-Paul Belmondo.
17:58J'aimerais interroger Jérôme Béglé,
18:01directeur général de Paris Match, qui est avec nous.
18:03Est-ce que le lien entre les Français
18:06et Delon est le même
18:08que ceux qui ont pu avoir avec...
18:10Non, c'est...
18:12On va laisser parler. A l'intérieur,
18:14je vous redonne la parole, mais on interroge
18:16Jérôme Béglé.
18:18C'est pas du tout le même lien.
18:20C'est vrai que la France et les Français se sont coupés
18:22entre les pros Delon et les pros Belmondo,
18:25mais c'était vraiment une ligne de fracture qui était
18:27assez bien définie.
18:29Belmondo, c'était le meilleur ami, c'était le pote,
18:31c'était un type qui était pas du tout intimidant,
18:33c'était le copain qu'on tutoyait facilement,
18:35avec qui on avait envie d'aller passer un week-end
18:37ou de boire un verre.
18:39Alain Delon, il avait un côté beaucoup plus distancié,
18:41beaucoup plus impressionnant, presque de la différence.
18:43Donc déjà, dans la personnalité, on n'a pas du tout
18:45le même genre de personnage.
18:47Après, dans les films, les choix de films,
18:49c'est très différent. Delon, il a enchaîné
18:51les rôles un peu sombres, les rôles de policier,
18:53de flic et ou de voyou,
18:55dans lesquels il avait assez peu d'humour, parce que c'était pas
18:57tellement son genre. Belmondo,
18:59quels que soient ses films, il a toujours des scènes
19:01ou plusieurs scènes d'humour et de distance
19:03qu'il met avec son personnage.
19:05D'ailleurs, quand on voit, quand ils tournent,
19:07ils font en tout cas un grand film ensemble,
19:09qui est Borsalino, ce sont quand même
19:11deux registres qui sont assez différents.
19:13On les a revus dans une chance sur deux,
19:15mais c'était à la fin.
19:17C'était un film de Patrice Oconte à la fin,
19:19où là, ils jouaient beaucoup sur leur personnalité,
19:21ce qu'ils avaient été, sur leur filmographie.
19:23C'était un peu un...
19:25C'est un ovni dans leur carrière, à l'un comme à l'autre.
19:27Ensuite, en termes de
19:29popularité, je pense que
19:31il y avait une énorme popularité,
19:33une énorme cote d'amour
19:35dont bénéficiait Belmondo.
19:37C'est sûr que c'est un personnage un peu plus austère,
19:39un petit peu plus...
19:41qui tient plus en respect, qui intimide plus les autres.
19:43Mais néanmoins, ça reste
19:45dans l'histoire du cinéma,
19:47ce sont deux pierres importantes
19:49qu'on ne peut pas dissocier.
19:51À l'intervient, on les a beaucoup opposés.
19:53Est-ce que, véritablement,
19:55ils étaient aussi ennemis
19:57qu'on le dit dans la vie ?
19:59D'abord, je ne changerais
20:01pas un mot à tout ce que vient de dire
20:03Jérôme Béclé,
20:05qui est absolument le fond...
20:07Voilà, c'est déjà une grosse avancée,
20:09mais néanmoins, mais pas un mot, c'est parfait.
20:11C'est exactement le fond
20:13de la vérité de l'histoire.
20:15Ensuite, leur opposition...
20:19Je ne vais pas vous dire que c'est une invention
20:21médiatique de l'époque,
20:23mais ça faisait bien vendre d'avoir
20:25Belmondo...
20:27Et là, Jérôme Béclé, le patron de Paris Match,
20:29fait oui de la tête...
20:31C'est pas loin d'être une invention.
20:33Il y a eu une ou deux petites brouilles
20:35au moment de Borsalino, justement, où Delon a mis son nom
20:37plus gros que celui de Belmondo
20:39sur la face du film, mais le reste du temps,
20:41il y avait un immense respect l'un pour l'autre,
20:43leurs enfants se voyaient,
20:45beaucoup d'affection,
20:47ils avaient tous les deux des agents
20:49qui se respectaient,
20:51et ils voyaient très bien que l'autre
20:53était un super pro, et comme eux-mêmes
20:55n'étaient pas pour la moitié d'une chaussette,
20:57ils disaient, en gros, le cinéma, c'est lui et moi,
20:59ou c'est moi et lui.
21:01Il y avait eu cette histoire d'affiche,
21:03paraît-il, pour Borsalino,
21:05ce combat d'égo ?
21:07Oui, il n'y avait pas de combat,
21:09puisque, je ne sais pas
21:11qui avait tort ou raison à l'époque,
21:13le prétexte a été que
21:15Alain Rémy, Alain Delon présente,
21:17et en dessous, Belmondo, Delon,
21:19alors que sur le contrat, il y avait marqué
21:21qu'il y avait autant de fois l'un que l'autre.
21:23Vous avez suivi ?
21:25Mais honnêtement, c'est du folklore
21:27qui a été entretenu par les médias, etc.
21:29Ce que vous nous dites
21:31à l'intervention, c'est que, contrairement à l'image
21:33qu'on pouvait avoir
21:35d'Alain Delon, c'était quelqu'un
21:37de très accessible ?
21:39Qui, Alain ?
21:41Non, je ne vous ai pas dit ça,
21:43mais je vous ai dit que,
21:45en dehors de l'aspect affichage,
21:47média, folklore, les vendes et tout,
21:49Alain et Jean-Paul
21:51étaient très amis,
21:53très liés, le nombre de fois où j'emmenais
21:55l'un chez l'autre et l'autre chez l'un, etc.
21:57Jusqu'au bout,
21:59et aujourd'hui, Anthony
22:01et Paul
22:03sont très amis
22:05et d'ailleurs très conscients d'être
22:07les dépositaires de
22:09l'épilogue d'une histoire.
22:11Mais ils étaient
22:13très liés, y compris quand ils s'engueulaient.
22:15C'est comme dans les couples, de temps en temps,
22:17on s'engueule et puis après,
22:19ça s'attable. Ils étaient très liés.
22:21Donc ça, c'est quand même
22:23une invention, pas une invention,
22:25mais une exagération.
22:27Dès qu'il y avait une humeur de l'un
22:29ou une réflexion, ça arrivait
22:31dans le journal et on pensait immédiatement
22:33qu'ils étaient à couteau tiré.
22:35Alors qu'ils n'ont jamais été à couteau tiré.
22:37De temps en temps, ils s'engueulaient.
22:39Merci beaucoup, Alain Terrien,
22:41producteur intarissable
22:43sur le cinéma en général,
22:45sur Alain Delon en particulier.
22:47Merci d'avoir été avec nous en direct
22:49sur Europe 1. On se retrouve
22:51dans un instant, Estelle, pour la deuxième partie de l'émission.
22:53Tout à fait, 11h58. Et puisqu'il est question
22:55dans Europe 1 et vous du monument Alain Delon,
22:57retrouvez sur l'appli Europe 1
22:59et europe1.fr le nouveau podcast
23:01Destin Extraordinaire consacré à l'acteur
23:03et raconté par Pascal Praud,
23:058 épisodes d'une quinzaine de minutes dont vous découvrirez
23:07l'épisode 2 au cours de cette émission.
23:09Dans quelques minutes, le retour dans l'info
23:11et l'hommage à Alain Delon qui continue jusqu'à 13h.
23:13A tout de suite.
23:15Olivier Delagarde sur Europe 1.
23:17Merci à vous, Maude Tambedini.
23:19On se retrouve à 12h30 pour l'info.
23:21Europe 1 et vous.
23:2311h-13h.
23:25Olivier Delagarde.
23:35On ne se lasse pas de cette musique
23:37des New Morricone pour
23:39le film Le clan des Siciliens
23:41de 1969 avec un casting
23:43évidemment extraordinaire.
23:45Lino Ventura, Jean Gabin,
23:47Alain Delon.
23:49On est là pour, évidemment,
23:51pendant deux heures, rendre hommage
23:53à l'acteur. On est avec Jérôme Béglé,
23:55le directeur général
23:57de Paris Match.
23:59Il faut qu'on dise un mot, quand même, Jérôme,
24:01de la fin de la vie d'Alain Delon
24:03qui a été
24:05compliquée, qu'on ne peut
24:07pas souhaiter à son pire ennemi.
24:09On avait cette impression-là avec
24:11cette famille qui s'est déchirée.
24:13Alors, d'abord, une fin de vie, ce n'est jamais beau.
24:15Deuxièmement,
24:17ce n'est pas que je veux banaliser, mais
24:19qu'est-ce qui s'est passé ? Il y a eu une dame
24:21qui s'appelait Iromie Rollin, qui travaillait
24:23au service d'Alain Delon, qui a pris un peu
24:25de place, jusqu'à se faire passer pour
24:27sa compagne. Et évidemment, ça n'a pas
24:29plu aux enfants,
24:31à tous les enfants, à la fin.
24:33Au début, certains acceptaient, puis d'autres
24:35ont moins accepté. Et à la fin, tout le monde a
24:37compris que cette dame avait outrepassé
24:39un peu sa place et son pouvoir.
24:41Puis qu'il y avait des choses
24:43pas forcément très agréables qui se passaient
24:45dans l'entourage même d'Alain Delon.
24:47Donc au bout d'un moment, les enfants ont réagi
24:49et ça a donné lieu
24:51effectivement à
24:53ces petites affaires
24:55pas forcément agréables qui sont
24:57sorties à droite et à gauche. Mais encore une fois,
24:59ce qu'il faut retenir, c'est que les
25:01derniers jours d'Alain Delon, les enfants étaient
25:03totalement unis et réunis
25:05à Douchy pour dire
25:07au revoir à leur père, qu'il n'y a pas eu
25:09l'ombre d'une polémique,
25:11d'un doute, d'une engueulade entre eux
25:13et qu'il est mort entouré de l'affection
25:15des siens. Et ça n'est pas
25:17un propos banal que de dire
25:19ça. Je le dis avec toute
25:21l'importance qu'ont chacun des mots
25:23prononcés. Il est mort entouré
25:25des siens et de l'affection des siens. Il y avait même
25:27Rosalie, la mère des deux
25:29enfants derniers d'Alain Delon
25:31qui était là. Voilà, donc
25:33effectivement, il y a eu des tensions
25:35mais ces tensions sont, me semble-t-il,
25:37aujourd'hui derrière nous. Bon, ce qui était sûr
25:39aussi, c'est que Alain Delon
25:41était prêt. D'ailleurs
25:43il disait ne pas redouter la mort
25:45et l'attendre même avec
25:47une forme d'impatience.
25:49Écoutez, il parlait de la mort depuis 25 ans
25:51il vivait avec ses souvenirs
25:53quand il ouvrait son portefeuille
25:55il y avait toujours une photo de Romy Schneider
25:57qui en tombait. Romy Schneider elle est morte
25:59il y a quasiment, il y a 40 ans
26:01plus de 40 ans. Dans le
26:03match qui sera en vente demain à Paris
26:05et le mercredi dans le reste de la France, on publie
26:07une photo extraordinaire
26:09parce qu'il nous montre
26:11dans la chapelle de Douchy
26:13là où il sera enterré
26:15là où il va être enterré. C'est-à-dire qu'il a
26:17fait creuser dans la chapelle
26:19de l'autre côté du mur où ses chiens
26:21préférés sont enterrés
26:23un
26:25tombeau, enfin
26:27l'endroit où il reposera. Donc
26:29je ne veux pas dire qu'il jouait avec ça
26:31en tout cas il s'était acclimaté à la mort
26:33il vivait avec la mort
26:35si je puis dire, il vivait avec sa propre mort
26:37il disait ne pas la redouter
26:39l'attendre, d'être assez serein
26:41là-dessus. Et voilà il a été emporté
26:43à 88 ans
26:45à quelques semaines de ses 89 ans
26:47je crois
26:49qu'il était extrêmement
26:51prêt avec cela. Merci
26:53en tout cas Jérôme Beiglet, directeur général
26:55de Paris Match d'être
26:57venu parler de cette
26:59star internationale, c'est plus de 51
27:01de Paris Match qui ont été consacrés
27:03à Alain Delon
27:05et puis on retrace également sa vie Estelle
27:07Tout à fait, midi 7 de Europe 1 et vous
27:09dans cette partie d'émission on vous propose d'écouter le deuxième
27:11épisode de ce podcast exceptionnel
27:13qui s'appelle d'ailleurs Destin Exceptionnel
27:15consacré à Alain Delon, ce deuxième épisode
27:17s'appelle Tête brûlée, il est narré par Pascal Praud

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