La grande interview : Hervé Morin

  • il y a 2 semaines
Le président de la région Normandie, Hervé Morin était l’invité de #LaGrandeInterview de Anthony Favalli dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
Transcript
00:00Générique
00:02Hervé Morin, bonjour.
00:03Vous êtes président
00:05les centristes de la Normandie,
00:07ancien ministre de la Défense.
00:09Nous devons trouver une nouvelle voie
00:11à l'Assemblée par le dialogue,
00:13le dépassement des clivages habituels.
00:15C'est par ces mots que débute la lettre de Gabriel Attal,
00:18envoyée ce mardi aux chefs de groupe à l'Assemblée.
00:21Il ne s'agit pas d'effacer nos différences et nos désaccords,
00:24mais de les surmonter, de les dépasser.
00:27Il les dépasse tellement
00:28qu'il a exclu parmi les destinataires de cette lettre
00:31le RN et la France insoumise.
00:33Question pour vous ce matin.
00:35Peut-on gouverner le pays sans ces deux parties
00:38et notamment sans cette alliance LR-RN
00:41qui cumule 143 sièges à l'Assemblée ?
00:43Écoutez, quel peut être d'abord ce gouvernement ?
00:47Est-ce qu'on peut essayer de se poser
00:49les questions centrales avant de déterminer
00:52quel serait le plan d'action ?
00:54Est-ce que c'est un gouvernement de transformation du pays ?
00:58Non.
00:59C'est un gouvernement de transition.
01:01C'est un gouvernement qui nous amène jusqu'à l'été prochain
01:04et la capacité pour les Français, éventuellement,
01:07de s'exprimer à nouveau par le suffrage universel.
01:10Après, il y a quelques principes de base.
01:12C'est, est-ce qu'on accepte
01:14des prélèments obligatoires supplémentaires ?
01:17Est-ce qu'on lutte contre les déficits publics ?
01:19Est-ce qu'on est tenus par nos engagements européens ?
01:23Est-ce qu'on sanctuarise les crédits militaires
01:25où le monde est extrêmement dangereux ?
01:28Il y a un plan d'action proposé par Gabriel Attal.
01:31Il y a six axes.
01:32Comme c'est un gouvernement de transition,
01:35il ne faut pas se raconter l'histoire.
01:37De transition jusqu'à quoi ?
01:39De transition jusqu'au moment où on pourra à nouveau
01:42dissoudre l'Assemblée nationale, reconstituer une majorité...
01:45Vous pensez que, d'ici un an,
01:47on court droit vers la dissolution de l'Assemblée
01:50avec un nouveau vote législatif ?
01:52Très probablement.
01:53Ce que je sais, c'est qu'on a une année
01:55où l'essentiel du travail du gouvernement,
01:57c'est d'essayer d'améliorer les choses
02:00sur un certain nombre de points et surtout de faire voter un budget.
02:03Un budget qui répond à la question
02:05qui nous est posée par les institutions européennes,
02:08c'est ce que vous faites pour réduire votre déficit.
02:11Puisque là, nous sommes dans une période
02:14où nous sommes sous la menace de sanctions
02:16de la Commission européenne pour déficit excessif.
02:19Ce sera la seule question pendant un an ?
02:21Pendant un an, ne nous faisons pas dire...
02:23Il y aura très peu de réformes, il faut pas se raconter l'histoire.
02:27Il y aura la capacité de pouvoir bâtir
02:29un certain nombre de politiques d'ajustement et rien d'autre.
02:33Je prends des sujets simples.
02:37La question qui se pose pour le gouvernement de demain,
02:40c'est est-ce qu'on maintient le programme électronucléaire français ?
02:44Est-ce qu'on continue à apporter dans chaque région
02:47ce qu'on appelle les COP régionales,
02:49c'est-à-dire les politiques régionales
02:52qui sont déclinées autour de la transition énergétique ?
02:57Est-ce qu'on dégage de nouveaux moyens
03:02où on mène des politiques qui permettent d'améliorer le logement ?
03:05Vous nous condamnez à l'immobilisme,
03:07je ne sais pas pourquoi.
03:09Vous nous dites qu'il n'y aura pas de réponse.
03:11La dissolution nous a amenés à cela.
03:13Une autre question qui pourrait être posée durant cette période,
03:17c'est celle d'une...
03:19D'ailleurs, ce que propose Gabriel Attal,
03:21ce sont des questions sur les institutions.
03:24Est-ce qu'enfin, on introduit une dose proportionnelle
03:28qui est un discours politique tenu par à peu près tout le monde
03:32au moment des élections ?
03:33Il y a un certain nombre de sujets sur lesquels on peut être.
03:36Les grandes transformations, les grandes réformes du pays,
03:40il n'y en aura pas.
03:41Donc, ce qu'il nous faut, c'est avoir un homme ou une femme
03:46qui ait l'expérience politique,
03:49qui est capable de parler à peu près avec tout le monde,
03:52qui est, pour reprendre une formule de mon copain Borloo,
03:55capable d'arranger les bidons,
03:57de discuter, de trouver les voies et moyens
03:59pour bâtir des majorités
04:01et surtout faire en sorte que la France puisse avoir un budget.
04:05Ca m'a l'air d'être un gouvernement technique.
04:07Non, je ne veux pas de gouvernement technique.
04:10Je trouve, très franchement,
04:11je regardais la campagne de la candidate
04:15de la France insoumise.
04:17Ca a quelque chose de...
04:20C'est peut-être parce que c'est un vieux con qui fait de la politique
04:24depuis 20 ans, mais ça a un côté quasi indécent
04:28de quelqu'un qui n'a jamais exercé aucune responsabilité politique
04:32et qui est directrice des finances à la Ville de Paris
04:35qui dit que je peux être Premier ministre de la France.
04:38Vous parlez de Lucie Castaner.
04:40Je crois qu'il nous faut quelqu'un
04:42qui a suffisamment d'expérience politique,
04:44qui connaît l'environnement de l'Assemblée nationale
04:47et qui est capable de faire en sorte
04:49que la France ne tombe pas dans une crise de régime.
04:52C'est ça qu'on lui demande.
04:53Qui, pour Premier ministre, a donné des noms ?
04:56Gérald Darmanin dans le Figaro
04:58semble voir d'un bon oeil l'hypothèse Xavier Bertrand.
05:01J'ai dit que Xavier Bertrand avait de grandes qualités.
05:04Je ne me permets pas de nommer à la place du président.
05:07Oui, Xavier Bertrand, Jean-Louis Borloo,
05:10que je citais tout à l'heure, qui a été par exemple,
05:13lorsque nous étions en gouvernement ensemble,
05:15capable de faire voter à l'unanimité sa loi.
05:19Bon...
05:20Hervé Morin ?
05:21Non, je suis dans ma région, je suis très heureux,
05:24je n'ai aucune envie de rentrer dans ce gouvernement.
05:27Mais disons les choses.
05:29N'inventons pas un gouvernement
05:32qui serait capable d'entraîner et d'emmener le pays
05:35vers des transformations importantes.
05:37Il y en aura besoin.
05:38Il nous faut éviter la crise de régime
05:41et pouvoir ajuster les choses sur un certain nombre de points.
05:44Le Premier ministre doit être extérieur à la Macronie ?
05:47Oui, ça me paraît une évidence.
05:50On ne peut pas avoir perdu les élections
05:53et dire que l'on va conduire le gouvernement de demain.
05:56Je voudrais qu'on revienne à ce plan d'action de Gabriel Attal
05:59et ses lettres, pas que celles de lui.
06:01Stéphane Séjourné, les centristes d'Horizon
06:04ont écrit leurs lettres aux autres chefs de parti.
06:07Oui, j'avais co-signé, il y a quelques semaines,
06:10avec Jean-François Copé,
06:11une lettre disant, voilà une tribune,
06:13ce qu'il nous faut pour le pays.
06:16On ne peut pas rester en dehors
06:17de la construction du gouvernement.
06:21Et la lettre de Lucie Castex ?
06:22Toutes ces lettres ont un point commun,
06:24ce n'est pas de rassemblement national,
06:27malgré ses 143 sièges qu'il obtient avec les LR d'Éric Ciotti.
06:32Bah, écoutez, est-ce que le rassemblement national
06:36veut lutter contre les déficits publics ? Non.
06:39Est-ce que le RN tient à nos engagements européens ?
06:42Non. Donc, très clairement,
06:44il n'y a pas de discussion possible avec le RN.
06:46Vous dites que la France n'est pas gouvernable.
06:49Il faut éviter que la France ne soit pas gouvernable
06:52et donc avoir la capacité de bâtir un accord à minima
06:57sur un certain nombre de sujets
06:58et qui permet à la France d'avoir un budget et une loi de finances.
07:03On va faire votre bilan de ces Jeux olympiques, Hervé Morin.
07:07Que pensez-vous de l'organisation de cette compétition
07:09et de l'image renvoyée par la France ?
07:11Bah, écoutez, moi, j'ai passé des...
07:15Je ne sais pas si c'est des dizaines d'heures ou des centaines d'heures.
07:18C'est probablement des centaines d'heures,
07:21comme beaucoup de Français devant ma télé.
07:23J'adore le sport, j'en fais beaucoup.
07:25Je trouve que l'image de la France a été belle,
07:28qu'on a vu des JO fantastiques,
07:30que le fait de le faire au pied des grands monuments
07:33que le monde entier connaît était une excellente idée.
07:36Après, nous ne nous racontons pas d'histoire.
07:38Il n'y a pas la France de demain
07:40parce qu'on vient de faire les Jeux olympiques.
07:43La menace terroriste a été déjouée lors de ces Jeux olympiques.
07:46La délinquance fortement réduite sur les lieux de compétition,
07:49notamment à Paris.
07:50Y a-t-il des leçons à tirer pour le quotidien des Français
07:52au-delà des JO ?
07:53On voit, d'ailleurs,
07:55les premières images du champ de Mars aujourd'hui
07:57sont marquées par le retour des vendeurs à la sauvette.
08:00Manifestement, on estime qu'une fois que les projecteurs sont partis,
08:04il n'y a plus de sécurité assurée comme lors de la compétition.
08:07Je lisais qu'il y aurait des tas de conclusions
08:09qu'on pourrait tirer dans la mise en oeuvre d'un certain nombre de politiques.
08:13Moi, j'y crois pas vraiment.
08:16A chaque fois qu'il y a des crises,
08:18on vous explique que demain ne sera pas comme hier.
08:20Au moment des crises financières,
08:22on nous explique qu'il y a quelque chose à l'échanger.
08:25A tel ou tel moment,
08:26à chaque fois qu'il y a des grands événements,
08:28souvenez-vous de 1998, la France black-blombeur...
08:32Bon, en réalité,
08:35les vrais sujets restent devant nous.
08:37La vraie vie, pour reprendre l'expression d'Emmanuel Macron,
08:41c'est la lutte contre l'insécurité alors que la délinquance augmente,
08:45c'est la lutte contre les déficits,
08:47c'est de faire en sorte que la France puisse améliorer sa compétitivité.
08:51Tous ces sujets-là restent devant nous.
08:54On voit qu'Emmanuel Macron
08:55essaie de tirer les marrons du feu de la réussite de l'événement.
08:59Il va organiser une parade des athlètes le 14 septembre.
09:02C'est de bonne guerre, mais est-ce que ça peut marcher, selon vous ?
09:06Bah, écoutez...
09:08Moi, j'aime...
09:11Comment vous dire ?
09:15J'aime quand on fait de la politique sobrement.
09:19Quand je voyais Emmanuel Macron...
09:22Ce qu'on a vécu ces dernières semaines, c'est la vraie vie.
09:25Vous l'avez dit.
09:26La vraie vie, c'est pas ça.
09:28Compatriote, vous voyez, je lisais ce matin
09:31dans un des journaux que la RATP avait remis son service d'été.
09:35C'est ça, la vraie vie, pour les gens qui vont prendre le métro.
09:39Donc, clairement, j'aimerais qu'on ait un peu de pudeur.
09:44Quand je voyais Emmanuel Macron se jeter dans les bras des athlètes
09:48à chaque fois qu'il y en avait un qui avait une médaille, etc.,
09:51je suis pas convaincu qu'il fasse tout ça.
09:53Il veut poursuivre l'euphorie de cet événement.
09:56Je ne suis pas convaincu.
09:57Il n'en tirera pas de bénéfice politique.
10:00Hervé Morin, vous avez été ministre de la Défense de Nicolas Sarkozy.
10:03Je voudrais évoquer avec vous le conflit entre l'Ukraine et la Russie.
10:08L'Ukraine qui revendique de nouvelles avancées
10:10sur le territoire russe dans la région de Kursk.
10:13Une semaine après le début de son offensive surprise,
10:1774 localités sont passées sous son contrôle,
10:20plus de 1 000 km2.
10:22Une avancée qui, nous dit-on, n'a pas pour but
10:25l'annexion de ces territoires russes,
10:27mais plutôt la négociation d'une paix juste.
10:29Est-ce un tournant dans le conflit ?
10:31Difficile à dire.
10:33Il y a tout de même, dans cette offensive ukrainienne,
10:37au moins deux points qui méritent d'être signalés.
10:39Le premier, c'est l'agilité de l'armée ukrainienne.
10:43Est-ce que cette agilité est liée aux équipements occidentaux ?
10:48Est-ce qu'enfin, les équipements occidentaux
10:50qui ont été livrés aux Ukrainiens ont permis à l'Ukraine
10:54de pouvoir avoir cette offensive ?
10:56Il faudrait connaître les détails que je n'ai pas.
10:58Et puis, le second point que je voudrais qu'on ait en tête,
11:03c'est que, sauf erreur de ma part,
11:05ça doit être la première fois
11:08qu'un pays ayant l'arme nucléaire,
11:11ayant la dissuasion,
11:13est envahi par des forces conventionnelles.
11:18Et donc, ces questions-là, il faut les avoir en tête
11:21quand on aborde ce sujet.
11:22Ce que j'espère, c'est qu'un moment ou un autre,
11:25la raison finira par l'emporter
11:27et qu'il y aura des négociations qui permettront d'aller vers la paix,
11:30parce que ça fait quand même deux ans que ça dure,
11:33et que bientôt sonnera le temps de l'automne et de l'hiver,
11:37et donc encore des souffrances multiples
11:39pour des femmes et des hommes qui n'ont pas demandé la guerre.
11:42D'ailleurs, Washington s'inquiète
11:44de la fourniture de missiles balistiques de l'Iran à la Russie.
11:48Pourquoi Téhéran vient en aide à Moscou ?
11:51Parce que Téhéran soutient tout ce qui peut
11:55contester la place et déstabiliser la place des Européens
12:00et du camp occidental.
12:01L'Iran, qui joue avec les nerfs du monde entier en ce moment,
12:05avec cette riposte contre Israël,
12:07qui pourrait embraser aussi toute la région.
12:09Joe Biden estime qu'un cessez-le-feu à Gaza
12:12pourrait dissuader Téhéran d'attaquer.
12:14Une déclaration qui intervient plus de 24 heures
12:17avant de nouvelles négociations
12:19pour une trêve à Gaza et la libération d'otages.
12:21Avez-vous le sentiment qu'on peut encore éviter
12:24cet embrasement dans la région ?
12:26Je l'espère.
12:27Je l'espère, et donc, oui, je trouve que les Américains
12:30ont raison de fournir les moyens de se défendre à Israël.
12:34Les risques sont lourds, sont importants,
12:37et en même temps, il faut que les Etats-Unis
12:40fassent pression sur le gouvernement Netanyahou
12:43pour faire en sorte qu'un moment ou un autre,
12:46il y ait une trêve et qu'on puisse, en effet,
12:49aborder la question de la libération des otages.
12:51L'Iran, je le disais,
12:53joue avec les nerfs de la communauté internationale
12:56et surtout d'Israël,
12:58qui est le premier pays ciblé par l'Iran.
13:00Pourquoi l'Iran fait ça depuis 15 jours ?
13:04Est-ce que l'Iran, finalement, a les moyens, véritablement,
13:07de se permettre une escalade dans la région ?
13:10Moi, j'ai eu la chance d'aller en Iran
13:13au moment où l'Iran a sorti
13:16de cette période d'isolement.
13:20C'est une grande civilisation.
13:24Moi, j'avais été étonné de voir un pays
13:27qui avait été sous embargo pendant des années et des années,
13:30avoir des infrastructures dans cet État,
13:33des campus universitaires dans cet État,
13:36et donc, l'Iran a été capable, tout de même,
13:40de continuer à faire voler des avions, par exemple,
13:43alors que ce pays était sous embargo.
13:46Je me méfie de la capacité de l'Iran
13:50à pouvoir mener des frappes
13:52qui soient extrêmement dangereuses
13:54et très lourdes pour les populations visées.
13:57Merci, Hervé Morin.
13:59Vous êtes président l'Essentriste de la Normandie,
14:01ancien ministre de la Défense.
14:03C'était ce matin votre grande interview sur Europe 1 et sur CNews.

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