Conseil de nutritionniste
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00:00Bonjour, je reçois sur ce plateau Stéphane Baye, qui est nutritionniste indépendant pour le cabinet BDM en région Rhône-Alpes. Bonjour Stéphane.
00:18Aujourd'hui on va parler technique d'alimentation, être assez précis, notamment des rations. On va se donner pour grand thème comment arriver à faire une ration qui va pour faire 10 000 litres de lait avec seulement 2 kg de tourteau de soja.
00:36Première question, pourquoi aller se casser la tête à aller chercher seulement 2 kg de soja alors que quand on est à 10 000 litres de lait on pourrait se permettre d'en mettre un peu plus ?
00:48L'idée de départ de cette problématique c'est surtout le prix du soja. On a pris un exemple tout simple au sein du cabinet, c'est qu'il y a un éleveur qui n'a pas changé de stratégie entre 1997 et aujourd'hui.
01:0460 vaches laitières, un troupeau moyen lambda. S'il n'a vraiment rien changé dans son système de production, il a un surcoût de production de l'ordre de 20 000€ à l'année rien que par la hausse du prix du soja.
01:18On constate que le prix du soja est en croissance continue depuis les 15-20 dernières années. Tous les prévisionnistes, même si personne n'arrive à prédire l'avenir, en règle générale la tendance est à une hausse moyenne du prix du soja.
01:32Cette ration à 10 000 litres avec 2 kg de tourteau, quelles sont les pistes de travail ? Est-ce que c'est des choses qui existent déjà ailleurs ?
01:46C'est des systèmes qu'on met en place chez les éleveurs qui nous suivent au niveau du cabinet. La piste principale de travail est d'arriver à réduire la forme d'incorporation du maïs dans la ration pour pouvoir libérer de la place dans un rumen.
02:06Un rumen n'est pas extensible à volonté. L'idée derrière ça c'est de pouvoir faire consommer un maximum de légumineuses à mon animal pour s'affranchir de ces kilos d'achat extérieurs qui sont notamment le soja.
02:20Pour pouvoir arriver à libérer cette place, on change notre méthode d'incorporation du maïs sans silage. Le maïs sans silage est une plante très intéressante, très énergétique avec beaucoup d'amidon.
02:30On a besoin d'un bon niveau énergétique pour produire ces 10 000 litres de lait. Par contre, le maïs a un défaut, c'est qu'il ramène très peu de protéines. L'idée derrière ça c'est de garder la partie énergétique de mon maïs, réduire l'encombrement qu'on peut avoir avec la tige de la plante entière pour pouvoir libérer de la place pour incorporer plus de légumineuses.
02:54C'est à dire que ce maïs plante entière, considéré comme un fourrage, il faut le mettre plutôt en grains, concentrer l'énergie et en faire un concentré. C'est ça l'idée ?
03:05Oui, l'idée est vraiment derrière ça, c'est d'arriver à donner le maïs soit sous forme de maïs grain humide, qui est vraiment l'optimal en termes énergétiques parce qu'on arrive à approcher une UF25 au kg de matière sèche, donc des choses assez élevées, soit une étape que je dirais intermédiaire qui est le maïs épis où l'éleveur encile seulement la rafle du maïs et on arrive quand même à des concentrations de l'ordre d'une UF10, une UF15.
03:32L'idée c'est vraiment de supprimer le maïs plante entière de la ration et de ne plus en mettre même pas un petit peu, histoire de ?
03:40Non, tout à fait, alors il y a des étapes intermédiaires entre le démarrage du suivi d'un éleveur qu'on prend et la finalité, l'objectif qu'on se fixe, mais l'idée finale c'est vraiment de supprimer la partie encilage de maïs plante entière parce qu'en fait la tige a très très peu de valeur énergétique, moins de valeur énergétique qu'une paille parce qu'il y a beaucoup de cellulose, il y a eu beaucoup de sélection sur le maïs pour augmenter le taux d'amidon, mais le taux d'amidon augmentant, les maïs avaient tendance à verser,
04:09donc le taux de cellulose a aussi eu tendance à augmenter dans les variétés de maïs et on sait qu'à un moment donné la cellulose c'est du bois, donc c'est très dur à digérer pour un animal, pour une vache haute productrice.
04:21D'accord, donc on va mettre des kilos de maïs grain, donc soit maïs grain humide, soit maïs épi broyé, donc encilé et le fourrage, alors c'est quoi ? C'est avec de la légumineuse pure à côté ?
04:34Donc l'idée derrière ça effectivement, moi j'ai travaillé deux ans au Canada et aux Etats-Unis et c'est vrai que l'idée derrière ça c'est de libérer de la place dans mon rumen pour justement pouvoir incorporer une bonne dose d'encilage de légumineuse.
04:48Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison, c'est que ma légumineuse elle va faire entre 18 et 22 en MAT, donc il y a un gros gros gros niveau azoté qui est intéressant pour avoir des vaches hautes productrices,
05:01avec un défaut quand même qui est la concentration énergétique, donc la luzerne elle est très protéique, pas d'énergie, et mon maïs du coup on va aller chercher l'inverse, on va aller chercher une grosse concentration énergétique pour avoir deux fourrages qui se complémentent très très bien.
05:15D'accord, donc luzerne et maïs, sur cette ration de base à peu près, on est à combien de kilos de luzerne et combien de kilos de maïs ?
05:22La limite, l'optimale on va dire, ça va être 12 à 14 kilos de matière sèche de luzerne qu'on va arriver à complémenter avec 4, 5, 6 kilos de matière sèche de maïs grains humides ou 8, 10, 10, 12 de maïs grains épis.
05:40D'accord, donc cette ration là elle va être équilibrée à combien du F pour combien de litres de lait à peu près ?
05:47Donc là, dépendamment de la valeur protéique de notre luzerne, parce que la valeur énergétique du maïs est vraiment très stable, on va dire voilà, notre maïs épis va faire une UF10, une UF15, notre maïs humide une UF25, ça on est à peu près sur des valeurs.
06:02La luzerne va varier suivant les stades de récolte entre 18 et 22 de protéines, mais la combinaison de ces deux fourrages de base me permet d'avoir une concentration à loge de l'ordre de 0,9 UF et de 14 à 16 de MAT au kilo de matière sèche.
06:17D'accord, donc ça fait une ration qui est autour d'un peu moins de 26, 28 litres de lait, donc qui est équilibrée à peu près ?
06:26Oui, l'avantage c'est que les deux fourrages se complémentent très bien, énergie, protéines, et puis c'est surtout qu'on a une couverture laitière qui est déjà assez importante avec les fourrages de base de l'ordre de 26, 28 litres de lait suivant la gestion du troupeau.
06:41Donc ça veut quand même dire qu'on n'a encore rien acheté à l'extérieur, on n'a que fait son maïs grain et sa luzerne et on a déjà une ration à 28 équilibrée ?
06:49Oui, sans rien ajouter.
06:51Ça peut paraître surprenant, mais en fait on a les deux fourrages qui sont top, la luzerne qui me ramène la protéine et le maïs qui me ramène ma partie énergétique, et on a un niveau de base très élevé.
07:05Vous avez parlé de 5-6 kg de maïs grain pur, il n'y a quand même pas un risque d'acidoses au niveau santé, qu'est-ce que ça donne ?
07:15Non, je dirais même au contraire, parce que c'est vrai que la problématique en élevage, et tous les éleveurs laitiers le savent, c'est les problèmes d'acidoses ou de subacidoses sur les troupeaux, et c'est surtout d'arriver à faire vieillir les troupeaux en termes de rentabilité.
07:28Par contre, effectivement 5-6 kg, ça peut paraître élevé de maïs grain humide, mais attention, en parallèle de ça, on a aussi un fourrage qui est hyper santé, qui est la luzerne, où on l'incorpore à hauteur de 10-12-14 kg de matière sèche, c'est vraiment le fourrage chanté par excellence.
07:44Pourquoi ? Parce qu'il est basique en lui-même, il est très élevé en termes de pH, donc il tamponne l'acidité de morhumaine, et puis l'autre forme intéressante, c'est qu'il crée aussi de la rumination.
07:55On a oublié que la vache était un ruminant, et pour qu'elle soit en bonne santé, il faut qu'elle arrive à ruminer.
08:01D'accord, et donc cette ration de base qui est équilibrée à autour de 27 kg, comment on la complète pour arriver à environ 33 kg de moyenne troupeau si on veut arriver à 10 000 litres de lait sur l'année ?
08:15Oui, l'objectif est à peu près là en niveau de production, atteindre 32-34 litres pour arriver à faire nos 10 000 litres de lait.
08:22Donc l'objectif pour faire 10 000 litres de lait, c'est quasiment 1 UF au kg de matière sèche et 17-17,5 UF en concentration azotée.
08:30Donc après c'est très simple, on prend des produits assez azotés et très digestes et assez énergétiques.
08:36Le produit de base qu'on peut incorporer dans la ration à ce moment-là, c'est le tourteau de soja.
08:41Pourquoi ? Parce que c'est une des protéines les plus assimilables par les ruminants, et puis aussi qu'il y a un niveau énergétique assez intéressant.
08:48Quel type de tourteau de soja ?
08:51Un tourteau de soja traditionnel, 48 ou un soja 50, c'est la même base de produits, sauf qu'il y en a un qui est un peu plus extrudé que l'autre.
08:59D'accord, et donc 2 kg, après j'imagine qu'il faut quand même rajouter un peu d'énergie, un peu de céréales, du blé, du noix...
09:08Oui, tout à fait, du coup on a une ration de base à 0,9 UF, donc pour pouvoir la monter à 1 UF, et bien à ce moment-là,
09:14comme on a vraiment un aliment santé en face, on peut même se permettre de rajouter un petit peu de céréales à paille type blé, orge ou triticale,
09:22qui est de l'énergie un petit peu plus rapide, qui fait peur à certains éleveurs, on dit pas de blé parce que c'est trop acidogène.
09:30Effectivement, il y a 70% du blé qui est digéré dans les 2 heures qui suivent l'ingestion.
09:35Mais par contre, comme on a vraiment un gros gros levier santé avec la luzerne, on peut se permettre de rajouter 1 ou 2 kg de blé à côté.
09:42Voilà, ça peut être le blé, ça peut être de la mélasse par exemple, pour amener une partie sucrée dans la ration qui est aussi intéressante qu'on n'a pas,
09:50dans la luzerne qui est vraiment typée légumineuse, qui a peu de sucre, ça peut être des produits de ce type-là.
09:56D'accord, et donc les conditions pour parvenir à ce type de ration, c'est quand même de maîtriser vraiment ces fourrages,
10:04et notamment la luzerne, il faut quand même savoir et pouvoir la récolter, arriver à combien de MAT par tonne de luzerne ?
10:15Oui, en fait, la luzerne, il faut vraiment la prendre comme une culture. Tous les éleveurs aujourd'hui savent cultiver le maïs parce qu'ils font ça depuis 20-25 ans.
10:24C'est vraiment rentré dans les mœurs, on sait faire, c'est facile. Mais la luzerne, ce n'est pas plus compliqué, il y a juste un apprentissage à avoir.
10:30Mais en fait, en tonnage de MAT qu'on arrive à sortir à l'hectare, c'est le produit qui nous sort le plus de protéines à l'hectare.
10:38Et son système de culture est quand même assez simple. C'est vrai que si on veut le faire en foin sec, c'est plus compliqué parce qu'il faut le faire à l'arrosé
10:47pour ne pas perdre les feuilles ou des choses comme ça. Donc on oublie cette partie-là. Les deux premières coupes sont vraiment faites en ensilage très précoce,
10:54pour aller chercher le maximum de valeur alimentaire dans les fourrages.
10:58On cherche du rendement en MAT hectare et pas en tonnes hectare.
11:02C'est ça. C'est vraiment l'idée, sortir la MAT hectare. Comme à l'heure actuelle, on parle des UF qu'on sort à l'hectare sur le maïs.
11:09Sur la luzerne, c'est vraiment une culture. Et combien de MAT à l'hectare on arrive à sortir ?
11:13Stéphane Bayle, je vous remercie. Et puis, je vous rappelle que vous pourrez retrouver des exemples, par exemple, des exemples de rations de ce type sur WebAgri,
11:22avec les conseils de nutritionnistes écrits par les nutritionnistes du cabinet BDM. Je vous remercie. A bientôt.
11:30Merci.