80 ans du D-DAY : de commémoration militaire à grand rendez-vous diplomatique

  • il y a 4 mois

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00:00C'est la plage sur laquelle ces 14 000 Canadiens ont débarqué ce 6 juin 1944, il ne faut pas les oublier.
00:09Gauthier Rybinski, il y a eu au cours de l'histoire une forme de compétition mémorielle autour de ce débarquement,
00:15dont les cérémonies de commémorations sont un peu l'image, on le disait tout à l'heure ensemble sur le plateau,
00:22il n'y a pas toujours eu ce grand raout diplomatique autour des commémorations du D-Day.
00:28Non, vous soulignez à juste titre qu'il y a une forme effectivement d'américanisation petit à petit,
00:36non seulement de la campagne mais des sources de mémoire, aussi pour une raison très simple,
00:42c'est que les Etats-Unis qui étaient, on le sait, plus que réticents à entrer en guerre en 1941,
00:48l'ont fait avec d'abord un constat qui était celui de la flotte perdue à Pearl Harbor suite à l'attaque japonaise,
00:58et puis cette intuition par un pouvoir américain qui est sorti de la crise absolument effarante, effroyable de 1929,
01:08et qui se dit mais peut-être que là il y a une façon justement d'entraîner une économie américaine de telle sorte
01:14qu'elle évite ce type d'accidents, de catastrophes, et aussi finalement d'entrevoir par là une sorte de maîtrise par les Etats-Unis
01:26de l'espace mondial, économique, etc., avec un pays qui était toujours hésitant jusque-là,
01:33et qui l'avait montré dans les décennies précédentes, entre l'isolationnisme et au contraire une forme de présence,
01:40d'omniprésence sur la scène internationale. Donc c'est aussi ça, c'est-à-dire que l'historiographie en quelque sorte des commémorations
01:49reflète ce qu'a été le devenir de chacun de ces pays-là à l'issue de la Seconde Guerre.
01:56En 1954, pour le dixième anniversaire du débarquement, il n'y a qu'un seul chef d'État, c'est le président français René Coty,
02:03on sait que de Gaulle ensuite a boudé l'événement, et le premier grand rat aux diplomatiques, c'est 1984, Mitterrand, Robert Frank ?
02:10D'abord c'est une collaboration normande dans les premières années, avec de temps en temps un ministre qui vient.
02:15En 1954, c'est le président Coty qui vient, mais c'est en même temps extrêmement modeste.
02:19En 1964, de Gaulle boude. De Gaulle a un très mauvais souvenir du débarquement.
02:24Il pense qu'il a été complètement malmené par Roosevelt et par Churchill.
02:29Le 4 juin, il va voir Churchill à Portsmouth.
02:33Donc l'avant-veille du débarquement.
02:35C'est à ce moment-là qu'il sait qu'il va y avoir un débarquement. Oui, on le traite mal.
02:38Il sait que les Américains veulent venir avec une monnaie d'occupation, comme en Italie.
02:42L'Italie, ex-ennemi, et la France n'est pas l'ennemi.
02:45Donc il est furieux. C'est à ce moment-là que Churchill lui dit, si je dois choisir entre Roosevelt et de Gaulle, je choisirai Roosevelt.
02:50Si je dois choisir entre l'Europe et le grand large, je choisirai toujours le grand large.
02:54Ça vient d'être révélé par le Guardian, une lettre non envoyée par Churchill à de Gaulle.
03:01Elle dit, vous avez un caractère odieux. Pendant 4 ans, j'essaie de négocier avec vous, ce n'est plus possible.
03:06Vous refusez de faire une allocution, comme la reine de Hollande, comme moi-même, Churchill, le jour du débarquement.
03:14Vous refusez de nous envoyer des instructeurs.
03:16Eh bien, sachez que vous pouvez partir le premier avion, dès que le temps sera bon, etc.
03:21Mais il a marqué, not to go. Parce que de Gaulle, finalement, cède.
03:27Il fera ça aussi à propos de la Syrie un an plus tard. On a l'impression que de Gaulle ne cède jamais.
03:32Si, il lui arrive de céder. Il cède, il prend sur lui, etc.
03:35Donc c'était vraiment touch and go, comme on dit en anglais. Il aurait pu être viré par Churchill.
03:40Donc en 1964, il a un mauvais souvenir, il boude.
03:431974, Giscard vient juste d'être élu, il envoie un ministre.
03:47Et c'est ce moment, 1984, la véritable mise en scène avec plein de chefs d'Etat.
03:52Avec Mitterrand en 1984 et ensuite en 1994.
03:55Mais Mitterrand, il discute avec Gaulle, il dit non, c'est peut-être pas le moment.
04:00Et Gaulle est soulagé de ne pas être invité en 1984.
04:03Et vous savez qu'il y a la cérémonie de compensation.
04:06Eh bien, c'est le fameux 22 septembre 1984 à Verdun.
04:10Ils sont main dans la main.
04:12Parce qu'ils voulaient une cérémonie franco-allemande seulement.
04:15Alors que le 6 juin, bon, c'était dur.
04:17Il faut donc attendre 2004 pour qu'il y ait un chancelier allemand.
04:202004, première fois que l'Allemagne est invitée.
04:23Il aura fallu 2004, 60 ans pour inviter l'Allemagne et cette accolade historique.
04:30Et 2004, c'est la première fois où il y a vraiment une mise en scène télévisuelle.
04:35C'est-à-dire un grand spectacle.
04:36C'est un grand spectacle, comme en 2014 et comme ça va l'être aujourd'hui.
04:39Un mot, Gauthier, de l'image que l'on voit en direct.
04:42C'est l'arrivée de la reine Camilla pour ces cérémonies franco-britanniques
04:48au mémorial de Vers-sur-Mer.
04:51Pour l'instant, sauf erreur, je ne vois pas le roi Charles III,
04:55dont on connaît les ennuis de santé.
04:58La reine Camilla qui serre la main au Premier ministre Richisson à Gauthier.
05:03Juste un petit complément, justement, sur ces années.
05:09Pardon, je reprécise, Gauthier, je vous recoupe.
05:11Excusez-moi, je vois le roi Charles III au premier plan, en costume militaire.
05:15Excusez-moi, Stéphanie Trouillard me faisait signe.
05:17Elle a raison. Gauthier, allez-y.
05:18Juste pour rappeler ce qu'avait dit Gerhard Schröder.
05:22C'était évidemment avant qu'il ne prenne ses jetons au conseil d'administration de Gazprom.
05:27Mais il avait dit lui-même qu'à propos du 8 mai,
05:30il disait que le 8 mai, c'était aussi une date importante pour les Allemands
05:34parce que c'était la date de la libération de l'Allemagne.
05:36Il faut dire qu'il avait vu les choses...
05:39Voilà, c'était l'ancien Schröder.
05:42Et sur la manière dont vous parliez, effectivement, de Churchill,
05:46il y a quelque chose qui m'en vient souvent à l'esprit.
05:48C'est la manière, dans un temps plutôt apaisé,
05:51pas forcément sous le coup de l'énervement,
05:54qu'il disait de de Gaulle.
05:56De Gaulle avait toujours l'air hautain et haltier
05:59d'un lama qu'on aurait surpris nu dans son bain.
06:02Oui, c'est quelque chose d'assez pittoresque au sens propre du terme,
06:06mais assez bien vu.
06:08Et puis parce que, justement, oui, il y a eu une concurrence.
06:11Et ce qui était très difficile...
06:13C'est pour ça que je voulais revenir à ça.
06:15Ce qui était très difficile pour un de Gaulle,
06:17mais pour d'autres, aussi pour la résistance française,
06:19c'est de faire comprendre qu'il y avait la puissance du fait
06:24et de la volonté politique.
06:26Là où on avait dit à de Gaulle ou à d'autres, aux résistants,
06:30on avait dit, écoutez, vous n'avez aucune chance.
06:33La réalité, le réalisme, c'est de voir qu'il y a la puissance allemande.
06:37Certains, même en France, bien sûr, beaucoup même,
06:39vont dire il vaut mieux se ranger de ce côté-là.
06:41Vous voyez tout le carcan de ce que peut être le réalisme
06:45et qu'on débite aussi parfois aujourd'hui.
06:47On dit bien à certains, écoutez, ne vous rebellez pas,
06:50c'est pas la peine, c'est trop dangereux.
06:52Et vous avez là, y compris même face à Churchill
06:55qui n'était pas opposé à tout cela,
06:58du moins pas forcément, pas toujours,
07:00mais cette volonté de dire, malgré le réalisme,
07:03il y a quelque chose qui n'est pas acceptable.
07:06Et de Gaulle le fait en disant, au fond,
07:09moi petit général de brigade deux étoiles, si je ne m'abuse,
07:13je dis non.
07:14Et vous voyez comme c'est important ça,
07:16y compris à notre époque où nous sommes à nouveau
07:19dans une forme de conformisme au réalisme.
07:22C'est-à-dire que le réalisme, c'est voir les choses,
07:24c'est très bien, il faut,
07:25mais le conformisme, c'est se dire,
07:27elles sont bien comme ça.
07:28C'est admettre la réalité telle qu'elle est.
07:30Et là, c'est une histoire où les gens n'ont pas admis
07:33la réalité telle qu'elle était.
07:34Stéphanie, pour faire un point, Monarchie,
07:36on a donc bien vu Charles III arriver à côté de Camilla.
07:40On avait un doute sur sa présence en raison de son détente.
07:42C'est émouvant de le voir là.
07:44C'est émouvant aussi parce que ça nous rappelle sa mère.
07:47Qui elle-même a connu le détente.
07:48On parlait des commémorations de 1984,
07:50donc les premières grandes commémorations
07:52en présence de chef d'État.
07:53Il y avait Ronald Reagan, côté américain.
07:55Qui a fait un discours absolument magnifique.
07:57Et Elizabeth II, côté britannique.
07:59Et depuis, elle était venue tous les dix ans aux commémorations.
08:01Dix ans après, avec Clinton.
08:03Elle est encore là.
08:04Et en 2014, c'était l'un de ses derniers voyages
08:07en tant que souveraine.
08:09Et c'est vrai qu'on assiste aussi à une transmission,
08:14un passage de relais.
08:15Parce qu'en 2014, c'était la dernière chef d'État
08:18qui avait vécu elle-même la Seconde Guerre mondiale.
08:20Et qui avait participé à cette Seconde Guerre mondiale.
08:23On se souvient de ces images.
08:24On la voit en tant que mécanicienne portant l'uniforme.
08:27Donc c'est effectivement émouvant de voir que cette année,
08:29c'est donc son fils, le roi Charles III,
08:31qui participe à ces cérémonies
08:33depuis le décès de la reine Elizabeth II.
08:35Et qui devrait prendre la parole
08:37selon le programme officiel.
08:38Dans un instant, Robert Fang, vous vouliez dire quelque chose ?
08:40Oui, deux choses.
08:41Churchill et de Gaulle.
08:43Pour Churchill, peut-être juste titre ou à tort,
08:46pour lui, c'est lui qui fait la guerre.
08:48Comme Clemenceau l'avait dit en 1917.
08:49Je fais la guerre. C'est ça qu'il dit à de Gaulle.
08:51De Gaulle, toi tu ne fais pas la guerre.
08:53De Gaulle, il a autre chose à faire.
08:54Il essaie de faire représenter la France,
08:55faire en sorte qu'elle soit parmi les vainqueurs.
08:57Donc il fait de la politique.
08:58Et il le fait très bien d'ailleurs.
08:59Et donc il y a un peu cette discordance.
09:01Dans les jours qui vont suivre,
09:03ils ne viennent pas ensemble en Normandie.
09:05De Gaulle va à Bayeux, Churchill va ailleurs.
09:07Il faut attendre le 11 novembre 1944,
09:09quelques mois plus tard,
09:10pour qu'ils défilent ensemble à Paris
09:11pour l'anniversaire de la première guerre mondiale.
09:14Cérémonie franco-britannique,
09:16n'oublions pas que nous sommes le 120e anniversaire
09:18de l'entente cordiale.
09:19Et donc là, les deux anniversaires coïncident.

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