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00:00Place à notre dernier rendez-vous de Paris Direct, bienvenue dans Derrière l'image, votre rendez-vous pour prendre le temps de décrypter l'info à partir de photos qui font sens.
00:08C'est un épisode consacré aujourd'hui aux commémorations du débarquement, 80e anniversaire auquel sont dédiés donc ces trois jours.
00:16Ça a commencé ce matin, l'occasion évidemment de faire vivre la mémoire de ces événements.
00:21Nos confrères de The Conversation consacrent à cette occasion un article sur la question débarquement, les souvenirs des derniers témoins civils.
00:29Et on reçoit à ce propos Victoire Hensonder. Bonjour Victoire.
00:31Bonjour.
00:32Merci d'être avec nous, vous êtes chef de rubrique santé à The Conversation France, média en ligne d'analyse de l'actualité qui associe rechercher et journalisme.
00:39Alors c'est la tradition, on va commencer par décrypter un cliché.
00:43Je le disais, Emmanuel Macron se rend à Saint-Lô cet après-midi dans la Manche pour prononcer un discours sur ces victimes civiles des bombardements alliés.
00:49Justement, vous avez choisi de vous intéresser à ces témoins, ces villes, ceux qui ont vu et vécu ces heures si sombres.
00:57Oui, parce que désormais, on s'intéresse aussi aux civiles. Vous l'avez dit, le président va se rendre à Saint-Lô parce qu'il va rendre hommage aux victimes civiles.
01:05Et nous, on a choisi une photo qui illustre très bien cette situation. On le voit, c'est une photo de civile, de femme, c'est pas anodin.
01:13On voit que finalement, elle fuit les bombardements. On voit trois générations de femmes, une dame âgée, on peut imaginer que c'est la grand-mère, la maman et la petite-fille.
01:21Et cette petite-fille, beaucoup de ces petites-filles aujourd'hui sont toujours en vie. Elles viennent à nous et aujourd'hui, elles racontent leur récit.
01:29On a juste cette photo parce qu'elles montrent la place des civiles qui ont fui les bombardements, qui ont subi ces traumatismes.
01:36Et on voit aussi la place des femmes parce que désormais, des femmes qui sont toujours en vie prennent aussi la parole pour raconter comment elles ont parcouru leur vie après avoir vécu ces traumatismes du débarquement.
01:49Voilà, les sacrifiés nécessaires de cette guerre, disait tout à l'heure sur notre antenne l'un de ces témoins qui avait 5 ans au moment de cette bataille de Normandie qui a donc duré plusieurs mois.
02:00La bataille de Normandie qui n'a pas occupé la même place dans la vie de tous ces survivants civils.
02:05Non, non, en fait, c'est beaucoup de monde. C'est 300 000 sinistrés quand même, pour se faire un peu une idée.
02:11Et en fait, nous, on s'est intéressés à un travail fait par des chercheurs qui travaillent en psychologie qui ont en fait distingué trois catégories de personnes.
02:18Il y a des personnes qui ont passé leur vie à se souvenir, à mener des actions pour commémorer dès la fin de la guerre jusqu'à maintenant.
02:24Il y a des personnes qui, en revanche, ont mené leur vie, leur vie de famille, leur vie professionnelle.
02:29Et puis, au moment de la retraite, ont ressenti le besoin de s'inscrire dans cette mémoire et de raconter.
02:35Et puis, il y a une troisième catégorie de témoins, de personnes qui n'ont jamais abordé la question, ont mis ces événements-là à distance toute leur vie jusqu'à aujourd'hui.
02:45Mais malgré tout, ces trois profils de personnes ont quelque chose en commun, c'est qu'aujourd'hui, en fait, elles ont envie de raconter,
02:50de raconter le récit de ce qu'elles ont vécu, de raconter comment elles se sont construites avec cet événement au début de leur vie.
02:56C'était des jeunes personnes à l'époque. Aujourd'hui, ce sont des messieurs et des dames qui sont très, très, très âgées.
03:01Et donc, nous, on s'est intéressés à un travail qui est fait à l'université de Caen par des chercheurs pour recueillir ce que racontent ces derniers témoins civils de la bataille de Normandie.
03:12Voilà, comment transmettre la mémoire ? Vaste question.
03:15À la veille des commémorations du débarquement, nos confrères de France 2 ont justement rencontré Henri-Jean Renaud, témoin de la libération de cette époque.
03:23Il a gardé ses cahiers d'enfance, de nombreux souvenirs datant de l'occupation.
03:27En 1944, il est âgé de 9 ans, soit le même âge que son jeune invité, un petit Léon, vous allez le voir, à qui il transmet ce jour-là son histoire.
03:36Il se fait un devoir de partager sa mémoire avec la jeune génération.
03:40Reportage.
03:42Mes œuvres, voilà, mes cahiers d'enfance.
03:47Henri-Jean Renaud a appris à écrire et à lire sous l'occupation.
03:51À la libération en 1944, il a 9 ans, le même âge que Léon Vandenbusch, son invité du jour.
03:58À cette époque-là, on écrivait avec des plumes.
04:01Si tu plantais ta plume dans le papier, on appelait ça un pâté.
04:05Tu vois que ma pâle est remplie de pâté.
04:10Des souvenirs d'un écolier presque comme les autres, mais souvent rattrapés par l'horreur de la guerre.
04:16Alors, au fond de sa maison, il compile les souvenirs d'une vie.
04:21Fais attention, il y a des marches quand même.
04:23Voilà, j'ai toujours peur de me casser la figure.
04:26Il se fait un devoir de les partager avec la jeune génération.
04:31Au moment du débarquement et des premiers bombardements,
04:34il se cache 2 jours dans un fossé avec sa famille avant de trouver refuge dans une maison.
04:39À un moment, il y a eu une accalmie et on a eu envie de sortir.
04:43On sort, on sort et il y avait 2 parachutistes américains que tu vois en photo là.
04:49Et la dame leur a payé un coup de cidre.
04:55Ici, en culotte de gorge comme Tintin et Milou.
05:02À l'aube de ces 90 printemps, Henri-Jean Renaud ressent l'urgence de transmettre son vécu.
05:07Un témoignage touchant pour le jeune garçon.
05:11Il n'avait pas beaucoup joué, il n'avait pas beaucoup à manger.
05:15Il a vécu la guerre.
05:17Oui, le rationnement.
05:20Si leurs grands-parents ont été un peu impliqués,
05:23ils diront, ah bah oui, grand-père m'avait dit que...
05:26Mais si vous ne pouvez pas rattacher ces souvenirs à quelqu'un de charnel,
05:31c'est de l'histoire.
05:33C'est un livre, vous pouvez lire des choses sur la guerre de 14,
05:37mais c'est plus la même chose.
05:40Alors il va aller jusqu'à confier ses trésors aux jeunes élèves.
05:43Et puis les petits soldats.
05:45Qui les présentera lors d'une exposition dans sa classe.
05:49Faire revivre les années 40 pour Christelle Poincheval, la directrice,
05:53c'est une forme d'hommage.
05:56Les objets d'Henri-Jean Renaud sont ici traités avec la plus grande minutie
06:00et le plus grand respect.
06:02Ils sont les souvenirs d'un passé qui s'estompe peu à peu
06:05dans la mémoire des plus jeunes.
06:07Voilà, c'est son grand-frère qui joue avec.
06:09Et si vous regardez, c'est des soldats de la Première Guerre mondiale qu'on voit dedans.
06:12Tiens, tu peux prendre.
06:14Chapeau de bol.
06:15Ces objets ont été prêtés à l'école par les habitants de Sainte-Mère-Église.
06:18Retrouvés souvent sous une couche de poussière dans un grenier.
06:21Cette exposition leur donne une seconde vie.
06:24On mettait le café là et on mettait l'eau chaude dedans.
06:28Et après, ça faisait du café.
06:30Et après, ça faisait du café.
06:32Ici, les enfants sont très sensibles à tout ce qui est militaire.
06:35On va tous les ans visiter le camp réalisé avec le musée.
06:39Il y a plein de gens.
06:41Il y en a quand les jeeps américaines à la maison qui font des tours.
06:46C'est une culture américaine du débarquement.
06:51Mais le quotidien, ils ne connaissent pas beaucoup.
06:54Dans la ville, le souvenir de la guerre est présent partout.
06:59Jusque sur le toit de l'église,
07:01où un mannequin représente toujours l'arrivée des Américains sur le sol français.
07:07Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944,
07:10des dizaines de soldats sont parachutés sur Sainte-Mère-Église.
07:13En quelques heures, ils libèrent la ville.
07:16Elle sera la première en France.
07:22Mais comment continuer à raconter l'histoire
07:25quand il ne reste que si peu de témoins directs ?
07:28A Saint-Marcel, dans le Morbihan,
07:30cette clairière a abrité le plus important maquis de Bretagne.
07:33Ce jour-là, ce sont des passionnés d'histoire
07:36qui redonnent vie à ce haut lieu de la résistance.
07:40Ici, à Saint-Marcel, on a eu,
07:43au moment où le maquis était le plus important,
07:46entre 2 500 à 3 000 maquisards.
07:49On va compter beaucoup de jeunes qui ont réussi à se cacher
07:52pour ne pas partir en Allemagne pour le service du travail obligatoire.
07:56Face à eux, des élèves officiers de l'école militaire de Saint-Cyr,
08:00mais aussi des lycéens.
08:02Des jeunes du même âge que ces maquisards,
08:04parachutés depuis Londres pour stopper les troupes allemandes
08:07en route vers la Normandie.
08:09Ils se rendent compte qu'au final, ce n'est pas si loin tout ça.
08:13Il ne faut pas qu'on refasse les erreurs du passé.
08:17La mission de ces intervenants,
08:20c'est de transmettre la mémoire aux élèves officiers
08:23pour qu'ils deviennent à leur tour des passeurs d'histoire.
08:26Ces gens-là étaient prêts à mourir pour ces petits actes de sabotage.
08:31Marion prend déjà son rôle très à cœur.
08:34C'est de transmettre des choses qui m'ont parlé à moi,
08:37qui ont du sens pour moi.
08:39C'est peut-être plus simple pour eux aussi, pour elles,
08:41de se rendre compte de ce que ça a été vraiment la résistance.
08:44Les objets aident aussi à mieux comprendre le sacrifice de ces hommes.
08:49Il y a deux poches à soufflet dans le bas de la blouse,
08:52tout simplement pour y placer des grenades ou des fumigènes
08:54pour pouvoir se défendre directement en arrivant sur la zone.
08:58Comme ces 70 kg d'équipement que les maquisards portaient sur leur dos
09:02ou leurs armes que les jeunes sont invités à manipuler.
09:07Je pensais que c'était plus lourd que ça.
09:09On redécouvre un peu l'histoire et en même temps,
09:11on apprend des choses sur la guerre et ce qui a pu se passer.
09:15Et du coup, je trouve ça important d'être ici.
09:24Ce jour-là, le 8 mai,
09:26on célèbre également la victoire des Alliés sur l'Allemagne nazie.
09:30Car chaque commémoration est l'occasion de se souvenir de l'engagement de ces hommes.
09:36Un moyen aussi de conserver la mémoire bien vivante pour la postérité.
09:42Voilà, Victoire, pourquoi la transmission de cette mémoire
09:45et ces témoignages sont si importants aujourd'hui ?
09:47C'est important à plusieurs titres.
09:48Déjà pour les personnes elles-mêmes qui aujourd'hui sont très âgées,
09:51qui ont besoin de raconter ce qu'elles ont vécu.
09:53Certaines personnes n'ont jamais parlé.
09:54Aujourd'hui, c'est important.
09:55Elles se sont construites, après ces drames,
09:58comment elles se sont construites,
09:59qu'est-ce qu'il reste de ces drames dans la vie qu'elles ont construite.
10:02C'est très important.
10:03On parlait des femmes,
10:04la place des femmes pendant l'occupation, pendant la libération.
10:07Les femmes qui aujourd'hui racontent dans ce travail que j'évoquais,
10:11elles parlent de brimades qu'elles ont connues,
10:13de menaces, d'humiliation, de menaces de viol à ces moments-là,
10:16qui ont des échos sur leur vie après,
10:18une position de subordination auxquelles elles ont été confrontées ensuite dans leur vie.
10:22C'est vraiment important.
10:23Et puis, on le dit dans le sujet, pour nous tous, c'est important.
10:25L'étude que j'évoque qui se passe à Caen,
10:27les personnes sont enregistrées, avec leur consentement évidemment,
10:30et ces enregistrements vont être versés aux archives de la ville de Caen
10:33parce que leur histoire, à elles, va rejoindre la grande histoire.
10:36Donc, c'est important.
10:37Ils donnent quoi, justement, les premiers recueils de témoignages ?
10:39Et puis, comment vont ces derniers civils qui ont connu le débarquement ?
10:42Ils sont encore nombreux.
10:43Les récits sont apaisés, mais malgré tout,
10:45on retrouve encore des stigmas, des traumatismes,
10:47du trouble de stress traumatique qu'elles ont connus.
10:49Les personnes ont peur de certains bruits, il y a des cauchemars, etc.
10:52Vous savez, l'actualité aujourd'hui, elle montre aussi des villes en ruine,
10:56et ça fait écho à ce qu'elles ont connu,
10:58et du coup, ça réveille ce qu'ont pu vivre ces personnes-là.
11:01Donc, on se rend compte que c'est important qu'elles puissent raconter
11:04parce que ces traumatismes, ils restent vivaces pour elles.
11:08Huit décennies après le traumatisme, toujours bien présent dans les cellules, finalement.
11:12Merci beaucoup, Victoire Hanson, de The Conversation.

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