Suzanne Schmitt, experte en documents et écritures auprès de la cour d'appel de Paris, agréée par la cour de cassation, dévoile à Dominique Rizet les secrets de sa spécialité. L'expertise en écriture est davantage une technique qu'une science, mais pourtant, elle obéit à un savoir-faire de plus en plus pointu et rigoureux. Suzanne Schmitt revient sur quatre dossiers dans lesquels l'expertise en écriture a tenu un rôle capital : l'affaire Omar Raddad, les meurtres de Marc et Francine Véran-Raspini, l'affaire Alain Lamare et le meurtre du petit Grégory.
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00:00L'expertise en écriture, pour comparer, vérifier, prouver qu'une signature est litigieuse, qu'un chèque est falsifié,
00:07pour identifier les faussaires, les auteurs de lettres anonymes ou les corbodélateurs.
00:12L'expertise en écriture est davantage une technique qu'une science.
00:15Pourtant, elle obéit à un savoir-faire de plus en plus pointu et rigoureux.
00:20Suzanne Schmitt, vous êtes experte en écriture et en documents.
00:23C'est quoi la différence avec l'expert ou l'expertise en graphologie ?
00:27Alors, la graphologie n'est pas une spécialité expertale.
00:30La graphologie consiste à analyser et interpréter l'écriture d'une lettre
00:35afin de définir la personnalité, de dévoiler le caractère de celui qui l'a écrite.
00:39C'est-à-dire qu'il s'agit d'analyser et d'interpréter l'écriture d'une lettre
00:43afin de définir la personnalité, de dévoiler le caractère de celui qui l'a écrite.
00:47Alors que la comparaison d'écriture a pour objet d'identifier le rédacteur ou le signataire
00:53d'un document litigieux en utilisant la comparaison.
00:56Vous vous intéressez d'abord au document lui-même avant de vous intéresser à l'écriture.
01:02Ça se passe comme ça ?
01:03Absolument.
01:04C'est-à-dire que le document lui-même peut parler de lui-même.
01:07Alors, qu'est-ce qu'on fait ?
01:08On utilise d'abord un microscope pour faire un examen optique du papier.
01:13Cet examen va permettre notamment de vérifier si le document litigieux est original
01:17ou s'il s'agit d'une reproduction.
01:19Ça permet de vérifier s'il y a des anomalies sur le papier,
01:22tels des grattages, des gommages, des tracés sous-jacents.
01:26Parce qu'il arrive qu'on écrive au crayon à papier, on repasse à titre de modèle
01:31et on repasse sur le tracé avec de l'encre.
01:34Et ça permet aussi de différencier les caractères typographiques.
01:38Donc vous avez l'observation au microscope
01:40et puis vous avez aussi un appareil, vous avez une mallette spéciale.
01:43Qu'est-ce que c'est cet appareil ?
01:44Absolument.
01:45C'est un appareil miniaturisé qui permet notamment de faire des différences d'encre
01:50grâce à l'infrarouge.
01:51Expliquez-nous comment ça marche.
01:52Alors, on va faire un test tout simplement avec un testament.
01:55Qu'est-ce qui peut être falsifié sur un testament ?
01:57La somme.
01:58Règle générale, c'est la somme.
01:59Voilà.
02:00La somme ou la date.
02:01D'accord.
02:02Donc je vais vous faire une démonstration.
02:03Le testament de primabord, c'est exactement la même chose.
02:06Le testament de primabord, c'est exactement la même encre quand on le regarde.
02:09Il n'y a pas de différence d'encre nulle part.
02:11On va quand même vérifier s'il n'y a pas eu de falsification, de rajout, etc.
02:19Là, je suis sur les zéros du montant.
02:23J'avance, j'avance.
02:25Tous les zéros sont à peu près de la même encre.
02:28Ce que je vais faire maintenant, je vais changer de longueur d'onde au niveau de l'infrarouge.
02:32Et qu'est-ce qu'on voit ici ?
02:34On s'aperçoit tout simplement que deux chiffres et un point ont été rajoutés.
02:41Même si à l'œil nu, on a l'impression que c'est la même encre, en définitive, c'est un rajout qui a été fait.
02:47Donc là, on s'est intéressé aux documents, mais vous allez aussi vous pencher sur l'écriture.
02:51Et là, comment ça se passe ?
02:52Bien sûr, on va regarder l'écriture de très près en utilisant une méthodologie précise.
02:57C'est-à-dire que dans le premier cas, on va faire un examen intrinsèque du document litigieux
03:03sans tenir compte du dossier de comparaison.
03:06On va procéder à tous les examens optiques, spectraux, etc. dont on a parlé.
03:10Ensuite, on va uniquement traiter le dossier de comparaison.
03:15On rappelle que le dossier de comparaison, c'est l'original.
03:17Le dossier de comparaison est constitué de pièces manuscrites de comparaison,
03:24c'est-à-dire écrites par la personne suspectée.
03:27Ce dossier de comparaison, pour qu'il soit fiable,
03:30doit contenir à la fois des documents qui sont antérieurs, contemporains
03:34et postérieurs aux documents à examiner.
03:36À ce moment-là, on va procéder à l'étude comparative,
03:39à savoir comparaison entre l'écriture et la signature du document litigieux
03:44avec les documents de référence.
03:46Et si on vous demande de comparer une écriture avec celle d'une personne qui est décédée,
03:51comment faites-vous ?
03:52On va rechercher des documents dans son lieu de domicile.
03:56On va rassembler tout ce qu'on trouve.
03:58Et on va essayer aussi parallèlement de trouver des documents officiels
04:02dont on est sûr que c'est bien elle qui a porté les mentions manuscrites
04:06et les signatures sur les dits documents,
04:08qui eux vont servir de référence pour vérifier que tout ce qu'on a glané par ailleurs est bien de sa main.
04:13Est-ce que, par exemple, des mots croisés, ça peut suffire ?
04:16Ça peut être utile à condition que le document litigieux soit constitué de capital d'imprimerie.
04:23Et c'est ce qui s'est passé dans l'affaire Omar Radhad.
04:26Le 24 juin 1991, à Mougins, les gendarmes découvrent le corps inanimé de Guylaine Marshall
04:33au fond de la cave de sa villa.
04:35Sur une porte blanche, cette inscription « Omar m'a tué ».
04:39Tracée avec le sang de la victime, cette phrase, avec sa faute d'orthographe,
04:44entrera dans l'histoire et l'a menée Omar Radhad devant les assises.
04:48Le lendemain de la découverte du corps de Guylaine Marshall, Omar Radhad est arrêté.
04:53Le jardinier est mis en garde à vue, puis écroué.
04:56Le prévenu clame son innocence, mais la veille, il travaillait chez une voisine de la victime.
05:01Pour les gendarmes, c'est clair, Omar Radhad a largement eu le temps d'aller voir Guylaine Marshall pour la tuer.
05:08Et puis surtout, il y a les deux inscriptions.
05:11Une, parfaitement lisible, « Omar m'a tué ».
05:14Et une autre, restée inachevée, un peu plus loin.
05:18Mais ces messages ont-ils vraiment été écrits par la victime ?
05:22Cette femme grièvement blessée a-t-elle pu écrire elle-même, avec son propre sang, cette phrase à deux reprises ?
05:29« Les blessures qu'avait Madame Marshall étaient multiples, importantes, mais absolument pas mortelles, immédiatement mortelles.
05:36On sait par exemple, c'est prouvé, que même avec une plaie cardiaque,
05:40on peut faire ce qu'on appelle des actes de survie encore pendant quelques minutes.
05:43Donc dans le cas de Madame Marshall, si tant est que c'est bien elle qui écrit ce qui est inscrit sur la porte,
05:51sur quoi je ne suis pas compétent, mais en tout cas, physiquement, elle pouvait tout à fait le faire. »
05:56« Rien n'a été noté qui permettait d'affirmer que ce cerveau avait souffert suffisamment, si vous voulez,
06:03pour empêcher la personne d'être consciente, autrement dit lucide. »
06:07Que Madame Marshall ait pu écrire cette lettre ne signifie pas forcément qu'elle l'ait écrite.
06:12Le juge d'instruction demande une expertise en écriture, suivie d'une contre-expertise demandée par la Défense.
06:19Les experts travaillent chacun de leur côté, sans se consulter.
06:23Et ils arrivent à la même conclusion, Guylaine Marshall est bien l'auteur de ces inscriptions.
06:32« C'est une écriture facile à tracer sur un plan vertical.
06:37Or, que sait-on, on sait que Madame Marshall utilise très couramment cette écriture, notamment dans ses mots croisés.
06:42Donc c'est un spécimen d'écriture qu'elle maîtrise parfaitement. »
06:45« La lettre R est une lettre très très typée chez elle.
06:49Effectivement, on n'en retrouve pas toutes, ces R ne sont pas tracées de la même manière.
06:53Mais on en retrouve certains, je dirais en nombre suffisant pour établir une concordance fiable.
06:58Elle fait un R comme ça, elle part du pied et elle le trace en une fois là.
07:02Comme ça, elle monte et elle redescend.
07:05Et ça c'est un geste très très typique chez elle, qu'on retrouve dans ses écrits, que j'ai mis en évidence dans mon expertise.
07:11C'est un E qu'elle fait tout à fait ça.
07:14Elle le tracait d'abord en L, avec un sommet très rond, une base très ronde,
07:18et elle ajoutait les deux barrettes, supérieure et médiane.
07:21C'est pas une lettre bâton, comme on en voit dans des lettres anonymes,
07:24avec trois traits qui croisent une barre verticale.
07:27C'est une lettre tracée de manière spontanée.
07:34Et j'ai pu montrer qu'il y avait des similitudes tellement évidentes entre ces lettres
07:38que ça ne pouvait être que Madame Marshall qui avait écrit. »
07:42Est-elle digne d'une femme très cultivée ? Une habituée des mots croisés, justement ?
07:47« C'est vrai qu'on s'est beaucoup attaché à cette faute d'orthographe.
07:50Je dirais pas qu'elle était coutumière du fait, mais on a retrouvé des fautes dans ses écrits.
07:55Donc je pense que quand on se voit mourir, on n'est peut-être pas tellement attaché à l'orthographe. »
08:00Mais Guylaine Marshall aurait-elle pu écrire ses messages sous la menace et la contrainte ?
08:06« Quand vous guidez la main de quelqu'un, quand vous prenez sa main et que vous l'obligez à écrire,
08:11il y a une opposition de force qui se produit.
08:14Parce que c'est souvent l'empreinte du scripteur qui tient la main
08:19qui va déterminer le geste graphique et non pas celui qui écrit.
08:23Et là, on n'a pas senti d'opposition de force.
08:26On a vu une écriture normalement dégradée compte tenu de l'état de Madame Marshall. »
08:31L'expertise est donc accablante pour Omar Radad.
08:34Si Guylaine Marshall a bien écrit ses mots avec son propre sang, c'est qu'elle a dénoncé son agresseur.
08:42Printemps 1993, le juge d'instruction clôt l'enquête et renvoie Omar Radad devant les assises.
08:48Son procès s'ouvre le 24 janvier 1994 à Nice.
08:53Les journalistes sont nombreux et penchent pour l'innocence du jardinier.
08:59Et au cinquième jour du procès, on en vient enfin à l'essentiel.
09:05« L'audience reprend. Omar Radad rentre.
09:09Et à ce moment-là, le président, assez impérial, demande à des huissiers, dit que l'on montre les portes.
09:17Et à ce moment-là, on enlève le plastique et on voit la fameuse inscription « Omar m'a tué ».
09:34Et quand on voit ces portes, je vous assure que ça c'est un truc qu'on n'oublie jamais.
09:40Et surtout, parce qu'on voit l'agonie, on voit l'agonie de la victime.
09:49Surtout sur la deuxième porte, c'est-à-dire la porte sur laquelle est inscrit « Omar m'a tué »,
09:55qui s'arrête sur le « tu » parce que la phrase ne peut pas être terminée.
09:59Et à ce moment-là, on voit à la fois d'abord la phrase décline vers le sol, le verbe ne se termine pas.
10:10On voit des traces d'appui de main de quelqu'un qui s'appuie, qui s'accroche, qui essaye de s'accrocher à cette porte pour finir sa phrase,
10:17mais qui n'y arrive pas et qui tombe et qui tombe et qui tombe.
10:20Et on voit des dégoulinades comme ça, des traces de sang, de mains ensanglantées qui glissent sur la porte.
10:28Et ça s'achève en bas. On voit la personne qui essaye de se rattraper parce qu'il y a des doigts comme ça et puis hop !
10:34Et là, on se dit, si c'est quelqu'un qui a simulé totalement ces inscriptions, le mec, il est vraiment fort.
10:44Parce que pour arriver à faire ça...
10:48On voit la tête d'Omar Haddad qui blémit. Il n'avait jamais vu, j'imagine, ces inscriptions auparavant.
10:55Et à ce moment-là, le président, sentant Omar dans un moment de faiblesse, qui découvre l'inscription qui en tout cas le désigne,
11:02lui dit, Omar, qu'est-ce que ça vous inspire ? Et Omar, toujours via son interprète, répond, je ne vois pas en quoi ça me concerne.
11:12Le président lui dit, asseyez-vous, on va vous l'expliquer tout à l'heure.
11:15Et j'ai eu le sentiment que là, le procès avait basculé et qu'Omar Haddad était, pardonnez-moi l'expression, dans la nasse.
11:24Les experts en écriture viennent à la barre et ils confirment. Pour eux, ces écrits sont bien l'oeuvre de Guylaine Marshall.
11:31Mais ils avouent devant la cour que c'est cet affaiblissement physiologique de la main de la victime d'une porte à l'autre qui a emporté leur conviction.
11:39L'analyse de l'écriture en elle-même ne les aurait convaincus qu'aux deux tiers. Il reste donc un doute.
11:45Si je ne peux me prononcer que sur les lettres sans tenir compte justement du contexte général, c'est évident, je ne peux pas être certain.
11:56C'est pour ça que j'ai dit deux tiers, un tiers.
11:58Les expertises en écriture ont pourtant pesé lourd et le 2 février, Omar Haddad est condamné à 18 ans de réclusion criminelle.
12:06Plus tard, un comité de soutien a demandé la révision du procès, une révision qui n'a toujours pas eu lieu.
12:13Une nouvelle expertise en écriture a bien été demandée par la cour de cassation, mais les experts n'ont pas pu se prononcer.
12:26Alors dans l'affaire Omar Haddad, qu'est-ce qui a rendu difficile l'expertise de l'écriture ?
12:32Alors les écrits sur les deux portes étaient à la verticale.
12:36C'est-à-dire le scripteur avait écrit comme ça ?
12:38C'était sur un mur, sur la verticale.
12:40Ce n'est pas le document posé à plat ?
12:42Ce n'est pas le document posé à plat.
12:43Qu'est-ce que ça change ?
12:44Ça change beaucoup de choses. On n'écrit pas de la même manière sur un mur à la verticale que sur une table et à plat.
12:50Donc la difficulté aussi de cette affaire, c'est que la personne, la victime étant décédée, on ne pouvait plus lui demander d'écrire à la verticale.
12:59Et c'est une écriture bâton ?
13:01C'est une écriture en capitale d'imprimerie qui est d'autant plus difficile justement à expertiser,
13:06puisqu'on n'a pas de modalité de liaison qui, en règle générale, contiennent des automatismes.
13:11Alors au procès, dans l'affaire Omar Haddad, les experts ont dit qu'ils étaient sûrs au deux tiers. Qu'est-ce que ça veut dire ?
13:18Ça montre tout simplement qu'ils avaient un doute.
13:20Et ce doute, il y a des affaires où on ne peut pas se prononcer, où on ne peut pas être affirmatif à 100%.
13:26Susan Schmidt, on a ici un document que vous nous avez apporté.
13:29C'est une affaire judiciaire sur laquelle vous avez travaillé directement.
13:32On vous a demandé de comparer des écritures. Expliquez-nous comment vous avez fait.
13:37Donc nous avons ici la lettre anonyme.
13:40Ici nous avons une des pièces de comparaison écrite sous dictée.
13:44Et alors qu'est-ce que vous constatez ?
13:45Alors pour comparer ces deux écritures-là, nous avons quelque chose de très particulier.
13:51Nous avons cette ondulation sur semaine qu'on retrouve à l'identique dans le document de comparaison.
13:58Que vous avez tracée en jaune à chaque fois ?
14:00Voilà, qui est surlignée. La ligne de crête et la ligne de base sont surlignées de jaune de part et d'autre.
14:07Quoi encore ?
14:08Ensuite, nous avons sur le mot prochaine, nous avons deux fois prochaine dans la lettre litigieuse.
14:14Nous l'avons une fois dans la lettre de comparaison.
14:17On voit très bien que les proportions de lettres sont tout à fait similaires.
14:21C'est-à-dire qu'on commence avec des lettres qui sont grandes et qui se rapetissent au fur et à mesure pour s'inscrire dans un rail.
14:28Et nous avons aussi l'attaque du D mais qui n'est pas significative par elle-même.
14:33Je dirais qu'à la limite, ces deux mots, semaine et prochaine, sont beaucoup plus parlants que cet indice morphologique sur la lettre D.
14:43Qu'est-ce que vous avez conclu ? C'est la même personne qui a écrit ces deux documents ?
14:46Effectivement, c'est la même personne. Mais il faut quand même savoir que je n'avais pas que ce document de comparaison.
14:52Il y en avait d'autres. On ne se prononce pas sur une seule pièce.
14:55On peut aussi falsifier son écriture. Comment est-ce qu'on s'y prend ?
14:58On va tout simplement aller à l'encontre du naturel.
15:01C'est-à-dire que celui qui a une écriture grande va la rapetisser ou inversement.
15:06Celui qui a une écriture inclinée, il va la renverser.
15:09Ce sont deux indices déjà. Il va modifier la forme également de l'écrit.
15:13En règle générale, quand on déguise son écriture, on revient à une écriture relativement scolaire.
15:18C'est quelque chose, je dirais, d'instinctif.
15:20Alors qu'est-ce qu'on falsifie le plus souvent dans les affaires judiciaires ?
15:24Les testaments, les assurances vie, les crédits et les chèques.
15:29Dans les affaires criminelles crapuleuses, il est souvent question de faux en écriture.
15:34Un chèque falsifié, c'est ce qu'a perdu Philippe Dubois.
15:38L'homme et ses deux complices ont assassiné une mère et son fils pour leur voler leurs magots, qu'ils n'ont pas trouvés.
15:45Alors, ils ont encaissé un chèque.
15:49Mars 2002. Dans la banlieue de Nice, une femme de 71 ans, Francine Véran Raspini, et son fils Marc, ont disparu.
15:58Ce sont leurs voisins qui ont donné l'alerte.
16:00La mère et le fils vivaient en vase clos, isolés, pas d'amis, pas de famille.
16:05Pourtant, ils sont à la tête d'une énorme fortune.
16:08Un beau parc immobilier dans le centre-ville de Nice, un immense terrain sur la colline de Guéraud et une grande bâtisse bourgeoise où ils vivent.
16:19« Madame Véran Raspini, qui est issue d'une vieille famille niçoise, gère les biens immobiliers de sa famille, un petit peu à l'ancienne.
16:29Elle est favorable au paiement en liquide de ses loyers. Elle a eu des problèmes avec le fisc.
16:36Donc, elle a décidé, visiblement, de ne plus verser son argent sur des comptes.
16:41Elle vit un petit peu dans un système qui est assez autarcie, qui est fermé. »
16:47Toujours aucun signe, ni de la mère, ni du fils.
16:51Alors, les policiers perquisitionnent leur domicile.
16:54Mais ils n'y trouvent aucune trace de lutte.
16:57Les policiers ont bien entendu parler d'un Philippe Dubois, un homme violent,
17:01qui loue au Raspini un cabanon sur leur terrain et avec lequel Francine Véran Raspini avait eu un différent.
17:08Mais rien de concret.
17:09Alors, les enquêteurs épluchent et surveillent les comptes en banque des Véran Raspini.
17:14Depuis leur disparition, aucun mouvement, aucun retrait.
17:18Aucun jusqu'au 5 avril 2002, soit trois semaines plus tard.
17:23« Nous allons recevoir un avis dès l'établissement bancaire, la BNP, de madame Véran Raspini,
17:31nous avisant de l'encaissement de deux chèques d'un montant important. »
17:35Le premier est de 17 500 euros.
17:38L'autre, de 11 000.
17:40Curieux, ces gros chèques.
17:42Les signatures ont-elles été imitées ?
17:45Voici le début d'une piste.
17:47Deux chèques litigieux.
17:48L'enquête commence enfin.
17:54« Nous allons travailler sur les personnes, les bénéficiaires des deux chèques, Patrick et Laurent Gauvin. »
18:00Patrick et Laurent Gauvin, un père et son fils.
18:06« Ce sont des gens qui, sans être à la marge de la société, ils sont en bordure.
18:10Ils travaillent et puis ils ne travaillent pas.
18:12Ils sont un petit peu dans des situations, une certaine précarisation. »
18:16« Ce sont deux personnes qui sont connues de la police, pas pour des faits très graves.
18:20Mais bon, ils ne comprennent pas pourquoi ils créditent leur compte de 17 000 et 11 000 euros.
18:25Et ensuite, il y a des débits immédiats en trois retraits.
18:29Ils retirent chacun la quasi-totalité du versement. »
18:33Les policiers découvrent alors que Philippe Dubois,
18:36le locataire du cabanon avec lequel Mme Raspigny a eu des problèmes,
18:39et les deux Gauvins se connaissent.
18:44« Nous allons les placer sous écoute téléphonique
18:47et on va s'apercevoir très rapidement qu'ils sont en relation. »
18:50« Les Gauvins, Patrick et Laurent et Philippe Dubois, sont en relation constante.
18:55Ils ont des relations d'amitié, ils ont des relations habituelles. »
18:59« On constatera aussi qu'ils ont, pour les Gauvins, un peu plus d'argent, ce qui n'était pas le cas.
19:04Laurent, un Gauvin, va s'acheter une monde, va s'acheter de gourmettes.
19:07Il va faire des cadeaux à sa copine.
19:09Alors, auparavant, on sait qu'il n'avait pas du tout d'argent. »
19:14Qui a rempli les chèques ?
19:16Pour le savoir, les policiers doivent arrêter les trois hommes.
19:19Mais ils n'ont pas assez de preuves encore.
19:22Alors, ils tentent un coup.
19:24Médiatiser l'affaire pour les affoler.
19:26Et ça marche.
19:27Tous se téléphonent.
19:29Ils parlent d'Héraspigny, des chèques.
19:31Les conversations téléphoniques sont accablantes.
19:34Le 16 avril 2002, plus d'un mois après la disparition de la mère et du fils,
19:39les policiers arrêtent les trois hommes.
19:42« Bon, manifestement, ils se sont entendus avant quand même l'interpellation,
19:46puisque ça se passe plus d'un mois après la commission des faits.
19:49Donc, ils ont mis au point une stratégie de ce qu'ils allaient dire à la police.
19:52Ils avaient décidé de dire que c'était Marc Héraspigny qui leur avait confié ces chèques.
19:57Pour une raison qu'on ne comprend pas bien,
19:59mais il ne pouvait pas lui-même mettre les chèques sur un compte bancaire
20:04et tirer le liquide.
20:05Donc, il aurait demandé ce service au Gauvin. »
20:08Mais finalement, après plusieurs heures de garde à vue
20:11et une nuit de réflexion, les Gauvins flanchent.
20:17« Ils diront justement que Philippe Dubois leur fait très peur,
20:20qu'il a beaucoup de charisme, qu'il est violent,
20:23que Philippe Dubois leur a proposé de faire un mauvais coup chez Héraspigny,
20:27mais que, bien sûr, eux n'ont pas voulu le faire,
20:29qu'ils n'ont bénéficié que des chèques,
20:31puisque Dubois leur avait demandé d'encaisser les chèques pour lui.
20:34Voilà. Mais eux ne seront jamais montés dans cette propriété.
20:37Ils rejetteront tout sur Philippe Dubois. »
20:39Mais Philippe Dubois, lui, ne se met pas à table et nie toute implication.
20:43Il explique qu'il ne connaissait même pas l'existence de ces chèques.
20:48Mais confronté aux écoutes, il est obligé de faire marche arrière.
20:52Alors, oui, il était bien au courant pour les chèques,
20:55mais pour lui, ces chèques venaient d'un cambriolage.
20:58« Ils chargent les Gauvins en disant
21:00« Ouais, mais les Gauvins ont toujours eu, c'était récurrent, des problèmes d'argent.
21:03Donc, ce n'est pas étonnant que ce soit eux. Je pense que c'est eux. »
21:06Le juge d'instruction veut absolument connaître
21:09l'auteur de ces deux chèques encaissés par les Gauvins.
21:12Il fait appel à un expert en écriture.
21:16« La première des opérations, c'est évidemment de savoir
21:19si M. ou Mme Raspini pouvaient être ou ne pas être les auteurs des écrits.
21:25Ça, c'est la première des choses.
21:27Donc, pour l'écriture, il n'y avait aucune difficulté.
21:30Il n'y avait pas de... C'était évidemment pas eux qui avaient rédigé. »
21:33Alors, qui a imité l'écriture d'Everand Raspini ?
21:37L'expert compare l'écriture de chacun des trois hommes avec celle des deux chèques.
21:42« Prenons par exemple un usage particulier, qui est la construction des dates.
21:47On voit qu'on a une majuscule de petite taille.
21:50Et surtout, la construction du millésime, qui est tout à fait remarquable,
21:55avec la première et le dernier chiffre de très grande taille,
22:00avec ces petits zéros étriqués, on a un geste parfaitement identique.
22:07C'est un geste qui est évidemment naturel,
22:09et qui est attribuable, puisqu'on le retrouve à l'identique dans l'écriture de Philippe Dubois. »
22:16Alors, confronté aux conclusions de l'expertise, Philippe Dubois est coincé.
22:21Il reconnaît avoir rédigé les chèques dérobés au Verand Raspini.
22:25Il ne peut plus nier son implication.
22:33Mais comment faites-vous pour identifier l'auteur créateur de l'écriture ?
22:38Comment voyez-vous l'auteur crapuleux d'un chèque, par exemple ?
22:41Sur un chèque, il y a très peu d'informations. Il y a des chiffres, il y a trois mots, il y a une signature.
22:45« Je vais vous prouver le contraire. Faites-moi donc un chèque, s'il vous plaît.
22:50Voilà. »
22:51C'est un gros chèque.
22:52« Ah, c'est un gros chèque. Merci, merci, monsieur Rizet.
22:55Alors, voilà, sur ce chèque, nous avons notamment le symbole euro qui est écrit en entier.
23:02Alors, vous avez certaines personnes qui ne font que le symbole lui-même.
23:05Vous, vous l'avez écrit en toutes lettres.
23:07Vous avez, par exemple, au niveau du 700 000, je dévoile le montant du chèque.
23:13Vous n'avez pas rajouté de virgule, vous n'avez pas rajouté de décimale.
23:16C'est un indice aussi.
23:18Vous n'avez pas mis de point entre 700 et les trois zéros.
23:22La date, vous avez mis le mois en écriture cursive.
23:26Par exemple, au niveau de la date, on peut avoir des dates différentes.
23:300-3, 0-8, 12, séparés par des chiffres, des barres obliques, des points, des tirets, etc., etc. »
23:37« Ça, ce sont mes automatismes.
23:38On va dire que là, j'ai falsifié le chèque, par exemple.
23:40Je sais que je vous fais un faux chèque de 700 000 euros.
23:43D'habitude, j'écris 0-3, 0-8, 2012.
23:47Et là, volontairement, supposons que j'ai fait ça, j'écris 0-3 août 2012.
23:53Je mets un point entre 700 et 1000.
23:55Là, je ne l'ai pas fait.
23:56Et j'écris euro avec le sigle.
23:58Là, j'ai fait différemment.
23:59Comment allez-vous me démasquer ? »
24:00« Alors, tout simplement, je vais vous donner une trentaine de chèques à remplir,
24:04le plus rapidement possible.
24:06Et vous ne pourrez pas maintenir votre contrôle de façon permanente
24:10pendant toute la durée de cette réalisation. »
24:13« C'est-à-dire que mes automatismes vont revenir ? »
24:15« À un moment ou à un autre.
24:16Il y en a l'un ou l'autre qui va revenir.
24:18De la même manière, la position de la signature.
24:21On a chacun, lorsqu'on signe un chèque, des habitudes.
24:24On positionne la signature à un endroit donné, près de la date.
24:27En décalé sur la gauche, en décalé sur la droite, vers le bas, etc.
24:31Ça, c'est un automatisme. »
24:33« Est-ce que deux personnes ne peuvent pas avoir simplement la même écriture ?
24:36Deux personnes d'une même famille ? »
24:37« Absolument.
24:38Ça se produit assez fréquemment que deux personnes d'une même famille
24:41aient une écriture très ressemblante. »
24:44« Donc, vous risquez de vous tromper ? »
24:45« Alors, on recherche les différences.
24:47Tout simplement.
24:48Parce que qu'est-ce qui permet de différencier les écritures ?
24:50Ce ne sont pas les similitudes.
24:52À partir du moment où les écritures se ressemblent,
24:54on va chercher les différences. »
24:56« Là, c'est le cas de figure idéale pour vous.
24:58Vous avez un élément de comparaison, une écriture de comparaison.
25:02Mais si on vous donne un document sans aucun élément de comparaison,
25:06on vous donne la lettre d'un corbeau,
25:08on vous donne une lettre anonyme,
25:10et vous n'avez que ça,
25:12comment allez-vous réussir à la faire parler ? »
25:14« Alors, la lettre anonyme, il me faut des documents de comparaison.
25:17Obligatoirement. »
25:18« Donc, vous ne saurez rien.
25:19À partir d'un document anonyme, vous ne pouvez rien trouver.
25:22Est-ce que vous pouvez dire des choses sur la personnalité de celui qui l'a écrite ? »
25:26« Ce qu'on peut trouver, par exemple,
25:28ce sont des modes d'expression,
25:30ce sont des syntaxes particulières,
25:36une construction de phrases spécifiques.
25:40Un exemple qui me vient à l'esprit,
25:42notamment d'un texte qui comportait certains termes
25:45qu'on utilise classiquement en informatique.
25:48Puis effectivement, il s'est révélé que le corbeau en question était informaticien. »
25:53Malheureusement, les juges d'instruction n'ont pas toujours pensé
25:56à recourir à l'expertise en écriture,
25:58alors qu'elle aurait pu accélérer l'enquête et sauver des vies.
26:01C'est le cas dans l'affaire Lamarre,
26:03qui a défrayé la chronique en 1978.
26:09Tout a commencé le 31 mai.
26:11Ce jour-là, les gendarmes ont fait une bien étrange découverte
26:14dans la forêt de Chantilly.
26:17« Une équipe du PSIG découvre dans un chemin de terre
26:21au carrefour des Ripailles une 504.
26:24Un véhicule abandonné, le pare-brise est cassé,
26:28la lunette arrière est cassée, brisée apparemment en coup de feu. »
26:32Croyant à une affaire de banditisme,
26:34les gendarmes alertent la police judiciaire.
26:37« On découvre dans ce véhicule des cordages
26:40comme si quelqu'un avait été attaché sur le sieste passager.
26:44Des mégots de gitanes blanches,
26:47une seringue hypodermique ayant contenu un produit,
26:51on ne sait pas quoi, une poudre blanche. »
26:53Sur le siège passager, un indice inquiétant,
26:56un mouchoir taché de sang.
26:59« Et puis des douilles, des douilles de 9 mm anciennes,
27:02également des douilles de carabines US. »
27:05Une mise en scène ? Les policiers sont perplexes.
27:10Deux mois plus tard, à Pont-Sainte-Maxence,
27:13toujours dans l'Oise, une jeune fille de 17 ans
27:16est victime d'une curieuse agression à minuit,
27:19alors qu'elle sortait d'une séance de cinéma.
27:22« Elle rentre chez elle et à ce moment-là,
27:25un individu qui circule à bord d'un véhicule Grenat
27:28tire à plusieurs reprises sur elle. »
27:31La jeune fille s'en sort avec une balle dans le mollet.
27:34Ses jours ne sont pas en danger.
27:37Puis, dix jours plus tard, un gardien de la paix
27:40contrôle une voiture en stationnement irrégulier.
27:46« Il ouvre la portière du véhicule et s'en suit immédiatement
27:50une détonation suivie d'un incendie. »
27:53Une voiture piégée.
27:55Le gardien de la paix est brûlé au visage et aux mains.
27:58La Renault 12 avait été volée.
28:03C'est à ce moment-là que la police reçoit une lettre anonyme.
28:07« Monsieur le commissaire Thierfin, commissariat de Creil.
28:10Monsieur, cette lettre est écrite
28:13afin de vous fournir quelques précisions
28:16concernant la voiture Renault 12, rouge,
28:19immatriculée 1303 QG02. »
28:22Et l'auteur mystérieux revendique tout.
28:25La voiture dans la forêt de Chantilly,
28:28l'agression de la jeune fille et la voiture piégée.
28:31Plus inquiétant, il dit qu'il va recommencer.
28:36« Cette lettre n'est pas une confession qui exigerait de nombreuses pages.
28:40C'est seulement un avertissement.
28:42Transmettez-le.
28:44Signé, point d'interrogation. »
28:46« Bon, ça veut dire que c'est le début.
28:49Ça va continuer. Vous allez voir ce que vous allez voir.
28:52Ce n'est qu'un début. »
28:54Ce n'est pas un canular.
28:56Les empreintes relevées sur la R12 piégée
28:59et celles retrouvées sur la lettre anonyme sont identiques.
29:02Et à bien s'y pencher,
29:04cette lettre donne des indications particulières.
29:07Un gendarme commence à tiquer.
29:10« Moi, je lis la lettre.
29:12Et curieusement, je me suis dit, mais ce n'est pas possible.
29:15Il y avait des expressions dans cette lettre qui...
29:18Je me suis dit, mais c'est un gendarme qui a écrit ça.
29:21Le véhicule Renault 12, de couleur rouge, immatriculé,
29:24ça, c'est chez nous, ça.
29:26Il y a des expressions qui sont typiquement gendarmes. »
29:29Alors là...
29:32« On a joint tout le monde, tous ceux que j'avais autour.
29:35Ils m'ont dit que ce n'était pas possible.
29:37Je me suis dit, mais attendez, un gendarme, c'est un homme comme un autre.
29:40Je ne dis pas qu'il est en activité,
29:42mais il y a des gendarmes qui tombent malades, qui sont soignés.
29:45Puis les hommes, c'est les hommes. »
29:47Mais lorsque Pinault confie ses doutes à ses homologues officiers,
29:50il est vertement remis à sa place.
29:52« À quoi le sort ? Il est scandalisé.
29:54C'est honteux. Honteux de penser que ça puisse être un gendarme.
29:57C'est honteux.
29:59C'est honteux, en fait, au personnel de la Gendarmerie nationale. »
30:02Le capitaine Pinault vérifie tout de même les emplois du temps de ses hommes.
30:06Sans succès. Alors, il abandonne.
30:09Ce qu'il ne sait pas, c'est que certains policiers, eux aussi, ont un doute.
30:14Mais comme chez les gendarmes, la pilule a du mal à passer.
30:19« Je crois qu'il est difficile pour un policier,
30:23pour un gendarme, pour un militaire,
30:29de penser un seul instant qu'il puisse s'agir, dès l'heure, d'un des nôtres. »
30:35Le commissaire de Creil n'hésite pas à prendre une initiative personnelle,
30:39la même que le capitaine Pinault.
30:42« J'ai, au feeling, procédé à quelques vérifications
30:46sur l'emploi du temps de certains fonctionnaires,
30:49sur des critères tout à fait vaseux, qui ne prouvaient rien.
30:55Bon, critères sur vie privée bizarre, vie privée dissolue,
30:59comportement caractériel, nerveux, nervosité, etc.
31:04Bon, je n'y ai rien trouvé, j'aurais pu me tromper. »
31:07Du côté de la police, comme de la gendarmerie, les vérifications ne donnent rien.
31:12Quelques mois passent, sans incident.
31:15Puis, le 1er décembre 1978, derrière l'hippodrome de Chantilly,
31:20de nouveau une alerte, plus grave.
31:22Des personnes ont aperçu une jeune femme allongée sur le bord de la route.
31:26« Je pense qu'elle a eu un malaise au début, se précipite.
31:29En fait, cette jeune femme a reçu plusieurs balles dans le corps.
31:33Elle est hospitalisée d'urgence, elle s'appelle Yolande,
31:37et malheureusement, elle décède le soir à la clinique déchoquée. »
31:42Cette fois, le criminel a tué une jeune fille.
31:45Elle avait 19 ans, et il ne s'arrête pas là.
31:48Fin décembre, une autre jeune fille est grièvement blessée par balles sur le bord de la route.
31:53Mais elle est consciente, et donne une description de son agresseur.
31:58« Un homme jeune, qui parlait avec aisance.
32:03Fort sympathique, beau garçon, très bien habillé,
32:07avec les mains extrêmement soignées, les ongles soignés.
32:10Il lui a parlé de la pluie de Bretagne, puis à un moment, il lui a dit « je vais vous faire mal »,
32:15elle a tourné la tête, elle a vu qu'il y avait une arme dirigée de ce côté, il a tiré trois fois. »
32:20Immédiatement, les gendarmes déclenchent une chasse à l'homme.
32:23Mais le fuyard échappe à tous les barrages, un échec incompréhensible,
32:27qui donne du corps à la piste d'un assassin familier des forces de l'ordre.
32:33Le style de la lettre anonyme ? Son écriture ? Le savoir-faire du fugitif ?
32:38Et si c'était vrai ? Et si le tueur de Loise était un gendarme ou un policier ?
32:43L'ambiance devient lourde.
32:46Nos regards se tournaient de plus en plus, si vous voulez, vers la gendarmerie.
32:57Et la gendarmerie portait peut-être de plus en plus ses regards un peu plus vers la police.
33:05Je veux dire beaucoup plus clairement qu'on commençait à se suspecter un peu réciproquement et dangereusement.
33:15Mais un gendarme commence à avoir quelques doutes sur un de ses collègues, un certain Alain Lamarre.
33:21Il en a presque honte, il veut en avoir le cœur net.
33:25Alors en cachette, il compare l'écriture des procès-verbaux rédigés par le gendarme Lamarre avec celle de la lettre anonyme.
33:36J'ai observé des similitudes d'écriture flagrantes, flagrantes !
33:44Vous savez, par deux fois, avec les loupes, même la loupe de ma grand-mère, je me souviens qu'elle était rose.
33:49Je me disais, c'est pas possible.
33:53Ah oui, qu'il a hésité. Il était deux nuits sans dormir.
34:01Et à un moment, il s'est lancé.
34:04Après, il a dit, bah écoute, y'a pas, tant pis.
34:10J'y vais, on verra bien ce qui se passera après.
34:14Le gendarme se résout à consulter son supérieur, le capitaine Pinault.
34:18Convaincu, l'officier en parle au supérieur de Lamarre.
34:24Et on discute, j'ai dit, mais il est comment Lamarre ? Il me dit, c'est mon meilleur.
34:28C'est mon meilleur, c'est le seul qui s'intéresse à l'affaire.
34:32Tous les jours, il me demande, alors on l'a arrêté, ce salaud, qu'on lui coupe la tête ?
34:37Et je lui pose la question, vous avez vérifié en peu de temps ? Il me dit non.
34:41Comment non ? Non, le commandant Colson a donné l'ordre de pas le faire.
34:46Bon, j'en ai marre du coup. On les compte ?
34:49On commence à prendre depuis le début des affaires, et on s'aperçoit très vite qu'à chaque fois qu'il y a quelque chose,
34:56il est hors service, si vous voulez.
34:59Et là, je veux dire que très vite, on a les boyaux qui se nouent, comme on dit, vous savez.
35:04Vous avez une frousse qui vous vient, quelque chose qui vous sert les tripes.
35:10Lamarre est bien le tueur de l'Oise.
35:13L'intuition de quelques policiers et gendarmes était bien la bonne.
35:17La lettre anonyme en disait long et n'a pas été exploitée.
35:21Une telle accusation était sans doute trop lourde à porter.
35:24Dans un dossier comme l'affaire Lamarre, au niveau uniquement de la sémantique, de la tournure des phrases,
35:31est-ce que l'expertise en écriture aurait pu apporter quelque chose ?
35:35Effectivement, je pense que rien que l'analyse du texte, l'analyse de la tournure des phrases,
35:41l'analyse des expressions, parce qu'il existe des expressions corporatistes, des expressions professionnelles,
35:47l'informaticien ne va pas utiliser les mêmes expressions que, par exemple, un gendarme.
35:52Donc rien que l'analyse des textes elle-même aurait peut-être pu mettre sur la voie.
35:56Quels sont les pièges dans lesquels l'expert doit veiller à ne jamais tomber ?
36:01Alors, le premier piège, ce sont les similitudes.
36:04Qu'est-ce que c'est ?
36:05Rien de tel. Les similitudes, ce sont des ressemblances entre deux écritures.
36:08Or, les ressemblances entre deux écritures, il faut toujours s'en méfier.
36:12On peut, dans certains cas, retrouver des différences.
36:15Ces différences vont être des particularités propres à chacun.
36:18Donc, tant qu'il existe une différence, on ne peut pas s'appuyer sur les ressemblances pour accuser quelqu'un.
36:24Et est-ce qu'on garde toute sa vie la même écriture ou est-ce qu'on change ?
36:27L'écriture peut évoluer au cours de la vie.
36:29Elle peut notamment changer du jour au lendemain suite à un traumatisme psychologique.
36:34Elle peut également, bien sûr, changer.
36:37Elle peut changer du jour au lendemain suite à un traumatisme psychologique.
36:41Elle peut également être modifiée par des traitements médicaux.
36:44Elle peut rajeunir sous le coup de traitements médicaux.
36:47Et elle peut se dégrader, bien sûr, avec l'âge.
36:49Est-ce que vous, vous en tenez compte dans vos expertises ?
36:52Il est important d'avoir un dossier de comparaison au moins sur une dizaine d'années
36:58pour vérifier si l'écriture est restée constante ou si elle a évolué
37:02ou si, au contraire, elle s'est dégradée.
37:04Donc, on peut changer d'écriture au cours de sa vie.
37:07Mais est-ce qu'on peut aussi changer d'écriture en fonction de son humeur ?
37:10Absolument. L'écriture n'est qu'une émanation de la personnalité.
37:14On peut changer d'écriture, par exemple, lorsque je fais écrire certains détenus.
37:19Il arrive un phénomène d'usure. À un moment donné, il change d'écriture.
37:24Ça, ça vous est arrivé ? Vous l'avez constaté déjà ?
37:26Absolument.
37:27Qu'est-ce qui s'est passé ?
37:28C'était tout simplement un exercice d'écriture effectué en prison.
37:32Ce détenu avait deux écritures totalement différentes
37:37qui m'avaient été fournies par le juge d'instruction.
37:40Il était impossible de faire le lien entre ces deux écritures.
37:44Donc, il a fallu le faire écrire.
37:46Je l'ai fait écrire, écrire, écrire, jusqu'à l'usure.
37:49Et à un certain moment, il s'est carrément mis en colère.
37:52Et après son coup de colère, son écriture a changé au sein d'une même phrase.
37:59C'est l'élément qui m'a permis de raccrocher la première écriture à la seconde.
38:04Si on a une lettre anonyme, une lettre de Corbeau,
38:07et qu'on veut identifier son scripteur, comment est-ce qu'on s'y prend ?
38:11Il faut rechercher des éléments de comparaison, impérativement.
38:15En règle générale, c'est le juge d'instruction qui s'en occupe.
38:18L'important dans les lettres de Corbeau, c'est de faire écrire déjà l'environnement.
38:23La plupart du temps, on sait que l'origine des lettres de Corbeau est relativement proche.
38:29Une dictée à tous les membres de la famille.
38:32C'est l'histoire de l'affaire Villemin.
38:34Le 16 octobre 1984, un petit garçon de 4 ans, Grégory Villemin,
38:39est retrouvé mort, ligoté, jeté dans la Vologne.
38:42Le lendemain, les parents de l'enfant, Christine et Jean-Marie Villemin,
38:46reçoivent une lettre anonyme qui revendique le crime.
38:49Le Corbeau a déjà écrit à trois reprises aux Villemins.
38:52L'année précédente, en 1983, un mot glissait dans les volets.
38:56« Je vous ferai votre peau » à la famille Villemin.
39:02Puis, deux lettres, une en majuscule, une autre en cursive.
39:06On y désigne le chef. Le chef, c'est Jean-Marie Villemin.
39:20Qu'est-ce qu'on retrouve dans cette lettre-là ?
39:22Quels sont les mots, les thèmes qui réapparaissent tout le temps ?
39:25C'est vengeance, haine, argent et le chef.
39:32Grégory est sacrifié à la haine, au désir de vengeance
39:37que quelqu'un éprouve à l'encontre de Jean-Marie.
39:40Ça, c'est quelque chose qui est clair.
39:42Le Corbeau a mis ses menaces à exécution.
39:44Et cette fois, le couple Villemin effondré
39:47voit une lettre qui revendique le meurtre de leur enfant.
39:53C'est un billet très court.
39:56La lettre dit textuellement
39:59« Ce n'est pas ton argent qui pourra te redonner ton fils.
40:04Voilà ma vengeance, pauvre con. »
40:11Pour les gendarmes, l'assassin, c'est le Corbeau.
40:14Alors, qui peut haïr Jean-Marie Villemin au point de lui écrire après le meurtre
40:18« J'espère que tu mourras de chagrin ».
40:23Le Corbeau connaît très bien le couple.
40:25Il ferait même partie des proches.
40:27Alors, chaque membre de la famille Villemin est prié de faire une dictée.
40:32Et le juge d'instruction décide de réunir plusieurs experts en écriture.
40:36Première constatation, les lettres du Corbeau ont été écrites par la même main.
40:42Vient ensuite le travail de comparaison,
40:44qui aboutit très vite à un nom, celui d'un certain Bernard Laroche.
40:51Je suis restée tout l'après-midi
40:54où j'ai travaillé sur le dossier des 147 ou 148 personnes, je ne me rappelle plus.
41:03Et ce qui m'a permis d'éliminer,
41:06de me concentrer effectivement sur l'écriture de Bernard Laroche.
41:11Et là, vers 5h, j'ai rappelé le capitaine Sesmat.
41:16Je lui ai dit « Écoutez, j'ai une opinion. Voilà mon opinion.
41:22Je ne peux pas dire qu'il soit le meurtrier. »
41:27Et c'est lui qui a écrit les lettres.
41:29Bernard Laroche est un cousin germain de Jean-Marie Villemin.
41:34C'est tout ce qui se passe dans la famille grâce à ses relations avec Michel et Ginette.
41:40Donc c'est quelqu'un qui nous intéresse.
41:42C'est quelqu'un qui en apparence est connu comme quelqu'un de bonhomme, de sympathique, etc.
41:49qui correspond relativement bien au profil donné par les experts sur un corbeau potentiel.
41:56Le juge et les gendarmes sont impressionnés.
41:59Mais ce n'est pas tout.
42:00Sur l'une des lettres, un expert découvre un nouvel indice.
42:05On voyait assez nettement les traces de ce qui ressemblait à une signature.
42:12Sur la lettre de revendication ?
42:14Sur la lettre de revendication qui provenait d'un bloc
42:18et qui donc avait reçu l'empreinte d'écrits tracés auparavant sur le même bloc.
42:29C'est ce qu'on appelle un foulage.
42:31Pour le faire apparaître, il faut promener un faisceau lumineux sur la feuille.
42:41Ce foulage, avec des moyens adaptés, de lumière rasante, avec une incidence rasante,
42:47on a pu voir un L et un B, effectivement, un défoulage très nettement.
42:51La lettre L était donc d'une lettre L calligraphique avec une grande entame, courbe à la partie supérieure également.
42:59Et la lettre B était donc d'une lettre typographique, un B typographique tout à fait de ce qui est plus courant.
43:06Et ce qui est encore plus troublant, c'est que lorsqu'on superpose le L et le B gravés dans la lettre du corbeau,
43:13avec la véritable signature de Bernard Laroche, ça colle.
43:20Alors ça, c'est un terme de l'expertise en écriture. Qu'est-ce que c'est qu'un foulage ?
43:25Alors, le foulage, c'est tout simplement l'empreinte laissée dans le papier qui a servi de sous-main lors de la rédaction de l'original.
43:33Sur la feuille du dessous ?
43:34Sur la feuille du dessous. Donc si, par exemple, je vous demande le chèque qui était sous le chèque que vous m'avez fait.
43:42Allez, on va vérifier.
43:44On va vérifier s'il y a des traces de foulage.
43:48Alors, comment faites-vous ?
43:49J'éclaire tout simplement le chèque avec une lumière rasante. Et regardez.
43:54On voit apparaître les marques.
43:55Voilà. Les caractères.
43:56On peut presque lire.
43:57On peut les lire, effectivement.
43:59Ça peut marquer sur plusieurs pages, en dessous ?
44:01Ça peut marquer sur plusieurs pages, selon l'épaisseur du papier et selon la pression exercée sur l'instrument utilisé.
44:07Mais en fait, l'idéal, c'est de confier le document à la police scientifique qui, elle, va utiliser un appareil appelé ESDA.
44:15C'est un appareil qui va permettre de faire un film du foulage.
44:20Qu'est-ce que ça apporte comme preuve dans une affaire criminelle ?
44:24Ça apporte des indications.
44:26Ce n'est pas une preuve en soi, mais on obtient des indications.
44:29Par exemple, dans des affaires civiles, je pense notamment à des cessions de parts sociales,
44:35on arrive à vérifier quel a été l'ordre de signature de la position des paraffes et de la signature finale.
44:44Les expertises en écriture accablent donc de façon formelle Bernard Laroche.
44:49Mais coup de théâtre.
44:50Trois collègues de Christine Villemin, la mère de Grégory, la mettent en cause.
44:56Alors, rebelote.
44:58Le juge d'instruction demande une nouvelle expertise en écriture, une expertise qui va tout remettre en cause.
45:07Nous avons dû rendre notre rapport le 15 février.
45:11Et un petit peu avant le 4 février, le juge me téléphone en me disant, donnez-moi vos conclusions.
45:17Je dis, monsieur le juge, je n'en ai pas question.
45:19D'ailleurs, on s'était mis d'accord, on ne donnera pas nos conclusions.
45:22Il m'a dit, dites-moi seulement si c'est Bernard Laroche.
45:26Je lui ai dit, pourquoi vous me demandez ça ?
45:28Parce qu'il me dit, si ce n'est pas lui, je le remets en liberté dans deux jours.
45:32Je lui ai dit, oui, ce n'est pas Bernard Laroche.
45:35Mais il y avait ma consœur qui était avec moi, on avait pris cette décision.
45:40On a dit, bon, parce que c'était pour libérer un type qui, pour nous, il était pour nous.
45:44Le juge Lambert décide donc de rendre sa liberté à Bernard Laroche.
45:49Quel médecin, quel expert psychiatre l'a examiné ?
45:53Qui s'est davantage intéressé à lui ?
45:56Je ne crois personne, il est resté là et il est devenu, c'est innocent par défaut.
46:00Début juillet, l'expertise tombe sur le bureau du juge Lambert.
46:05Et ses résultats lui donnent raison.
46:07Pour les experts, le corbeau, c'est Christine Villemin, la mère.
46:11Les gendarmes n'en reviennent pas.
46:13Je pense que la question des expertises et des experts, surtout,
46:17reste pour moi un grand point d'interrogation.
46:21Comment des personnes spécialisées de manière très très pointue dans un domaine
46:26peuvent dire des choses radicalement opposées ?
46:29Pour moi, ça reste un grand mystère.
46:31Nous, on a fait notre travail honnêtement.
46:33On n'avait aucun intérêt, si vous voulez, à désigner A ou B.
46:37Et si vous voulez, on a été traînés dans la boue.
46:39On nous a dit qu'on était des bons à rien, etc.
46:42Ça a été écrit dans la presse.
46:43Alors, vous savez, c'est quand même pas plaisant,
46:45quand vous avez fait honnêtement votre boulot.
46:46Parce que, vous savez, nous, la solution de facilité,
46:48c'était de désigner la roche qui était déjà...
46:51Bon, puis voilà.
46:53La mère de Grégory est alors arrêtée.
46:56Christine Villemin était encore sans entrave
46:58lorsqu'elle s'est présentée devant le juge Lambert au palais de justice d'Épinal.
47:02Il était 16h30.
47:03Deux heures plus tard, elle était inculpée d'homicide volontaire
47:06sur la personne de son fils Grégory et écouée à la prison de Metz.
47:10Mettre le seau sur cette femme d'une telle inculpation,
47:14c'est l'irréparable.
47:16L'irréparable a été commis.
47:1811 jours après, Christine Villemin est remise en liberté pour manque de preuves.
47:23Plus tard, elle est totalement innocentée par un non-lieu.
47:27L'enquête a abouti à une catastrophe judiciaire.
47:30Le meurtrier du petit Grégory n'a toujours pas été identifié.
47:35Susan Schmidt, comment est-il possible que des experts, deux experts,
47:40puissent donner un avis, deux avis aussi diamétralement opposés ?
47:45Alors d'abord, il faut vérifier, il faut voir,
47:47c'est de travailler sur les mêmes documents de comparaison.
47:50Parce que si on ne dispose pas des mêmes documents,
47:52on peut avoir des avis divergents.
47:54Par ailleurs, il faut vérifier si la méthodologie a été respectée,
47:58c'est-à-dire est-ce que l'examen intrinsèque a été bien fait,
48:01est-ce que l'examen critique des pièces de comparaison a été fait dans les règles de l'art.
48:06Donc ça, ce sont les deux causes fondamentales des dissensions.
48:10Est-ce que vous avez déjà arrivé de rendre une expertise
48:14qui était complètement opposée, complètement contradictoire,
48:17après un autre expert ?
48:18Dans une affaire criminelle, deux experts avaient rendu un avis totalement différent du mien.
48:23Je suis arrivée en troisième déposition,
48:26avec donc mon avis,
48:29lequel a été confirmé par un autre indice matériel
48:34qui a permis de crédibiliser l'opinion que j'avais sur la chose.
48:39Et puis une autre affaire en correctionnelle ?
48:41Une autre affaire en correctionnelle,
48:43où effectivement une multitude d'experts ont donné un avis similaire.
48:47Combien ?
48:48Il y a eu sept experts qui ont donné un avis totalement affirmatif
48:52accusant donc une personne.
48:54Et je suis arrivée en huitième position avec un avis différent,
48:58lequel a été confirmé par un collège d'experts.
49:01Du coup, est-ce qu'on peut vraiment accuser quelqu'un de façon formelle
49:04à partir d'une expertise en écriture ?
49:06Dans certains cas, oui.
49:08Dans quels cas ?
49:09Lorsqu'on a eu suffisamment de documents de comparaison
49:12pour faire un travail de fond,
49:14on peut effectivement être affirmatif.
49:17Qu'est-ce qui peut permettre à votre profession d'expert en écriture
49:21d'évoluer, d'avancer ?
49:23Est-ce que c'est la technologie ? Est-ce que ce sera autre chose ?
49:26La technologie participe effectivement.
49:28Si on arrive à mettre au point d'autres méthodes d'analyse pour les documents,
49:32ça peut effectivement aider.
49:34Pour l'écriture, je ne vois pas.
49:36L'écriture, c'est toujours l'écriture.
49:38Et en fait, il faut être très critique dans son observation,
49:41très pertinent, très objectif dans son observation.
49:44L'expertise en écriture n'est pas une science exacte,
49:47mais une science humaine.
49:49Moins fiable que les expertises génétiques,
49:51elle est pourtant complémentaire et apporte des éclairages importants.
49:55Une aide précieuse pour la justice.