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Docteur Hervé Mignot chef de l’équipe d’appui départementale en soins palliatifs de l’Indre (EADSP 36), répond aux questions de Dimitri Pavlenko.
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Docteur Hervé Mignot chef de l’équipe d’appui départementale en soins palliatifs de l’Indre (EADSP 36), répond aux questions de Dimitri Pavlenko.
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NewsTranscription
00:00 7h-9h, Europe 1 matin. Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le docteur spécialiste en soins palliatifs
00:08 Hervé Mignot. Bonjour docteur Hervé Mignot. Bonjour monsieur. Vous êtes docteur Mignot le chef de l'équipe d'appui
00:14 départemental en soins palliatifs du département de l'Indre, donc c'est autour de Châteauroux.
00:20 Vous allez dans un instant nous expliquer exactement ce que vous faites mais
00:23 vous êtes en ligne avec nous ce matin puisque
00:26 Gabriel Attal a dévoilé samedi plusieurs mesures pour permettre aux français
00:30 d'accéder plus facilement aux médecins. On sait qu'il y a des déserts médicaux en France. Il y a tout un volet de ces annonces qui
00:37 concernent le développement des soins palliatifs. Ce sera l'objet d'un texte de loi qui va être présenté en conseil des ministres demain,
00:43 mercredi. Il se trouve qu'en France il y a 21 départements où on n'a pas ce que l'on appelle
00:49 d'unités de soins palliatifs, c'est à dire vraiment des endroits dans les hôpitaux où on peut gérer la fin de vie des patients.
00:55 Vous justement vous êtes une unité
00:58 mobile parce qu'il n'y a pas d'unité de soins palliatifs dans le département de l'Indre, docteur Mignot, c'est bien ça ?
01:02 Non, il n'en existe pas en effet.
01:04 Nous n'avons pas trouvé les moyens, d'abord nous n'avons pas eu les moyens financiers pour la mettre en place et d'autre part nous manquons aussi
01:11 de moyens humains, de médecins, d'infirmières, de cadres formés dans le champ des soins palliatifs pour pouvoir assumer à la fois
01:17 les deux équipes mobiles du département et puis qui serait cette unité.
01:22 Il est certain qu'il y a une perte de chance pour un certain nombre de patients et en particulier
01:26 certains d'entre eux ou leur famille rechignent à se rendre dans les départements limitrophes
01:30 pour être accueillis dans les unités de soins palliatifs voisines.
01:34 Racontez-nous un peu votre quotidien docteur Mignot, c'est quoi une unité
01:37 mobile de soins palliatifs, comment ça se passe, à quoi ressemble votre équipement ? Racontez-nous parce que
01:42 on n'a peut-être pas forcément l'habitude de visualiser ce que vous faites.
01:47 Alors c'est une unité qui dépend du centre hospitalier de Châteauroux qui est composée de médecins, d'infirmières,
01:52 psychologues, secrétaires qui peut être appelée par tout le monde, c'est-à-dire aussi bien le patient que son entourage, les soignants
01:59 et bien sûr les médecins qui s'occupent de ces patients pour pouvoir recueillir un avis sur les prises en charge.
02:06 Nous n'intervenons pas pour accompagner les malades
02:09 nous-mêmes mais nous sommes là pour
02:12 aider les intervenants de première ligne à mieux les accompagner.
02:16 Nous essayons de mener des évaluations
02:18 sur place, là où sont les patients, ce qui impose qu'on se déplace
02:22 dans tout le département avec parfois des temps de route qui sont de l'ordre d'une heure
02:26 pour aller rencontrer le patient
02:28 essayer de comprendre
02:31 quelle est sa situation dans toutes les dimensions de sa personne, aussi bien sur le plan somatique que sur le plan social, familial,
02:37 psychique, spirituel, et de voir de quelle façon nous pouvons
02:41 lui venir en aide s'il y a effectivement des aspects qui sont insuffisamment pris en charge.
02:45 - Mais vous faites de l'évaluation, c'est-à-dire du diagnostic, vous n'êtes pas là au quotidien à assurer les soins, si j'ai bien compris.
02:52 - Voilà, nous ne sommes pas là pour au quotidien faire les prescriptions, suivre les patients.
02:57 Nous apportons un avis d'expertise
02:59 qui est ensuite repris par le médecin responsable
03:04 qui a le loisir d'ailleurs de suivre nos avis ou pas d'ailleurs,
03:08 et puis ensuite nous pouvons réévaluer autant qu'il y a de besoins les situations bien sûr.
03:14 - Mais ce que vous appelez intervenants de première ligne,
03:16 Dr Mignot, si j'ai bien compris, ce sont les médecins traitants, les infirmiers, les kinésithérapeutes,
03:21 mais est-ce qu'il y en a partout là où vous vous rendez, dans toutes les communes où vous vous rendez ?
03:25 - Alors effectivement nous sommes assez souvent confrontés à ces situations de patients qui n'ont plus de médecin et qui pourtant sont en fin de vie
03:31 et ont besoin crucial d'être visités.
03:35 À ce moment là, notre travail consiste à essayer de trouver parmi les médecins présents dans le département certains
03:40 qui seraient d'accord pour venir exceptionnellement prendre un nouveau patient.
03:44 Nous faisons appel souvent aux communes, ce qu'on appelle les CPTS, les communautés professionnelles de santé territoriales.
03:51 - Qu'est-ce que vous pensez, Docteur, de ce qui se prépare au niveau législatif, c'est-à-dire
03:56 un projet de loi
03:58 biface, donc qui prévoit d'un côté le développement des soins palliatifs et puis de l'autre cette fameuse
04:03 "aide à mourir" dont on a déjà beaucoup parlé.
04:05 Les situations que vous rencontrez vous font pencher en faveur de cette aide à mourir, qu'en pensez-vous, Docteur ?
04:12 - Non, ce projet de loi nous met à mal parce qu'il met effectivement dans le même
04:17 projet deux aspects radicalement différents, que sont d'un côté l'accompagnement de la souffrance de l'autre
04:23 et l'amobilisation de toutes les énergies nécessaires pour aller
04:26 repousser le plus loin possible cette souffrance et de l'autre une solution qui serait une interruption
04:32 de vie, comme une interruption de courant. - C'est la négation de votre travail un petit peu ?
04:36 Vous avez l'impression que c'est ça, cette aide à mourir ? - Écoutez,
04:39 j'utilise souvent une métaphore, je dis souvent que c'est comme si on faisait une loi autorisant
04:44 les régimes dans un pays où les gens souffrent la plupart de la fin.
04:47 Ce n'est pas décent aujourd'hui de proposer
04:51 à ce moment-là, dans cette temporalité-là, ce projet et en plus de le coller
04:55 à une majoration du plan des soins palliatifs. Alors vous savez, ce plan en faveur des soins palliatifs
05:00 depuis 35 ans que j'exerce dans ce métier, j'en ai vu passer beaucoup de ces fameux plans.
05:04 Je ne vous cacherai pas que j'attends encore
05:07 les bénéfices des plans précédents
05:09 parce qu'annoncer qu'il va y avoir de l'argent de verser ne veut pas dire que forcément les équipes sur place en seront bénéficiaires
05:16 et que ça se traduira véritablement
05:19 par un mieux-être pour les patients. - Mais de quoi vous auriez concrètement besoin dans l'exercice de votre métier au quotidien ?
05:26 - Alors écoutez,
05:28 ce qu'il faudrait avant tout, c'est véritablement un basculement de culture. C'est-à-dire que
05:33 on commence à comprendre que finalement le soin palliatif c'est premier. Il faudrait faire beaucoup de formations, il faudrait
05:40 parfois contraindre, je le dis très clairement. - Vous pensez à quoi ? Quel genre d'institution il faudrait contraindre selon vous ?
05:46 - Écoutez, je ne vais pas mettre de la discorde là où il n'y a pas besoin d'en mettre, mais je veux dire par là, par exemple,
05:52 que les crédits nous arrivent.
05:54 Moi dans mon équipe, je suis encore en train d'attendre des crédits, par exemple, d'une assistante sociale qui devait nous être versé il y a cinq
05:59 ans et qu'on attend toujours. - Il y a cinq ans ? - Oui, là où on se, comment dire,
06:04 les responsables administratifs se renvoient là-bas, les uns en disant qu'ils n'ont pas reçu les versements suffisants, d'autres qui disent "mais si, finalement ils y sont, mais c'est votre..."
06:11 Nous, nous sommes au milieu de tout ça, impuissants
06:14 à devoir finalement faire le travail par nous-mêmes et le faire sans doute moins bien qu'une assistante sociale le ferait elle-même,
06:20 alors que nous sommes tenus d'essayer d'accompagner un plus en plus grand nombre de personnes, de plus en plus précaires, parce que la population est
06:25 bienveillissante, à domicile du fait du virage ambulatoire.
06:28 - Et vous suivez combien de personnes en ce moment avec votre unité mobile, docteur Mignot ? - Alors on a en permanence, entre... alors c'est très variable,
06:37 autour de 15 à 20 personnes que nous suivons de près, et puis il y a des patients pour lesquels nous sommes en contact
06:47 également, et qui régulièrement se réacutisent, si vous me passez ce dilemme,
06:51 et pour lequel il faut qu'on réintervienne vite, et puis il y a aussi tout le champ du soutien des familles, notamment après le décès, parce que
06:57 ça fait partie de notre travail de continuer d'être vigilant
06:59 auprès des familles lorsque elles ont perdu un proche, et que nous savons que certains d'entre eux sont vulnérables et qu'il faut les
07:05 soutenir pendant un temps déterminé. - Donc les soins palliatifs, c'est même après le décès du patient, en tout cas dans votre cas, docteur Mignot.
07:13 Merci en tout cas d'avoir témoigné au micro d'Europe 1, docteur, je vous souhaite une bonne journée. - Bonne journée.