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Jacques, médecin en Nouvelle-Calédonie, répond aux questions de Dimitri Pavlenko.
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00:00 7h-9h, Europe 1 Matin. Il est 7h12 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin Jacques qui habite en Nouvelle-Calédonie.
00:08 Bonjour Jacques. Oui bonjour Dimitri. Bienvenue sur Europe 1. Alors on va dire que vous êtes médecin, vous restez un petit peu flou sur votre identité,
00:16 sur votre localisation par rapport à des questions de sécurité tellement la situation est actuellement sensible en Nouvelle-Calédonie.
00:24 C'est l'après-midi à l'heure où l'on se parle, il est environ 15h. Alors on suit évidemment sur Europe 1 les événements qui secouent le caillou depuis lundi.
00:32 Tout simplement pour commencer Jacques, quelle est la situation à l'heure où nous nous parlons semble-t-il ? C'est un petit peu plus calme que les jours précédents, vous confirmez ou pas ?
00:41 Oui en fait quand la situation est contrastée, il y a des quartiers où effectivement le calme est revenu. Bon certes on circule toujours avec difficulté parce qu'il y a toujours des check-up,
00:50 des zones de barrages où on doit ralentir, on doit vraiment prouver qu'on n'a rien de dangereux avec nous. Mais globalement dans certains quartiers de Nouméa on circule bien,
00:59 par contre il y a encore des quartiers qui sont très difficiles d'accès. Et qu'en est-il du vôtre ? Vous vous organisez pour vous défendre, on parle beaucoup de milices d'autodéfense
01:09 constituées depuis le début de la semaine Jacques. Vous vivez ça ? Oui alors on vit ça. J'aime pas trop le terme de milices, en faites compte ce sont vraiment des groupes qu'on a fondé d'autodéfense.
01:19 Notre but n'étant pas de mener des actions offensives, on ne sort pas en milices en dehors de nos quartiers, on reste derrière nos barricades, on ne bouge pas et on vit un petit peu la crainte permanente de voir des gens arriver qu'on ne connaît pas et qui pourraient éventuellement être agressifs.
01:35 Qui sont ces assaillants Jacques ? Ces assaillants ce sont des gens qu'on croisait sans problème particulier il y a encore quelques jours.
01:44 Ce sont essentiellement des jeunes hommes et des jeunes femmes qui individuellement ou même en petits groupes ne posaient pas de problème particulier ou du moins ne nous montraient pas ni de haine ni de rancœur.
01:57 Et ce sont ces personnes là qu'on retrouve maintenant en face de nous. Et qui vous veulent du mal, vous vous sentez menacé ? Oui, oui, oui.
02:05 Dans des propos très durs, des propos racistes, on en subit tous, quelle que soit notre couleur de peau malheureusement.
02:14 Mais des propos très durs, racistes en disant "tu vas partir de la Nouvelle-Calédonie sinon ça va mal se passer pour toi". Enfin bon, des choses comme ça bien entendu.
02:26 Alors ça fait d'ailleurs un demi-siècle, même un peu plus, je crois que vous vivez Jacques en Nouvelle-Calédonie. Vous êtes arrivé au début des années 1970.
02:35 On vous envoie le signal qu'aujourd'hui ce serait bon que vous partiez comme si vous n'étiez pas chez vous. Qu'est-ce que ça vous fait Jacques ?
02:43 Ah ça me fait mal au cœur parce que ce pays j'y ai investi beaucoup de temps, beaucoup de travail. Je n'ai pas l'impression d'avoir volé ma place ici, en tout cas je ne l'ai prise à personne.
02:52 Mon but étant d'essayer d'améliorer par mon travail le quotidien des personnes et d'apporter un plus à la société qu'on essaye de bâtir jour après jour.
03:02 Mais c'est-à-dire qu'on vous envoie le message que la Nouvelle-Calédonie ce n'est pas, ce n'est plus la France ? On ne veut plus que ce soit la France ?
03:09 C'est ce message qu'une certaine partie de la population, mais pas tout le monde, nous envoie. Ce sont les plus bruyants, les plus visibles. C'est le message qu'on reçoit en ce moment.
03:21 C'est qui ces plus visibles ? On a beaucoup parlé notamment du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a pointé du doigt la CCAT notamment. Qu'est-ce que c'est cette cellule de coordination des actions de terrain ?
03:32 On peut dire que c'est le bras armé ou en tout cas les porte-voix des partis indépendantistes néo-calédoniens qui veulent faire partir la France de la Nouvelle-Calédonie.
03:50 Ils sont représentatifs ? Cette CCAT ça représente combien de personnes d'après vous à la louche ?
03:59 A la louche ça doit représenter plusieurs dizaines de milliers de personnes sur une population qui en compte 300 000. Vous voyez tout de suite qu'ils représentent quand même une quantité relativement importante.
04:11 Mais est-ce qu'ils sont tous réellement conscients de ce qu'ils font et des actes qu'ils réalisent ? Ça je n'en suis pas certain.
04:19 On a vu aussi les images très impressionnantes de magasins pillés, repillés, brûlés, rebrûlés avec un sentiment d'acharnement sur les commerces.
04:32 On parle de situations de pénurie. Racontez-nous un petit peu ce qui se passe. Est-ce que vous avez encore à manger notamment ? Parce qu'apparemment il y a des gens qui aujourd'hui n'ont plus rien à manger.
04:41 Oui, il y a des gens qui n'ont plus grand chose à manger. Moi j'ai de la chance, je n'avais pas fait de prévision particulière mais j'ai encore 2-3 jours de provision devant moi.
04:51 Mais je sais pertinemment que si le circuit de distribution n'est pas rétabli dans les 2 à 3 jours, je vais commencer à souffrir, ça c'est certain.
05:00 Et je pense qu'il y a des personnes qui sont dans des situations bien plus critiques que moi.
05:04 On a signalé que vous étiez médecin. Est-ce que vous parvenez à voir vos patients depuis le début de la semaine Jacques ?
05:10 Non, c'est impossible. C'est impossible. Par peur, certains pourraient éventuellement venir parce qu'ils ne sont pas très loin, mais malheureusement par peur ils ne veulent pas venir.
05:20 Et puis d'autres qui ont essayé se sont vus refouler même en disant qu'ils avaient besoin d'une consultation avec un médecin.
05:28 Vous êtes inquiet pour eux ? La situation de l'hôpital aussi, le fameux Médipol, c'est là où ont été opérés notamment toutes les personnes qui ont été blessées lors des émeutes.
05:38 Je pense aux gendarmes, je pense aux policiers mais pas qu'eux. Apparemment la situation autour du Médipol est absolument critique aussi.
05:45 Oui, la situation est critique parce qu'il y a de nombreux barrages. Tantôt ils laissent passer, tantôt ils ne laissent pas passer.
05:51 Ce qui est critique c'est le renouvellement des équipes médicales et paramédicales sur place.
05:58 Alors ils tiennent le coup, ils font un travail extraordinaire. Ils sont présents, ils sont volontaires, ils sont courageux.
06:04 Il faut être courageux pour y aller, il faut être courageux pour y rester parce que quand on sait qu'on a nos familles potentiellement menacées,
06:11 forcément ça n'incite pas à vouloir absolument rester à l'hôpital. Et pourtant toutes ces équipes soignantes restent à l'hôpital et font un travail extraordinaire.
06:21 Je crois que tout le monde a été débordé par l'ampleur de cette vague qui est arrivée et qui était par sa violence tout à fait inattendue.
06:33 Ils se sont attaqués absolument à tout. Ils se sont attaqués à des écoles, ils se sont même attaqués à des centres de dialyse.
06:39 Quand on sait que les gens qui sont dans les centres de dialyse dépendent de soins et s'ils ne reçoivent pas ces soins,
06:45 malheureusement en quelques jours leur pronostic vital peut être engagé. Tout ça en fin de compte, ça nous a complètement échappé.
06:50 Mais pourquoi d'après vous attaquer des magasins, des centres de dialyse, des pompes, des stations-service ?
06:56 Est-ce qu'il y a un sens à toute cette case d'après vous ?
06:58 Je crois qu'il y a un sens pour attaquer certaines enseignes pour mettre à mal l'économie calédonienne.
07:08 Je pense qu'effectivement il y a eu un geste très volontaire pour ça.
07:13 Maintenant ils se sont peut-être aussi fait déborder par leur base et ces hordes de personnes se sont mis à attaquer tout ce qu'ils trouvaient.
07:21 Donc en fin de compte, il y avait deux volets à ce problème-là.
07:27 Vous avez vécu les événements des années 80, Jacques, puisque comme je le disais, vous êtes en Nouvelle-Calédonie depuis les années 70.
07:34 Est-ce que c'est comparable ce que l'on vit actuellement chez vous ?
07:37 Non, ce n'est pas comparable. D'abord parce que les événements dans les années 80 étaient essentiellement, en grande partie, en dehors de Nouméa.
07:45 C'était la brousse qui avait beaucoup souffert à cette époque-là.
07:48 Là c'est vraiment Nouméa et puis les grandes villes autour de Nouméa qui sont impactées.
07:55 Donc la violence aussi n'est pas du tout la même, la volonté de destruction non plus.
08:00 C'est plus grave ?
08:02 Non, à mon avis, oui je pense que c'est plus grave.
08:06 De par l'ampleur du mouvement, je pense que c'est plus grave.
08:11 Merci beaucoup, Jacques, de votre témoignage courageux, parce qu'il faut accepter de prendre la parole dans ces conditions, dans ces circonstances,
08:19 où tout le monde s'écoute, tout le monde se regarde, tout le monde se surveille, ce n'est pas simple.
08:22 Merci à vous, Jacques, et on vous souhaite donc bon courage pour les jours et les semaines à venir.
08:28 Merci d'avoir témoigné sur Europe 1 ce matin.
08:30 Merci Dimitri, merci beaucoup.