Le politologue, Guillaume Bigot, revient sur la multiplication des affaires contre des mineurs en France : «Il y a de l’omerta, il y a la crainte des représailles».
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00:00 Exactement. Je pense que là on est face à une sorte de volonté de minoration de ce qui se passe.
00:06 D'abord là les séquences qu'on a, comment dire, les séquences, ne serait-ce que la semaine, prenons que la semaine.
00:12 On voit bien qu'il ne s'agit pas de faits divers, on essaie de faits diversifiés pour reprendre l'expression chère à Mathieu.
00:18 Faits diversifiés ce qui se passe. Mais là il y en a trop. Qu'est-ce qu'il fait un fait de société par rapport à un fait divers ?
00:24 C'est une accumulation, c'est une multiplication, c'est aussi une montée en puissance.
00:27 Ça n'existait pas hier, ça existe aujourd'hui et ça monte en puissance.
00:30 Viry-Châtillon, Montpellier, Tour dans la même semaine, 15 ans, 14 ans, 14 ans,
00:35 quelqu'un qui meurt et deux personnes qui sont gravement blessées, c'est évidemment un fait de société.
00:40 Par opposition au Petit Émile, là aussi on peut se demander s'il n'y a pas un effet de diversion.
00:44 Petit Émile c'est complètement un fait divers pour le coup. Mais on en parle constamment.
00:48 Deuxième chose, je pense qu'évidemment on peut dire que c'est extrême dans les effets.
00:52 Toutes les semaines il n'y a pas des collégiens qui meurent ou qui sont gravement blessés.
00:56 Mais par contre c'est quand même très documenté de manière très objective, cette montée en puissance.
01:01 Et le niveau que ça atteint, Éducation nationale, il y a une direction, à la direction de la prévision,
01:07 2022, 16 incidents graves, violences pour 1000 élèves, 16 pour 1000.
01:13 C'est donc un phénomène absolument massif.
01:17 Mais c'est peut-être même, à mon avis c'est sûr, que la partie émergée d'un iceberg. Pourquoi ?
01:22 Un, parce que l'essentiel se déroule en dehors du collège et n'est pas quantifié par l'Éducation nationale.
01:29 Donc c'est qu'une partie émergée. Et deuxièmement parce qu'on sait qu'il y a l'omerta, on sait qu'il y a la crainte des représailles.
01:34 Et donc qu'est-ce qu'on entend ? On entend les autorités de l'État, comme exactement le ministre de la Santé, délégué à la Santé,
01:39 Mme Belloubet, M. Macron, ils veulent continuer à sanctuariser l'école. On l'a dit tout à l'heure.
01:43 Sanctuariser l'école, c'est-à-dire qu'ils ne pénétreront pas dans l'école comme au moment du discours pour les obstacles de Samuel Paty.
01:50 Ils ne passeront pas. Ben oui, ils sont déjà passés et malheureusement, ils sont repassés.
01:54 Au moment même où la violence se déchaînait dans les collèges, il y avait une réunion Place Beauvau, donc au ministère de l'Intérieur,
02:00 et Mme Belloubet entendait déployer un bouclier autour de l'école. La conclusion que j'en tire, c'est que le seul bouclier qui existe
02:07 est à l'intérieur du cerveau de nos dirigeants, entre la réalité et leurs opinions. C'est ça, la vérité.
02:14 Et donc, on en arrive à quoi ? À mon avis, un diagnostic de perte de contrôle des autorités, comme on dit, au sens large,
02:20 vis-à-vis d'une violence qui est endémique et qui monte chez les adolescents. Bien sûr, tous les adolescents ne participent pas à cette violence.
02:26 Ça commence par ceux qui en sont victimes, mais attention, la violence est un phénomène mimétique.
02:30 Deuxièmement, ceux qui ne participent pas à cette violence, qui la subissent, voient quand même que cette violence reste pour l'instant impunie.
02:37 Donc, ils assistent un peu tétasinisés à une sorte de capitulation des adultes, du monde adulte et des autorités face à l'explosion de cette violence.
02:44 Ça ne peut pas être neutre. On en revient à cette lecture de la République de Platon, qui...
02:49 C'est vraiment des phrases de la République de Platon qui sont très célèbres. Alors, je ne peux pas faire toute la citation,
02:53 mais "Lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, alors on est à la veille de la tyrannie."
03:00 Lorsque les maîtres tremblent devant les élèves et préfèrent les flatter, on est à la veille de la tyrannie.
03:04 On a vu cette vidéo aussi où il y a une jeune fille qui frappe sa mère.
03:09 Ça a circulé la même semaine. Et cette formule d'Anna Arendt qui avait été aussi soulignée par Philippe de Villiers très justement.
03:16 [Musique]
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