• il y a 8 mois
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Xavier Melki, maire divers droite de Franconville, répond aux questions de Dimitri Pavlenko. Il témoigne des injustices et des inégalités dans l'attribution des logements sociaux qu'il constate chaque jour dans ses fonctions.
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Transcription
00:00 - Sur Europe 1, Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le maire de Franconville dans le Val d'Oise.
00:05 - Bonjour Xavier Melchi. - Bonjour.
00:06 - Bienvenue sur Europe 1, maire d'hiver droite de Franconville.
00:09 Vous êtes aussi conseiller régional d'Ile-de-France.
00:11 Alors, parole d'élus de terrain ce matin avec vous Xavier Melchi sur Europe 1.
00:15 Témoignage aussi de ce qui pourrit le quotidien de millions de français.
00:19 Vous avez publié hier sur le réseau social X un message à propos de l'un de vos amis, de vos administrés.
00:25 Je vais lire le message que vous avez écrit. "25 rapports de police municipale depuis 2023.
00:30 Avant-hier, il a frappé un policier durant son interpellation alors qu'il conduisait sans permis,
00:35 ivre et sous cannabis. Il a été laissé libre et sera convoqué un jour.
00:40 Il vit toujours en logement social malgré ma demande d'expulsion."
00:44 Bon, il y a beaucoup de choses dans ce message, Xavier Melchi,
00:46 mais c'est une sorte de concentré de votre vie de maire, Xavier Melchi.
00:51 - Oui, c'est surtout, ce n'est pas le premier message que je fais comme ça.
00:54 C'est que, en fait, c'est infernal.
00:56 C'est infernal, on n'est pas responsable de la sécurité, c'est l'État.
01:00 On n'est pas responsable de la justice, c'est l'État.
01:02 Et puis, moi, je n'en veux pas aux gens dans les tribunaux, ils ne sont pas assez,
01:04 ils ne sont pas assez nombreux, les policiers ne sont pas assez nombreux.
01:06 Mais quand on est confronté à des familles qui ne peuvent pas se loger,
01:09 qui sont cinq dans un appartement parce qu'ils travaillent du matin au soir et qu'ils n'ont pas assez d'argent,
01:13 et qu'on voit en face des personnes comme ça qui ne respectent rien,
01:17 ouais, on peut s'interroger, ouais.
01:18 - Il y a vraiment un sujet de tension aujourd'hui autour du logement social
01:22 de ces familles qui en disposent et qui pourrissent la vie de la collectivité.
01:26 Et des familles, des gens viennent vous voir en vous disant "mais pourquoi eux,
01:29 ils ont un logement social, moi j'en aurais besoin et j'en ai pas, est-ce qu'ils le méritent ?"
01:32 On vient vraiment vous solliciter régulièrement pour ça ?
01:34 - C'est tous les jours qu'on a des demandes de logement social.
01:37 Moi, sur Franconville, on a 15 000 logements en tout,
01:40 j'ai 2200 demandes de logement social.
01:43 Donc, parfois justifiées, parfois non justifiées, parfois anciennes.
01:46 Mais c'est vrai qu'il y a une forme d'inéquité dans le traitement et dans l'accès au logement social, évidemment.
01:50 Alors, si la seule réponse est d'en construire plus,
01:52 bah oui, c'est facile comme réponse, mais pour loger qui ?
01:55 - Mais pour revenir à cette personne dont vous parlez dans votre message,
01:59 c'est vrai que c'est quand même ahurissant,
02:01 une situation d'impunité permanente totale,
02:04 il y a beaucoup de cas comme celui-ci chez vous ?
02:06 - J'en ai une quinzaine en tout, à peu près.
02:08 - C'est pas le pire, j'en ai un, 56 rapports de police,
02:10 agression aux forces de l'ordre, trafic de stup', vol avec agression,
02:13 vol de voiture, refus d'obtempérer, tapage.
02:16 J'en ai un autre, une famille qui a 16 rapports de police,
02:18 violence en réunion, tentative de vol, dégradation, recel, rixes, violence.
02:21 - Oui.
02:23 - Oui, il y en a, bien sûr, il y en a.
02:24 - Alors, ça fait pas beaucoup quand même à l'échelle d'une commune 15 ?
02:26 - Non, c'est pas beaucoup, vous savez, dans un immeuble de 52 appartements,
02:30 il suffit d'une ou deux personnes qui se mettent à contrôler en bas,
02:33 et puis ça pourrit toute la vie du quartier.
02:35 - Alors, vous dites que vous avez demandé l'expulsion de cette personne,
02:38 j'imagine que pour les autres, vous avez systématisé un petit peu le procédé,
02:43 l'expulsion du logement social, et ça n'aboutit pas ?
02:48 - Alors, on a, en fait, on contraint le bailleur à respecter son bail,
02:52 c'est-à-dire que dans le bail, il y a marqué que le locataire
02:54 ne doit pas troubler la jouissance de ses voisins, des colocataires.
02:57 - Oui.
02:58 - Donc, nous, on lui dit "j'ai un certain nombre de rapports de police,
03:01 ces rapports de police municipales sont transmis au service de l'État,
03:05 rapprochez-vous entre avocats, et puis organisez,
03:07 posez sur le dossier du bureau du juge l'expulsion".
03:11 Et puis, l'année dernière, on a réussi à faire expulser comme ça 7 ou 8 familles.
03:15 Voilà, puis après, la trêve hivernale...
03:16 - Donc, ça fonctionne quand même ?
03:17 - Ça fonctionne, en fait, le problème, c'est de faire constituer le dossier.
03:21 Donc, moi, je contrains vraiment, j'incite fortement,
03:24 très fortement le bailleur à constituer le dossier.
03:26 - Donc, vous êtes le premier magistrat de votre commune, quand vous êtes maire,
03:30 mais vous êtes aussi huissier d'une certaine manière,
03:32 vous constituez comme ça des dossiers pour...
03:34 - Non, les rapports de police municipales sont systématiquement
03:37 transmis aux forces de l'ordre, donc en fait, ils les ont.
03:39 Et dans le Val-d'Oise, il y a une convention qui existe
03:41 entre le préfet, le bailleur et le procureur
03:43 pour qu'il y ait une circulation de l'information qui soit plus fluide
03:46 et fort de cette convention.
03:47 Moi, je dis, écoutez, il y a de l'information qui est sur un des bureaux,
03:50 occupez-vous-en.
03:51 - Alors, il y a plusieurs sujets, il y a la question du logement social,
03:53 et vous nous avez dit, en fait, à quel point c'était aigu,
03:57 et c'est un sujet, effectivement, qui est particulièrement important
04:00 en région Île-de-France, où il y a une très, très forte demande.
04:03 Alors, il paraît que d'ailleurs, à propos de logements sociaux,
04:05 vous n'en construisez pas assez sur Franconville.
04:07 Vous payez une amende, je crois, d'un million d'euros par an.
04:09 - Non, on n'est pas un million.
04:11 En fait, on paye une amende, mais comme on n'est pas une ville riche,
04:13 on en est exonéré.
04:14 Voyez-vous, donc, ce qui m'arrange en soi,
04:16 mais on n'est pas de mauvais élèves, on est à 21% de logements sociaux.
04:19 On est à 21%, la ville est urbanisée sur 4...
04:21 - C'est 27% à la moitié de la rue.
04:23 - Mais la ville est urbanisée sur 4 km², il en manque 750,
04:26 je ne sais pas où les mettre.
04:27 - Oui.
04:28 Ah, vous ne savez pas où les mettre ?
04:29 - Je ne sais pas faire.
04:30 - Donc, ce n'est pas de la mauvaise volonté, hein ?
04:31 - Non, ce n'est pas de la mauvaise volonté.
04:33 Et puis, après, il y a la...
04:34 En fait, le problème, ce n'est pas le logement social,
04:36 ce n'est pas les 90% des familles qui sont dans le logement social.
04:39 C'est comment le logement social est géré,
04:41 et comment on attribue une fois un logement social,
04:43 et il faut réussir à le désattribuer.
04:45 On ne peut pas garder un logement à vie
04:47 quand la seule source de revenus, c'est le trafic.
04:49 Ce n'est pas possible.
04:49 - Vous considérez, vous, en tant que maire qui a expérimenté ces choses-là,
04:53 vous n'avez pas directement la main sur le logement social,
04:55 vous l'avez dit, il y a des bailleurs.
04:56 Mais vous remettez en question les critères d'attribution des logements sociaux ?
05:01 - Ah oui, complètement.
05:01 Et tout est mis en place pour que les maires soient désaisis,
05:04 peu à peu, chaque jour un peu plus,
05:05 de leur capacité d'attribution.
05:07 Après, c'est très technique.
05:08 On avait une gestion en stock, on passe sur une gestion en flux.
05:11 C'est-à-dire que là où j'avais 200 logements,
05:12 demain, j'en aurais pu qu'un attribuer.
05:13 - Mais comment on fait le tri entre les urgences ?
05:16 Parce que le logement social...
05:17 Enfin, toutes les situations sont urgentes.
05:20 - Toutes les situations sont urgentes, c'est sûr.
05:21 Quand on a la chance de pouvoir bénéficier d'un logement...
05:23 Je crois que l'année dernière, j'ai eu, à l'échelle de la ville,
05:25 un seul F5 dans l'escarcelle de la commune
05:28 qui n'a proposé à une famille.
05:29 Quand on a un nombre de familles comme ça,
05:30 donc on a notre service logement qui propose des dossiers,
05:33 il faut que le dossier soit complet,
05:34 et puis après, au final, au bout du bout,
05:36 c'est le bailleur social qui choisit.
05:38 - Il y a le logement social, et puis on a vu,
05:39 il y a aussi la question de la délinquance,
05:41 la question de la sécurité.
05:43 Vous avez reçu des menaces, vous d'ailleurs, l'année dernière.
05:46 On vous reprochait sur un banc de ne pas avoir rénové le city-stade.
05:50 Mais les gens qui disent ça menacent tout de suite
05:53 la vie de votre famille.
05:55 - En fait, aujourd'hui, les maires, alors moi, comme d'autres,
05:57 en fait, il suffit qu'on essaye de remettre un peu l'autorité en place.
06:01 On est tout de suite sujet à des menaces.
06:04 Les profs, les policiers, les maires,
06:06 tout ce qui représente finalement un peu l'autorité aujourd'hui.
06:09 Donc, oui, beaucoup de maires en ont marre.
06:11 Je crois qu'à la moitié du mandat 2020-2026,
06:13 il y avait plus de démissions que sur l'ensemble du mandat précédent.
06:16 - Et alors autour de vous, après les émeutes,
06:18 ça a été particulièrement dur chez vous aussi à Franconville,
06:20 comme dans toute la région Ile-de-France
06:22 et comme dans beaucoup de villes en France.
06:24 Il y a un avant, il y a un après,
06:25 avec vos collègues maires, vous en parlez de cette situation ?
06:28 - Non, on a mis la poussière sous le tapis.
06:30 Ça avance, ça continue, on n'en parle plus, tout va bien, Mme la marquise.
06:34 - On vous sent un peu désabusé, Xavier Melki ?
06:37 - Pas désabusé, on n'est plus dans de la colère, on est au-dessus, en fait.
06:40 On tient parce que les élus locaux, si on lâche,
06:44 il y a tout qui tombe, en fait.
06:46 On est encore le dernier lien où les gens ont confiance en nous.
06:50 Et puis, on ne fait pas ça, moi, je ne fais pas ça.
06:53 Je ne me suis pas levé un matin en disant "Tiens, on va essayer de faire expulser quelqu'un de son logement".
06:56 On a des milliers de familles qui n'arrivent pas à se loger.
06:58 Et aujourd'hui, si nous, on ne pousse pas un peu, il ne se passe rien.
07:02 Les polices municipales, la police, c'est l'État.
07:05 Les villes ont créé une police municipale.
07:07 La justice, c'est l'État.
07:10 On a l'État qui est défaillant sur un grand, grand, grand, grand nombre de ses compétences.
07:14 - La police municipale, ça devait être la police en plus,
07:16 et en fait, c'est la police à la place.
07:18 - Oui, c'est la police à la place, et heureusement qu'on les a.
07:21 Et moi, mes agents travaillent très, très bien avec les policiers nationaux.
07:25 C'est des partenaires, ils sont quasiment d'égal à égal.
07:28 - Merci Xavier Melchi de votre témoignage, d'être venu ce matin sur Europe 1.
07:32 Je rappelle, vous êtes le maire d'hiver droite de Franconville, dans le Val-d'Oise.
07:36 Merci à vous, bonne journée.

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