Anne Fulda reçoit Bruno de Stabenrath pour son livre «La jeunesse du monde» dans #HDLivres
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00:00 - Bienvenue à l'heure des livres, Bruno de Stabenrath.
00:03 - Bonjour Anne.
00:04 - Alors on vous connaît, vous avez déjà écrit, vous avez été acteur,
00:06 vous avez écrit de nombreux livres, "Kavalka", "De l'ami impossible" entre autres.
00:10 Et là, vous venez de publier "La jeunesse du monde",
00:13 un très beau livre paru chez "De Noël",
00:15 un livre qui mêle votre histoire personnelle avec des anecdotes assez intéressantes,
00:20 où on croise le général Salan.
00:22 Et aussi l'histoire de Gauthier et Vincent Malraux,
00:27 qui étaient les fils d'André Malraux.
00:31 C'est un livre passionnant.
00:33 Alors parlez-nous d'abord de comment vous êtes tombé sur ces...
00:37 Pourquoi vous êtes intéressé finalement à l'histoire de ces deux fils
00:42 qui sont morts tragiquement dans un accident de voiture.
00:44 - En mai 61.
00:45 - En mai 61.
00:45 - C'était une trentaine d'années par un personnage qui est récurrent dans le livre,
00:48 qui s'appelle Céleste, et qui va me raconter cette histoire.
00:51 Elle a 11 ans et elle passe le dernier week-end à Porcrot avec Vincent et Gauthier.
00:56 Vincent fait son portrait, la Demoiselle au soleil.
00:59 Et puis après il rentre à Paris et l'accident va arriver à ce moment-là.
01:02 Et Céleste, moi je la rencontre en 68,
01:05 quand je vais en vacances à Porcrot après un accident de voiture familial mémorable.
01:09 Et Céleste va me raconter cette histoire.
01:10 Elle va me mettre entre les mains le Paris Match du 3 juin 61,
01:13 avec Jackie Kennedy en couverture et avec la photo des garçons Malraux.
01:18 Moi j'ai quatre frères et je suis très sensible aux fratries.
01:20 Et je trouve ces deux garçons magnifiques.
01:22 Et j'ai envie de savoir pourquoi et comment ils sont morts.
01:25 Et je vais découvrir toute leur histoire au cours des 30 années avec des archives.
01:29 Donc c'est une histoire très émouvante.
01:31 Oui, c'est une belle histoire qui obligatoirement nous plonge dans l'histoire d'André Malraux,
01:37 l'histoire familiale extrêmement compliquée d'André Malraux,
01:39 parce que leur mère est Josette Clotis.
01:41 La mère des garçons.
01:43 Meurt écrasée par un train, devant ses enfants.
01:45 Leurs enfants étaient tout petits.
01:49 Malraux a perdu ses deux frères à la guerre.
01:50 Oui, donc vraiment un destin très très lourd.
01:54 D'ailleurs, évidemment, ce destin lourd, notamment la mort de leur mère,
01:59 va peser, notamment sur leur caractère.
02:01 Est-ce que vous expliquez ce qu'explique la nourrice ?
02:03 Oui, parce que Gauthier, le fils aîné et le fils chéri, c'est le premier.
02:07 Mais quand Josette Clotis, qui est la maîtresse de Malraux,
02:10 qui est toujours mariée avec Clara, est enceinte de Vincent,
02:14 Vincent c'est peut-être le fils maudit.
02:16 Et jamais Malraux... C'est un peu le procès de Malraux aussi.
02:20 Jamais Malraux ne parlera de leur mère à ses deux enfants.
02:24 Il ne leur dira rien.
02:25 Et Vincent, qui est mon préféré,
02:27 enfin quand je dis que c'est mon préféré,
02:28 c'est celui avec lequel j'ai eu beaucoup d'atomes crochus en retrouvant sa vie.
02:32 C'est le fils maudit et c'est un peintre merveilleux.
02:35 Et il est fâché avec son père.
02:37 Enfin, ils sont vraiment séparés avec leur père au moment de l'accident.
02:40 Alors Vincent, d'ailleurs, ne porte pas le nom de son père.
02:42 Il s'appelle Clotis.
02:43 Il s'appelle Clotis, lui.
02:44 Ce qui, j'imagine, crée aussi un fossé, un mal-être.
02:49 Oui, et même quand les gendarmes vont retrouver les corps
02:51 après l'accident de voiture,
02:52 ils vont se dire "mais qui est ce Clotis ?"
02:54 Parce que Clotis, en fait, c'était le grand-père de Vincent,
02:56 le père de Josette et le maire d'hier.
02:59 Et c'est pour ça qu'ils allaient en vacances à Port-Cro.
03:00 Alors, vous venez de le dire,
03:02 c'est vrai que cela dresse en filigrame
03:04 un portrait peu avantageux d'André Malraux comme père,
03:09 qui était absent.
03:10 On va dire que les grandes douleurs sont muettes.
03:12 Mais moi, je dis, Malraux, il n'était pas garagiste,
03:13 il n'était pas épicier, il n'était pas médecin,
03:15 il était écrivain.
03:16 Il pouvait faire 15 pages "Rentre ici Jean Moulin",
03:19 mais écrire cinq, six lignes sur la mort de ses enfants,
03:22 il ne l'a jamais fait.
03:23 - Mais même de leur vivant, il n'était pas là.
03:25 C'est surtout de leur vivant, il n'a pas été là.
03:27 Après, effectivement, on peut le dire d'une certaine façon,
03:30 puisqu'il a quand même pointé du doigt ceux qui livraient
03:35 en pâture leur misérable petit tas de secrets.
03:37 Mais il aurait pu par pudeur,
03:39 mais c'est surtout qu'il n'a pas été là.
03:41 - Il n'a pas été là.
03:42 Mais même le dernier livre qui parle de la vie de Malraux,
03:45 c'est Sophie Villemorin, qui était la dernière femme de Malraux
03:48 et qui raconte les dernières sept années,
03:50 donc après l'accident.
03:51 Et on aurait espéré qu'entre deux pages,
03:53 ils disent "Vincent Gauthier, mes enfants",
03:54 enfin à l'article de la mort, mais jamais.
03:56 Ça ne m'a toujours choqué.
03:57 - Oui, c'est quelque chose d'assez étonnant.
03:59 - Réhabilité.
04:01 Une jeunesse merveilleuse.
04:02 - Et il y a aussi en toile de fond le cliché d'une époque,
04:10 soit sur le début des années 60,
04:13 une époque qui est un peu compliquée
04:15 parce que la guerre d'Algérie n'est pas finie.
04:18 - La guerre froide.
04:19 - La guerre froide.
04:20 - Et sur le sang, il y a un épisode qui revient,
04:22 enfin sur lequel vous revenez,
04:24 c'est ce passage de Rudolf Noreyef à l'Ouest.
04:28 - Grâce à Fabiola, qui est la petite amie de Vincent Malraux.
04:31 - Voilà.
04:32 - Et puis surtout, ce qui est fascinant,
04:34 c'est qu'en mai 61, vous avez à Paris,
04:36 Noreyef avec les Ballets du Curof, donc le KGB,
04:40 parce qu'ils ont peur que leurs danseurs passent à l'Ouest,
04:42 la CIA avec les Kennedy.
04:44 Vous avez l'OS qui veut tuer De Gaulle.
04:46 Vous avez le FLN, les porteurs de valises,
04:48 le Sénéro, le SDEG de l'époque.
04:50 C'est un volcan.
04:52 - Alors dernière question rapidement,
04:54 comment avez-vous travaillé ?
04:56 - Archives et puis des témoignages.
04:59 - Avant Dalin Malraux.
05:01 - Oui, c'était difficile de retrouver un peu des témoins
05:04 qui ont tous entre 85 et 90 ans,
05:06 mais j'ai trouvé deux, trois témoins extraordinaires.
05:08 Parfois, j'ai été déçu.
05:09 Les gens qui ne voulaient pas parler,
05:11 soit ils étaient émus par l'émotion,
05:14 ce qui était le cas de Dalin Pompidou,
05:16 c'était un ami de Georges, un ami de Gautier Malraux,
05:18 mais qui connaissait les tableaux.
05:20 Mais le plus émouvant, en fait,
05:22 ça a été au moment où il fallait parler de l'accident,
05:24 parce que c'est le chapitre inévitable.
05:26 Et là, je me suis servi des témoignages.
05:28 Puisqu'à l'époque, en 61,
05:30 il n'y a pas d'autoroute, les routes sont meurtrières,
05:32 il y a des platanes, il n'y a pas de lignes de vitesse,
05:34 les voitures sont en acier,
05:36 il n'y a pas de senseur de sécurité, il n'y a pas de airbag,
05:38 et il n'y a pas de SAMU.
05:40 C'est les garagistes qui sont ambulanciers.
05:42 C'est terrible.
05:44 Mais ça donne un...
05:46 - En tout cas, je vous conseille vraiment de lire.
05:48 C'est un très beau livre, vraiment très beau livre,
05:50 qui est passionnant.
05:52 On est vraiment à portée.
05:54 Ça s'appelle "La jeunesse du monde".
05:56 Un beau titre, vous m'avez dit.
05:58 - Une fois jamais oublié.
06:00 - "La jeunesse du monde", donc c'est par Richard Denoyel.
06:02 Merci beaucoup, Bruno de Stamenrath.
06:04 - Merci, Anne.
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