Le professeur des universités Gilles Kepel était l’invité de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
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00:00 Bienvenue et bonjour Gilles Kepel.
00:02 Merci de votre présence et votre grande interview sur CNE.
00:05 Vous êtes professeur des universités, auteur de nombreux ouvrages à succès,
00:08 dont le dernier en date qui s'intitule "Holocauste" aux éditions Plon
00:13 et qui décrit un énorme big bang géopolitique en cours depuis les attaques du 7 octobre.
00:18 Nous allons en parler en détail.
00:19 Tout d'abord, Gilles Kepel, dans l'actualité, Israël a fini par admettre hier
00:24 que les sept humanitaires étrangers tués à Gaza l'avaient été par une frappe israélienne,
00:29 non intentionnelle précise l'état hébreu.
00:32 Le président américain Joe Biden s'est dit indigné.
00:35 Vers quoi est-on en train de basculer depuis la riposte aux attaques du 7 octobre selon vous ?
00:39 On est en train aujourd'hui de passer dans une phase d'affrontement qui est de plus en plus dangereuse
00:45 puisque au fond après presque six mois d'attaques sur Gaza,
00:49 l'armée israélienne n'a pas réussi à atteindre les objectifs qui avaient été fixés par M. Netanyahou.
00:55 Yair Yassinouar, le patron du Hamas, responsable de l'attaque du 7 octobre,
00:59 est toujours introuvable, inaccessible.
01:02 Et aujourd'hui, pour sortir un peu de ce dilemme,
01:06 M. Netanyahou est tenté de diriger ses attaques vers d'autres adversaires
01:12 en utilisant non pas les troupes au sol,
01:14 ça a été une catastrophe avec l'hécatombe qu'on a vue à Gaza,
01:17 mais des frappes très ciblées comme ce qui s'est passé en Syrie tout récemment
01:22 où le plus haut gradé des gardiens de la révolution a été tué par une frappe extrêmement précise
01:29 dans des locaux de l'ambassade iranienne à Damas.
01:32 La section consulaire de l'ambassade iranienne.
01:34 Voilà, c'est une sorte de performance technique, indépendamment du jugement qu'on peut porter dessus.
01:39 Et on voit bien l'escalade avec le Hezbollah.
01:42 Dans le livre, justement, nous avons une carte de mon collègue Fabrice Balanche
01:46 qui s'appelle "Le Hezbollah, le Front Nord et la prochaine cible".
01:50 Tous les civils israéliens ont été évacués des villes de la frontière nord
01:56 et on voit bien que les frappes sont de plus en plus importantes.
01:59 Le Hezbollah est en position assez délicate aujourd'hui
02:02 parce qu'il est très impopulaire au Liban, il a contribué à amener le pays dans le chaos.
02:07 Il en est le dirigeant de fait, d'une certaine manière.
02:10 Et l'affaiblissement du Hezbollah par une frappe israélienne
02:13 ne serait pas exagérément pleuré par les dirigeants sunnites de la région
02:18 puisque pour trouver la prêt, pour qu'il y ait un État palestinien,
02:23 les Saoudiens, qui sont la grande puissance de la région,
02:26 n'investiront de l'argent que si la République d'Iran et ses proxys,
02:32 ses mandataires, sont éliminés.
02:34 Pardonnez-moi, juste avant la prêt, ce que l'on vit et que vous décrivez très précisément,
02:39 c'est quand même, précisons-le ce matin, rarissime de bombarder, de toucher une ambassade.
02:45 Là, le monde entier craint l'escalade, l'ONU, la Chine, la Russie,
02:48 tous les alliés condamnent, l'Europe s'inquiète fortement.
02:51 Est-ce qu'on peut avoir une sorte, l'embrasement nié à l'escalade,
02:55 mais une forme de guerre asymétrique aujourd'hui entre Israël et l'Iran ?
02:59 Oui, parce que même s'il y a une accélération de la guerre et une frappe explicite du Hezbollah,
03:05 ce qui s'est passé à Damas est un avertissement, évidemment.
03:09 La République islamique dit que ça ne sera pas impuni, évidemment,
03:13 mais quand ils ont bombardé le Pakistan à la suite d'un attentat contre l'événement
03:21 qui commémorait la mort du patron, du fondateur de cette brigade Qods des passdarans iraniens,
03:27 Qassem Soleimani, le 3 janvier, qui était perpétré d'ailleurs par l'État islamique Persion Khorasan,
03:32 le même qui a revendiqué l'attaque à Moscou, vous voyez que les choses sont extrêmement liées
03:37 sur tout le spectre mondial, comme vous l'avez dit tout à l'heure.
03:41 À partir de ce moment-là, les Israéliens imaginent que le Hezbollah va être tellement ratatiné
03:47 par des frappes violentes qu'il n'aura pas la possibilité de se défendre.
03:50 Mais ça, c'est peu probable.
03:52 Et les Iraniens disposent de mandataires ailleurs, de proxys, d'autres.
03:57 Donc on est dans une logique d'escalade militaire qui inquiète beaucoup le président Biden,
04:03 puisque pour la première fois aux États-Unis, ce n'est pas le lobby pro-israélien qui fait consensus.
04:10 C'est lequel alors ?
04:12 Parce que vous avez toutes sortes d'individus qui s'expriment.
04:16 Par exemple, dans le swing state, l'État bascule du Michigan,
04:21 vous avez 100 000 personnes qui ont voté ce qu'on appelle "uncommitted",
04:25 c'est-à-dire on ne s'engage pas pour Biden.
04:28 Biden n'avait gagné qu'à 150 000 voix en 2020, parmi lesquelles de nombreux Arabes américains
04:33 qui sont beaucoup habitués dans la région de Dearborn au Michigan,
04:37 beaucoup de Libanais d'ailleurs, avec une présence du Hezbollah qui n'est pas négligeable.
04:40 On pensait toujours, les États-Unis, comme dominés par le lobby pro-israélien.
04:46 Sur le moyen de l'Orient, vous avez dans certains coins maintenant un lobby plutôt pro-palestinien ou pro-Hezbollah.
04:54 Ça veut dire que vous nous dites que Joe Biden, en ce moment,
04:57 n'affichera pas forcément un soutien total, entier à Israël.
05:01 Bien sûr, parce qu'en tout cas, Netanyahou, et c'est la distance qu'il a.
05:05 C'est important, on va en parler.
05:07 Les États-Unis se sont abstenus la semaine dernière au Conseil de sécurité de l'ONU
05:12 sur une résolution prenant un cessez-le-feu,
05:15 alors qu'il s'y était pourtant limité pendant le ramadan qui est en train de s'achever.
05:20 Il s'y était opposé autrefois.
05:22 Et Biden est pris dans une espèce de dilemme, parce que soit il cède à son aile gauche,
05:28 il récupère ses voix, mais une grande partie des Juifs américains qui votent démocrate
05:33 ou juste votent Trump, soit c'est dans l'autre sens, il risque de les perdre.
05:36 Donc il est en train de jouer une partie très difficile.
05:40 Et Benjamin Netanyahou en profite, parce qu'il pense qu'il peut lui tendre le bras.
05:45 Mais c'est un qui-tout double pour Netanyahou.
05:48 Et dangereux pour la région et le reste du monde.
05:51 Et en Israël même, Netanyahou est critiqué comme jamais,
05:54 puisque beaucoup lui reprochent de n'avoir, d'être responsable,
05:58 ce qui s'est passé le 7 octobre, parce qu'il avait ce fameux concept,
06:02 comme on le dit, paraît-il, en Israël, conceptia, qui dit,
06:05 le Hamas "aboie mais ne mord pas", parce qu'on les a fait nourrir
06:10 par le Qatar de 40 millions de dollars chaque mois.
06:14 Donc il crie pour la consommation interne, mais ils n'attaqueront jamais.
06:18 C'est pour ça qu'il a transféré les chars qui étaient à la bande de Gaza,
06:22 en Cisjordanie, à la demande des colons extrémistes.
06:25 Vous décrivez dans votre livre une forme d'aveuglement, de déni,
06:28 et une surprise majeure de l'attaque et des attaques du 7 octobre.
06:32 On va y revenir. Comment vous décrivez, Gilles Kepel,
06:35 ce qui est en cours à Gaza ? Il y a quelques jours,
06:37 invité ici de la grande interview, Bernard-Henri Lévy,
06:40 auteur du livre "Solitude d'Israël", a dénoncé, dit-il,
06:43 une inversion des choses, du logiciel, c'est-à-dire qu'Israël devient coupable,
06:47 aujourd'hui, de ce qui se passe à Gaza. Il le dénonce avec force.
06:51 Qu'en pensez-vous ? Et vous, comment vous décrivez la situation ?
06:53 Pour la situation de Gaza elle-même, il est indéniable qu'il y ait eu
06:57 une hécatombe. Les chiffres sont ceux fournis par l'administration
07:02 sanitaire du Hamas. Ils sont peut-être à prendre avec des pincettes,
07:06 parce qu'il n'y a pas de journalistes sur place, du fait aussi
07:09 de la volonté israélienne, mais il y a en tout cas des dizaines
07:12 de milliers de morts et de blessés à Gaza, causés par les bombardements
07:16 israéliens, parmi lesquels des femmes, des enfants, et aussi, bien sûr,
07:19 des combattants. Donc ça, c'est un fait qu'on ne peut pas nier.
07:23 Ce qui se passe, c'est que beaucoup de gens qui se focalisent
07:26 sur ce fait, ont complètement oublié ce qui était passé le 7 octobre.
07:29 Et donc, moi je ne suis pas partisan, militant dans l'affaire,
07:33 j'essaie d'avoir une position analytique. Il faut analyser ce qui s'est passé
07:38 le 7 octobre, pourquoi ce que j'appelle dans le livre la "razzia" du 7 octobre,
07:42 comment ça mobilise à la fois les mystiques et politiques,
07:46 des arguments religieux, des arguments nationalistes, etc.,
07:49 ce qui s'est passé. Ensuite, analyser la riposte israélienne,
07:53 pourquoi elle a échoué militairement. - Elle a échoué pour vous.
07:56 La riposte israélienne a l'air de faire l'État des chèques.
07:59 - Oui, rappelez-vous, vous étiez jeune à l'époque, en 1973,
08:03 la guerre d'octobre d'ître du ramadan aux guerres de William Kipour,
08:09 en 19 jours, les opérations militaires étaient terminées.
08:13 Là, ça fait 6 mois et il n'y a pas véritablement de succès,
08:18 et il y a de plus en plus d'effets négatifs, comme ce que vous venez de mentionner,
08:24 c'est non seulement les Palestiniens tués en masse, les civils,
08:28 mais aussi les humanitaires qui viennent d'être tués.
08:31 Cette organisation de World Kitchen, vous vous rappelez ? - Oui, exactement.
08:34 - Avec un bateau venant de Chypre pour apporter de la nourriture
08:39 alors que la famine menace à Gaza, et ce bateau repart aujourd'hui.
08:43 Donc, on est dans une situation où M. Netanyahou, là, s'est pris dans un piège.
08:47 Et il me semble que la pression, à la fois des manifestations en Israël aujourd'hui
08:52 et la pression américaine font tout pour faire en sorte qu'il décide de se retirer.
08:58 Or, il ne va pas le faire parce que s'il se retire, il risque d'aller en prison.
09:02 - Donc, nous arrivons à des moments compliqués, y compris avec des répercussions dans le monde et en France.
09:09 Justement, à ce sujet, Gilles Kepel, la menace terroriste est forte en France,
09:13 après l'attaque notamment sanglante de Moscou, et elle approche des Jeux olympiques.
09:17 Est-ce que vous estimez qu'on a raison autant de parler de cette vitrine des Jeux olympiques ?
09:22 Est-ce qu'on en fait trop ? Est-ce que les renseignements s'inquiètent ?
09:25 Ou est-ce que vous-même, vous vous dites "attention, là, il peut y avoir un risque majeur" ?
09:28 - Je crois qu'il y a une très grande vigilance.
09:30 D'abord parce que ce ne serait pas la première fois que les Jeux olympiques seraient pris en otage
09:34 du conflit israélo-palestinien ou israélo-arabe à Munich en 1972.
09:39 On se rappelle les joueurs israéliens qui avaient été tués par le groupe septembre noir palestinien.
09:47 Là, on est dans une tension maximale.
09:51 La façon dont le monde est réécrit, les fondements moraux de l'ordre sont réécrits
09:56 par des pays comme l'Afrique du Sud ou par les mouvements woke et décolonialistes,
10:00 expliquent que ce n'est plus l'affrontement Est-Ouest aujourd'hui,
10:04 mais du Sud global ou des Suds, comme on dit à l'école normale supérieure,
10:08 contre le Nord haï, le Nord où beaucoup de gens veulent immigrer
10:13 et où par ailleurs on ne parle pas du fait que dans le Sud vous avez des régimes illibéraux,
10:17 mais Paris est l'incarnation de ce Nord, d'une certaine manière, pour ceux qui le haïssent.
10:22 Donc, la vitrine extraordinaire des Jeux olympiques,
10:26 les Jeux olympiques c'est un moment où personne ne triche, d'une certaine manière.
10:30 Il y a des sports, il y a des règles, ce sont les meilleurs qui gagnent en principe
10:34 et tout le monde va se focaliser. On attend énormément de monde à Paris,
10:38 d'où les tensions sur le marché du logement en particulier, les enjeux sécuritaires,
10:43 le recrutement de nombreux taxis et tout cela fait qu'évidemment il y a un risque.
10:49 Ce risque, il est géré, je pense, par les services d'enseignement qui travaillent là-dessus énormément.
10:55 On voit qu'il y a une coopération européenne, un certain nombre de pays européens
10:59 souhaitent s'associer à la France et d'une certaine manière,
11:03 c'est aussi une sorte de renouveau de l'Europe.
11:05 Vous avez vu qu'une Europe de la défense est enfin en train de naître.
11:09 Vraiment ? Est-ce que ce n'est pas le serpent de mer ?
11:12 Oui, en tout cas c'est un vœu. Pieux peut-être, mais un vœu.
11:15 Il y a aussi des financements. L'essentiel c'est qu'il y ait une industrie européenne de la défense
11:19 qui se crée et ça c'est la clé et d'une certaine façon c'est la suite des manœuvres de la Russie.
11:27 Vous avez raison de mentionner que l'affaire, l'attentat à Moscou,
11:33 d'abord indique que la Russie n'est pas si forte que ça, puisque c'est une faille dans sa cuirasse.
11:38 Oui, c'est ce qu'on dit, les autocraties ne sont pas épargnées,
11:41 mais alors est-ce que nous sommes finalement dans le même camp que la Russie,
11:45 visée par les mêmes ennemis alors qu'il y a quelques semaines encore,
11:49 et c'est le récit qui prévaut en grande partie, le grand ennemi, la plus grande menace,
11:53 c'est les conséquences de la guerre en Ukraine et donc Poutine.
11:56 Et je crois que Poutine a été pris à son propre piège lui aussi,
11:59 c'est-à-dire qu'il soutenait le Hamas et autres,
12:02 et il se fait frapper par des mouvements islamistes radicaux
12:07 qui sont les héritiers de la répression très violente du djihad en Tchétchénie.
12:12 Alors nous n'avons pas en France une organisation comme Daesh-Khorasan,
12:17 il y en a eu d'autres Daesh, ce sont des gens qui sont allés se former en Syrie aussi.
12:20 Il n'y a pas de cellules dormantes ?
12:22 Je n'en sais rien, mais on ne voit pas de cela.
12:25 Mais en revanche, les deux crimes les plus monstrueux récents,
12:30 la décapitation de notre collègue le professeur Samuel Paty
12:34 et le poignardage de notre autre collègue le professeur Dominique Bernard à Arras,
12:39 ont été commis l'un par Abdullah Ansaroff qui était tchétchène, originaire de cette région,
12:44 et l'autre par Anin Gouch qui est de la région voisine.
12:47 Et donc si vous voulez, c'est ce que j'ai appelé d'autres fois le djihadisme d'atmosphère,
12:52 vous n'avez pas des donneurs d'ordre, mais vous avez des individus qui vont se radicaliser sur le web,
12:57 à travers des réseaux qui sont nourris d'images de martyrs et qui risquent de passer à l'action.
13:03 Et c'est ça qui inquiète au plus haut degré, si vous voulez, les services de renseignement,
13:08 alors quelles seraient les manipulations des uns ou des autres, je n'en sais rien.
13:12 Mais bien évidemment, c'est pour ça que me semble-t-il,
13:15 il est important d'arriver à décrypter ce qui se joue.
13:18 C'est pour ça que j'ai écrit ce livre, j'en avais publié un autre assez récemment,
13:23 mais alors que je le commentais pour les médias notamment,
13:26 j'ai accumulé le maximum de documentation en mettant à chaud quelque chose
13:31 dans la perspective de mes 40 ans d'expérience de cette région,
13:35 pour essayer de proposer une analyse dont on peut être pour, on peut être contre, etc.
13:41 - Et c'est basé sur des faits, des décurs, des expériences ?
13:43 - Sur des faits, des éléments d'intellectuons, des choses,
13:46 et c'est là-dessus que je voudrais contribuer, si vous voulez, à un débat majeur
13:51 qui soit réaliste, qui ne soit pas dans la panique manipulée par les uns ou par les autres,
13:57 ou par le déni, et qui aborde rationnellement les faits
14:02 et qui permette aux citoyens et aux citoyennes que nous sommes
14:05 de comprendre ce qui se joue aujourd'hui.
14:07 - Tel est qu'on essaye de le faire ce matin.
14:09 Et plus largement, j'ai une dernière question à Gilles Kébel,
14:12 qui se passe dans nos universités.
14:14 Vous avez souvent évoqué et dénoncé d'ailleurs les coups de boutoir
14:17 à la fois des idéologies woke et puis des islamistes.
14:21 Il y a cette photo d'une étudiante intégralement voilée à la faculté de Nanterre.
14:25 Je précise que c'est le syndicat UNI qui publie cette photo sur X.
14:29 Alors, est-ce que vous y voyez le symbole de la pénétration
14:33 de l'islam politique dans les universités ?
14:35 Vous avez dénoncé très souvent toutes les idéologies
14:38 qui infiltrent, qui s'enquistent et s'installent.
14:40 Comment vous réagissez ?
14:41 - Sur cette photo, elle est effectivement telle qu'elle,
14:44 assez ahurissante.
14:45 Bon, maintenant, il faudrait savoir dans quelles circonstances
14:47 elle fait, qui s'est vêtue ou éventuellement déguisée ainsi.
14:51 Ce que je note, moi, c'est surtout ce qui me préoccupe beaucoup,
14:55 c'est la prévalence de l'idéologie sur la connaissance.
14:58 On a parlé de Sciences Po récemment.
15:00 Ce malheureux amphiboutmi qui a été renommé Amphigaza,
15:04 moi, j'y ai enseigné pendant plus d'une dizaine d'années,
15:06 dans des moments assez difficiles, quand j'étais sous protection policière,
15:10 parce que Daesh m'avait condamné à mort,
15:12 on n'entendait pas une mouche voler dans l'amphi.
15:15 Les étudiants étaient très intéressés par ce genre de choses
15:19 et après, ils allaient former les élites de la nation,
15:23 Sciences Po, l'école normale, etc.
15:25 Aujourd'hui, ce magistère a disparu.
15:28 Moi-même, je suis mis à la retraite d'office le 1er septembre.
15:32 Mes enseignements ont été fermés, sans même que j'aie été prévenu,
15:36 et vont être remplacés par des enseignements sur le sud global,
15:39 c'est-à-dire que ce qui me préoccupe énormément,
15:42 c'est comment dans les institutions, peut-être c'est trop de le dire,
15:45 d'élites qui forment ceux qui vont diriger le pays demain,
15:49 on a remplacé le savoir, la connaissance,
15:53 qui est destinée à être débattue, par l'idéologie.
15:58 Et ça, ça m'inquiète beaucoup.
16:00 Et pour revenir à la connaissance, il faut lire,
16:03 continuer de s'informer, décider,
16:05 c'est notamment l'objet de votre livre,
16:07 Gilles Kepel, Holocauste, Israël, Gaza et la guerre contre l'Occident,
16:10 aux éditions Plon.
16:11 Merci d'avoir été notre invité.
16:13 Merci de votre invitation.
16:14 A bientôt, Gilles Kepel.
16:15 [Musique]
16:17 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]