• il y a 7 mois
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Eglantine Eméyé, animatrice et fondatrice de l’association "Un pas vers la vie" qui accompagne les familles touchées par l’autisme, répond aux questions de Dimitri Pavlenko à l'occasion de la Journée mondiale de la sensibilisation à l'autisme.

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Transcription
00:00 Il est 7h11 sur Europe 1, Dimitri Pavlenko vous recevez ce matin de l'animatrice Eglantine Emeyer.
00:05 Bonjour Eglantine Emeyer.
00:07 Bonjour Dimitri, bonjour tout le monde.
00:09 Bienvenue sur Europe 1, nous sommes le 2 avril, c'est la journée mondiale de sensibilisation à l'autisme.
00:15 On dit plutôt maintenant d'ailleurs les troubles du spectre autistique.
00:19 Ça a été votre quotidien pendant près de 18 ans Eglantine Emeyer, avec votre fils Samy qui est décédé l'an dernier.
00:26 Mais vous continuez à oeuvrer avec votre association "Un pas vers la vie",
00:31 association reconnue d'utilité publique pour toutes les familles qui ont un enfant autiste.
00:37 Peut-être pour commencer Eglantine Emeyer, question toute simple, c'est quoi l'autisme ?
00:41 Oh que c'est difficile, et ça l'est encore plus depuis le début du neurodéveloppement.
00:47 On parle de ce type que...
00:50 Alors on ne vous entend pas très bien Eglantine, si vous pouviez stabiliser le micro dans lequel vous nous parlez.
00:55 D'accord, est-ce que là vous m'entendez ?
00:58 Très bien.
00:59 C'est très difficile de définir l'autisme parce que si on parle de spectre, c'est parce que c'est très très large.
01:05 L'autisme ça va de la personne que vous n'identifierez pas spontanément,
01:09 qui est comme vous et moi, qui parle, qui a un travail, qui a une vie,
01:13 mais qui a quand même de grosses difficultés à gérer son quotidien parce qu'il est très sensible d'un point de vue sensoriel,
01:19 et que gérer à la fois le bruit, l'image, les odeurs, ça l'épuise toute la journée,
01:25 et qu'il ne sait pas très bien comment communiquer normalement avec vous.
01:28 Et puis ça va jusqu'à l'autiste très sévère, qui est non-verbal, qui a des déficiences cognitives,
01:34 et qui aura besoin d'aide toute sa vie, qui restera quelqu'un de dépendant et de lourdement handicapé.
01:39 Et alors apparemment on ne sait pas forcément que son enfant est atteint du trouble de l'autisme,
01:43 les médecins ne sont pas tous formés loin de là pour l'identifier.
01:48 - Et comment l'avez-vous découvert par exemple vous et Glantine avec votre fils Samy ?
01:52 C'était il y a fort longtemps, évidemment les choses ont changé, mais en deux décennies ça a bougé.
01:57 - Ça a beaucoup bougé parce qu'aujourd'hui d'abord je crois que beaucoup de familles,
02:02 on entend tous parler de l'autisme.
02:04 Donc quand vous avez un enfant qui tout d'un coup ne regarde pas très bien dans les yeux,
02:08 qui a des gestes un peu automatiques, dont le développement semble ne pas suivre une trajectoire tout à fait normale,
02:15 maintenant je crois que beaucoup de familles se posent des questions et vont chercher des réponses.
02:19 Elles ne se contenteront plus de la réponse standard, vous verrez, il finira par évoluer comme les autres.
02:24 Mais ensuite oui, il y a des centres de diagnostic de plus en plus précoces,
02:29 c'est vrai qu'on manque encore de monde, et donc la liste est longue et on peut attendre longtemps avant de le découvrir.
02:34 Et puis je pense que vous connaissez des autistes sans le savoir, donc le diagnostic peut être très tardif.
02:38 - Il y a des autistes sans le savoir en France, Glantine et Meillet,
02:41 qui sont dans les troubles du spectre ?
02:46 - Beaucoup, des gens qui se sentent bien, qui n'ont pas assez d'amis,
02:49 les autres leur renvoient une image de "ils sont un peu bizarres",
02:52 on les trouve légèrement décalés, ils n'ont pas forcément le sens de la répartie,
02:58 ils ont du mal à percevoir les doubles sens dans une phrase,
03:02 ils se sentent différents mais ils ne savent pas pourquoi, et c'est une souffrance.
03:06 - D'ailleurs vous avez fait un documentaire qui s'appelle "Mon fils, un si long combat",
03:11 il est facile à trouver, il est sur Youtube, qui montre votre quotidien,
03:14 parce que des fois il faut voir pour comprendre, et Glantine et Meillet.
03:18 Je dis ça parce que l'autisme est reconnu comme un handicap en France depuis 1996,
03:23 il y a une espèce de latence de la société à prendre en considération ce que c'est,
03:29 et les familles qui connaissent, qui vivent ça, peuvent en témoigner,
03:33 elles sont souvent très seules, elles le disent toutes.
03:35 - C'est très difficile, surtout quand vous avez un jeune enfant autiste sévère,
03:40 et donc ce sont ces enfants-là qui ne s'expriment pas et qui ont de gros troubles du comportement,
03:45 en fait ils perçoivent le monde tellement différemment de nous qu'ils sont très angoissés.
03:49 Et ces enfants grandissent, ils deviennent de jeunes adultes,
03:51 les parents sont désemparés et il y a très peu de prise en charge.
03:55 C'est très difficile et c'est un quotidien qu'on n'imagine pas,
03:59 qui est extrêmement dur, tous les jours c'est très difficile.
04:03 - C'est pour cela que vous continuez, Eglantine Emmeillier,
04:05 malgré la mort de votre fils l'an dernier, vous avez bouleversé la France,
04:09 lorsque vous l'avez annoncé, et vous êtes toujours là,
04:12 vous êtes toujours là à témoigner encore ce matin sur Europe 1.
04:15 - Mais parce que je reçois tous les jours des messages de familles désemparées,
04:19 et que j'ai vécu leur quotidien, il y a tellement de choses à faire,
04:23 que je ne peux pas baisser les bras et on ne peut pas les abandonner ces familles.
04:26 Et il y a eu trop de leurres, on a fait croire qu'on allait pouvoir mettre tous nos enfants
04:31 dans des prises en charge à l'école et que ça allait avancer.
04:34 Mais comme je vous le disais, le spectre autistique est tellement large,
04:37 qu'il y a quand même une grande part d'autistes qui resteront dépendants
04:40 de toute leur vie et qui ont besoin d'aide.
04:42 - Mais qui a fait croire qu'on pourrait prendre en charge dans des écoles
04:45 tous les enfants autistes de France, Eglantine Emmeillier ?
04:48 - Un peu tout le monde, pour être honnête.
04:51 Les associations se sont précipitées sur des méthodes comportementalistes,
04:55 des méthodes de prise en charge dont on nous a promis des merveilles,
04:58 donc on y a cru. Et on a aussi réussi, peut-être aussi, à convaincre l'État
05:03 que si tous les enfants allaient à l'école très tôt,
05:06 s'ils avaient les bonnes prises en charge, ils deviendraient des personnes autonomes.
05:09 C'est vrai, c'est vrai pour une bonne partie des autistes,
05:12 mais malheureusement, pour les plus difficiles,
05:14 ceux qui font vivre un enfer à leur famille et qui vivent un enfer,
05:18 là, on a fait une grave erreur.
05:20 - C'est le mythe de l'inclusion qui vole un peu en éclat,
05:23 dans ce que vous nous dites, Eglantine Emmeillier.
05:25 Ce discours selon lequel, effectivement, des enfants qui présentent
05:28 des troubles autistiques, finalement, avec d'autres enfants,
05:31 ils vont progresser tout seuls.
05:33 - En fait, il faut savoir ce qu'on entend par inclusion.
05:36 L'inclusion ne veut pas forcément dire "être comme les autres".
05:39 Au contraire. Je pense que oui, il faut les inclure dans la société,
05:43 c'est-à-dire leur donner une place, mais une place qui leur correspond.
05:46 Et l'école, ce n'est pas ça. Ce n'est pas toujours ça.
05:49 - Qu'est-ce qu'il faudrait aujourd'hui ? De quoi on manque, très concrètement ?
05:52 Comment on peut vous aider aussi, Eglantine Emmeillier ?
05:55 Les réalisations concrètes que vous faites, vous, avec Un Pas Vers La Vie,
05:58 votre association, racontez-nous.
06:00 - Aujourd'hui, on crée ce qu'on appelle nos espaces épanouis.
06:04 Ce sont des mini-écoles, un peu partout en France.
06:08 On est en train de se développer à toute vitesse,
06:10 parce que le besoin est énorme.
06:11 On trouve des éducateurs, on les met en relation avec les parents.
06:14 On prend les éducateurs que certaines familles ont déjà,
06:17 et on rassemble ces enfants dans quelque chose qui ressemble
06:20 le plus possible à une petite école, mais avec des couleurs adaptées,
06:24 des structures, des formes adaptées.
06:26 Et on leur fait vivre un quotidien, on leur apprend des moyens de communication,
06:30 parce que quel que soit le handicap, on peut en trouver.
06:32 Et ça, ça apaise pas mal de tensions.
06:34 Et puis, pour ceux qui le peuvent, on leur apprend à lire, à écrire.
06:38 Mais c'est vrai qu'à Un Pas Vers La Vie,
06:40 on a beaucoup d'enfants autistes très sévères ou atteints.
06:43 Donc, on n'en fera pas des travailleurs de main.
06:46 - Bien sûr. Et puis, c'est un sacerdoce, la prise en charge d'enfants autistes.
06:49 Et j'emploie à dessein ce terme de sacerdoce.
06:52 C'est pourquoi aussi, vous développez,
06:54 et c'est très important d'en parler, parce que l'équilibre des familles dépend de cela,
06:58 les maisons de répit. Vous pouvez nous expliquer ce que c'est ?
07:01 - Alors, je vous disais à quel point le quotidien avec une personne autiste
07:06 peut être épuisant quand ce sont des autistes sévères.
07:08 Et malheureusement, les parents ne s'arrêtent jamais.
07:10 En général, les mamans arrêtent de travailler, il y a des pères aussi.
07:13 Mais c'est nuit et jour, souvent.
07:16 Les maisons de répit, c'est essentiel pour que de temps en temps,
07:19 on puisse envoyer notre enfant dans une sorte de centre de vacances totalement adapté,
07:24 pour que la famille, et n'oublions pas la fratrie,
07:27 puisse quelques jours, de temps en temps, se reposer et vivre une vie normale.
07:31 C'est indispensable. Mais aujourd'hui, on manque de tout,
07:34 pour rebondir sur la question de tout à l'heure.
07:36 On manque aussi d'éducateurs. Ce sont des métiers difficiles, épuisants,
07:39 pas assez valorisés, pas assez payés.
07:42 Donc on a de plus en plus de mal à trouver des éducateurs et des éducatrices.
07:46 On manque d'argent, évidemment. On manque de places, on manque de structures.
07:50 Les associations ne vont pas résoudre les problèmes toutes seules.
07:53 Donc on a besoin aujourd'hui de recréer des places,
07:56 mais des places qui soient autre chose que les institutions d'avant,
07:59 où il y avait 80 personnes au même endroit.
08:01 Ça, c'est plus possible, plus personne n'en veut.
08:03 On a besoin de créer des petites maisons aussi,
08:05 dans lesquelles nos enfants devenus adultes vont vivre, soutenus, aidés, toute la journée.
08:09 - Merci pour votre parole, Eglantine Emeyer.
08:12 C'est toujours bouleversant de vous entendre.
08:15 Merci pour la force aussi que vous exprimez.
08:17 Je pense que c'est très important pour toutes les familles qui traversent l'expérience de l'autisme.
08:21 Votre association, Un Pas Vers La Vie, si on veut vous faire un don, c'est très facile.
08:25 Et puis on peut voir aussi votre documentaire.
08:28 J'en donne le titre, il est visible sur YouTube.
08:30 "Mon fils, un si long combat".
08:32 - Je vais y penser à toutes les familles aujourd'hui.
08:35 - Vous avez raison.
08:36 Ah bah tiens justement, merci à vous Eglantine Emey.

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