• il y a 8 mois

Aujourd'hui dans "Punchline", Laurence Ferrari et ses invités débattent de laïcité, des menaces terroristes contre les écoles françaises, de l'attentat islamiste en Russie et des attaques du 7 octobre, avec Gilles Kepel. Politologue, il vient de publier son nouveau livre "Holocaustes, Israël Gaza et la guerre contre l'Occident" aux éditions Plon.
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Transcription
00:00 [Musique]
00:08 Punchline, 18h-19h, Laurence Ferrari sur CNews et Europe 1.
00:14 [Musique]
00:16 18h38, on se retrouve dans Punchline sur CNews et sur Europe 1.
00:19 Gilles Kepel nous a rejoint. Bonsoir Gilles Kepel.
00:22 Vous publiez Holocaust, ce livre chez Plon, Israël, Gaza et la guerre contre l'Occident.
00:26 On va y venir évidemment parce que c'est le cœur de cet ouvrage.
00:28 J'aimerais juste savoir ce que vous pensez de ce qui se passe dans notre pays.
00:32 Les attaques de l'islamisme en France, à la lumière de ce qui s'est passé au lycée Maurice Ravel,
00:37 puisque le proviseur de cet établissement a été menacé de mort
00:40 après avoir demandé à une élève de retirer son voile, ce qui est conforme à la loi,
00:44 et que l'Éducation nationale trouve que c'est pour des convenances personnelles
00:49 qu'il a dû quitter ses fonctions, alors que c'est une défaite évidemment de la République.
00:53 J'aimerais juste qu'on écoute Didier Lemer, qui est un ancien professeur de philosophie
00:56 qui a vécu à peu près la même chose, qui a dû quitter aussi l'enseignement
00:59 après avoir été menacé de mort par les islamistes. Écoutez.
01:02 L'école, c'est l'école de la République, c'est l'école de l'émancipation,
01:06 c'est celle qui permet de devenir citoyen.
01:08 Et c'est donc la première cible, je pense, pour les islamistes aujourd'hui,
01:12 c'est de fracturer cette école.
01:14 En fracturant l'école, on fracture la nation,
01:17 on monte une communauté des individus qu'on assigne à une identité contre la communauté nationale.
01:23 C'est la victoire de la rébellion sur l'autorité, sur la règle,
01:29 et de façon générale sur la loi.
01:31 Les chefs d'établissement sont en première ligne pour faire appliquer les textes,
01:35 et donc ils sont les premiers visés.
01:37 Gilles Keppel, pourquoi l'école est-elle à ce point-là ciblée par les islamistes ?
01:41 Parce que c'est le lieu, comme l'a dit Didier Lemer à l'instant,
01:44 où on apprend l'esprit critique, la liberté,
01:48 et justement la hantise d'un certain nombre de militants islamistes.
01:52 C'est que, justement, l'école casse la logique séparatiste et communautaire,
01:57 et fonde les enfants dans le creuset national républicain,
02:03 qui n'empêche pas de garder sa foi, ses coutumes, ce qu'on veut,
02:07 mais l'emprise des religieux radicaux sur les enfants est diminuée d'autant
02:16 à partir du moment où ils élaborent une pensée critique
02:19 qui peut leur permettre de remettre en cause ces allégeances.
02:22 Ça veut dire qu'on n'est qu'au début de ces attaques contre l'école de la République ?
02:26 Que ça va se multiplier, s'intensifier, se diversifier ?
02:29 Non, puisque, comme on l'a vu de manière tragique,
02:32 l'assassinat de notre collègue Samuel Paty,
02:36 et ensuite de notre collègue Dominique Bernard,
02:39 par deux personnes qui étaient originaires justement de l'Asie centrale,
02:45 l'un en Tchétchène et l'autre en Ingouche,
02:48 c'est-à-dire ces zones aujourd'hui où l'État islamique version willaya du Khorasan,
02:56 dont il est originaire, et cet État islamique version Khorasan,
02:59 ce n'est pas du tout comme le Daesh que nous avons malheureusement connu.
03:03 Ce ne sont pas en grande partie des jeunes Français
03:07 qui sont partis et revenus à travers les expéditions qu'on a vues.
03:10 C'est une branche particulière,
03:12 que sont des Ouzbèques, des Tchétchènes, des Tadjiks, des Ingouches,
03:16 qui sont allés au djihad en Syrie, qui ensuite sont repartis.
03:20 Mais nous avons des communautés,
03:22 alors il ne s'agit pas de jeter bien sûr l'opprobre sur elles, dans leur ensemble,
03:26 dont certains membres sont venus en France,
03:28 qui ont été accueillis comme réfugiés politiques
03:30 après la deuxième guerre de Tchétchénie contre Poutine.
03:33 Et deux d'entre eux justement ont commis,
03:36 dans ce que j'ai appelé moi, le djihadisme d'atmosphère,
03:38 c'est-à-dire sans être dans une organisation,
03:41 mais en étant influencés par des réseaux sociaux, par des affinités,
03:45 ont commis ces deux crimes monstrueux,
03:48 à l'intérieur de l'école,
03:51 et des crimes contre des professeurs qui étaient assassinés.
03:53 Donc cette mouvance islamiste nous menace, y compris sur le sol français.
03:56 Et d'autant plus avec cette...
04:01 comment dire... cette incidence aujourd'hui
04:03 de le Hirassane, qui au début du mois de janvier
04:07 a causé un attentat en Iran,
04:10 ensuite à Moscou,
04:12 et bien évidemment dans la perspective des Jeux Olympiques,
04:15 c'est quelque chose qui offre
04:19 un spectacle majeur au monde.
04:23 Tous les regards sont tournés vers Paris,
04:27 et ça signifie évidemment que les services de sécurité
04:30 sont en alerte maximum.
04:32 Vincent Herouette, on a entendu hier le procureur du Parquet national antiterroriste,
04:36 M. Ricard, dire qu'il était absolument inquiet
04:38 de la sortie des radicalisés de prison.
04:40 Il y en a un certain nombre, quelques centaines,
04:42 qui sont en train d'être libérés petit à petit,
04:44 et ils représentent un danger réel.
04:46 Tous les responsables de la sécurité qui ne sont pas
04:49 en fonction et tenus au devoir de réserve disent à peu près la même chose,
04:52 c'est que ces JO se présentent assez mal,
04:55 sur le plomb de la sécurité justement.
04:57 Quant à les sorties de prison, ce qu'on voit c'est que le Daesh,
05:00 l'État islamique au Khorasan, s'est beaucoup développé
05:03 grâce justement à l'effondrement de l'État
05:05 au moment où les Américains sont partis,
05:07 et que les prisons se sont ouvertes en Afghanistan,
05:10 et ils ont pu ainsi recruter,
05:12 et avec quelques attentats bien sanglants,
05:17 se refaire une sorte de popularité dans les grands...
05:22 J'aurais voulu poser une question à Gilles Kepel,
05:24 qui connaît bien justement ces mouvements.
05:26 Vous n'avez pas été surpris dans l'attentat de vendredi ?
05:29 Rien ne vous a étonné ?
05:31 Le fait que le Daesh fasse appel à des...
05:33 - On parle de Moscou, Vincent.
05:35 - ... à des mercenaires. Pardon ?
05:37 - Vous parlez de Moscou, de l'attentat de Moscou.
05:39 - C'est ce que j'ai dit, Paris ? - Non, non.
05:41 - Je voulais préciser pour les militaires.
05:42 - L'attentat de Moscou ne vous a pas étonné dans son déroulement ?
05:44 - Des mercenaires ? C'est-à-dire que ce sont des gens qui ont été payés ?
05:47 - Oui.
05:48 - Ça, c'est ce que nous disent les services russes.
05:50 Donc pour l'instant, ce sont les aveux, comme vous avez remarqué,
05:54 quand on a vu... - Arrachés par la torture.
05:56 - ... quand on a vu les suspects,
05:58 ils avaient passé un mauvais quart d'heure.
06:00 Donc je serai prudent, si vous voulez,
06:03 pour tirer des conclusions pour l'instant.
06:06 - Je peux prolonger alors ce questionnement.
06:08 Je vais le formuler différemment.
06:10 Est-ce que ça ne vous a pas étonné ?
06:11 Normalement, on est plutôt habitué à des auteurs terroristes
06:15 qui viennent et qui se font soit exploser,
06:17 soit tuer pour ne pas être capturés vivants.
06:20 Et le fait qu'ils se fassent capturer,
06:21 somme toute, assez facilement,
06:23 alors qu'on avait l'impression qu'ils étaient extrêmement entraînés
06:25 et très armés, etc.,
06:27 est-ce que ça, ce n'est pas un petit peu étonnant
06:29 dans le déroulé par rapport à ce qu'on voit habituellement ?
06:31 - Oui, c'est étonnant, à condition que ce soit effectivement eux
06:34 qui aient commis les attentats.
06:36 On n'en est pas du tout sûr.
06:37 On ne peut pas considérer dans l'heure actuelle
06:40 que la parole des services de renseignement russe
06:44 est l'expression de la vérité urbie et torbie.
06:47 Je crois qu'il faut avoir une scène prudence en attendant cela.
06:51 - Dans votre livre "Holocauste",
06:53 vous reviez sur ce que vous appelez l'Arazia
06:55 qui a dévasté le 7 octobre 2023 l'État juif
06:57 où 1140 personnes ont été massacrées, violées, mutilées.
07:01 Vous évoquez aussi la riposte armée de Tsaïl sur Gaza
07:04 qui provoque des milliers de morts.
07:05 J'aimerais juste vous faire écouter le témoignage d'une ex-otage du Hamas.
07:09 C'est extrêmement rare, une femme qui s'appelle Amit
07:12 qui s'est livrée au New York Times
07:13 dans un très long entretien publié hier.
07:15 Elle révèle pour la première fois les pratiques du Hamas
07:19 sur les femmes qui sont otages
07:21 et notamment les violences sexuelles qu'elles subissent.
07:23 Récit de Camille Guédon.
07:24 - Un témoignage horrifiant.
07:27 Amit Soussana, ex-otage du Hamas,
07:29 raconte avoir été enlevée à son domicile,
07:31 battue et traînée à Gaza par au moins 10 hommes,
07:34 dont certains armés.
07:36 Plusieurs jours après son enlèvement,
07:38 enfermée dans une chambre d'enfants
07:40 et enchaînée à la cheville gauche,
07:42 un ravisseur a commencé à lui poser des questions sur sa vie sexuelle.
07:45 Aux alentours du 24 octobre,
07:47 son geôlier lui a enlevé cette chaîne
07:49 et l'a laissée dans une salle de bain.
07:51 - Il m'a assise au bord du bain
07:53 et j'ai fermé mes jambes.
07:55 J'ai résisté.
07:56 Il n'arrêtait pas de me frapper
07:57 et de me mettre son arme sur le visage,
08:00 puis il m'a traînée jusqu'à la chambre.
08:02 Il m'a forcée avec l'arme pointée sur moi
08:05 à commettre un acte sexuel.
08:07 Suite à ces révélations d'agression sexuelle,
08:09 Israël a réagi au plus haut niveau.
08:11 Daniel Hagary, le porte-parole de l'armée,
08:14 appelle le monde à agir.
08:16 - Il s'agit d'un témoignage horrible.
08:18 C'est un signal d'alarme.
08:21 Un appel au monde à agir,
08:24 à faire tout ce qui est en son pouvoir
08:27 et à faire pression sur le Hamas
08:29 pour qu'il libère nos otages.
08:31 Le Hamas nie ces accusations.
08:34 Mais un rapport de l'ONU, publié début mars,
08:36 faisait état de violences sexuelles
08:38 commises par des membres du Hamas
08:39 lors de l'attaque du 7 octobre
08:41 qui a fait plus de 1160 morts en Israël.
08:44 - Ce que vous décrivez dans votre livre,
08:46 ce qu'on vient d'écouter,
08:48 c'est un holocauste pour vous, Gilles Keppel ?
08:50 - Alors, j'ai utilisé ce terme...
08:52 - Dans le sens originel du terme ?
08:53 - Oui, j'ai utilisé ce terme "holocauste" au pluriel,
08:55 il y a un "s" dans le titre,
08:57 pour montrer en quoi l'accusation d'holocauste,
09:01 aujourd'hui, est utilisée
09:04 par un certain nombre d'acteurs sur place,
09:06 mais aussi internationaux,
09:08 de manière à changer complètement
09:10 notre vision du monde.
09:12 - Holocauste, c'est sacrifice de masse.
09:13 - Voilà, sacrifice de masse.
09:15 Et ce que va dire, par exemple, l'Afrique du Sud,
09:17 c'est que l'holocauste,
09:20 qui est la manière dont on appelait
09:21 l'extermination des Juifs par le nazisme en France,
09:24 jusqu'à ce que le terme hébraïque de Shoah
09:26 s'impose en France à la suite du film de Claude Lanzmann
09:30 et du succès qu'il a eu,
09:31 au fond, les Sud-Africains nous disent,
09:34 quand ils vont à la Cour internationale de justice,
09:36 c'est une vieille histoire,
09:37 ça date d'il y a longtemps,
09:38 c'est une histoire entre Européens et entre Blancs.
09:41 Ce qui est important aujourd'hui,
09:42 c'est de fonder le système moral de l'univers,
09:47 non plus sur le "plus jamais ça" de 1945,
09:50 où il y avait un accord entre les Soviétiques et les Occidentaux,
09:54 c'est une des rares choses qui a subsisté malgré la guerre froide,
09:57 mais bien plutôt sur ce qu'ils appellent
09:59 les crimes de la colonisation et de l'apartheid,
10:01 et de transformer le monde de cette manière-là.
10:04 Et dans cette vision-là,
10:06 donc, l'holocauste, le génocide, le peuple génocidé,
10:09 c'est-à-dire le peuple juif à qui la terre d'Israël
10:13 a été donnée par l'ONU,
10:15 dans des circonstances qu'on ne peut pas, d'ailleurs, discuter,
10:17 devait servir de refuge,
10:19 est devenu, dans leur vision, le peuple génocidaire,
10:23 puisque, dans leur interprétation,
10:25 donc, l'hécatombe qui a touché Gaza,
10:30 comme vous l'avez rappelé,
10:31 on ne sait pas exactement combien il y a de morts,
10:34 parce que ce sont les chiffres du panorama,
10:36 mais enfin, ils sont très nombreux,
10:37 25-30 000 morts, c'est beaucoup,
10:40 est aujourd'hui devenu ce qui s'oppose, d'une certaine manière,
10:44 à la légitimité même de l'État d'Israël.
10:46 Mais vous réfutez le mot de "génocide",
10:48 vous parlez d'une hécatombe.
10:49 Oui, alors j'utilise le mot "hécatombe"
10:51 parce que c'est le terme, si j'ose dire, technique le plus exact,
10:54 et je voudrais montrer que, précisément,
10:56 à partir du moment où on utilise le terme "génocide",
11:00 on prend partie dans un camp ou dans un autre.
11:03 Et moi, mon travail, comme universitaire,
11:05 ce n'est pas de me faire le porte-parole
11:08 d'un camp ou d'un autre,
11:09 mais d'essayer de comprendre
11:12 et d'analyser au plus juste ce qui s'est passé.
11:14 Vous voyez, j'ai été...
11:15 Vous aviez d'ailleurs eu la gentillesse de m'inviter,
11:17 j'avais publié un livre,
11:19 un trimestre précédent, qui s'appelait "Prophet en son pays",
11:23 et j'ai été très sollicité pour décrypter,
11:27 puisque j'étais avec l'expérience que j'avais,
11:29 ce phénomène du 7 octobre.
11:31 Donc, j'ai accumulé énormément d'informations,
11:34 et il m'a semblé qu'avec mes 40 ans d'expérience,
11:37 je pouvais mettre ce phénomène,
11:40 parce que je me suis enfermé chez moi dans le midi,
11:42 et j'ai écrit ce livre pour essayer de donner des matériaux
11:47 pour que nous arrivions à comprendre quels sont les enjeux.
11:50 Alors, par exemple, le témoignage que vous venez de présenter,
11:53 on avait bien sûr un certain nombre de gens qui avaient parlé de ça,
11:58 on avait eu des dénégations,
11:59 et je pense qu'au fur et à mesure,
12:01 c'est pourquoi c'est difficile d'écrire à chaud,
12:04 mais j'ai essayé de le faire en prenant toutes les précautions possibles,
12:07 au fur et à mesure, un certain nombre de témoignages de même ordre
12:11 vont émerger de nouveau,
12:12 et on aura aussi des témoignages sur ce qui s'est passé à Gaza,
12:15 où, comme vous le savez, la presse ne peut pas pénétrer.
12:18 Donc ça, c'est extrêmement important,
12:20 parce que bien sûr, ce qui s'est joué en Israël le 7 octobre et à Gaza ensuite,
12:26 est horrible pour des raisons différentes,
12:29 mais ce sont des gens qui sont morts,
12:31 dans l'affaire d'Israël, il y a eu des mutilations,
12:35 il y a eu des viols, visiblement,
12:37 dont l'autre, dans les bombardements de Gaza,
12:40 des gens n'ont pas été violés explicitement,
12:44 mais que vous soyez tués par une bombe ou rendus infirme à vie,
12:48 ce n'est pas rien non plus.
12:50 Et ce qui est important, je crois, c'est d'arriver à comprendre
12:53 comment tous ces phénomènes,
12:54 outre leur importance pour le Moyen-Orient,
12:57 pour les identifications auxquelles peuvent se livrer
13:00 un certain nombre de concitoyens et de compatriotes,
13:03 comment ça a transformé le monde.
13:04 Moi, j'explique notamment pourquoi il me semble que
13:07 le 7 octobre est un événement qui, finalement,
13:10 a plus de signification que le 11 septembre.
13:13 Personne, aux États-Unis ou en France, à l'époque,
13:16 autre, je dis vraiment minoritaire et inaudible,
13:19 n'a expliqué que le 11 septembre était un acte de résistance.
13:23 Vous avez eu la philosophe américaine,
13:26 la papesse du bouddhisme, Judith Butler,
13:29 qui a déclaré, chez les indigènes de la République à Paris l'autre jour,
13:33 "Octobre 7th was an act of resistance".
13:35 Ça avait l'air d'ailleurs en France, on disait ça.
13:38 C'est un acte de résistance, oui, c'est pas difficile à traduire.
13:40 Et évidemment, ça pose un certain nombre de questions.
13:44 Et de même, on voit ce qui s'est passé aux États-Unis.
13:47 Après le 11 septembre, l'université Harvard n'a pas été fracturée.
13:51 Sciences Po n'a pas été occupée, etc.
13:54 Vous voyez, donc, je crois que ce sont des conséquences,
13:56 y compris sur nos propres sociétés, qui sont très importantes.
13:59 On voit aujourd'hui que, par exemple,
14:02 l'ONU a voté une résolution de cesser le feu.
14:06 Monsieur Netanyahou s'assied dessus,
14:09 puisqu'il estime qu'aller au cesser le feu aujourd'hui,
14:12 s'il n'a pas cautérisé la plaie du 7 octobre,
14:16 c'est risquer son avenir politique en Israël.
14:18 Puis il pense qu'il peut aller relativement loin,
14:21 puisqu'il y aura des pressions minimales de la présidence américaine.
14:26 Monsieur Biden est candidat à ces réélections.
14:28 S'il pousse trop dans le cesser le feu,
14:32 il va être abandonné par l'électorat juif, qui ira chez Trump.
14:37 S'il ne le fait pas,
14:40 il risque de perdre la jeunesse et un certain nombre de minorités.
14:43 Donc, vous voyez, on est dans cette situation d'Israël et Palestine,
14:47 dans quelque chose qui nous concerne directement.
14:50 Vous m'avez posé une question sur les Jeux olympiques tout à l'heure
14:53 et sur ce qui se passait ici, dans les lycées.
14:56 C'est en fait un phénomène qui est à la fois très local,
15:00 mais en même temps qui est global et qui nous concerne tous.
15:03 Une toute petite question de Tatiana et de Vincent.
15:04 Oui, très rapidement, parce que vous disiez qu'il y a eu des viols, visiblement.
15:08 Il y a eu des viols, évidemment.
15:10 Aujourd'hui, il y a des enquêtes qui sont menées,
15:12 qui montrent que non seulement le 7 octobre, le jour du massacre,
15:14 les corps de femmes, d'enfants et d'hommes ont été mutilés,
15:17 - Les seins coupés. - Ensuite, dans les tunnels.
15:19 - On a eu un certain nombre de témoignages. - On voit aussi que selon les témoignages,
15:22 des femmes vont revenir en devant être avortées,
15:25 parce qu'elles auront été mises enceintes à la suite de ces nombreux viols.
15:29 - Ma question, la suivante... - Ma question est de savoir
15:31 combien vont revenir.
15:32 - Parce que la lutte est vivante. - Combien encore sont vivantes ?
15:34 Combien des 19 femmes en grottage vont revenir ?
15:37 On ne sait pas exactement.
15:38 Ma question, la suivante, c'est comment est-ce qu'on fait
15:41 pour faire comprendre aux personnes qui sont encore dans une sorte de relativisme
15:45 par rapport à ce qui s'est passé et ce qu'il se passe encore aujourd'hui dans ces tunnels,
15:49 et sans faire une concurrence victimaire ?
15:50 C'est-à-dire qu'il y a 32 000 par nom de mort, comme vous disiez,
15:53 selon le ministère du Hamas, c'est un chiffre invérifiable,
15:56 pas de journée sur place, mais un désastre aussi humanitaire, humain, etc.,
16:00 bien évidemment.
16:01 Mais cela dit, comment est-ce qu'on fait pour réaffirmer au monde
16:04 le fait que ce 7 octobre, l'État d'Israël a failli dans sa mission première,
16:07 qui était celle de la sécurité de son peuple,
16:09 mais surtout que c'est quelque part un génocide ?
16:11 Parce que les gens sont venus, le Hamas, les gens du Hamas sont venus
16:14 pour tuer, pour salir, pour mutiler des personnes qui n'ont qu'un cas d'Été juif
16:17 et juste pour cette raison.
16:19 Moi, ce que je fais dans mon travail d'universitaire,
16:21 si vous voulez, je ne suis ni porte-parole, ni journaliste, ni autre,
16:24 c'est d'essayer de restituer les faits dans leur totalité
16:28 au moment où j'ai écrit, si vous voulez, tout ce qu'il y avait à disposition
16:32 et de montrer pourquoi ça a été fait, comment ça a été fait.
16:37 Si vous lisez le livre, vous verrez que j'essaie de comprendre
16:40 quelles sont les logiques qui ont présidé à ce qui s'est passé.
16:43 Comment est-ce que le Hamas a pu justifier ses exactions,
16:48 y compris en se référant à un certain nombre de textes religieux
16:51 ou également pourquoi est-ce que M. Netanyahou a cru
16:55 que c'était une bonne idée de faire stipendier le Hamas par le Qatar
16:59 pensant qu'ainsi il pouvait dire tout ce qu'il voulait,
17:02 mais il ne mordrait pas, si je vous dirais.
17:04 J'ai longuement visionné en arabe les vidéos de Yair Yassinouar,
17:08 le chef du Hamas, etc.
17:09 Moi, c'est mon travail, c'est de faire ça, vous voyez ?
17:11 - Universitaire, effectivement. - Oui, j'essaie,
17:14 même si je n'y suis plus pour longtemps.
17:16 Vincent, rapidement, il nous reste...
17:18 Ce que dit le professeur Keppel est très subtil,
17:19 mais moi, dans le mode holocauste, il y a une dimension religieuse,
17:23 une dimension... Dans l'écriture, on offre un sacrifice en holocauste.
17:27 Et dans l'holocauste juif, que tous les antisémites ont voulu ramener
17:32 à un simple génocide en niant à la fois le caractère industriel
17:36 de profanation, même, caractère quasi satanique,
17:40 le fait de le mettre au pluriel, je le crains,
17:43 fera un grand plaisir à tous ceux qui veulent à tout prix renvoyer dos à dos
17:50 ce qui s'est passé le 7 octobre, qui était effectivement d'ordre génocidaire,
17:55 et puis le massacre qui a lieu en ce moment de civils à Gaza,
18:00 qui est un fait de guerre.
18:02 Alors, Pierre Keppel, il nous restera peu de temps, une minute.
18:04 J'entends votre remarque, et notamment dans un certain nombre
18:08 de milieux juifs, la remarque a été faite.
18:12 Quand ils ont lu le livre, ils ont abandonné cette remarque.
18:15 J'espère que vous lirez le livre aussi, Vincent.
18:17 Parce que, justement, ce que j'essaye d'expliquer, c'est que
18:20 ça n'est pas tellement à propos de ce qui s'est passé sur le terrain,
18:23 c'est la manière dont aujourd'hui l'histoire du monde,
18:27 les clivages du sud global contre le nord, est recodée à partir
18:33 de ces notions de low cost qui sont opposées à celles de la Shoah,
18:38 si vous voulez, et ça, c'est le véritable enjeu politique.
18:41 C'est la relativisation, c'est là-dessus que je m'interroge.
18:44 Ce pourquoi je mets ce S.
18:46 Merci beaucoup Gilles Kepel, votre livre fait plomb.
18:49 Merci Vincent Herbette, Tatiana Rondar-Bazac et Geoffroy Lejeune.
18:52 Dans un instant, vous retrouvez Hélène Zellani sur Europe 1 pour Europe 1 soir
18:55 et Christine Guely sur CNews pour Face 1 Info.
18:57 Bonne soirée à vous sur nos deux antennes. A demain.

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