Category
🗞
NewsTranscription
00:00 * Extrait de la vidéo *
00:06 Un chiffre pour résumer la situation des femmes en zone rurale vis-à-vis des violences.
00:12 En France, les territoires ruraux représentent 33% de la population française et 47% des féminicides.
00:20 33% de la population, 47% des féminicides.
00:24 Dans les campagnes, les femmes sont davantage confrontées à l'isolement, aux injonctions sociales.
00:29 Alors comment aider les femmes victimes de violences ?
00:32 Pour le comprendre, je vous propose tout d'abord de décrire la situation, la condition de ces femmes.
00:38 En quoi diffèrent-elles des femmes situées dans les zones urbaines ?
00:41 Bonjour Yaël Amsalen-Menghi.
00:44 Bonjour.
00:45 Vous êtes sociologue à l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire.
00:49 Et on vous doit un livre intitulé "Les filles du coin vivent et grandissent en milieu rural".
00:54 Ce livre a été publié aux éditions des presses de Sciences Po.
00:58 Il faut tout d'abord donner quelques chiffres sur un rapport qui a été fait autour des femmes et de la ruralité.
01:05 En finir avec les zones blanches de l'égalité, c'était le titre de ce rapport.
01:10 Il y a vraiment des conditions de vie différentes dans les zones rurales.
01:14 Lesquelles selon vous, Yaël Amsalen-Menghi ?
01:18 Alors déjà, ce n'est pas selon moi, c'est selon l'ensemble des données dont on peut bénéficier dans toutes les recherches scientifiques et dans les données de l'INSEE.
01:25 C'est d'une part le fait que les femmes par rapport aux autres en milieu urbain ou par rapport aux hommes en milieu rural,
01:35 les femmes en milieu rural d'une part sont concernées par des emplois qui sont plus précaires que le reste de la population.
01:42 Contrairement à l'image un peu, on va dire, rapide de la ruralité en milieu rural français,
01:48 on trouve d'abord des ouvriers et des ouvrières, des employés et des employées et des personnes qui travaillent dans les métiers de service.
01:53 Et donc pas du tout des agricultrices et des agriculteurs.
01:56 Il y en a, mais massivement, les espaces ruraux sont d'abord dominés statistiquement par les fractions basses des classes populaires ou par les classes populaires en France.
02:06 Ce qui va faire les spécificités, c'est à la fois les emplois et la spécificité des emplois,
02:11 les emplois précaires avec du temps partiel, des horaires fractionnés, des enjeux très forts sur une faible offre du travail
02:19 et donc considérer qu'on a de la chance d'avoir du travail et qui va exposer beaucoup toutes les femmes, en particulier les jeunes.
02:26 Mais toutes les femmes à des situations de violence dans le cadre professionnel.
02:30 Et puis, on en reparlera. Un autre élément qui va revenir beaucoup et qui va structurer vraiment tout ça,
02:36 c'est la précarité économique qui est finalement la fin, qui va expliquer la structurelle inégalité entre les femmes et les hommes en France
02:47 et dont on va voir que dans les situations de violence, ça va se retrouver vraiment l'enjeu de manière exacerbée.
02:52 Un autre élément qui est important, et puis peut-être je m'arrêterai là sur les espaces ruraux,
02:57 c'est la mobilité et tous les enjeux de déplacement, puisqu'on sait que les femmes, de toute façon, sont moins équipées d'une voiture,
03:04 ont moins souvent le permis de conduire que les hommes, et ça pour toutes les classes d'âge.
03:09 Et donc, elles vont se retrouver aussi à la fois plus à devoir fréquenter les transports publics,
03:15 or on sait qu'il y en a beaucoup moins dans les espaces ruraux,
03:17 elles vont se retrouver à devoir être tributaires de leurs conjoints ou de leurs réseaux pour pouvoir se déplacer,
03:23 ou de faire aussi voiture-taxi davantage que leurs alter-égos masculins.
03:27 Est-ce que l'isolement géographique, puisque l'habitat n'est évidemment pas le même dans les zones rurales,
03:32 est-ce que cet isolement géographique s'accompagne d'un isolement social, Yael Amsalem-Mangui ?
03:38 L'isolement géographique, il est très varié. La ruralité n'a pas de manière homogène d'exister dans les espaces ruraux français.
03:46 Même quand on prend sur un même département, selon là où on va aller,
03:51 typiquement si on prend l'Isère ou la Chartreuse, quand on est pile dans les montagnes,
03:54 ou quand on est dans les zones rurales autour, on va voir qu'il va y avoir une disparité d'offres.
03:59 Par contre, ce qu'on va voir, c'est qu'effectivement, il y a un enjeu sur les services publics de proximité,
04:04 qui sont largement et inégalement répartis et qui sont davantage concentrés ou accessibles dans les espaces urbains,
04:10 et qui n'ont pas autant d'existence dans les espaces ruraux,
04:13 avec malgré tout des histoires très différentes dans les espaces ruraux,
04:16 en fonction de l'action politique qui a pu s'y développer.
04:19 C'est-à-dire, qu'est-ce que l'on observe comme typologie ou comme manière d'être ?
04:25 On a, en tout cas d'après les études que vous avez réalisées, une forme d'isolement social,
04:33 de cohabitation différente des uns et des autres.
04:36 Qu'est-ce que ça provoque comme situation sociologique ?
04:40 Alors, ce qu'on va voir, alors moi j'ai travaillé d'abord sur les jeunes,
04:43 mais je pense qu'il y a des choses qui sont valables aussi pour les personnes "plus âgées",
04:48 c'est-à-dire au-dessus de 25 ans,
04:50 c'est qu'elles vont pointer très rapidement la faiblesse des services de proximité,
04:56 des services publics, dans lesquels elles vont mettre à la fois le fait de pouvoir faire sa carte d'identité,
05:01 mais aussi le fait d'accéder à des médecins,
05:03 mais aussi derrière le fait d'accéder à des associations, à une mission locale,
05:07 à des professionnels de santé,
05:09 et donc c'est là où on va voir que la faible densité des services d'aide,
05:13 plus le manque de transport en commun, va largement limiter l'accès aux services,
05:18 et dans des effets d'interconnaissance, va aussi faire qu'on ne peut pas accéder aux ressources de manière confidentielle.
05:24 Et donc il va y avoir un effet de stigmatisation plus fort sur les quelques associations,
05:29 les quelques espaces, parce qu'on sait où vont les gens,
05:32 quand est-ce que les gens vont à tel ou tel endroit.
05:34 Bon, donc on a un isolement relatif, un isolement professionnel, là vous l'avez évoqué,
05:42 il y a l'Amsalem Mangui,
05:43 et puis également, probablement, une injonction des injonctions sociales,
05:50 une sorte de contrôle social, comme disent les sociologues,
05:54 qui fait par exemple que la mise en couple est conseillée,
05:59 par exemple pour ces jeunes filles que vous avez étudiées, donc entre 14 et 25 ans.
06:04 Alors ce n'est pas que la mise en couple est conseillée, elle est attendue.
06:07 Jusqu'à 16 ans, c'est normal de ne pas être en couple,
06:09 après il faut montrer qu'on a déjà au moins repoussé des partenaires.
06:13 Et puis en fait, on va voir que les jeunes femmes les plus âgées que j'ai pu rencontrer,
06:16 donc entre 23 et 25 ans,
06:18 elles vont pointer le rappel à l'ordre, à la fois des filles du même âge,
06:22 mais aussi de l'ensemble des femmes de leur entourage,
06:24 et plus largement de leur entourage, avec les hommes qui y participent.
06:27 Mais les adultes sont très prescripteurs de normes,
06:29 et donc vont leur rappeler quand même quand est-ce qu'elles se posent,
06:31 quand est-ce qu'elles s'installent,
06:33 alors que le reste des filles de leur génération,
06:36 qui vivent dans les espaces ruraux comme elles,
06:38 elles se sont posées, elles se sont casées.
06:40 Et donc quelque part, il va y avoir un rappel à l'ordre,
06:43 un rappel à l'ordre de genre des femmes qui doivent se poser, se caser,
06:48 y compris conjugalement, professionnellement,
06:50 et puis familialement avec les enjeux d'entrer dans la parentalité.
06:53 Surtout pour les femmes qui ne sont pas diplômées ?
06:55 Alors moi j'ai travaillé sur les filles qui restent dans les espaces ruraux,
06:58 qui sont plus nombreuses à être faiblement diplômées,
07:02 ou moins diplômées que celles qui vont partir en ville,
07:05 continuer leur formation.
07:07 Donc c'est quelque chose qu'on va voir exacerber,
07:09 exacerber aussi lié aux tensions économiques.
07:11 Mais alors pourquoi y a-t-il une injonction particulière pour ces femmes-là ?
07:16 Alors vous dites qu'il y a une corrélation,
07:18 puisque les femmes, comme les hommes d'ailleurs,
07:21 qui sont dans les milieux ruraux,
07:22 sont principalement des ouvriers, des employés.
07:24 Mais pourquoi les normes sont-elles présentes ?
07:27 Pourquoi celles-ci ?
07:28 Alors pourquoi ces normes ?
07:29 C'est déjà parce que dans des situations de précarité économique,
07:33 le fait de pouvoir partir de chez ses parents,
07:35 c'est aussi le fait de venir s'installer.
07:38 Et en fait, dans tous les parcours que j'ai pu rencontrer,
07:39 même s'il y a une espèce de représentation un peu collective
07:42 des filles qui ne seraient pas assez ambitieuses,
07:44 ou qui n'oseraient pas, ou qui ne seraient pas assez mobiles,
07:46 toutes les filles que j'ai rencontrées,
07:48 celles qui sont parties, elles se sont installées chez leurs conjoints.
07:52 En tout cas, il n'y a jamais des conjointes qui sont venues s'installer chez elles, par exemple.
07:56 Et donc elles vont s'installer avec leurs conjoints,
07:58 ou elles vont s'installer dans la famille de leurs conjoints.
08:00 Et donc ça, c'est des choses qu'on va voir.
08:02 Les garçons ne sont jamais finalement dans la famille de leurs copines,
08:05 ou en tout cas très rarement.
08:07 Dans l'enquête, ce n'est pas quelque chose qui apparaît.
08:10 Et donc ça, c'est des choses qui vont revenir aussi sur les injonctions qui vont peser,
08:14 sur le devoir aussi de grandir et vouloir partir de chez ses parents,
08:19 avec des conditions économiques qui ne permettent pas de partir de chez ses parents.
08:23 Il y a aussi à côté des relations amoureuses,
08:26 il y a les relations amicales, les formes de sociabilité.
08:29 Qu'est-ce que vous observez alors notamment pour ces jeunes femmes,
08:32 puisque vous avez particulièrement étudié les jeunes ?
08:36 Quels sont donc les liens qu'elles nouent ?
08:39 Est-ce qu'il est possible de faire une distinction par rapport aux jeunes femmes de milieu urbain ?
08:45 Alors, il y a plusieurs éléments sur les relations amicales qui vont revenir.
08:50 D'une part, il y a le fait que tout le monde se connaît depuis la plus petite enfance.
08:54 Donc voilà, ce qui n'est pas forcément aussi évident au milieu urbain.
08:56 Il y a des déménagements.
08:57 Alors, en milieu rural aussi, il y a beaucoup de déménagements,
08:59 mais elles vont déménager dans des périmètres qui vont faire qu'elles vont encore se voir,
09:03 elles vont encore se fréquenter autour d'établissements scolaires qui sont moins nombreux.
09:06 Et donc, elles vont se retrouver assez vite.
09:08 En milieu urbain, dès qu'on déménage, on change d'établissement, on ne se voit plus.
09:11 Éventuellement, on maintient des liens avec des groupes sur les réseaux sociaux.
09:15 Donc voilà, il va y avoir après des catégories de groupes de filles,
09:19 avec qui il va y avoir des processus de classement et de déclassement,
09:22 avec des groupes de filles qui sont fréquentables versus des filles qui ne sont pas fréquentables.
09:26 Au fur et à mesure de l'adolescence, et ça, on va le retrouver aussi en milieu urbain,
09:30 mais parmi les filles qui deviennent moins fréquentables,
09:32 c'est aussi les filles qui ne se sont jamais montrées avec un garçon.
09:35 Les filles qui, avec l'avancée en âge, on va voir qu'il va y avoir des suspicions.
09:39 Alors, des suspicions de filles qui peuvent être susceptibles de poser des problèmes,
09:44 de ne pas être conformes finalement à l'ordre de genre.
09:46 Et donc, on va quelque part s'en distinguer.
09:49 Mais aussi, on va s'en distinguer parce que dans le quotidien,
09:52 le quotidien d'être en couple ou d'avoir des enfants
09:54 ne va pas être le même que les filles qui ne sont pas en couple.
09:56 Et/ou qui n'ont pas d'enfants.
09:59 On va voir aussi que les relations amicales, elles vont être basées sur un entre-soi.
10:06 Un entre-soi de classe, un entre-soi de genre où les filles vont être solidaires.
10:10 Et c'est ce qu'on écrivait avec Benoît Coquart, mais il y a une solidarité qui existe
10:14 dans un contexte de concurrence, de concurrence sur les partenaires,
10:16 de concurrence sur l'emploi.
10:18 Et donc, il ne faut pas idéaliser une espèce de solidarité particulièrement heureuse
10:23 en milieu rural et qui n'existerait pas dans les espaces urbains,
10:26 anomiques, dans lesquels personne ne se connaîtrait.
10:29 La réalité, elle est bien plus contrastée et on observe vraiment des effets aussi de concurrence,
10:35 y compris sur les emplois un peu en vue, typiquement secrétaire de mairie ou travail à la poste
10:39 ou les postes un peu stables dans les usines, un peu qualifiés
10:43 ou dans les hôpitaux ou à l'EHPAD, par exemple.
10:46 Et donc là, on va voir très vite les enjeux de concurrence entre les filles
10:49 qui sont alimentées par les adultes aussi et qui vont rejouer et renouer
10:54 avec les histoires familiales des unes et des autres,
10:57 où elles vont se retrouver aussi finalement responsables et tributaires
11:01 des histoires passées de leurs grands-parents, arrière-grands-parents
11:04 et qui vont se rejouer au moment de leur entrée dans la vie adulte.
11:07 Est-ce que les réseaux sociaux changent quelque chose ?
11:09 Alors oui, les réseaux sociaux changent quelque chose par rapport à leur mère ou à leur grand-mère.
11:14 C'est qu'elles vont réussir à maintenir des liens avec leurs copines de primaire,
11:17 y compris quand les orientations scolaires se sont éclatées,
11:20 y compris quand elles vont déménager et tout ça.
11:22 En fait, on va voir que même si c'est des filles qu'elles ne fréquentent plus,
11:24 même si c'est des jeunes qu'elles ne fréquentent plus, elles vont maintenir des liens.
11:27 Et donc, on ne va pas garder les mêmes liens, mais les filles, les femmes, par exemple,
11:31 leur mère, elle devait passer d'un univers local avec leurs amis et tout ça,
11:35 de l'enfance et de l'adolescence à l'univers conjugal,
11:39 l'univers avec leur partenaire puisqu'elles partaient chez leur partenaire.
11:42 Aujourd'hui, les filles qui partent chez leur partenaire,
11:44 elles peuvent maintenir des liens avec leurs relations antérieures.
11:48 Yael Hamsalem Mengui, on vous doit les filles du coin vivre et grandir en milieu rural
11:53 aux éditions des presses de Sciences Po, avec des conditions de vie de ces femmes
11:58 en milieu rural qui sont singulières et notamment dans le contexte des violences faites aux femmes.
12:04 Dans quelques minutes, dans une vingtaine de minutes, vous serez rejointe par deux femmes
12:11 qui militent l'une au planning familial et l'autre qui dirige une association d'entraide
12:16 qui vient en aide à ces femmes victimes de violences.
12:19 Et on verra donc quels sont les contextes spécifiques des femmes qui habitent dans ces lieux.
12:25 7h56 sur France Culture.
12:27 6h39, les matins de France Culture.
12:33 Guillaume Erner.
12:34 En France, 47% des féminicides ont lieu en zone rurale,
12:38 alors que ces dernières n'abritent que 33% de la population française.
12:43 Peut-on pour autant en déduire que les femmes sont plus vulnérables aux violences sexistes
12:48 et sexuelles dans les campagnes qu'en ville ?
12:50 Quelles sont les particularités des violences faites aux femmes dans les territoires ruraux ?
12:54 On en a parlé avec vous, Yael Hamsalem Mengui,
12:58 vous êtes sociologue chargée d'études et de recherche à l'Institut National de la Jeunesse.
13:02 On vous doit les filles du coin vivre et grandir en milieu rural
13:05 aux éditions des presses de Sciences Po.
13:07 Vous nous avez expliqué qu'il y avait une sociologie particulière aux milieux ruraux,
13:11 avec une population qui était principalement composée d'ouvriers et d'employés,
13:17 tout simplement parce que les agriculteurs ne sont que 400 000 en France,
13:20 donc ils ne peuvent pas constituer l'essentiel des habitants des zones rurales.
13:26 Et il y a un contrôle social important avec une norme qui veut que
13:32 les jeunes femmes se mettent en couple, surtout si elle n'est pas diplômée.
13:37 Lorsqu'elle a moins de 25 ans, on considère qu'il faut se mettre en couple.
13:43 Et puis, une forme d'isolement social qui s'explique notamment par une concurrence,
13:48 concurrence pour les emplois qui sont probablement moins nombreux,
13:53 pour aussi la mise en couple, on vient de l'évoquer.
13:57 Et puis, enfin, on a une situation où une cohorte d'individus
14:03 vit bien souvent ensemble sur la longue période,
14:07 parce que même si les déménagements sont aussi importants en zone rurale qu'en zone urbaine,
14:13 eh bien, elles sont allées dans les mêmes établissements scolaires et donc se suivent.
14:19 Pour poursuivre cet éclairage spécifique, nous sommes en duplex avec Anne Okaïs.
14:25 Bonjour.
14:26 Oui, bonjour.
14:27 Vous êtes directrice de l'association Réseau Femmes à l'abri dans la Drôme.
14:32 C'est une association qui se charge donc de trouver un logement, de mettre à l'abri
14:38 les femmes qui sont victimes de violences dans ces milieux ruraux.
14:43 Et puis Sarah Younah, c'est un nom d'emprunt. Bonjour.
14:46 Oui, bonjour.
14:47 Vous êtes militante au planning familial de Saint-Iriex, la Perche, dans Haute-Loire.
14:54 Vous, vous êtes une association présente dans la première étape.
14:57 Autrement dit, vous sensibilisez ces femmes à la manière dont elles peuvent,
15:03 dont elles doivent se méfier des violences qui pourraient être commises à leur endroit.
15:10 Finalement, Sarah Younah, dans votre travail quotidien, qu'est-ce que vous faites ?
15:14 Quelles sont les femmes qui sont à l'écoute de vos conseils
15:20 et quelles sont les problématiques auxquelles elles sont exposées ?
15:24 Alors déjà, je vais juste me permettre de vous reprendre.
15:26 Donc nous sommes situés en Haute-Vienne.
15:27 Nous sommes le planning de Saint-Iriex-la-Perche.
15:31 Nous, principalement, nous sommes une association qui fait de la prévention du conseil
15:36 et qui offre un espace d'accueil et d'écoute pour les personnes qui en auraient besoin.
15:41 Globalement, les personnes qui viennent à nous sont des personnes qui, d'abord,
15:46 ont besoin d'informations et d'orientations quant à la santé sexuelle.
15:50 Et ça va concerner aussi tout ce qui est contraception, IVG.
15:54 C'est par là, en fait, c'est notre porte d'entrée auprès des personnes.
15:59 Et c'est souvent par là qu'on décèle des violences.
16:01 Donc nous, ce n'est pas la demande principale, les sujets de violence.
16:07 Mais on est effectivement très sensibles et surtout très à l'écoute des femmes
16:12 qui arrivent avec, par exemple, une question concernant un rapport non protégé.
16:18 Un rapport non protégé, pour nous, c'est savoir si ce rapport a été consenti.
16:21 Et s'il n'a pas été consenti, est-ce qu'il a été fait dans un cadre de violence ?
16:27 Et dans ces cas-là, ça nous alerte et ça nous permet d'orienter la personne
16:30 s'il a besoin d'une mise à l'abri ou de porter plainte.
16:34 Est-ce qu'il est possible de trouver des différences à Rayuna
16:38 entre cette situation à laquelle vous êtes confrontée
16:42 et la situation de femmes du même âge dans des zones urbaines ?
16:47 Ce que dit très bien Mme Amselen-Menghi, c'est qu'en campagne,
16:52 on est dans des réalités où les personnes sont isolées de par le territoire géographique
16:58 qui est assez vaste et où il faut prendre la voiture pour se déplacer,
17:01 où tout le monde se connaît.
17:03 Ce qui implique que dénoncer des violences, des viols,
17:07 dans un milieu où tout le monde se connaît, ce n'est pas évident la plupart du temps.
17:11 Voilà, donc je pense que ça, c'est la première chose.
17:13 L'isolement rend les femmes fragiles puisqu'aller rencontrer son voisin
17:20 des fois pour être mise à l'abri n'est pas si évident que ça
17:23 quand on habite à 600 mètres de la personne la plus proche
17:26 et quand cette personne connaît très bien son mari ou son conjoint par ailleurs.
17:31 Il y a l'âme, Mme Amselen-Menghi, un commentaire.
17:33 Oui, alors dans cette idée-là, en fait, ce qu'on observe,
17:35 c'est que les violences que subissent les femmes participent clairement
17:38 à leur socialisation de genre et on va voir finalement au fil de l'âge
17:42 un continuum de violences dont parlent plusieurs sociologues
17:45 comme Marilyn Libert ou comme Marion Thiouz
17:47 et qui vont montrer combien les femmes vont être concernées davantage
17:51 dans les violences intra-familiales et puis ensuite conjugales,
17:54 y compris dès l'adolescence et puis après dans la formation,
17:58 notamment dans les stages et dans l'apprentissage et puis après dans le travail
18:01 et puis aussi dans l'espace public.
18:02 Et donc, ce n'est pas une séparation espace public-espace privé
18:05 où il y aurait des violences spécifiques ou des violences à un endroit et pas à un autre,
18:09 mais on va voir un continuum de violences où les femmes sont exposées
18:13 et sont exposées dans un réseau d'interconnaissances
18:17 qui va aussi mettre les femmes en difficulté davantage
18:19 dans les espaces ruraux que dans les espaces urbains.
18:21 Il y a aussi, Sarah Younah, le fait qu'il y a, semble-t-il, des normes,
18:26 on l'a vu avec Yalem Salem-Menghi, des normes qui sont plus fortement contrôlées
18:33 peut-être en zone rurale qu'en zone urbaine.
18:36 Qu'est-ce que ça veut dire pour ces femmes que vous recevez ?
18:39 Quelles représentations se font-elles de leurs devoirs, de leurs droits,
18:43 de la manière dont le couple doit être constitué ?
18:49 Effectivement, ce que dit très bien Mme Salem-Menghi,
18:53 c'est que nous, on s'aperçoit que les femmes en ruralité,
18:57 elles sont habituées à ce continuum des violences,
18:59 donc supporter de la violence au quotidien,
19:02 c'est quelque chose qui fait partie de leur réalité
19:04 et elles n'ont pas forcément conscience que ça, c'est de la violence.
19:08 Donc, souvent, effectivement, nous, ce qu'on perçoit
19:11 quand on reçoit des personnes en permanence,
19:13 c'est qu'elles n'identifient pas ces violences au quotidien comme en étant
19:17 et donc, il y a tout un travail qui va être de mettre des mots là-dessus
19:23 et de leur demander si pour elles, ce qui se passe leur paraît normal,
19:27 si c'est vivable et si elles ont envie de continuer à vivre ce qu'elles vivent.
19:33 Et c'est là où ce n'est pas évident parce que le contrôle social étant tellement fort,
19:37 la honte aussi, la honte d'être victime, d'être reconnue comme victime,
19:41 ce n'est pas évident de se reconnaître victime
19:44 et de faire appel aux autres, de demander de l'aide.
19:49 Donc, tout ça, ça participe effectivement d'un climat
19:52 où il faut, dans les accompagnements de violences, prendre le temps.
19:56 C'est des accompagnements qui sont longs, qui demandent souvent plusieurs entretiens
20:01 et souvent, effectivement, la première parole, c'est de dire
20:04 mais vous n'êtes pas seul face à ça, on est là
20:06 et on peut vous accompagner.
20:08 Et ça, c'est très important puisque souvent, cet isolement
20:11 procure pour ces femmes-là un sentiment que ça ne sert à rien d'aller s'exprimer
20:15 ou de trouver des solutions puisque de toute façon, elles seront isolées et seules.
20:19 - Oui, parce que c'est paradoxal, c'est un isolement et pour autant une absence d'anonymat.
20:24 - Tout à fait, vous le résumez très bien.
20:26 - Mais alors, là, il y a l'Amsalem Mungui,
20:30 cet anonymat impossible à avoir, cet isolement impossible à briser
20:37 donc il crée finalement une situation qui est largement plus défavorable en milieu rural.
20:42 - Voilà, c'est ça. En fait, l'idée, ce n'est pas de pointer les femmes en milieu rural
20:46 comme très différentes de leurs altérégaux en milieu urbain
20:49 ou de penser que les violences seraient vraiment caractéristiques des espaces ruraux
20:53 ou d'une certaine classe sociale.
20:55 On sait, et là, on l'a vu, on l'a entendu dans les médias depuis plusieurs mois,
20:59 que c'est toutes les classes sociales, que toutes les femmes peuvent être concernées par des violences.
21:02 Mais effectivement, les enjeux d'interconnaissance renforcent les situations
21:07 de précarité relationnelle, de précarité économique
21:12 puisqu'on va se sentir un peu face au patron qu'on connaît
21:15 parce qu'on a eu le poste par un copain, par ses parents, par quelqu'un qu'on connaît,
21:20 loyal vis-à-vis du patron et donc dans les situations de harcèlement au travail,
21:23 que ce soit du harcèlement professionnel ou du harcèlement sexuel ou les deux,
21:27 on ne peut pas dénoncer son patron qui est aussi le patron de ses parents ou de ses grands-parents
21:30 mais qui peut être son propriétaire ou qui peut être juste le cousin, le copain ou la grand-mère.
21:37 Voilà, toutes les classes sociales mais il y a quand même un chiffre à expliquer,
21:41 il y a l'MSLM-Mingui, je l'ai dit, c'est un chiffre très frappant.
21:44 33% de la population française habite en zone rurale
21:48 et ces zones concentrent 47% des féminicides.
21:51 Si on considère qu'il y a une surreprésentation de certaines catégories sociales
21:56 des ouvriers et des employés en zone rurale,
21:59 est-ce que là, ce n'est pas une typologie particulière
22:04 qui serait liée à certaines classes sociales productrices de violences dans ces zones-là ?
22:10 Je ne sais pas si on peut le ramener à des classes sociales.
22:12 Par contre, ce qui est sûr, c'est qu'on peut ramener ça à la faible densité
22:16 des services d'aide qui sont caractéristiques des espaces ruraux.
22:18 Le fait d'avoir un maillage associatif...
22:20 Peu d'alertes, peu de dispositifs d'alerte ?
22:23 Peu de moyens.
22:23 Peu de moyens pour les femmes d'aller demander de l'aide,
22:26 même s'il y a des associations qui se démènent sur le territoire,
22:28 même si par espace on a des élus qui vont se démener.
22:32 On voit aussi l'importance des maires ruraux,
22:34 et ça Pauline Delage, elle le montre bien,
22:36 des maires ruraux qui vont occuper une place importante dans le repérage.
22:39 Elles connaissent tout le monde, les maires ruraux rurals.
22:43 Et donc, quand ils ont décidé de se servir de leur réseau de sentinelles
22:47 pour repérer les violences et les prendre en charge,
22:49 ils et elles ont la charge aussi de la gestion de la délinquance.
22:52 Donc voilà, quand ils ont décidé ou elles ont décidé de fermer les yeux,
22:55 ils ont aussi la responsabilité derrière.
22:58 Donc il y a tous ces moments-là où on va voir que les effets de l'interconnaissance
23:02 sont par contre très spécifiques aux espaces ruraux.
23:04 Qu'est-ce que vous en pensez Sarah Younah ?
23:06 Est-ce qu'il y a typologie des récurrences parmi les hommes violents ?
23:14 Non, effectivement, moi je pense que ça traverse un peu toutes les couches socioprofessionnelles
23:20 et toutes les classes.
23:22 Et effectivement, ce que nous on peut opposer à ce qui se passe en campagne,
23:27 c'est de créer des réseaux d'entraide fort et de créer effectivement
23:32 pour les femmes qui en ont besoin et les minorités sexuelles qui en ont besoin,
23:38 des réseaux de solidarité où on est très en lien.
23:41 Ce qui permet de contrebalancer ce qu'explique Madame Yahyam Salem-Mangui,
23:46 c'est que comme cette interconnaissance, elle crée de la pression sociale supplémentaire,
23:51 il faut être très fort en face et très solidaire
23:54 pour pouvoir mettre à l'abri les femmes qui en ont besoin.
23:57 Est-ce que la gendarmerie joue un rôle spécifique ?
24:01 Tout à fait, nous on a une gendarmerie qui depuis deux ans s'active à former des agents
24:06 à l'accueil des personnes victimes de violences notamment domestiques.
24:11 Et on se rend compte qu'il y a une vraie volonté dans certains territoires
24:16 d'être un relais pour ces femmes-là et en ça on ne peut que les saluer
24:19 parce que justement dans des territoires où l'interconnaissance ne favorise pas la libération de la parole,
24:26 souvent les gendarmes chez nous sont les premiers à être au courant de ces violences domestiques
24:30 et à pouvoir intervenir.
24:31 Donc on salue vraiment l'effort qu'ils font chez nous, en tout cas en haut du N.
24:36 Anne Okaïs, vous vous êtes située à une étape postérieure de celle qu'évoque Sarah Ayoudin
24:45 qui est la militante au planning familial
24:46 puisque vous recueillez ces femmes qui sont donc victimes de violences,
24:51 vous leur offrez un hébergement d'urgence.
24:55 Comment ça se déroule ? Quels sont donc les cadres pour ces femmes qui viennent auprès de vous ?
25:03 Alors on a aussi un travail de prévention parce qu'on a un dispositif itinérant
25:07 qui est absolument nécessaire en milieu rural.
25:10 On a un petit camion à bord duquel on peut faire des entretiens avec des femmes,
25:13 aller les rejoindre là où elles se trouvent.
25:15 Ça nous permet de repérer, ça nous permet d'être repérés par des partenaires
25:19 qui peuvent faire appel à nous.
25:20 Et en effet, les femmes qu'on accueille sont victimes elles de sans-abris.
25:25 On va plutôt en parler comme ça parce qu'il existe des dispositifs publics d'hébergement d'urgence,
25:31 en tout cas dans la Drôme parce que ça marche par préfecture,
25:34 qui accueillent de manière inconditionnelle les femmes victimes de violences.
25:37 Et nous on accueille les femmes qui sont exclues des dispositifs d'hébergement d'urgence.
25:42 Oui, parce que le problème, il est très concret.
25:45 Les femmes en milieu rural ont beaucoup plus de difficultés à trouver un logement
25:53 loin de leurs conjoints parce que bien souvent, à Nocaïs, leur travail
25:57 est évidemment lié à leur situation géographique et à la différence des femmes
26:04 qui vivent en milieu urbain, il est plus difficile de trouver l'anonymat dans un autre lieu.
26:10 Ça d'une part, le travail quand elles en ont, c'est-à-dire que même au tout début de la boucle,
26:16 quand une femme décide de s'échapper d'un contexte de violence en milieu rural,
26:22 en tout cas dans notre département, elle a le choix d'aller dans les deux villes
26:25 qui sont Valence et Montélimar, dans lesquelles il y a des hôtels sociaux
26:28 qui ne sont pas forcément adaptés non plus à leur profil, à leurs caractéristiques.
26:33 Donc elles doivent rompre avec leur milieu professionnel,
26:36 leur milieu social, le lieu de scolarité des enfants
26:39 et être dans un contexte qui n'est pas favorable à l'apaisement.
26:43 Parce que par exemple, il y a une maman qui nous racontait qu'elle s'est retrouvée en hôtel.
26:49 Elle est de milieu rural d'une toute petite commune,
26:52 elle s'est retrouvée avec ses deux enfants de 2 et 4 ans en hébergement en hôtel d'urgence.
26:58 Elle, elle était au premier étage, il y avait une cuisine au deuxième étage.
27:02 Les enfants n'étaient pas autorisés à aller dans la cuisine,
27:04 donc elle ne pouvait pas cuisiner en présence de ses enfants.
27:06 Donc elle devait laisser des enfants de 2 et 4 ans dans une chambre tout seul, enfermée,
27:09 pour cuisiner. Bref, c'était tout à fait inadapté.
27:12 Et en plus, se jouait à l'intérieur de cet endroit-là de la violence,
27:16 parce que c'est un endroit qui accueille tout un tas de personnes qui sont en situation d'errance.
27:21 Donc il y avait de la consommation toxique, il y avait de la violence entre les résidents.
27:27 Donc c'était quelque chose qui lui a fait dire "j'ai envie de retourner chez mon mari".
27:30 Et l'assistante sociale qui l'accompagne lui disait
27:32 "mais si vous retournez chez votre mari, les enfants seront en danger, on va vous les prendre".
27:36 Donc elle était prise en étau dans un contexte qui était absolument intenable.
27:40 C'est ce qui fait que des associations comme la nôtre commencent à se créer,
27:45 des élus commencent à mobiliser des logements communaux.
27:47 - Que lui est-il arrivé justement à cette femme et à ses deux enfants ?
27:50 - Eh bien au bout d'un moment, elle a enfin été positionnée sur un petit appartement d'insertion,
27:57 dans lequel elle a pu enfin se poser, évoluer et stabiliser sa situation.
28:03 - Là en l'occurrence on a affaire à une femme qui travaillait ?
28:07 - C'est une femme qui ne travaillait pas.
28:08 C'est une femme qui ne travaillait pas, c'est une femme dont le titre de séjour dépendait du monsieur,
28:12 qui a dû couvrir absolument tous ses droits, c'est-à-dire bénéficier de ses ressources propres.
28:17 Donc c'est des démarches qui prennent beaucoup de temps.
28:19 Donc ce sont des accueils qui sont très longs,
28:22 parce que souvent les femmes ne travaillent pas, elles s'occupent des enfants,
28:25 ou il y a des travaux à temps très très partiels qui ne suffisent pas à subvenir à leurs besoins.
28:30 Donc le temps d'ouvrir toutes les démarches administratives qui sont dématérialisées,
28:33 qui prennent énormément de temps, pour que les personnes aient accès à leurs ressources,
28:37 aient accès à leur logement, aient accès à la scolarité, l'insertion, etc.
28:40 Ce sont des accueils qui peuvent durer très longtemps.
28:43 - Yael Hamsalam, Mungui.
28:44 - Oui, alors pour revenir sur ce qui vient d'être dit,
28:46 en tout cas moi un truc qui sort beaucoup dans l'enquête sur les filles du coin,
28:50 c'est que les plus jeunes font part d'une inacceptation plus forte des violences,
28:56 et notamment des violences dans le cadre familial.
28:58 Et contrairement à leur mère, le fait de pouvoir quitter leur conjoint en situation de violence,
29:04 le fait de pouvoir casser leur couple, c'est quelque chose qui émerge largement au même titre
29:09 que l'importance d'être indépendante économiquement.
29:11 Et donc là on va voir une génération qui finalement a bénéficié de tout un discours,
29:16 de toute une société qui bouge, qui bouge lentement sur la prise en compte des violences,
29:21 mais avec le fait qu'on n'est pas obligé de rester dans des couples où c'est dysfonctionnel,
29:25 dans des familles où ça ne va pas, où on subit des violences.
29:28 Et ça c'est quelque chose qui émerge largement de la place, de la part des femmes,
29:32 même si les conditions de précarité vont faire qu'elles vont être maintenues malgré tout dans des contextes de violence.
29:39 Et alors Anne Okaïs, tout à l'heure il était question donc des régularités observables dans les situations de violence.
29:47 Est-ce qu'on a affaire à certains types d'hommes sur le plan des CSP, des catégories socio-professionnelles ou pas ?
29:54 Semblent-ils les deux personnes, les deux invités ILM, Salem Menghi et Sarah Younan, ne voyaient pas de régularité observable ?
30:04 Peut-être l'alcool, c'est d'après ce que j'ai lu, un facteur commun à beaucoup de ces situations.
30:11 Est-ce que c'est ce que vous observez ? Est-ce que vous observez d'autres choses ?
30:15 Alors ce qu'on observe, c'est peut-être des habitudes liées à la honte et à l'appartenance à une classe sociale
30:23 qui autorise ou non à s'adresser à des travailleurs sociaux.
30:26 Donc nous on a des personnes qui viennent nous rencontrer, qui ont été en contact de près ou de loin,
30:33 il y a longtemps ou il n'y a pas longtemps, avec des travailleurs sociaux parce que leur situation familiale
30:37 quand ils étaient jeunes ou leur situation actuelle les a emmenés à bénéficier d'aide ou avoir besoin d'aide de travailleurs sociaux.
30:45 Les CSP+ on les voit beaucoup moins parce qu'il n'y a pas ce réflexe-là d'appeler à l'aide et de contacter quelqu'un de tiers.
30:51 Il y a quelque chose qui est vraiment de l'ordre de l'échec de la honte et on ne sait pas qu'ils n'existent pas
30:58 parce qu'on peut rencontrer des femmes catégorie CSP++ dans des situations très très dégradées.
31:06 C'est-à-dire que tout le travail de prévention et d'alerte qui peut avoir lieu de manière un peu primaire
31:10 avec ce premier contact qui peut venir faire rencontrer la personne au moment où les violences émergent,
31:17 au moment où il est possible encore de poser un stop, les CSP++ on les rencontre dans des situations beaucoup plus dégradées
31:23 où là il s'agit d'urgence vitale. Nous c'est ce qu'on peut observer.
31:27 Après je n'ai qu'une connaissance en pyrite.
31:29 - Pardonnez-moi, je vous coupe comme vous êtes en duplex à Nocaïs.
31:33 Mais alors là j'imagine que vous travaillez étroitement avec la gendarmerie ?
31:38 - Oui tout à fait. Et d'ailleurs c'est surprenant parce que je vois qu'en Haute-Vienne c'est la même chose.
31:43 On a un adjudant de gendarmerie à Dieu le Fige, juste à côté de la commune où est le siège social de l'association,
31:49 qui fait un travail absolument formidable. C'est-à-dire qu'il s'est formé, il forme ses équipes.
31:54 Et non seulement il a la technicité qui fait qu'il a des pôles d'attention et des questions récurrentes
32:00 et des endroits de vigilance avec les victimes, mais en plus il a un supplément humain
32:07 qui fait que unanimement les femmes qu'on a dirigées vers lui ou qui reviennent de l'avoir vu que lui nous dirige
32:13 se sont senties bien reçues. Donc on sent qu'il y a un mouvement parce qu'au moment du dépôt de plainte,
32:18 dans ce cadre-là, parce qu'ils sont formés, c'est plus simple.
32:22 En revanche c'est au bout de la liste, c'est-à-dire que le traitement des plaintes
32:26 n'est pas encore très satisfaisant. Les réponses de la justice par rapport aux plaintes n'est pas encore satisfaisant.
32:31 Donc on ne va pas baisser les bras parce qu'il y a quelque chose qui bouge, parce qu'il y a ne serait-ce que 50 ça.
32:35 Les plaintes, on avait quand même beaucoup plus de retours absolument négatifs
32:40 sur la manière dont étaient accueillies les plaintes et traitées les plaintes au moment du dépôt.
32:44 Et maintenant on espère qu'en bout de parcours du processus de plainte,
32:50 on aura des réponses satisfaisantes avec une expression vraiment radicale sur l'empêchement des violences.
32:55 Un petit mot là-dessus Sarah Younaf, parce que c'est important.
32:57 Ça veut dire que les femmes sont entendues par la gendarmerie, qu'il n'y a plus de processus
33:07 comme on a pu le voir dans certaines affaires dramatiques.
33:10 Yalem Salem Magui fait la grimace. Qu'est-ce que vous en pensez Sarah Younaf ?
33:14 Je vais faire la grimace comme elle.
33:16 C'est-à-dire que nous ce qu'on constate c'est que la gendarmerie se forme certes,
33:20 mais par exemple à Limoges en ce moment nous avons des personnes haut placées dans nos administrations
33:27 qui sont sous le coup de plaintes pour agression sexuelle.
33:31 Donc ça veut dire que prendre une plainte c'est très bien,
33:35 mais si le premier magistrat qui s'occupe d'administrer la plainte est lui-même une personne qui pose problème,
33:42 qu'est-ce que ça implique ?
33:44 Donc il y a du progrès, on le note, mais il y a encore beaucoup de travail à faire
33:50 et il y a surtout une partie des comportements de nos cols blancs qui est encore à analyser et à questionner.
33:57 Un mot de conclusion Yael Hamselem Magui ?
33:59 Un mot de conclusion, c'est compliqué.
34:01 Je dirais quand même qu'il faut dans le cadre de cette émission rappeler au moins que en tant que témoin ou en tant que victime
34:06 on a quand même les moyens de pouvoir alerter et dénoncer les violences,
34:10 notamment par SMS au 114 ou par un appel au 3919 ou en ce qui concerne les enfants au 119.
34:16 Je pense qu'on ne peut pas conclure, mais au moins en redonnant l'information
34:19 et en se disant que toute cette information doit circuler partout et avec tous et tous.
34:24 On va mettre effectivement ces numéros sur le site de France Culture.
34:30 Merci Yael Hamselem Magui.
34:32 Je rappelle que l'on vous doit les filles du coin, vivre et grandir en milieu rural.
34:36 C'est votre livre publié aux éditions des presses de Science Pause.
34:40 Merci Sarah Younah, militante au planning familial.
34:44 Et merci à vous, Anokaïs, directrice de l'association Réseau Femmes à l'abri dans la Drôme.
34:52 Là aussi, on va mettre des liens sur le site internet de France Culture
34:58 pour que l'on puisse éventuellement vous contacter.