• il y a 9 mois
Yazid Ichemrahen est un chef pâtissier de 31 ans mondialement reconnu, qui, malgré une enfance difficile en famille d'accueil marquée par la maltraitance et l'instabilité, a su trouver sa vocation et son salut dans l'art de la pâtisserie. À force de travail et de sacrifices, il a fini par se hisser au rang des plus grands jusqu'à obtenir leur reconnaissance. Sa détermination l'a mené à ouvrir des boutiques à travers le monde et à multiplier les succès au point d'inspirer À la belle étoile, un film sur sa vie. Malgré cette success story, Yazid a toujours du mal à effacer son mal-être et à faire la paix avec son passé. Il retrace avec nous son incroyable parcours qui force l'admiration.

Merci à Yazid Ichemrahen pour sa confiance et pour ce témoignage marquant et inspirant.

Ses livres : Un rêve d'enfant étoilé et Créer pour survivre et vivre pour ne pas sombrer sont disponibles.

Retrouvez-le sur instagram pour suivre toute son actualité : https://www.instagram.com/yazid.ichemrahen/

Suivez O-Rigines le nouveau média qui s’intéresse à l’histoire des histoires.
Podcast : bit.ly/Origines_podcast
Youtube : https://www.youtube.com/@originesmedia
Instagram : https://www.instagram.com/origines.media
Twitter : https://twitter.com/Originesmedia
TikTok : https://www.tiktok.com/@originesmedia

Category

😹
Amusant
Transcription
00:00 18 minutes de train pour aller à Monaco chaque jour.
00:02 Et puis la journée, je travaille dans un palace.
00:06 Et la nuit, forcément, je dors dehors à la plage de Galet,
00:09 après avoir testé beaucoup d'autres endroits dans Nice.
00:13 Quand l'hôtel s'en aperçoit, il me donne une chambre et tout,
00:16 c'est une des scènes du film.
00:17 Je me dis, écoute, maintenant, soit je m'en sors, soit je vais tomber.
00:22 Je m'appelle Yazid Ishemraïl, j'ai 32 ans.
00:24 Je suis chef pâtissier à travers le monde maintenant.
00:27 J'ouvre des boutiques, j'essaye d'être un entrepreneur au quotidien.
00:31 Et avant tout, ma passion, c'est la création de choses culinaires et artistiques.
00:35 J'ai grandi dans la Marne, à Chouy, très exactement à côté d'Epernay.
00:39 Donc, c'est la ville du champagne.
00:41 Ma vie, dans ses premiers temps, n'a pas été forcément la plus facile.
00:45 Je suis né d'une mère alcoolique, tuée,
00:47 elle avait beaucoup de cordes à son arc,
00:50 due à une vie qui était aussi très compliquée pour elle.
00:53 Donc, on a grandi un peu balottés, ma sœur et moi,
00:57 entre famille d'accueil, foyer.
00:59 De l'âge de zéro à deux ans et demi, j'ai vécu avec ma maman,
01:02 donc dans un cadre assez spécial, dont je ne me rappelle pas tout.
01:08 Et à l'âge de deux ans et demi, je fais une rencontre assez particulière,
01:11 mais extraordinaire, qui est ma famille d'accueil.
01:13 Je suis placé à l'aide sociale à l'enfance,
01:15 tout simplement parce que ma maman ne pouvait pas s'occuper de moi,
01:17 comme des centaines de milliers de jeunes maintenant en France.
01:21 Et il se trouve que quand j'arrive chez ma tati,
01:23 à l'âge de deux ans et demi jusqu'à mes dix-douze ans,
01:26 donc j'ai une éducation très au millimètre,
01:28 stricte, à la française, avec des codes,
01:31 comme on ne sort pas de table avant d'avoir fini de manger,
01:34 on ne lèche pas le couteau, on ne met pas les coudes sur la table.
01:38 Enfin, une vraie belle éducation, si je puis dire.
01:40 Et puis, du jour au lendemain, je me retrouve dans un foyer,
01:43 parce que tout simplement, ma tati se met en retraite.
01:46 Et puis, à l'époque, je commence à être de plus en plus turbulent.
01:49 Et puis, le foyer me convient mieux, en tout cas sur mon cursus d'éducation.
01:52 Et du jour au lendemain, on va dire, je me retrouve d'un cadre familial,
01:56 aimant et protecteur et tout ce qu'il y a de plus normal,
02:00 à un espèce de zoo, je parle avec mes mots,
02:03 c'est la loi de la jungle, mais humaine,
02:07 avec des éducateurs qui portent bien leur nom.
02:09 C'est des êtres humains qui sont là pour nous éduquer
02:12 et nous inculquer, entre guillemets, la rigueur et un cadre d'un foyer.
02:16 Il n'y a pas forcément d'amour, il n'y a pas forcément d'empathie,
02:19 parce qu'un éducateur, c'est un peu comme un maton de prison,
02:23 il ne peut pas forcément être empathique.
02:25 C'est comme si une infirmière rentrait chez elle tous les jours en pleurant,
02:29 parce que tous les jours, elle voit des patients mourir.
02:32 Un éducateur doit pouvoir s'enlever son empathie,
02:35 manière à nous élever au mieux.
02:37 À l'époque, je n'avais absolument pas ni ce parler, ni encore moins ce recul.
02:43 Et j'étais juste révolté de la vie en général.
02:47 Les éducateurs, je les considérais comme les pires personnes existantes,
02:51 alors qu'elles étaient au final là pour notre bien à nous.
02:54 Mais en fait, dès la naissance, tu grandis, je suis grandi,
02:59 avec la sensation d'être toujours particulier et différent.
03:02 Je vois que je n'ai pas la même couleur, que je vis dans un village
03:05 où tout le monde me dit "mais ce n'est pas tes parents,
03:08 mais ils sont où tes parents ?" et je ne sais pas répondre à la question.
03:11 Donc petit à petit, tu apprends à vivre avec ça.
03:14 Au début, tu en souffres et puis après, tu ne souffres pas.
03:15 Et puis, ça fait un peu les montagnes russes.
03:17 Et quand j'arrive au foyer, c'est là où c'est le plus difficile et le plus traumatisant.
03:21 Parce que quand tu es en 5e, 6e, qu'on te ramène au collège
03:25 avec ces espèces de gros camions et qu'on amène 10, 15 élèves d'un coup,
03:29 et que tous les autres enfants arrivent avec leurs parents
03:31 et tout au plus leurs frères et sœurs,
03:33 toi, tout de suite, tu arrives dans un établissement scolaire public,
03:37 mais on sait que tu es différent.
03:38 Parce qu'à l'arrière de ce gros camion, il y a cette espèce de poinçon
03:41 qui dit que tu es un casseuse, que tu arrives du foyer.
03:43 Les professeurs font attention à toi,
03:46 mais en même temps, savent que ça ne va pas être toi le premier de la classe.
03:49 Et puis, les autres élèves, les plus éduqués ont pitié
03:52 et puis les moins éduqués ne parlent pas avec toi parce que tu n'es pas comme eux.
03:55 Et tu développes une espèce de haine intérieure,
03:59 une espèce de profond sentiment d'injustice
04:02 qui fait que ta vie, en tout cas la mienne, je vais parler pour moi,
04:06 j'ai toujours été entre l'âge de 5 ans jusqu'à mes 16, 17 ans, sur un fil,
04:12 et où chaque rencontre, chaque petit élément de ma vie
04:16 aurait pu me faire basculer d'un côté ou de l'autre.
04:19 Et c'est pour ça, je dis souvent, et c'est dans le titre de mon premier livre,
04:22 que la pâtisserie m'a sauvé la vie,
04:24 parce que j'ai rencontré ce métier à l'âge de 14 ans, 13 ans,
04:28 parce que la bonne étoile de ma vie fait que les deux fils de ma famille d'accueil
04:32 étaient pâtissiers, toujours dans le populaire, tout ce qu'il y a de plus populaire.
04:35 Si je n'avais pas rencontré ces gens-là,
04:37 si eux ne m'avaient pas inculqué les valeurs, entre guillemets,
04:41 de la pâtisserie dès ma tendre enfance, peut-être que je n'aurais jamais fait pâtissier.
04:45 Et peut-être qu'à l'âge de 14 ans, quand je me suis concentré
04:48 dans apprendre un métier, dans l'apprentissage,
04:51 j'aurais pu me concentrer dans d'autres choses,
04:53 vendre du stup ou faire tout un tas de bêtises,
04:55 ou tout simplement me révolter tellement fort que,
04:58 dû à la violence, je me retrouve dans des quartiers disciplinaires
05:02 qui, au final, auraient enlevé 98% de mes chances
05:05 de pouvoir faire ce que je fais aujourd'hui.
05:08 Beaucoup de médias ont tendance à raconter la belle histoire
05:11 en en oubliant tout ce qu'il a fallu faire pour se construire.
05:15 Et c'est un petit peu mon souci, qui n'en est pas un,
05:18 c'est que tu vois, si tu regardes mon film, c'est un film,
05:20 c'est la vraie histoire, j'en ai été copro,
05:23 donc j'ai vraiment fait en sorte d'être le plus honnête.
05:26 Mais il est un peu édulcoré.
05:27 Quand tu lis un article à droite et à gauche, etc.,
05:30 et c'est normal, c'est le jeu,
05:31 on va raconter toutes les dernières actualités qui sont belles.
05:34 Mais moi, je tiens à être honnête avec ça.
05:37 Avant de faire tout ce que je fais aujourd'hui
05:40 et d'avoir acquéri cette espèce de maturité dans ce que je fais,
05:46 j'ai fait beaucoup de bêtises.
05:47 Et les bêtises, ça a été, j'allais voler pour manger, moi, des fois.
05:51 Et quand je me faisais attraper, je finissais parfois en garde à vue.
05:53 Et limite, ça m'arrangeait d'aller en garde à vue,
05:55 parce que des fois, la garde à vue, au moins, tu manges.
05:57 T'as un petit lit avec un matelas comme ça pour dormir,
06:00 bon, tu te mets sur le côté, tu sors et puis c'est réglé.
06:02 J'ai transporté des sacs de stup' d'un point A à un point B
06:06 pour avoir un peu d'argent.
06:09 Et puis avec cet argent-là, je sais pas,
06:11 je m'achetais des baskets qu'au foyer, on pouvait pas avoir.
06:14 Ou voilà, des conneries, j'ai fait des conneries.
06:17 Je me suis fait réprimander pour ça.
06:18 Et puis j'ai déçu plein de gens.
06:20 Et puis je me suis mal comporté avec plein de gens.
06:22 Quand j'étais plus jeune, moi, j'étais très violent.
06:23 Par exemple, j'extériorisais avec de la violence.
06:26 Je me battais avec tout le monde.
06:27 J'avais la haine contre le système et contre les règles.
06:31 Et je le regrette, je regrette chaque chose que j'ai pu faire.
06:34 Mais si c'était à refaire, parce que je suis quelqu'un d'honnête,
06:37 je sais pas si je ne le recommencerais pas tout pareil.
06:41 J'ai galéré et j'ai pas été toujours la personne exemplaire
06:44 qu'on montre que je suis.
06:46 Et ça, c'est super important de le dire.
06:48 Parce que déjà, on montre pas une fausse personne.
06:51 On montre qu'aussi, on peut passer par beaucoup, beaucoup d'étapes,
06:55 que ce soit des difficultés pour en acquérir les qualités.
06:59 Si moi, aujourd'hui, je disais que ma réussite,
07:03 elle était seulement grâce à moi et pas grâce aussi à mes erreurs.
07:07 Et que j'avais été juste un petit jeune balotté de famille d'accueil en famille d'accueil.
07:12 Que j'avais été juste une petite victime qui a réussi.
07:15 C'est pas vrai.
07:16 Je suis retourné dans mon foyer, dans un foyer, il y a pas très longtemps,
07:18 faire un goûter pour les jeunes et ainsi de suite et tout.
07:21 Il y a des éducateurs qui ont dit non, clairement.
07:23 Moi, s'il est là, je ne viendrais pas travailler.
07:26 Parce que je leur ai fait des dingueries.
07:28 J'ai brûlé la voiture d'un éducateur parce qu'il m'avait dit,
07:31 je sais pas, non, je sais pas trop quoi.
07:34 Je tapais tout le monde, j'ai fait, mais je me suis mal comporté.
07:37 Mets-toi à ma place juste deux secondes.
07:39 Tu as 8 ans, 10 ans.
07:40 Tu as grandi chez monsieur et madame Binet-Yves, dans la Marne.
07:43 La coupe de cheveux, le truc, tu ne lèches pas le couteau, tu manges comme ça et tout.
07:46 Et que tu arrives là-bas, c'est la zone.
07:48 Bon, tu te fais victimiser quelques mois et puis après tu apprends.
07:51 Et tu es obligé.
07:52 Quand tu te fais cogner par 7 ou 8 personnes tous les jours,
07:56 parce que soit ils veulent ton goûter, soit c'est eux les trucs.
07:58 C'est comme dans les films en prison, c'est la vérité.
08:01 Ça ne va pas plaire à l'État ou à l'instruction,
08:02 parce que je dis, mais c'est la vérité.
08:04 Moi, il y a un moment où j'ai enchaîné les plaintes à mon égard,
08:07 parce que je faisais tout et n'importe quoi,
08:09 peut-être pour me faire voir ou par révolte et ainsi de suite, etc.
08:13 Et je me sentais invincible,
08:15 je me sentais puissant parce que j'étais mineur,
08:18 que je savais que je ne pouvais pas aller en prison,
08:19 que j'étais au foyer, qu'on me trouvait un tas d'excuses,
08:22 que j'ai fait plein de conneries, tu vois.
08:24 Il y a un moment, quand tu es au foyer, tu es en 5e,
08:27 c'est le moment où tu commences à parler à des filles,
08:30 il y a des trucs à bidule et tout.
08:31 C'est le moment où tu te construis, toi, en tant qu'homme aussi intérieurement,
08:34 que tu vois tous les jeunes de ta classe arriver en scénique
08:38 ou en machin ou en truc, propres sur eux, les Nike, les trucs, les bidules,
08:42 et que toi, tu es au foyer.
08:44 En vrai, tu as 54 euros d'argent de vêture, ils appelaient ça,
08:48 pour t'habiller par mois, ils t'amènent où à 54 balles par mois ?
08:52 À Gémeaux, tu as des chaussures STL à scratch,
08:54 et puis tu vas sortir faire un ou deux foot, machin,
08:57 tu as rencontré un ou deux mecs.
08:59 Frérot, tu veux travailler ? C'est payé combien ?
09:02 Ah, 50 euros par semaine.
09:03 C'est vrai, pour moi, c'est vrai.
09:05 Tu fais ce qu'on te dit, et puis tu as réussi à avoir un peu d'argent.
09:07 Et puis après, quand tu arrives en cours,
09:09 que tu as un petit peu des affaires, à l'époque,
09:11 c'était la mode de Sergio Tachini, je me rappelais.
09:14 C'était mon premier achat en tant qu'entrepreneur du pas très bien.
09:17 Et que je suis arrivé en 5e avec mon survet de Sergio Tachini,
09:21 ça rattrapait un espèce de manque que j'avais...
09:24 Enfin, je ne sais pas, tu commences, je veux dire.
09:26 Si moi, aujourd'hui, j'entreprends, je fais des trucs
09:28 d'un point de vue d'entrepreneuriat,
09:30 si je n'avais pas eu ça, la pâtisserie qui m'apporte ça,
09:33 sincèrement, je pense très très honnêtement que je serais en prison.
09:37 Parce que moi, il me fallait de l'argent.
09:38 Il fallait que je réussisse d'une manière quelconque.
09:41 Et ça n'a rien à voir qu'avec l'argent, c'était aussi
09:43 avec le manque de reconnaissance constante que j'avais envers moi,
09:46 je voulais le combler.
09:48 Voilà, j'ai essayé, tout au long de mon cursus,
09:51 de trouver la confiance en moi qui me manquait dès ma tendre enfance,
09:55 au travers de l'apprentissage de la pâtisserie.
09:58 Alors, je faisais des choux, des chouquettes
10:00 et des trucs pas très sexy au début.
10:02 Mes autres camarades de classe m'appelaient à l'époque "Croissy-Croissant",
10:06 c'était mon surnom.
10:07 À l'époque, d'aller en pâtisserie, c'est que tu avais mal travaillé
10:11 et que tu n'avais pas le cerveau suffisamment développé
10:13 pour aller en général.
10:14 Donc, tu te dirigeais vers un métier où tu allais rouler des baguettes
10:18 et tenir un bout de plastique pour faire des choux.
10:21 Et aussi parce que j'avais un tel manque de confiance en moi
10:24 qu'à terme, ça a été une aubaine pour moi
10:27 parce qu'au-delà du métier que j'ai choisi,
10:30 quand on fait un gâteau, on commence d'un point A et on finit à un point Z.
10:34 Et en fait, on transforme des matières brutes,
10:37 comme les œufs, la farine, le sucre,
10:40 en quelque chose de parfois sensationnel et artistiquement ultra joli.
10:44 On fait plaisir.
10:46 Et en fait, quand on regarde la recette d'une pâtisserie,
10:48 c'est un peu la même recette que celle de la vie
10:50 parce qu'on a tous des ingrédients qui sont différents,
10:53 mais tout autant similaires là d'où on vient.
10:56 Et puis, c'est vraiment la manière dont on les utilise
11:00 et la façon dont on a de les assembler qui fait la recette finale.
11:04 À 14 ans, on me demande de choisir un cursus et je vais en pâtisserie
11:07 parce que les deux fils de ma tati et mon tonton étaient pâtissiers,
11:10 que j'ai vus que des gâteaux dans ma vie
11:13 et que tout simplement, je voulais, je ne sais pas, les rendre fiers.
11:15 Et puis moi, j'ai toujours jamais aimé quand on me rabaissait.
11:19 Et ma tati, sans le vouloir, parce qu'elle voulait me protéger,
11:22 m'a dit "mais non, tu ne pourras pas toi faire de la pâtisserie, t'imagines,
11:24 il faut travailler à Noël, il faut se lever le matin,
11:26 mais toi, tu ne vas jamais te lever".
11:28 Je lui ai dit "attends, ces fils font de la pâtisserie,
11:31 moi, ça veut dire que je suis moins bien,
11:33 ça veut dire qu'eux, ils peuvent le faire, moi, je ne peux pas le faire".
11:35 Au début, que tu crois ou non, je n'ai commencé que pour ça.
11:38 Je m'en foutais complet de la pâtisserie moi.
11:40 Parce qu'encore une fois, j'étais au foyer,
11:43 je ne savais pas ce que je faisais, où j'allais.
11:45 Et réellement, la pâtisserie, ça a été une passion
11:47 sept ans après que j'ai commencé ce métier.
11:49 Sinon, c'était qu'un truc où j'allais.
11:53 Parce qu'après, les éducateurs étaient contents,
11:54 ils parlaient entre eux et moi, ils me disaient
11:56 "il a une formation, allez-y, il a une formation".
11:58 Et bizarrement, quand je faisais des conneries le soir,
12:01 mais que le lendemain, je me levais pour aller travailler,
12:03 on pardonnait un tout petit peu plus mes conneries
12:05 puisque j'avais une formation.
12:07 Je ne sais pas comment t'expliquer, on valorisait ce truc.
12:10 Et c'était la première chose qu'on valorisait, une de mes actions.
12:13 Quand je commence mon apprentissage, j'ai 14 ans,
12:16 je suis déjà un patron et en fait, quand je commence,
12:19 je vois que le mec, il me fait venir tous les jours à 4h du mat.
12:23 À l'époque, je n'avais pas de vélo, on est à 2km de la boulangerie,
12:27 j'avais un vélo avec une pédale, je l'utilisais comme une trottinette.
12:31 Tous les jours, il me faisait venir à 4h du matin
12:32 et jusqu'à midi, je ne touchais pas un gâteau, rien.
12:36 Je montais les sacs de farine, les boîtes de conserve,
12:38 après j'ouvrais les trucs, je grattais les plaques.
12:40 Un jour, je vais le voir, je pète les plombs,
12:42 mais pas longtemps après, en plus deux semaines après,
12:44 je n'ai pas trop de patience, je vais le voir et je lui dis
12:47 "mais on a signé un contrat d'apprentissage de pâtisserie,
12:50 je n'ai même jamais rempli un chou, pourquoi ?"
12:54 Et le pire dans tout ça, c'est que moi, quand je rentrais au foyer,
12:57 je mentais, je prenais en photo, j'avais un vieux, un Alcatel à l'époque,
13:01 qui s'ouvrait comme ça, je prenais en photo le travail des autres
13:04 et je disais au foyer "tu as vu, j'ai fait ça aujourd'hui,
13:06 tout le monde "ouah bravo", alors pas du tout,
13:07 la journée, j'étais en train de monter des sacs de farine en haut,
13:10 donc j'étais ultra frustré et en fait, le mec,
13:13 au bout de deux semaines, il s'énerve contre moi,
13:14 je lui dis comme ça et tout, moi si c'est ça, je démissionne,
13:16 je m'en vais et tout, mais je ne pouvais pas trop démissionner
13:18 parce que le premier patron où j'étais, c'était une instruction du juge,
13:22 c'était un peu ma dernière chance, genre soit du travail,
13:24 soit ça part en CER, Centre éducatif renforcé à Basel,
13:27 et donc je voulais rester, mais en même temps,
13:30 l'autre, il me faisait faire que des trucs hors pâtisserie.
13:33 Et en fait, il commence, je m'en rappellerai toute ma vie,
13:35 c'est la plus grande leçon de ma vie, il est devant son four
13:37 avec les baguettes et son gros ventre et tout,
13:39 et il me dit "tu viens me voir là, tu me déranges,
13:42 en fait c'est ta faute si tu ne fais que du nettoyage".
13:44 Je dis "pas du tout, vous m'avez donné une liste,
13:46 il n'y a que du nettoyage, il n'y a pas un gâteau".
13:47 Il me dit "c'est la liste qu'on donne à tous les apprentis,
13:50 toi tu es le dernier apprenti, tu vas faire ça autant de temps
13:52 que je te dirai de le faire, par contre, le dernier, Enzo,
13:55 qui est dans le labo en train de faire les baguettes,
13:57 lui tout ce que tu fais en six heures, il le fait en deux heures".
13:59 "Eh bien non, tu ne feras aucun gâteau tant que tu n'auras pas fini ta liste".
14:03 Le lendemain, je viens à 3h du matin au lieu de 4h,
14:05 de moi-même, c'est une discipline de moi-même,
14:07 et je cours partout, clac, clac, clac, clac,
14:10 7h30, je finis toute la liste.
14:12 Je me suis dit "attends, Enzo, il le fait, moi aussi,
14:14 t'es un ouf ou quoi ?".
14:16 Je ne sais pas, tu vois, j'ai tout marché comme ça à l'arrogance
14:19 et au manque de confiance en moi.
14:20 À 7h du matin, ce jour-là, il y avait une grille d'éclairs,
14:23 pas très belle, et il m'a donné une poche de crème pâtissière
14:26 avec plein de grumeaux dedans en plus, pas ouf.
14:28 Maintenant je le sais, je le vois, je pourrais les redire.
14:30 Et je les ai garnis, tu vois, les éclairs.
14:33 Et en fait, le simple fait de garnir les éclairs,
14:36 de les tremper dans cette espèce de fondant pas très beau au chocolat
14:39 et de les ramener à la patronne dans le magasin à 9h du matin
14:43 avec mon tablier plein de chocolat pas bien,
14:45 que j'avais mal travaillé,
14:46 et qu'elle, elle me dit "Ah, sympa, merci".
14:50 Juste le "sympa, merci".
14:52 Je ne l'avais jamais dit avant pour une action que j'avais faite,
14:54 moi, avec mes 10 doigts.
14:56 Donc, et j'ai été boulimique de ça petit à petit.
14:58 Et la pâtisserie, ça a été la première chose dans ma vie
15:02 qui m'a accordé un peu, non seulement de confiance en moi
15:05 et de gaieté avec mes 10 doigts.
15:08 J'ai été boulimique et des concours,
15:11 et de la réussite de tout type.
15:14 Après, moi, je commence mon cursus professionnel.
15:16 Je travaille à l'époque à Monaco.
15:19 Je n'avais pas de logement, pas de garant, pas de parents, rien,
15:21 pas d'argent, que dalle.
15:22 Je dors la nuit sur la plage de Nice,
15:24 18 minutes de train pour aller à Monaco chaque jour.
15:27 Et puis la journée, je travaille dans un palace.
15:31 Et la nuit, forcément, je dors dehors à la plage de Galet
15:34 après avoir testé beaucoup d'autres endroits dans Nice.
15:38 Quand l'hôtel s'en aperçoit, il me donne une chambre et tout,
15:41 c'est une des scènes du film.
15:42 Je me dis, écoute, maintenant, soit je m'en sors,
15:45 soit je vais tomber, tu vois.
15:47 De 16 à 18 ans, je fais un apprentissage.
15:49 Je passe mon CAP pâtissier.
15:51 Ensuite, à 18 ans, je quitte le foyer parce que c'est fini.
15:55 Tu n'es plus mineur, donc il n'y a plus de foyer,
15:57 il n'y a plus d'éduc, il n'y a plus d'aide, il n'y a plus de rien.
15:59 Mais j'ai un métier.
16:00 Je harcèle un mec qui est champion du monde de pâtisserie,
16:03 meilleur ouvrier de France.
16:04 Je m'en rappelle, à l'époque, j'étais au foyer,
16:05 il y avait une salle ordinateur avec les gros ordi de l'époque.
16:09 Et je tapais sur Internet "meilleur pâtissier du monde".
16:11 Je regarde et tout, et je vois que c'est ce gars-là
16:13 qui est le mieux référencé.
16:14 Et je l'appelle, je le harcèle,
16:15 et il me prend dans son laboratoire à trois.
16:17 Je travaille pendant un an.
16:19 Après, je monte à Paris, à la pâtisserie des rêves
16:21 de Philippe Conticini, avec l'actuel chef pâtissier
16:23 du Plaza Athénée qui était Angelo Musa.
16:25 Et de la pâtisserie des rêves, ma mère décède.
16:28 Donc ça ne me fait rien.
16:29 Et en même temps, ça me fait quand même quelque chose.
16:31 J'ai le cerveau, il est là et là.
16:33 Et 1100 balles pour vivre, ce n'est pas assez.
16:36 Donc je fais des trucs à côté.
16:37 Et je suis sur un fil, tu vois.
16:40 Je suis vraiment sur un fil où je me dis,
16:42 il y a un peu de la pâtisserie,
16:44 il y a un peu d'autres trucs, je ne sais pas comment faire, machin.
16:47 Et en fait, tout ça, ça me fait péter les plombs.
16:49 Je récupère mon solde de tout compte de 944 euros à l'époque
16:51 à la pâtisserie des rêves.
16:52 Et je le mets sur mon compte à la poste.
16:54 Je prends mes deux bagages et tout, j'arrive à Nice.
16:57 Et pendant une semaine, je dors à l'hôtel.
16:59 Et après, tout le reste du temps,
17:02 c'est l'histoire que je t'ai racontée avant.
17:04 Je dors dehors, quoi.
17:05 Et un jour, je rencontre une fille, je vais à Vignon.
17:07 Et là, je fais la rencontre d'un monsieur dans un bar
17:10 dans lequel je faisais des extras pour arrondir mes fins de mois et tout ça,
17:13 parce que je ne voulais plus faire des conneries ailleurs, en fait.
17:16 Je ne voulais plus vendre du stup ou aller voler.
17:19 Je ne voulais plus faire ça.
17:20 Je faisais des extras tous les vendredis, samedis
17:22 pour gagner 300 euros pour payer ma vie.
17:26 Et ce monsieur, un jour, me rencontre, Bernard Blacher,
17:29 le PDG des boulangeries Marie Blacher,
17:31 personne immensément riche qui doit faire, je ne sais pas,
17:33 500, 600 millions d'outils d'affaires à l'année.
17:35 C'est beaucoup, beaucoup.
17:36 Et si vous voulez, lui est un peu comme un mentor, un papa dans ma carrière.
17:41 Il met à disposition un laboratoire.
17:43 Je prépare la Coupe du monde de pâtisserie.
17:45 Je me dis que je vais faire la Coupe du monde.
17:47 À l'époque, c'est comme ça.
17:48 Soit je fais ça dans mon métier.
17:50 Je monte haut et j'essaye de devenir un grand chef,
17:53 comme ce que je voyais sur mon ordinateur à la télé, etc.
17:57 Soit je vais faire ce que je peux pour vivre.
18:01 Et puis après, ça ne va peut-être pas très bien finir pour moi.
18:03 Et sincèrement, à l'époque, j'étais tellement arrogant que même la veille,
18:06 je m'en rappellerai toute ma vie, même la veille du concours,
18:08 je mange au resto avec mon fameux Bernard Blacher, mon fameux partenaire.
18:12 Et il y a des serveurs, des gens autour de moi.
18:14 Je ne suis rien ni personne.
18:15 J'ai des baskets trouées.
18:17 Je leur dis lundi quand je reviens, je serai champion du monde.
18:20 Prenez champagne.
18:21 Je ne bois même pas, mais je leur ai dit ouvrez le champagne et tout.
18:23 On va faire la fête lundi et tout.
18:24 Et ils m'ont tous taillé.
18:25 Ils m'ont dit mais attends, tu prends pour qui toi ?
18:28 Tu n'as même pas fait le concours et tout.
18:29 Et puis ils ne parlent pas comme ça, truc et tout ça.
18:31 J'ai fait le concours, j'ai gagné.
18:34 Et puis c'est tout, il n'y avait pas le choix.
18:37 Et j'étais sûr de moi.
18:38 Mais comme dans tout récit, on voit le haut de l'iceberg.
18:42 Moi, par exemple, pour un projet qui se fait,
18:45 j'en ai loupé 10 pour une opportunité.
18:48 Il y en a 10 qui ne se sont pas faites.
18:50 Et pour une rencontre que j'ai pu transformer,
18:54 il y en a 10 que j'ai déçues ou que je n'ai pas réussi à faire
18:57 ou avec qui j'ai dû m'énerver trop vite
18:59 ou avec qui je n'ai pas été suffisamment bon professionnel.
19:03 Voilà, il y a beaucoup de choses de mon passé
19:06 qui font l'être que je suis aujourd'hui.
19:09 Il m'est arrivé les pires trucs comme les plus jolies choses.
19:12 Et il se trouve que je ne peux pas en vouloir
19:14 parce que moi-même, j'ai fait des conneries dues à ma construction.
19:17 Et si j'ai fait ces conneries-là, c'est parce qu'à un moment,
19:19 je n'ai pas eu le cadre et je souffrais tellement
19:22 que parfois, j'ai fait tout et n'importe quoi.
19:24 Et il se trouve que ma mère, en fait, c'est pareil.
19:26 Je ne peux pas jeter la pierre à une dame qui a fui son pays,
19:31 qui s'est fait *** quand elle était plus jeune.
19:34 Et puis c'est l'histoire de ma mère, elle s'est fait ***.
19:37 Elle a fui en France avec le bébé, elle a accouché sous X.
19:39 J'ai une sœur dans la nature qui a été adoptée par je ne sais pas qui.
19:45 Et je sais que cette histoire-là, elle est complètement folle.
19:48 Et elle, elle avait 16 ans, ma mère, quand elle a accouché sous X
19:51 de cette jeune fille.
19:53 Et il se trouve qu'elle aussi, elle a eu son lot de difficultés.
19:57 Certes, ça m'a fait souffrir moi et ça m'a fait grandir de cette manière.
20:00 J'ai eu un facteur chance.
20:02 Et ça, c'est la réalité de le dire,
20:04 que des millions de personnes à ma place n'auraient peut-être pas eu
20:08 et que ma mère n'a pas eu.
20:09 Donc aujourd'hui, je suis qui moi pour aller en vouloir à ma mère ?
20:14 Peut-être que quand elle se droguait, c'était pour oublier un quotidien.
20:17 Que quand elle buvait, c'était pour la même chose.
20:20 Et qu'ils n'ont pas tous la même chance et les mêmes rencontres que moi.
20:23 Donc, je ne peux pas aujourd'hui dire que je juge ou que je suis énervé
20:27 contre quiconque.
20:28 J'ai enlevé à une époque de ma vie, et je le ressens encore aujourd'hui,
20:32 toute forme d'empathie peut-être, et parfois même de cœur.
20:35 En fait, je mets énormément de cœur dans ma pâtisserie,
20:38 dans ce que je peux transmettre au travers du goût,
20:40 parce que c'est ce que je maîtrise profondément.
20:43 Mais l'exercice humain qu'il a fallu que je fasse étant plus jeune,
20:47 pour mettre une barrière entre moi et les sentiments,
20:50 et tout le cirque de ma famille néfaste,
20:53 elle se ressent même aujourd'hui dans ma relation humaine
20:56 avec les gens qui sont proches de moi.
20:58 J'ai des réactions parfois, ou alors des barrières ou des appréhensions
21:03 qu'un être humain normal de 32 ans ne devrait pas avoir.
21:06 Et ça, c'est avec beaucoup de recul et d'humilité que je le dis, c'est vrai.
21:09 Par exemple, l'enterrement de ma propre maman,
21:11 je n'y suis pas allé.
21:12 Elle avait dans les 40 ans, donc j'imagine que ce n'est pas
21:15 une mort de vieillesse naturelle.
21:17 On m'a appelé pour me le dire.
21:18 On m'appelle, j'ai épluché des pommes, j'ai été commis à l'époque.
21:21 J'avais dans la vingtaine, c'est mon assistante sociale qui m'appelle,
21:23 ma sœur en pleure, et puis toutes mes tantes en pleurent, et tout ça.
21:27 Ça m'a fait un froid pendant cinq minutes,
21:29 et puis je suis continué d'éplucher mes pommes.
21:32 Je n'y suis jamais allé.
21:33 Je sais qui l'ont enterré et dans quel endroit il l'ont enterré,
21:35 mais je n'y suis jamais allé parce que je n'en voyais pas l'intérêt.
21:39 Et au final, je pense que j'ai beaucoup moins souffert.
21:42 Mais moi, je pars du principe, je fais toujours cette métaphore.
21:45 Si tu ne connais pas le McDo dans ta vie,
21:48 que tu n'en connais pas l'odeur et que tu n'as jamais croqué dans un burger,
21:52 tu n'en as pas envie.
21:53 Tu vois, tu n'en as pas envie.
21:55 Et moi, je n'ai jamais connu ma famille ni mon cadre familial.
21:59 Je n'ai jamais eu envie d'aller plus loin dans la recherche
22:01 parce qu'à part perdre mon temps, me faire du mal et me frustrer sur des situations
22:06 qui, au final, je ne vais jamais résoudre, à quoi ça sert ?
22:11 C'est comme ça qu'en tout cas, moi, je l'ai apprendé
22:14 et j'ai préféré toutes ces années me concentrer sur mon cursus professionnel,
22:18 réussir ma vie individuellement et égoïstement,
22:21 parce que c'est peut-être le cas aussi,
22:22 plus que d'aller chercher des gens qui, au final,
22:25 quand j'étais plus jeune, s'en foutaient complètement.
22:27 C'est comme, je sais que j'ai un papa dans la nature.
22:30 Je ne sais pas où il est, je ne sais pas qui c'est.
22:32 Je sais qu'il s'appelle Mohamed ou Kader ou Karim.
22:34 On m'a dit plein de noms différents.
22:35 Je ne sais pas comment il s'appelle.
22:37 J'ai de la famille, deux, trois tantes et deux, trois cousines,
22:39 mais ils ont tous le même esprit que ma mère.
22:42 Donc, ce n'est pas des gens avec qui j'ai eu envie de, comment,
22:46 ni d'évoluer, ni de parler, ni de rechercher une once de bonté humaine.
22:49 Parce que bon, dans la vie, pour moi, c'est vraiment mon mindset
22:52 et c'est ce qui a fait que j'ai réussi à prendre des distances
22:55 par rapport à toute la néfastitude.
22:58 Je ne sais pas si ça se dit, de ma famille.
23:01 Il vaut mieux parfois utiliser son énergie,
23:05 l'énergie qu'on aurait utilisée à souffrir en parlant avec les mauvaises personnes
23:09 ou à rechercher des questions qui, au final, on ne va jamais résoudre,
23:12 à mettre cette énergie pour réussir et s'en sortir.
23:16 Il y a plein de gens qui me disent "mais cherche ton père".
23:18 Ça te permet de savoir, vous savez les phrases,
23:21 ça te permet de savoir où tu viens et puis tu vas comprendre.
23:23 Mais pourquoi, non, quoi ? Il n'était pas là.
23:26 Je vais aller le chercher, je vais toquer "salut papa, c'est moi".
23:28 Il va me parler cinq minutes et puis après c'est quoi ?
23:31 On fait les cassos, on se dit "ah mon père, j'ai eu un père".
23:33 Mais non, il n'était pas là. J'ai 32 ans.
23:36 Ce que je vais faire là, tout de suite, maintenant,
23:38 c'est m'atteler à réussir à ce que je veux faire
23:41 et essayer d'être un bon père peut-être pour mes enfants plus tard.
23:44 Et en fait, si je dis ça et que j'aborde ce sujet-là,
23:47 c'est qu'aujourd'hui, dans ma vie d'aujourd'hui,
23:49 j'essaye de rendre ce que la vie m'a apporté de différentes façons.
23:52 Et j'interviens dans des lycées ou dans des collèges
23:55 ou dans des prisons pour mineurs.
23:56 C'est à l'âge de 12 ans, 13 ans, 10 ans, 14 ans, 15 ans,
24:00 que tu changes une vie.
24:01 C'est ce qui m'est arrivé à moi.
24:02 Pas plus tard qu'il y a trois semaines,
24:03 je vais dans un lycée pour mineurs avec des jeunes,
24:05 la moitié des jeunes qui sont incarcérés
24:07 et l'autre moitié qui ne vont pas tarder à l'être.
24:11 Et quand tu leur parles, soit ils te parlent de chance,
24:13 soit "ouais mais nous, on a si nous".
24:16 Et en fait, ils sont dans une logique où sans cesse,
24:20 ils sont dans le reproche envers les autres,
24:22 mais jamais envers eux.
24:23 Et il se trouve des excuses à tout.
24:25 Et au final, c'est un mode de fonctionnement.
24:28 Et c'est ce qui m'est arrivé à moi aussi.
24:29 Moi, je me trouvais plein d'excuses.
24:31 "Ouais mais j'ai cassé le carreau de untel
24:32 parce que ma mère était comme ça."
24:33 C'est vrai, quand tu es jeune
24:35 et que tu n'as pas le cerveau intellectuellement
24:37 suffisamment développé avec le recul de l'âge,
24:39 eh bien, tu es plus dans trouver des excuses
24:42 que dans essayer d'utiliser ton énergie pour t'en sortir
24:46 parce que tu ne vois pas où est la porte, où est la clé.
24:48 Avec la vie que j'ai eue et les conneries que j'ai faites,
24:49 et le personnage que je suis,
24:51 je ne peux pas ni dire que je suis un exemple,
24:52 encore moins donner des conseils.
24:54 Et c'est ce que les gens aiment souvent.
24:56 C'est qu'en fait, je suis en face de jeunes
24:58 qui ont plein d'intervenants qui viennent les voir.
25:01 Un maître chien, un mec de l'abérie, un mec de...
25:04 Voilà, et en fait, ce ne sont que des gens
25:06 qui réussissent dans leur domaine,
25:08 mais qui ne sont pas forcément ultra légitimes vis-à-vis d'eux.
25:12 Quand tu parles à des gars qui grandissent avec les cafards
25:15 depuis leur temps d'enfance,
25:17 c'est une façon de parler,
25:18 mais dans des lieux où c'est une dinguerie,
25:20 tu n'as pas envie d'y aller, même pour deux heures,
25:23 et que leurs parents sont en précarité tellement forte
25:26 qu'ils sont obligés de voler ou de vendre des trucs de fous pour vivre.
25:30 Tu ne peux pas aller devant ces jeunes-là,
25:32 l'espace d'une heure avec ta belle veste et dire
25:35 "Moi, je te conseille de ci, je te conseille de..."
25:36 Non, pas du tout.
25:37 Quand j'arrive là-bas et que je leur dis
25:38 "Moi, à 19 ans, j'ai fait une garde à vue pour telle et telle chose,
25:42 et à 16 ans, j'ai fait ci, et à 17 ans, j'ai fait là,
25:46 et là, j'ai failli tomber pour ça et ça et ça",
25:48 ils disent "Oui, il est sérieux,
25:50 c'est bizarre, ça ne va pas trop avec son insta
25:52 et la personne qu'il est aujourd'hui".
25:54 Et là, on gratte, et on parle de avant, du centre de redressement,
25:58 et de ce qu'il a fallu faire, et de tout en fait.
26:01 Sur une vidéo, vous allez capter peut-être 15 millions de personnes,
26:05 on va peut-être réussir à en sauver 5 ou 6.
26:08 C'est un très faible pourcentage, mais c'est notre contribution déjà,
26:11 qui est déjà très grosse dans la société.
26:13 Et moi, c'est un peu ça, l'idée, ce n'est pas d'arriver,
26:16 même quand je fais une interview, à dire
26:18 "Oui, voilà, j'ai fait ci, j'ai eu le succès, sincèrement".
26:22 Et c'est, mon avis à moi, il n'existe pas plus que ça.
26:26 Moi, je connais énormément de gens qui ont beaucoup d'argent,
26:29 et qui, comme moi, ont "tout connu",
26:31 ce n'est pas très humble cette phrase,
26:33 mais je fais le tour du monde, plus de 40 pays,
26:35 là, les 8 dernières années,
26:37 et au final, ça m'arrive de me retrouver dans un hôtel
26:40 que jamais de la vie je ne me serais imaginé aller là-bas,
26:43 et tout seul, avec les larmes aux yeux, avec les pires démons en moi.
26:45 Donc, ce n'est pas parce qu'on fait beaucoup de choses
26:49 qu'on arrive, et un, à l'apprécier, et deux, à être heureux.
26:54 99% des gens qui me félicitent aujourd'hui,
26:56 ou qui sont mes amis, ou qui...
26:59 Bon, est-ce qu'il y a 10 ans,
27:02 quand ils m'auraient vu à Nice, en train de quémander 2 euros
27:06 pour aller acheter une frite au kebab de la gare,
27:09 est-ce que réellement, ils m'auraient aidé ou tendu la main sur 99% ?
27:14 Je ne suis pas sûr qu'il y en ait plus de 10%.
27:16 Oui, et ça, c'est la réalité.
27:17 Mais moi aussi, je suis comme ça.
27:19 L'être humain est comme ça.
27:20 Même aujourd'hui, pour être complètement honnête,
27:22 il y a des centaines de personnes qui me disent
27:24 « Ah, bravo, c'est super ! »
27:26 « Ah, mais c'est fou, tu t'en es sorti, pas du tout ! »
27:28 « Ouh là là ! Pas du tout sur le papier, ouais, c'est top ! »
27:31 « Nickel, la vitrine, elle est bien léchée, elle est parfaite ! »
27:33 En réalité, tout ce que j'ai eu à vivre,
27:37 ou tout ce que j'ai pu vivre,
27:39 c'est une espèce de mini-torture de chaque jour,
27:43 une espèce de prison mentale, on dit ça souvent,
27:46 qui fait que si tu arrives à te servir des petites difficultés,
27:50 plus les opportunités, plus les rencontres,
27:52 plus, encore une fois, c'est une recette,
27:54 eh bien tout ça, ça fait un joli mélange
27:56 qui fait que tu fais ce que je fais aujourd'hui.
27:59 Mes très proches le savent,
28:00 quand je fais des projets ou quand j'enchaîne les projets,
28:03 je n'ai même pas trop d'aspect ni de finance
28:06 ni d'accomplissement personnel,
28:08 j'ai un aspect juste de challenge pour ne pas trop penser
28:12 et mettre un pas après l'autre de manière à combler
28:15 certainement un manque de tout ce que je n'ai pas eu auparavant.
28:20 Peut-être que c'est ça aussi.
28:21 Il y a eu la ressortie de mon livre qu'a cartonné,
28:24 le film, c'est une dinguerie d'avoir un film à 32 ans sur sa vie,
28:28 qui en plus a été ultra, ultra, ultra bien reçu
28:31 de tout type de personnes en France,
28:33 et de surcroît, il est aujourd'hui dans les avions.
28:37 Parfois, je croise des gens à Paris qui viennent du Texas,
28:39 du Canada ou de Russie, qui m'arrêtent et qui me disent
28:42 "mais c'est fou, je vous vois là, j'ai vu votre film dans l'avion, c'est fou".
28:46 À la fin du mois, je m'envole au Japon, à Tokyo,
28:49 pour présenter mon film et il est sélectionné au César.
28:53 On ne l'aura certainement pas,
28:54 mais il est quand même sur le site internet des Césars, c'est fou.
28:58 Et en fait, tout ça, sans compter les contrats que j'ai signés à droite à gauche,
29:02 que j'ouvre des boutiques et que c'est mon accomplissement
29:05 professionnel, personnel, qui est mis en valeur
29:08 après 15 ans de travail de recherche et développement,
29:11 de remise en question et de frustration, les portes qui se sont fermées.
29:15 L'année dernière, ça a été l'année de toutes mes, peut-être,
29:19 victoires, réussites et accomplissements.
29:21 Pourtant, peut-être que, émotionnellement,
29:24 ça a été la pire année de ma vie, où je m'y suis senti le plus seul de toute ma vie.
29:28 C'est dingue ça, tu vois, et sur 1000 personnes qui m'envoient des messages
29:31 chaque jour sur les réseaux ou que je rencontre,
29:33 il n'y a absolument personne qui va penser ça.
29:36 Mes amis, mon agent, les gens que j'appelle la nuit en stress
29:39 et en trucs, le savent.
29:42 Une anecdote parmi tant d'autres, on signe le Grand Rex.
29:44 On fait l'avant-première de mon film dans une des plus grandes salles d'Europe.
29:48 Il y a plus de 3000 personnes qui sont présentes ce soir-là, etc.
29:51 C'est une célébration dingue.
29:53 Il y a Jamel Debbouze qui vient sur le tapis rouge avec nous faire des photos.
29:56 Le mec, je le regardais à la télé quand j'étais au foyer en galère,
30:00 quand on avait le droit à une demi-heure de salle télé.
30:02 Là, il est le coproducteur de mon film.
30:04 C'est carrément fou aussi.
30:06 Et là, il est avec moi et ainsi de suite et tout.
30:07 Au final, je rentre chez moi ce soir-là à 3h30 du matin,
30:11 dans mon bel appartement, machin, truc et tout.
30:13 C'est là où je me rends compte qu'au final, ça va être très dur.
30:17 Moi, aujourd'hui, quand il m'arrive des belles choses,
30:20 je n'ai personne forcément à appeler,
30:22 à part des gens que je connais depuis moins de trois ans,
30:25 pour dire « tiens, t'as vu, je me suis battu de rappel,
30:28 il y a 15 ans, on a fait ci, on a fait là.
30:30 Aujourd'hui, t'as vu, je viens de signer ce truc-là à la montagne.
30:34 T'as vu le film ? Qu'est-ce que t'en penses ? »
30:37 Et au final, c'est une torture même dans le bonheur.
30:39 Parce que quand tu réussis,
30:42 quand un mec normal y réussit ou une fille normale y réussit,
30:44 elle appelle sa mère.
30:46 C'est sa mère, ses parents, son père, c'est sa famille
30:48 qui sont fiers d'elle et heureux.
30:50 Et c'est comme ça que tu trouves le bonheur de réussir,
30:53 c'est en la partageant avec non seulement les gens que t'aiment
30:56 et les gens qui t'ont connu avant.
30:58 Et c'est pour ça que je parle souvent de prison mentale.
31:02 Je peux me battre pendant sept mois
31:03 pour faire un deal de malade mental à l'autre bout du monde
31:06 et que quand j'ai réussi à faire ce truc-là,
31:08 je me dis « j'ai tout niqué, pardon, je parle avec mes mots ».
31:11 Et au final, quand j'ai signé le truc,
31:14 faire une mini-dépression de deux semaines ou trois semaines
31:18 en n'ayant limite plus envie de le faire
31:19 parce qu'il n'y a aucun sens à ce que je fais pour l'instant.
31:23 Ma tati, mon tonton, c'est ma famille
31:25 et c'est les gens que j'aime le plus sur cette terre
31:27 et c'est les gens que je vais voir à la fois pour me remplir de bonheur,
31:31 de me faire redescendre les pieds sur terre, c'est super important,
31:35 et en même temps, recharger mon espèce de barre de vie.
31:38 Quand tout va vite, je retourne dans la maison où j'ai grandi,
31:41 où j'ai évolué, où j'ai souffert.
31:43 Il me suffit de quatre heures, une après-midi
31:45 et crois-moi que quand je retourne à Paris,
31:47 je n'ai plus la même mentale.
31:47 D'un coup, boum, ma tati et mon tonton,
31:49 pour te donner un ordre d'idée, quand je les ai invités au Grand Rex,
31:52 qu'on leur envoie une voiture pour monter à l'avant-première de Paris,
31:55 je pense que ça fait plus de 40 ans qu'ils ne sont pas montés à Paris.
31:57 Ils ont dû venir, ils ont 80 ans,
32:00 ils ont dû venir deux fois dans leur vie à Paris.
32:01 Et c'est des gens qui sont dans un certain cadre,
32:04 à Chouy, une petite ville de moins de 3000 habitants.
32:07 Ils ne sont jamais allés plus loin que la France, tu comprends ?
32:09 Ils n'ont pas idée du tout de ce que je fais
32:13 et je ne peux même pas tout leur dire parce qu'ils ne comprennent pas.
32:16 Ils ne comprendraient pas.
32:17 Quand je leur dis "je vais à New York",
32:19 elles disent à ses amis "c'était la vie avec les grands buildings,
32:24 les maisons jusqu'au ciel".
32:26 Et en fait, c'est mignon.
32:27 Et moi, c'est pour ça que j'aime énormément aller là-bas,
32:30 parce qu'il y a cette espèce d'insouciance.
32:33 Ma tatie et mon tonton, pour donner un ordre d'idée,
32:35 aujourd'hui, ils sont à la retraite
32:36 et ils gagnent moins de 1000 euros tous les deux
32:39 pour vivre 30 jours dans le mois.
32:41 Et ils n'étaient pas loin de ça toute leur vie.
32:43 On était peut-être 3, 4, 5, 6 à la maison.
32:47 On n'a jamais manqué de rien, jamais.
32:49 Et parce que c'est des gens qui sont dans la vraie vie d'économes,
32:55 moi par pudeur, ce que je fais parfois,
32:58 ou des endroits où on m'invite ou même les endroits où j'ouvre.
33:01 Il y a des gens comme moi d'ailleurs qui vivent avec l'entreprenariat,
33:06 forcément la qualité de vie, tout ce qui va avec,
33:08 toute cette espèce de mood.
33:11 Et il y a des personnes tellement belles profondément,
33:14 comme ma tatie et mon tonton,
33:16 qui n'ont jamais eu besoin de rien.
33:18 Et ça, c'est la plus grande leçon de ma vie aussi.
33:21 C'est des gens qui sont dans la réalité de l'humain
33:25 avant la consommation, ce qui brille.
33:28 On s'en fout, nous, on va à Leclerc acheter un jean à 5,50€
33:32 quand il est en solde.
33:34 Je vais le garder 12 ans et demi, mais à côté de ça,
33:36 quand je vais passer un dimanche en famille à 15,
33:39 mon petit Azit qui vient et Laurent, Dani, la famille et tout,
33:44 on va passer un super moment.
33:46 Ça, c'est la vie, ça, tu vois.
33:47 Et je suis très content, un, de l'avoir connu,
33:50 deux, d'être toujours en contact avec ces gens-là.
33:53 Et crois-moi que c'est un sacré paradoxe avec des fois ce que je vis
33:57 et ce que je fais.
33:59 C'est mon équilibre, mais en même temps,
34:01 c'est un peu ma ligne de vie.
34:04 C'est comme si dans ma vie d'aujourd'hui,
34:06 j'étais un peu dans le brouillard.
34:08 Je suis dans un monde que je ne connais pas,
34:09 avec des gens qui ne m'ont à la fois jamais calculé,
34:11 mais en même temps, avec qui j'évolue, je travaille,
34:14 parce que j'essaie d'avoir du talent chaque jour.
34:17 Le jour où je vais faire une connerie, où ça ne va pas,
34:19 il y a 97% de ces gens-là qui ne seront plus là.
34:23 Et j'ai toujours ce petit fil un peu transparent
34:25 qui me ramène vers Chouilly avec ma téti et mon tonton,
34:28 qui n'en ont strictement rien à faire, rien à faire,
34:31 ni du gâteau au chocolat que je vais faire à Courchevel,
34:34 et que si j'étais avec le roi du barène il y a deux jours,
34:36 rien à faire, rien à faire.
34:38 Ce qu'ils veulent, c'est le bon gâteau de chez Leclerc
34:43 avec un thé tisane des bonbons des Vosges
34:46 qu'elle a réussi à avoir dans les Vosges,
34:48 et puis qu'on passe un moment,
34:50 et peut-être qu'on joue au Scrabble, et puis voilà.
34:52 C'est ça le vrai bonheur.
34:54 Je dois faire le point aujourd'hui sur ma vie,
34:56 je ne changerai rien, pas un détail à quelques petites personnes près
35:00 qui ont souffert à cause de moi.
35:01 Durant mon parcours, je ne changerai rien de tout ce qui m'est arrivé,
35:04 parce qu'elle a été riche, parce que j'ai tout connu, toutes les émotions.
35:07 Je m'y suis senti à la fois invincible et en même temps ultra faible,
35:12 et en même temps ultra plébiscité, et en même temps ultra critiqué.
35:15 J'ai tout connu, je ne sais pas comment t'expliquer.
35:18 C'est dingue et absolument peut-être pas humble de parler comme ça à 32,
35:22 mais c'est la vérité.
35:23 Je n'ai pas le même cursus que les chefs,
35:24 je ne suis pas dans le même monde que beaucoup d'autres chefs pâtissiers,
35:28 et mon parcours a gêné beaucoup de gens.
35:32 Le fait que je fasse la Coupe du Monde très jeune,
35:34 quelque part j'ai décrédibilisé le concours,
35:35 parce que je l'ai gagné à 22 ans, je me suis sectionné à 21 ans.
35:38 Pour te donner un ordre d'idée, quand je gagne la Coupe du Monde,
35:43 tous mes coéquipiers sont invités sur les salons à être jurés
35:47 pour les autres Coupes du Monde.
35:48 Moi, on ne m'a jamais invité.
35:50 J'entends des trucs de fous tous les jours sur moi dans des palaces.
35:54 « Ah, mais il est comme ça, ah, mais il a fait ça, ah, mais il a fait ci. »
35:57 Et puis quand je rencontre les gens en physique,
35:59 au bout d'un jour, une demi-heure ou six mois,
36:02 ils finissent tous par me dire « Putain, mais en fait, t'es gentil toi. »
36:05 « Ah, mais je ne sais pas, c'est bizarre, j'avais entendu ça. »
36:08 Bon ben voilà, c'est comme ça, c'est la vie.
36:10 Et si j'ai un seul conseil, mais c'est même pas…
36:12 ça me gêne de donner des conseils.
36:13 Un seul message à des jeunes qui, comme moi, ont envie de pouvoir faire des choses,
36:18 je pense que la base de tout, de tout, de tout, de tout,
36:21 c'est l'apprentissage, la culture et l'éducation.
36:25 Si on n'a pas ces trois valeurs,
36:27 ou alors si on n'arrive pas à essayer de les cultiver chaque jour,
36:30 c'est absolument impossible de rien faire.
36:32 Et d'ailleurs, j'en suis le meilleur exemple parce que moi,
36:36 j'ai fait un apprentissage dans un métier,
36:38 mais je n'avais pas la culture qui me permettait d'être crédible dans ce métier.
36:42 J'étais un abruti, moi, je ne savais même pas qui était qui à l'époque.
36:45 Et ma vie fait que je m'y suis formé chaque jour,
36:48 j'apprends encore chaque jour,
36:50 et que si j'avais un tout petit peu mieux travaillé à l'école,
36:53 ça m'éviterait d'envoyer des fois à Minute 25 à des gens que je connais,
36:56 « Tiens, tu peux me corriger le texte, là, il faut que j'envoie un mail à lui, tu vois. »
36:59 Et c'est des freins que je rencontre chaque jour
37:01 parce que parfois, j'ai manqué de fond.
37:04 Et dans la vie, il y a deux trucs, il y a la forme et le fond.
37:08 Il faut choisir comment on a envie de réussir,
37:10 mais je pense qu'il y a une grosse différence,
37:12 et c'est Jean-Paul Guerlin qui disait ça, célèbre parfumeur,
37:16 il y a une grande différence, et je m'arrêterai là,
37:17 entre la gloire et la renommée.
37:20 La gloire, c'est quelque chose qu'on arrive à acquérir
37:23 durant un court instant en ayant fait tout et n'importe quoi,
37:27 et quand vous avez la gloire, vous êtes n'importe quoi, n'importe qui.
37:31 Et ensuite, il y a la renommée, c'est une gloire constante au long terme
37:35 qui va être seulement synonyme d'un savoir-faire et d'un sérieux régulier.
37:40 Aujourd'hui, moi, par exemple, je n'ai que 32 ans.
37:42 On peut raconter ce qu'on veut, mais je n'ai rien fait encore dans ma vie,
37:44 et j'ai une espèce de mini-gloire apportée par la confiance
37:48 que m'a donnée un producteur pour raconter le récit de ma vie.
37:50 J'aurai de la renommée quand j'aurai réussi à transformer
37:54 toutes ces petites choses qui m'arrivent
37:56 en quelque chose de non seulement viable,
37:58 périn, avec synonyme d'exemplarité, et dans mon comportement,
38:02 et dans ce que je renvoie aussi aux gens qui m'entourent.

Recommandations