Pascal Praud revient pendant deux heures, sans concession, sur tous les sujets qui font l'actualité. Aujourd’hui il reçoit Vladimir Cosma à l'occasion de la sortie de son nouvel album "Vladimir Cosma dirige ses Œuvres Concertantes".
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00:00 - Enfin ! Enfin on va changer de sujet et parler de choses infiniment plus légères grâce à Vladimir Kosma,
00:11 dont vous reconnaissez la musique et dont vous connaissez toutes les musiques. Bonjour monsieur Kosma !
00:16 - Bonjour monsieur Pro. - Vous allez bien ? - Ça peut aller pire, donc ça va pas mal.
00:23 - Belle et heureuse année ? - J'espère, j'espère. Je me la souhaite. - Qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter ?
00:30 - Ça, une bonne année, santé, etc. - On est en train d'écouter une musique, une bande originale de film,
00:39 vous en avez fait tellement et chacun aura reconnu... Alors ça c'est Rabi Jacob et avant on avait entendu L'Aile ou la Cuisse.
00:47 Ça c'est Rabi Jacob. Ça c'est Rabi Jacob. Et on avait entendu L'Aile ou la Cuisse. Quand vous réentendez vos musiques,
00:55 est-ce que vous vous souvenez de l'état d'esprit dans lequel vous les avez créées ?
01:00 - Écoutez, je ne me souviens pas parce que dès que je les ai créées, j'ai l'impression qu'elles appartiennent à tout le monde,
01:07 qu'elles ne sont plus de moi. Je me sens dépossédé de ces musiques et voilà, je les redécouvre comme vous.
01:15 - Ça reste toujours un mystère la création pour beaucoup de gens et notamment la création musicale.
01:20 Comment des notes viennent-elles dans votre cerveau ? En plus avec un style reconnaissable.
01:27 C'est-à-dire que j'ai envie de dire, on reconnaît Vladimir Kosta, ça évidemment on reconnaît Le Grand Blond avec une chaussure noire.
01:36 Comment vous expliquez ce mystère de la création ?
01:39 - Écoutez, je ne me l'explique pas. Je m'explique à travers Dieu. Je me dis à quelqu'un là qui me souffle les notes et moi je les reproduis.
01:50 Je ne me sens pas créateur, je me sens reproducteur de quelque chose qui vient de là-haut.
01:57 - Est-ce que vous savez toujours si la musique que vous êtes en train de créer est celle qui est la bonne ?
02:07 Est-ce que vous avez un regard de lucidité sur vous ? Est-ce que vous dites parfois, ça c'est pas terrible ou au contraire ça je tiens à quelque chose d'extraordinaire ?
02:15 - Oui, je crois que j'ai cette espèce d'intuition qui me dit quand je trouve les bonnes notes, voilà j'ai trouvé trois bonnes notes.
02:24 Et je m'accroche à ça et je commence à les travailler parce que une musique ça ne vient pas intégralement d'un bout à l'autre.
02:33 Ça me vient parfois trois notes, quatre notes et si je les trouve bonnes, je commence à les travailler et ça, ça peut durer assez longtemps, parfois des mois.
02:43 Jusque que j'arrive à la forme définitive que vous connaissez.
02:46 - Combien de temps vous mettez pour créer une bande originale comme celle-ci où on a écouté également Rabi Jacob tout à l'heure ?
02:54 - Écoutez, ça dure parfois une vie entière. Le thème du Rabi Jacob, j'ai commencé à l'écrire quand j'avais 15 ans.
03:02 Sans idée de Rabi Jacob, sans idée de thème, c'est les quelques notes du début de la musique.
03:11 Ce motif là m'est venu quand j'avais 15 ans et je l'ai tramballé avec moi jusqu'au moment où Gérard Houry est venu commander la musique du film.
03:24 Et là je me suis souvenu de ces trois notes et je me suis dit c'est celle-là qu'il faut pour le film.
03:30 - On a souvent vu des reportages chez vous et on vous voit avec un orgue, un petit orgue, j'allais dire un petit orgue de rien du tout,
03:37 en train de créer des chansons ou des musiques, des mélodies qui vont faire le tour du monde.
03:43 - Vous parlez d'un Wurliser, d'un petit piano électrique.
03:47 - J'ai souvent vu à la télévision.
03:49 - Oui, parce que c'est un piano que je peux mettre dans le coffre de ma voiture et donc je le tramballe partout.
03:56 J'ai fait la Boum par exemple à Saint-Jean-Cap-Ferrat et toujours sur ce petit piano que j'ai encore chez moi.
04:05 - Et puisque vous parlez de la Boum, effectivement, comment ne pas donner quelque chose qui a...
04:15 Regardez le studio, ça c'est le miracle de la télé, le miracle de la chanson.
04:21 Regardez la régie, regardez Géraldine, regardez Olivier, quelque chose se passe.
04:27 Richard Sanderson, il n'a écrit quoi, il n'a écrit d'ailleurs, il n'a pas écrit, mais il n'a chanté qu'un tube et c'est le vôtre, c'est le seul.
04:36 Sa carrière après, vous lui avez mis, vous auriez dû lui en composer un deuxième.
04:40 - Mais oui, mais c'est comme ça, c'est l'homme d'un succès.
04:45 Il a fait beaucoup de chansons, plusieurs chansons, mais ça n'a pas...
04:51 La mayonnaise n'a pas pris comme pour la réalité.
04:55 - Mais ça, cette chanson, elle est géniale.
04:59 - Si vous le dites, c'est vrai.
05:02 - Moi je la revois dans la playlist, j'écoute souvent.
05:05 - On l'a écoutée combien de fois cette chanson, M. Cosma ?
05:09 - On l'a écoutée souvent, beaucoup de fois, elle s'est vendue 40 millions de disques.
05:15 - C'est votre plus grand succès ?
05:18 - C'est un des plus grands succès, il y a eu "L'amour en héritage", il y a eu "Diva", il y a eu d'autres succès, mais au niveau chanson populaire...
05:29 - C'est sans doute la plus importante.
05:32 Alors "L'amour en héritage", je ne sais pas si vous connaissez,
05:35 pour tout vous dire, je ne savais même pas que c'était de vous, "L'amour en héritage".
05:39 J'ai reçu l'amour en héritage...
05:44 C'est Nana Mouskouri qui chantait ça, et c'était un feuilleton de TF1, je ne sais pas Fabrice Laffitte si vous avez mis cette chanson à notre programme.
05:54 Ça doit être 1981, 1982 peut-être, "L'amour en héritage", et c'était un feuilleton très célèbre de TF1.
06:02 Et puis il y a également "Destinée", c'est vous qui avez fait "Destinée" ?
06:05 - Oui, absolument.
06:07 - Alors, pardon, il dit que Guillaume Marchand n'aimait pas du tout "Destinée", c'est vrai ?
06:12 - Oui, ça a été une bagarre entre nous deux, déjà sur le tournage, parce qu'il chantait cette chanson un peu en la méprisant, si vous voulez, en se moquant d'elle.
06:23 Il faisait le clown sur la chanson, il lui dit "arrête, il ne faut pas la chanter comme ça,
06:28 il faut la chanter comme si c'était la plus belle chanson d'amour du monde, c'est comme ça, il faut que tu sois sérieux".
06:35 Il ne voulait pas, j'étais obligé d'aller voir Claude Didi, le metteur en scène, lui dire "écoutez, si il la chante comme ça, moi je la retire, je ne veux pas, il faut qu'il la chante au premier degré".
06:48 - Il ne faut pas de distance et il ne faut pas forcément de second degré.
06:52 Il ne faut pas qu'il fasse rire avec cette chanson.
06:56 Et il a fait ça, mais il m'en a voulu et il a toujours refusé de chanter cette chanson dans mes concerts ou dans des endroits publics, etc.
07:07 Il aime le jazz, il aime le tango et il a toujours été fou furieux que cette chanson ait devenu son plus grand succès et que tout le monde lui réclamait cette chanson.
07:19 Il ne voulait pas la chanter.
07:21 - 500 musiques de films, Vladimir Kosma.
07:24 Il y a quelque chose, moi je ne suis pas musicien malheureusement, monsieur Kosma, et j'ai entendu souvent sur cette chanson dire que c'est l'été indien à l'envers.
07:35 Et je ne comprenais pas ce concept de l'été indien à l'envers, des notes à l'envers.
07:42 - Écoutez, il y a un procédé dans la musique qui a été souvent utilisé par Bach, par Johann Sebastian Bach, c'est le procédé du miroir.
07:50 C'est-à-dire qu'on prend une musique et on la joue à l'envers.
07:54 - Mais ça fonctionne quand même ?
07:56 - Ça peut fonctionner, ça dépend des musiques, etc.
08:00 Dans "Destiné", ce n'est pas exactement à l'envers, c'est une idée de...
08:07 C'est une espèce de...
08:17 - Il y a un parallèle.
08:18 - De technique.
08:19 - Il y a une découleur.
08:20 - Voilà.
08:21 - Il y a une couleur...
08:22 - Voilà.
08:23 Ce n'est pas exactement à l'envers, mais c'est un procédé comme une fugue.
08:26 Vous voyez, il n'y a pas un procédé précis, précis, mais l'idée est là.
08:32 - Donc "Le Grand Blond", "Les aventures de Rami Jacob", "L'élu de la cuisse", "L'as des as", "La chèvre", "La gloire de mon père", "Destiné", on l'a entendu, "Réalité", "Your eyes", "Your eyes", c'est "La boumneux" qui était très bien.
08:45 "You call it love" dans "L'étudiante", c'est très bien aussi.
08:49 "Un éléphant", ça trompe énormément, et ça c'est formidable.
08:52 - "Piano".
08:53 - Ça c'est formidable.
08:55 En fait, je pense que vous êtes un génie, M. Cosma.
08:59 - Ah, là là là là là là là.
09:01 Comment je veux vivre avec un génie.
09:03 - Mais je pense que vous êtes un génie, parce que d'avoir autant créé que cela, autant de tubes que cela, je ne vois pas d'équivalent dans la jeune génération.
09:13 - Mais en ancienne, il y avait un Michel Legrand.
09:15 - Oui, bien sûr.
09:16 - Je ne sais pas si vous étiez ami ou pas avec lui, parce que parfois il y a de la concurrence.
09:20 - C'était au début, il n'y avait pas de concurrence, c'était mon mentor.
09:24 Je l'apprécie énormément et j'ai travaillé pendant 5 ans pour Michel Legrand.
09:29 Je faisais ses arrangements et on était très proches jusqu'au moment où nos vies sont séparées.
09:36 Puisque Yves Robert est venu me demander de faire la musique d'Alexandre le Bienheureux.
09:43 - Avec Philippe Noiret et Marlène Jobert, ça doit être 68 ou 69.
09:47 - Exactement. Alors qu'il demandait les musiques avant à Michel Legrand.
09:51 Alors là, ça change, ça devient grave.
09:53 - Oui, mais c'est toujours pareil dans tous les domaines.
09:56 Des gens qui sont en concurrence, parfois les chemins diffèrent.
10:01 - Et puis il y avait dans cette époque-là, Francis Leigh, qui travaillait beaucoup pour Claude Lelouch.
10:06 J'imagine que vous n'avez pas travaillé pour Claude Lelouch.
10:08 - Non, non.
10:09 - Forcément, puisque chacun a ses compositeurs, si j'ose dire, attitrés.
10:13 Et puis vous êtes très présente dans les années 70, 80 avec tous ces films-là.
10:18 Il est 12h49, on est très en retard, mais c'est un tel plaisir d'être avec Vladimir Kosma
10:23 et d'écouter toutes ces musiques que nous prenons le temps qu'il faut.
10:26 - Et avant la pause, je vous rappelle que ce soir, vous avez rendez-vous avec Elisabeth Assayag de 20h à 21h pour La France Bouge.
10:32 Et aujourd'hui, vous saurez tout sur le permis de conduire à 17 ans.
10:36 Et à cette occasion, Elisabeth Assayag reçoit Patrick Crespo, président du groupe CER Réseau,
10:41 Réseau d'Auto-Écoles et de Centre de Formation, 20h à 21h.
10:44 C'est La France Bouge sur Europe 1.
10:53 - Alors ça, c'est une musique qui est dans votre nouvel album, Monsieur Kosma.
10:59 - Oui.
11:00 Ah oui, c'est ça. C'est un concerto de mandoline.
11:06 Concerto Mediterraneo pour mandoline et orchestre à cordes.
11:10 Voilà, j'aime beaucoup la mandoline, je suis violoniste moi-même.
11:15 Et vous savez qu'il y a une parenté entre la mandoline et le violon.
11:21 La mandoline, c'est un violon sans archer.
11:24 On pique les cordes et on ne joue pas avec l'archer.
11:28 Donc, j'ai toujours aimé Paganini, qui était un grand violoniste,
11:33 mais était un grand mandoliniste en même temps.
11:35 Donc, j'ai écrit ce concerto pour mandoline et orchestre.
11:39 Et voilà, il sort.
11:40 - Il y a le concerto de Berlin également pour violon et orchestre.
11:43 Ça, c'est une œuvre composée à l'origine pour la bande originale du film La Septième Cible,
11:47 qui est un très joli film d'ailleurs de Claude Pinotot, avec Lino Ventura.
11:54 Et puis, c'est un film vraiment intéressant qui ne passe pas assez souvent à la télévision.
11:58 Ça, c'est un nouvel enregistrement qui fut créé et enregistré par le magistral Vadim Répin,
12:04 dont Yehudi Minouine a déclaré que c'est le meilleur et le plus parfait des violonistes
12:08 qu'il m'ait été donné d'entendre.
12:09 On voulait vous faire écouter également un fan qui s'appelle Éric.
12:14 Éric qui est là.
12:15 - Henrik.
12:16 - Henrik qui voulait saluer votre talent, M. Cosma.
12:20 Bonjour Henrik.
12:21 - Bonjour Pascal, bonjour à toutes les petites, et bien bonjour à M. Cosma bien évidemment.
12:27 - Bonjour.
12:28 - Bonjour.
12:29 Moi, je tiens sincèrement à vous remercier pour votre génie, pour votre musique.
12:37 Vous faites partie de notre patrimoine, du patrimoine français.
12:41 Votre musique fait partie de notre vie.
12:44 On peut très facilement superposer vos chansons, votre musique avec des événements de notre vie.
12:52 Pour mon cas particulier, moi c'est surtout le château de ma mère qui me marque beaucoup,
12:58 qui me transporte dans notre France d'antan, de la fin du 19e, début 20e,
13:05 et je me revois avec mes grands-parents.
13:08 Et ça me touche beaucoup.
13:10 Ça symbolise vraiment une France qui aujourd'hui n'existe plus.
13:15 Et qu'est-ce qu'un film sans une grande et une belle musique ?
13:21 Et rien que pour ça, je tiens à vous remercier.
13:24 - Ben merci.
13:25 - Faut remercier M. Pagnol aussi, Marcel Pagnol, qui a écrit le château de ma mère,
13:31 la gloire de mon père, dont j'ai fait la musique, dont Yves Robert a fait les films.
13:37 - Avec une musique très réussie là aussi, que chacun peut connaître.
13:43 Est-ce que la création, aujourd'hui forcément, vous continuez toujours d'écrire de la musique,
13:51 mais est-ce que votre créativité ou la création est intacte selon vous,
13:55 ou est-ce qu'avec l'âge ça s'émousse un peu ?
13:58 - Écoutez, je ne crois pas que ça s'émousse, mais vous savez,
14:03 il y a des grands compositeurs de la musique classique qui ont écrit des chefs-d'œuvre en étant très vieux.
14:12 Donc on ne peut pas dire qu'avec l'âge ça s'émousse, mais ça peut s'émousser.
14:17 Elle peut s'émousser comme elle arrive, quoi. C'est mystérieux.
14:20 C'est un peu, je vous ai dit ça, c'est quelque chose qui vient de Dieu.
14:24 Si Dieu arrête de nous donner la clé de la musique, on arrête de composer.
14:31 - J'espère qu'il est toujours en train de me...
14:36 - Vous n'êtes pas en colère comme Salieri qui prenait Dieu dans le film de Forman
14:42 et qui reprochait à Dieu d'avoir donné tout le talent à Mozart
14:46 et à lui, ce pauvre Salieri, de ne rien lui avoir donné ?
14:49 - Non, non, non, au contraire. Je lui remercie pour tout ce qu'il m'a donné et j'espère qu'il ne va pas m'oublier.
14:54 - Bah écoutez, vraiment merci, parce que vous êtes un bonheur.
14:57 Alors ça, effectivement, toutes ces musiques-là, elles sont dans nos vies.
15:04 Et puis même parfois, je disais tout à l'heure, l'amour entéritage.
15:08 Pardonnez-moi, je ne savais pas que c'était vous qui l'aviez composé.
15:11 Mais j'imagine que souvent, les gens doivent vous dire
15:16 "Ah, mais je ne savais pas que c'était vous qui aviez composé ça", etc.
15:19 Merci vraiment grandement, Vladimir Kosma, et belles et heureuses années à vous.