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Gérard Depardieu, un géant du cinéma français, ne cesse de soulever des polémiques le long de sa carrière. Qui se cache derrière cet homme à la réputation douteuse avec les femmes ?

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Personnes
Transcription
00:00 Et Blié me dit "tu fais peur aux femmes"
00:02 "qui c'est qui t'a dit ça ?"
00:06 Il me dit "c'est le producteur"
00:08 Mais il est con
00:11 Je peux pas faire peur aux femmes
00:14 J'aime les femmes
00:16 Mais je les aime pas comme un
00:18 comme un macho, j'ai jamais
00:22 je ne sais pas ce que c'est que séduire
00:26 J'ai jamais fait la cour à une femme
00:28 Je sais qu'est-ce qu'il raconte lui
00:30 Qu'est-ce que tu veux faire ?
00:32 Avec moi ? Là ?
00:35 Là, c'est bien, laisse ça
00:42 En le voyant arriver
00:54 les gens disent volontiers
00:56 voilà un homme qui a la tête sur les épaules
01:00 ce corps robuste, éloquent
01:03 supporte une tête coiffée ou décoiffée
01:06 de mèche, de copeaux, d'herbe
01:10 plus propre à l'adolescence
01:13 Essaye de passer Gérard, ta main droite, essaie de la passer à l'intérieur
01:16 pour pas qu'elle soit coupée
01:18 Non, au contraire, que je la vois, que tu prennes le montant, non au contraire, en sortant
01:21 Quoi ?
01:28 Redresse-toi bien Gérard, voilà très bien, non non non, tu peux garder les jambes croisées
01:37 Attention à la bouche
01:38 Non non non, c'est bien ça
01:42 Attention à la bouche Gérard
01:43 Quoi, bon ? Non non, je dis attention à la bouche
01:46 Ah ça là elle est belle
01:51 Tu peux regarder ailleurs Gérard, voilà voilà
01:58 Un visage qui vit dans le présent
02:02 oublieux du passé
02:04 insoucieux de l'avenir
02:06 et que la vie
02:07 exaspère ou comble selon
02:12 Je vis avec Gérard Depardieu
02:15 par exemple quand j'écris quelque chose
02:18 il s'impose automatiquement, je suis à mon bureau, je suis tout seul et j'écris
02:22 je suis en train de manger ma blanquette de veau
02:25 je me dis quel acteur peut dire ça, il n'y en a qu'un au monde, c'est Gérard Depardieu
02:29 évidemment
02:29 De même que quand on est
02:31 à proximité d'un bloc de glace, on est irradié par le froid, lorsqu'on est
02:35 à proximité d'un
02:37 bloc de Depardieu, on est irradié par une forme d'intelligence
02:41 de goût de la vie et de bonheur, c'est pareil
02:43 Gérard, on peut tout dire de lui et son contraire
02:45 d'ailleurs Gérard a tout dit et son contraire, c'est un peu comme Victor Hugo
02:48 il a tout dit et son contraire pour être sûr d'avoir tout dit
02:54 Toute ma vie j'ai couru pour plaire
02:57 pour faire en sorte qu'on puisse m'estimer
03:00 afin qu'à mon tour je puisse avoir un peu de considération pour moi-même
03:04 ne serait-ce qu'un dixième de l'estime que me portaient les autres
03:11 mais maintenant je m'en fous
03:13 on me prend tel que je suis
03:15 ou on ne me prend pas
03:23 comme on ne me prend pas
03:31 comme on ne me prend pas
03:38 comme on ne me prend pas
03:45 comme on ne me prend pas
03:52 comme on ne me prend pas
04:00 comme on ne me prend pas
04:08 Je veux que tu se monte ça
04:10 Elle est belle
04:11 Je prends ça
04:13 Attends
04:20 Elle n'est pas pue
04:23 Qui c'est qui a porté ça ?
04:24 C'est quelqu'un de chez Bertrand Zabit
04:30 Qu'est-ce que tu veux faire ?
04:33 On va mettre un petit coup de panneau
04:34 Avec moi ? Là ?
04:36 Là c'est bien laisse ça
04:41 Jean ?
04:44 A côté
04:46 Ben vas-y
04:51 Moi j'ai pas eu d'enfance parce que j'ai eu de...
04:58 je suis passé à la survie
05:01 donc j'ai pas eu d'enfance
05:03 et de même je suis très heureux
05:06 j'ai eu d'enfance jusqu'à 7-8 ans
05:10 mais mon éducation c'était de regarder les autres
05:16 et de voir comment ils faisaient
05:18 les imiter quoi
05:21 Personne n'a voulu de moi
05:24 ni les écoles, ni les curés
05:26 il n'y a que les flics avec lesquels j'ai ri
05:30 et que je respecte énormément
05:35 Château-Rouge ça reste toujours Château-Rouge
05:37 ce sont des gens discrets
05:39 qui sont des bérichons
05:41 qui se tiennent à leur place
05:43 qui ne dépassent pas les autres
05:45 des bérichons, qui se tiennent à leur place
05:48 qui ne dérangent personne
05:51 et les maisons étaient petites
05:53 les portes étaient petites
05:55 les esprits aussi
05:59 J'habitais une maison au 39 au du Marchal-Geoff
06:02 à Cointre-Rue en dessous il y avait la voisine
06:04 la maîtresse et le milou son mari
06:08 J'avais aussi le souvenir d'un père merveilleux
06:11 d'une mère aussi très belle
06:14 Dédé et Lalilette, ils se sont beaucoup aimés
06:17 il y avait du rêve, énormément de rêve
06:20 c'est un monde d'où je viens
06:23 et dont je suis fier
06:25 Lalilette, il y a une douceur dans son visage
06:28 qui est très douce
06:30 et qui est très douce
06:32 et qui est très douce
06:34 et qui est très douce
06:36 Il y a une douceur dans son visage qui est indescriptible
06:39 C'est quelqu'un d'appart
06:41 et je dois dire qu'elle m'a beaucoup aimé
06:43 et elle m'a beaucoup aidé
06:45 et quand elle voulait changer son train de vie
06:47 elle allait au cinéma
06:49 et elle mangeait le film pendant 15 jours dans la tête
06:52 Ce que Dédé, mon père, m'a appris
06:56 et Lalilette
06:58 c'est qu'il faut surtout fermer sa gueule
07:02 et passer
07:04 et le meilleur passage c'est le sourire
07:07 et j'ai dit oui
07:09 ouais je comprends pas
07:12 C'était un homme libre
07:14 qui n'a jamais cherché à mettre son empreinte
07:18 d'une éducation quelconque
07:21 sur nous
07:23 je veux dire, j'aurais pas la confiance que j'ai en moi
07:27 si j'avais pas eu l'amour de ma mère
07:30 et la fantaisie de mon père
07:33 Gérard, il protégeait
07:45 parce qu'à l'école, bon, fallait pas embêter la sœur
07:48 fallait pas...
07:50 Il était très gentil
07:52 Bon souvent, quand on manquait un peu d'argent
07:54 il disait à ma maman
07:56 tu verras, quand tu seras grande
07:58 je t'achèterai du saucisson
08:00 je tiendrai une boucherie
08:02 on aura de la viande et tout
08:05 on était pas malheureux
08:08 mais le soir, souvent, c'était un café roulé
08:11 ou un truc comme ça
08:13 Mon rêve c'était de boucher
08:19 Pourquoi ?
08:23 Pâtissier j'ai été deux jours, c'était pour nourrir les gens
08:26 Boucher, pareil
08:28 pour donner de la viande, pour nourrir les gens
08:31 Pierre !
08:33 C'est bien beau
08:35 On enrive en deux, c'est top
08:38 Alors tu veux que je vais la mettre sur cette épaule-là
08:42 de toute façon, j'ai...
08:44 C'est plus lourd, tu vois comme c'est...
08:47 C'était trop tard, hein ?
08:49 Ça va mieux ?
08:50 Oui, ça va mieux
08:52 Allez ! Dans ce sens, Gérard, dans ce sens-là
08:55 Tu changes rien, juste chope bien la lumière, c'est tout
08:58 Il y a une photo qu'a fait Richard Meloul
09:02 qui m'a marqué énormément
09:04 C'est une photo, on le voit dans des cartes de bœufs
09:07 des pièces de bœufs, c'est un peu comme le Rembrandt
09:11 comme le bœuf de Rembrandt
09:13 Et je trouve qu'il y a quelque chose de l'ordre de la vérité crue
09:18 Aucun après-accent circonflexe, aucun
09:22 C'est... tac !
09:24 C'est à prendre ou à laisser
09:27 Sur 14 bases aériennes,
09:32 les Américains en utilisent 4 de façon intensive
09:35 L'une des plus importantes, celle de Châteauroux,
09:37 est spécialisée dans le transport et l'entretien du matériel
09:40 L'esprit que j'ai de Châteauroux, c'est les Américains
09:46 Achetés américains, disent les pancartes des PX
09:50 ces bazars drugstores géants que l'on retrouve sur toutes les bases
09:54 autant de perdus pour le commerce local
09:56 Je faisais un gros trafic avec les Américains
09:59 et comme j'avais un physique qui, à 13 ans, était 1m80 et 75 kilos
10:06 c'était un bon poids moyen
10:08 et je m'entraînais à la boxe avec les GI américains de la base de Châteauroux
10:14 et ils me prenaient pour l'américain, les gens
10:17 et je me disais "yes, yes, yes"
10:21 C'était que ça
10:25 Les Américains sont partis en 1963
10:30 et moi j'ai dû partir un an avant
10:32 J'ai quitté ce monde qui, c'est-à-dire, me laisse toujours des très jolis refrains dans la tête
10:42 Le château de Châteauroux
10:46 J'arrivais directement, directement des bois, enfin de Châteauroux
11:02 Moi je suis venu dans ce métier, dans ce métier
11:07 alors que je ne savais pas que j'allais faire ça
11:10 Enfin finalement j'ai fait ce métier exactement comme j'ai vécu
11:15 De 8 ans dans les fêtes foraines
11:18 et puis quand je suis arrivé à Paris, j'ai fait la même chose
11:22 Je n'avais aucun formatage d'éducation quelconque
11:28 J'habitais avec 4 copains dont un était de Châteauroux qui m'avait emmené
11:35 qui était le fils d'un médecin qui s'appelle Michel Bélanger
11:38 et après il m'a emmené chez Lulin
11:40 où il y avait Tratignan qui donnait des cours
11:43 et moi j'y allais comme j'allais partout
11:47 Je rentrais directement en regardant les gens dans les yeux
11:51 et un jour il m'a dit "il faut que tu me passes ta scène toi"
11:56 J'étais pris au piège
11:59 donc moi je ne connaissais rien de ça, des textes
12:07 Je montais sur scène
12:10 et puis j'étais là sans rien
12:14 mais étrangement je n'avais pas peur ni le trac que j'étais là
12:20 C'était un drôle d'effet de se retrouver dans une lumière
12:25 sur une scène où des gens t'attendent
12:29 t'enregardes qu'ils sont des jeunes qui ont des vies équilibrées
12:36 J'ai regardé ça
12:55 Je commençais à rire
12:58 mais après ça me donnait un rire terrible
13:01 et tous les gens commençaient à rire
13:04 Il a dit "c'est une improvisation"
13:07 et c'est comme ça que j'ai commencé
13:14 Après Michel m'a dit "viens on va aller chez Jean-Laurent Cocher"
13:23 "il va t'apprendre les classiques"
13:27 et j'arrive chez Jean-Laurent Cocher
13:30 et lui me voit débarquer avec des bottes de pollue des cheveux
13:35 un espèce de bête avec cet espèce de rire
13:41 je connais, je connais
13:44 ça va, ça va
13:48 C'est une espèce de grand viking avec les cheveux sur les épaules
13:53 un jean certainement déchiré, déjà il avait devancé la mode
13:58 des grosses bottes en poils, je ne sais quoi
14:02 mais il y avait justement en lui cette fraîcheur
14:05 c'est ça la grâce, parce que c'est un personnage de grâce
14:08 Quand on me demandait d'apprendre un texte
14:11 il fallait que je mette des images
14:16 parce que par exemple dans "Britannicus"
14:19 quand il dit "que dis-je, j'aimais et j'idolâtre"
14:23 pour moi, idolâtrer ce n'était pas un verbe
14:28 c'était simplement que l'amour, ma passion pour elle
14:32 était un feu brûlant qui jaillissait de l'âtre
14:37 de la cheminée qui m'enveloppait
14:40 et après il a fallu apprendre les vers, "pirus"
14:44 alors je me dis "c'est quoi, qu'est-ce qu'il dit là ?"
14:48 "la Grèce en notre faveur est trop inquiétée"
14:52 "le soi plus important, je lui crue l'agité"
14:56 "mais ça veut dire quoi ça ?"
15:00 "bah il dit la Grèce c'est un pays"
15:04 "ça s'appelle un Alexandrin, tu as douze pieds"
15:08 alors il m'explique beaucoup, pour moi je ne comprenais rien
15:12 et d'un seul coup, puisque pour moi les mots devenaient comme de la musique
15:16 je me suis mis à dire des choses en prenant mon temps
15:24 et en articulant
15:27 alors que les autres, j'avais déjà entendu ça
15:31 "la Grèce en ma faveur est trop inquiétée"
15:37 "seigneurie, sur le nom de son ambassadeur"
15:42 "j'avais dans ses projets conçu plus de grandeur"
15:48 déjà je me suis assis
15:54 et j'ai parlé comme un voyou
15:58 j'ai regardé l'autre, je lui ai dit
16:06 "la Grèce en ma faveur est trop inquiétée"
16:09 "le soin plus important, je lui crue l'agité"
16:13 "seigneurie, sur le nom de son ambassadeur"
16:15 "j'avais dans ses projets conçu plus de grandeur"
16:19 "qui croirait en effet qu'une telle entreprise"
16:23 "du fils d'un même nom"
16:27 "mérita l'entremise qu'un peuple tout entier"
16:30 "tant de fois triomphant"
16:32 "du déni conspiré que la mort d'un enfant"
16:37 et il y avait un silence quand j'ai coché
16:42 et il m'a dit "viens voir, comment t'appelles-tu ?"
16:47 "Gérard, Gérard Depardieu"
16:50 et là j'étais devant son bureau
16:53 et il m'a fait un devant le bureau, j'étais à l'eau, j'écoutais
16:56 il me dit "t'as déjà travaillé ?"
16:58 je me dis "ouais, bien sûr"
17:03 et là il me regarde et il me dit
17:05 "tu vas travailler dans César de Bazan"
17:08 "tu vas travailler à Rue Blas"
17:10 je me dis "qu'est-ce que c'est que ces noms ?"
17:12 il se fout de ma gueule là
17:15 il dit "d'accord"
17:17 et je commence à écrire, mais comme je savais pas bien écrire
17:20 donc j'avais même ma main là-dessus
17:22 "comment t'as dit là ? Dans César de Bazan, oui"
17:26 et c'était pour moi des noms de chiens
17:29 je connaissais pas du tout
17:32 il aurait pu rester ça, cet espèce d'homme des bois
17:36 comme ça, un peu insolite
17:38 mais il s'est mis à travailler, mais comme un dingue
17:41 il dévorait tout le théâtre de Racine, il dévorait tout Musset
17:44 et quand il travaillait un personnage
17:46 c'était pas une petite scène extraite du contexte
17:48 comme ça il travaillait le rôle entier
17:50 un été, il nous avait suivis en stop avec des amis
17:53 on était en vacances sur la côte
17:56 on le voit arriver un matin, il avait un blouson, un slip
17:59 mais il avait à la main tout le théâtre de Marivaux
18:01 il se mettait dans un coin, sur un rocher, sur la plage de Cagnes
18:05 il passait ses journées à lire les dialogues
18:08 entre les marquises et les comtes de Marivaux
18:10 Gérard m'impressionnait beaucoup
18:12 c'est un drôle d'animal
18:14 il a tendance à regarder jusqu'où il peut aller
18:18 et il sent tout
18:20 il sent le rôle, il sent si son partenaire a peur ou pas
18:25 il a une présence extraordinaire
18:29 que les spectateurs peuvent constater
18:32 mais qu'on ressent sur le plateau
18:34 quand Gérard est là, Gérard est là
18:36 il est là partout
18:37 il y a des monuments, il y a des gens qui sont
18:40 les personnes, les rares personnes
18:43 qui sont emblématiques de ce métier
18:46 Gérard, c'est son tour
18:51 les marquises de Marivaux
18:54 le théâtre de Marivaux
18:57 le théâtre de Marivaux
19:00 le théâtre de Marivaux
19:03 le théâtre de Marivaux
19:06 le théâtre de Marivaux
19:09 le théâtre de Marivaux
19:12 le théâtre de Marivaux
19:15 le théâtre de Marivaux
19:18 le théâtre de Marivaux
19:21 le théâtre de Marivaux
19:24 le théâtre de Marivaux
19:27 le théâtre de Marivaux
19:30 le théâtre de Marivaux
19:33 le théâtre de Marivaux
19:36 On ne peut pas jouer avec un grand acteur sans se sentir grandi
19:39 jouer avec Gérard, c'est tout de suite
19:42 on se dit tout de suite, il va falloir que j'aille là
19:45 c'est pour ça que je ne me suis pas fait bouffer
19:47 je ne peux pas rester là, il va falloir que je fasse ça
19:50 ce qui m'a mis en valeur dans le film, c'est le regard de Gérard
19:53 avec qui je suis ?
19:56 mais qui c'est ce gugus ?
19:59 qui c'est ce gugus ? Il s'est dit au fond de lui-même
20:02 je parle du personnage, mais qu'est-ce qui le fait bien à Gérard dans le film ?
20:05 qui c'est ce gugus qu'on m'a foutu dans les pattes ?
20:08 et ce silence était extraordinaire
20:11 c'est pour ça que c'est un grand acteur, c'est que son oeil dit tout
20:14 son oeil peut dire le désarroi, la crainte, la peur
20:17 la colère, tout, tout
20:20 c'est un caméléon, c'est un jouisseur
20:29 il veut tout connaître, tout dévorer même
20:33 Ricardo Mutti me disait toujours
20:36 j'ai envie de rencontrer ce personnage, je veux le rencontrer
20:39 Mutti qui est plongé dans Verdi, dans Beethoven, dans Wagner
20:42 qui est le plus grand chef aujourd'hui qui existe
20:45 vous savez, c'est pas tous les acteurs qui se retrouvent
20:58 avec le Philharmonic de Vienne, Ricardo Mutti
21:01 avec la Symphonie Chicago Orchestra
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37:38 et avec la Symphonie Chicago Orchestra
37:41 et avec la Symphonie Chicago Orchestra
37:45 Pour moi, ce n'était pas une journée de tournage.
37:48 C'était simplement de rentrer dans un métier
37:51 C'était simplement de rentrer dans un métier
37:54 qui n'était pas mon métier, qui était un métier de liberté.
37:57 Je n'ai jamais pensé que je...
38:00 Je n'ai jamais pensé que je...
38:03 J'ai travaillé dans aucun film.
38:06 Même sur des films américains où il faut que vous ayez anglais.
38:09 Tu mets un texte là, puis je le lis, je le regarde comme ça, puis voilà.
38:12 Pour moi, c'était essentiel.
38:15 C'est au moins la moindre des politesses à te rendre
38:18 quand on te donne autant de liberté, à savoir une heure de maquillage,
38:21 quand on te fait ton emploi du temps de la journée.
38:24 Et qu'après, le soir, quand tu rentres dans ton hôtel,
38:27 d'un seul coup, ton propre silence devient gênant.
38:30 ton propre silence devient gênant.
38:33 Il faut sortir, sortir, aller boire.
38:36 Heureusement, il faut beaucoup de santé pour être acteur.
38:40 (musique)
38:43 Patrick était quelqu'un de très douloureux.
38:51 Extrêmement joyeux, mais très douloureux.
38:54 Il avait toujours un... Il avait toujours quelque chose derrière lui qui était...
38:57 Il avait trop de colère.
39:00 "Je t'ai toujours connu, écorché vif, grand, brûlé.
39:03 Tu la trouvais belle, la mort.
39:06 Bien garce, en ferte.
39:09 Je te le dis maintenant sans gêne et sans en faire un drame.
39:12 J'ai toujours senti la mort en toi."
39:15 (musique)
39:18 "Je peux pas m'empêcher de penser,
39:32 Patrick,
39:35 que si tu n'étais pas parti,
39:38 c'est peut-être toi que j'aurais embrassé
39:41 dans tes nuits de soirée."
39:44 (musique)
39:47 "Quand j'ai su que c'était fini, je me suis dit,
39:52 ben oui, quoi, rien à dire.
39:55 Et tout de même pas surjoué comme les mauvais acteurs.
39:58 Et puis, je t'avoue, moi, bien en face, je m'en fous.
40:01 Je m'en fous. Je veux pas rentrer là-dedans.
40:04 Moi, je suis une bête.
40:07 Ça m'est égal la mort. La mort connaît pas.
40:10 Je suis ta vie, la vie jusque dans sa monstruosité."
40:15 (bruits de pas)
40:18 (bruits de pas)
40:21 (bruits de pas)
40:49 "On voit pas bien, là.
40:52 Elle est tiérie.
40:55 J'avais envie d'écrire des lettres
40:58 auxquelles je pensais ne pas avoir assez parlé.
41:03 Et parce que j'ai jamais pu lui...
41:06 Et puis, en plus, j'étais très pudique,
41:09 mais j'ai eu beaucoup de confessions de Patrick.
41:12 En tout cas, j'ai partagé ses douleurs avec lui."
41:15 (musique)
41:19 "Il fait réapparaître les gens, Gérard.
41:22 Il fait réapparaître les morts.
41:24 Il les fait parler, il les voit.
41:27 Il leur donne une vie, une lumière."
41:30 Tu leur parles encore aux disparus ?
41:33 "Bien entendu.
41:35 Tous les jours, ils sont là, partout.
41:38 Il y a Guillaume, il y a tout le monde.
41:41 Barbara, elle chante.
41:47 Marguerite s'interroge."
41:52 "Vous le voyez ?"
41:58 "Oui, je le vois.
42:01 Infatigable."
42:03 "Les gens d'esprit ne meurent jamais.
42:06 On ne vit qu'avec ce qu'on a perdu.
42:10 Ceux qui sont devant vous
42:13 n'attendent que votre mort.
42:16 (sanglots)
42:19 (rires)
42:22 Ils vous aiment, mais ils se disent
42:25 'Putain, il ne va pas se barrer, il nous fait chier.
42:28 Putain, qu'ils nous foutent la paix,
42:31 qu'on l'aime, enfin.
42:34 Mais ça, c'est...
42:37 Je te dis ce que je ressens et ce que je vis."
42:40 "Il y a un être vivant, comme Marguerite,
42:44 comme Barbara, comme Maurice,
42:47 comme Guillaume, comme Jean Carmet,
42:51 comme le Dédé, la Lilette,
42:54 comme tous ces gens.
42:57 Ils tiennent, ils ne s'effacent pas.
43:00 Et ils tiennent parce que
43:03 je me rends compte
43:06 à quel point ce que j'ai vécu avec eux
43:10 était éternel."
43:14 "Hop, la mange à nous."
43:17 "Mais oui, mais vous n'avez pas rêvé de nous manger dans le but."
43:20 "Viens là, viens."
43:23 "Il y a des bruits."
43:26 "Bon, je vous laisse, tout bien."
43:29 "Oui, mais où il est le gros con, alors ?"
43:32 (rires)
43:35 "Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qu'il y a ?"
43:38 "On est tout à l'heure."
43:41 "On est tout à l'heure."
43:44 "On est tout à l'heure."
43:47 (rires)
43:50 "J'ai déjà vu la lumière
43:53 et senti la chaleur
43:56 et le soulagement, la libération.
43:59 J'ai vu ce dans...
44:02 J'ai senti ça chez ma mère.
44:05 Elle était en paix.
44:08 D'un seul coup, son visage était détendu.
44:11 Chez le DD, mon père,
44:14 c'était comme une surprise.
44:17 J'ai dû lui mettre un...
44:20 J'entendais l'infirmière parler comme ça
44:23 et je me disais "Mais merde, c'est qui, c'est le DD ?"
44:26 Et là, je l'ai dit devant l'infirmière,
44:29 "Vous n'avez pas un torchon, là, qu'on lui a vu avant,
44:32 qui a quand même pas parti comme ça ?"
44:35 "Ah oui, oui, je sais pas."
44:38 J'ai mis un torchon, il ressemblait à une espèce de gros œuf de Pâques.
44:41 À sa tête.
44:44 Voilà.
44:47 J'ai vu...
44:50 Jean. Jean Carmé, qui était...
44:53 qui était un peu en colère.
44:56 - Salut. - Tu sens bien, hein ?
44:59 Tu sens le bien-être.
45:02 Il n'y avait pas de...
45:05 ce trait qui repose.
45:08 Barbara était soulagée aussi.
45:11 J'ai vu que deux...
45:14 J'avais vu Yves Montand,
45:17 qui était alors un type très carré,
45:20 qui tout à coup était tout petit, rapetissé.
45:23 Et là, j'ai...
45:26 Je me suis dit...
45:29 "Finalement, ce corps, c'est quoi ?
45:32 Il a quoi ? Il a 70 % d'eau ?"
45:35 Et d'un seul coup, il s'était complètement rapetissé.
45:38 Il n'y en a que deux...
45:41 que j'ai vus vivants dans leur cercueil.
45:46 C'était Maurice Piana...
45:49 et Guillaume.
45:52 C'est normal, les tats, c'est rien.
45:55 Les coups, ben machin, les gens en disant...
45:58 C'est bon.
46:01 En plus, dans une situation donnée.
46:04 Maurice a toujours été...
46:07 Il était même intelligent.
46:10 Il n'y avait pas de questions,
46:13 il n'y avait pas de réponses.
46:16 Il avait toujours cette lucidité.
46:19 Et chez Guillaume, il y avait une grande violence.
46:22 Si j'ouvrais le cercueil,
46:25 il y avait toujours cette violence,
46:28 la même force.
46:31 J'étais frappé de voir ces deux,
46:34 les deux seuls, dans un cercueil,
46:37 encore vivants,
46:40 avec leurs sentiments intacts.
46:44 Guillaume est mort comme un poète.
46:47 Comme Rimbaud est mort.
46:50 C'est simplement que lui, il avait les mots.
46:53 C'est comme Rimbaud.
46:56 Quand on dit Rimbaud, c'est...
46:59 Il est mort.
47:02 Il est mort.
47:05 Il est mort.
47:08 Il est mort.
47:11 Il est mort à 33 ans.
47:14 Un légende coupé comme Guillaume.
47:17 Non, c'est pas ça.
47:20 Que...
47:23 Guillaume, il hurle encore dans mes...
47:26 Dans la maison.
47:29 Il est costaud.
47:33 Sous-titrage MFP.
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