• il y a 2 ans
Table ronde - Réactions et réponses des invités suite aux restitutions des ateliers
Transcription
00:00 Alors on va enchaîner peut-être dans cette deuxième partie, Amandine, sur la restitution
00:14 des ateliers.
00:15 Est-ce qu'il y a eu un point particulier sur lequel vous souhaitiez rebondir ?
00:20 Oui, est-ce que vous m'entendez bien et pas trop fort ? Il y a deux points sur lesquels
00:32 je pourrais en particulier rebondir.
00:34 Le premier, c'est la question qui a été posée par un atelier, celui du Pacte du pouvoir
00:38 de vivre probablement, sur la manière pour les adhérents, la vie nouvelle, de pouvoir
00:43 s'engager sur des actions citoyennes.
00:45 En quelques mots, parce que je l'ai dit tout à l'heure, on va notamment créer des espaces
00:51 d'engagement au sein du Pacte du pouvoir de vivre où les citoyens pourront, avec d'autres
00:55 citoyens de sa commune ou de son bassin de vie, identifier des projets, des sujets sur
01:01 lesquels ils auront envie de s'investir collectivement.
01:06 Donc on entraîne vraiment de structurer ça.
01:08 C'est une partie de la réponse, mais évidemment il y a beaucoup d'autres espaces où on peut
01:12 s'investir dans son territoire.
01:15 Mais si on l'a créé en tant que Pacte du pouvoir de vivre, cet espace d'engagement
01:19 citoyen, c'est que venaient vers nous des citoyens qui nous disaient "moi je suis bénévole
01:26 au secours catholique, syndicat à la CFDT et donateur chez Oxfam.
01:31 Je partage toute la vision de chacune de ces organisations, mais j'ai besoin de trouver
01:35 un espace où je peux porter un projet de société un peu plus large dans son ensemble.
01:40 Je n'ai pas envie de m'engager maintenant, en tout cas dans un parti, ou même plus tard
01:43 d'ailleurs, dans un parti politique".
01:45 Donc on sent qu'il y a besoin de ces espaces où on s'engage pour un projet plus large,
01:51 complémentaire aux engagements qu'on peut avoir dans des associations, des organisations.
01:55 Donc ça c'est la première remarque, peut-être réponse que je voulais faire suite aux synthèses
02:01 des ateliers.
02:02 La deuxième conclusion à question qui m'a interpellée, c'est la question sur la modernité.
02:07 Moi je suis agronome de formation, donc j'ai beaucoup travaillé sur la question de transition
02:12 agroécologique notamment, et on a souvent mis dans la case éclairage à la bougie l'agroécologie
02:20 et tout ce qui n'était pas de l'innovation technologique, ultra-mécanique de l'agriculture.
02:26 On avait ce retour sur les propositions qu'on faisait de mise en place de l'agroécologie,
02:35 mais vous revenez à des anciennes techniques, donc en fait c'est le retour au Moyen-Âge
02:38 où chacun aura des petites parcelles et des petites productions, etc.
02:43 Et je pense que tout le défi de la transition écologique, c'est justement d'être dans
02:48 l'innovation.
02:49 Alors pas l'innovation technologique, numérique, etc. ou pas seulement, évidemment on ne va
02:56 pas avoir le luxe de s'en priver, mais dans l'innovation sociale, dans l'innovation qui
03:02 s'appuie sur ce qu'on appelle les solutions fondées sur la nature, donc qui prend en
03:05 compte la complexité du monde qui nous entoure, de la biodiversité, du vivant, des écosystèmes.
03:11 Donc on a foncièrement besoin d'innovation collective, sociale, technique, qui s'appuie
03:17 sur de la complexité, c'est-à-dire que typiquement un problème n'est pas égal à une solution,
03:25 et donc ça je l'ai pu l'expérimenter en tant qu'agronome qui travaille sur les politiques
03:30 publiques liées à l'agriculture, c'est vraiment une tendance au simplisme.
03:36 Et moi je pense que fondamentalement la modernité elle est devant nous, et que nous, organisation
03:42 de la société civile, portons aussi une forme de modernité.
03:45 Penser la solidarité, les liens entre les personnes, les enjeux collectifs, les démocraties
03:52 dans un monde qui change, il faut être campé sur ses deux pieds, penser les choses nouvelles,
03:59 choses auxquelles on n'a jamais pensé, et je pense fondamentalement que c'est ça la
04:03 modernité.
04:04 Merci Amandine.
04:05 Je vais continuer le tour d'état peut-être avec Jean-Christophe sur les ateliers, ce
04:12 qui avait peut-être pas pour l'instant.
04:15 Du coup on continue avec Serge.
04:17 Merci Serge.
04:18 Alors il y a plusieurs choses, il y a un travail très très riche qui a été réalisé, et
04:27 en plus on a commencé à discuter de thèmes vraiment très importants.
04:32 Ce que je voudrais peut-être rappeler, c'est que dans les ateliers on voit effectivement
04:38 une volonté de réactiver en quelque sorte la société civile à travers des mobilisations
04:44 citoyennes.
04:45 Ça revient très très souvent, faire confiance finalement à la société civile pour trouver
04:51 des solutions.
04:52 Alors moi je trouve qu'on est effectivement dans un moment peut-être historique où face
04:59 à la défiance des citoyens à l'égard ou vis-à-vis des institutions, des grandes
05:05 institutions, vous savez que nous sommes dans une société partout en France où il y a
05:10 une très grande défiance à l'égard des institutions et à l'égard de l'État,
05:13 et quand on fait des comparaisons internationales on s'aperçoit que les Français ont peut-être
05:18 de bonnes institutions mais ils ne font pas confiance à leurs institutions.
05:21 Donc ça c'est vraiment cette défiance, elle est inscrite historiquement.
05:24 Alors on pourrait s'interroger pourquoi autant de défiance en France à l'égard des institutions.
05:30 Alors peut-être qu'il faudrait y voir l'effet d'un système étatique très bureaucratique
05:38 qui écrase parfois la volonté des citoyens, qui écrase peut-être un peu la démocratie,
05:44 on le voit.
05:45 Mais l'État agit, il y a vraiment dans sa toute puissance, pour le meilleur parfois,
05:52 mais aussi notamment le meilleur c'est quand même le principe de l'égalité entre les
06:00 citoyens et entre les territoires, d'avoir un système unifié par l'État, c'est quelque
06:05 chose d'important quand même, dans un État de droit.
06:07 Mais en même temps, cela se fait souvent par un caractère extrêmement directif et
06:16 qui écrase parfois les citoyens.
06:18 Alors les citoyens sont souvent en attente de l'État, mais en même temps très défiant
06:26 à son égard parce qu'en fait on a du mal parfois à exister face à un État si puissant
06:33 et aussi face à des institutions qui exercent le pouvoir de façon extrêmement centralisée
06:41 et qui ne laissent pas forcément toujours suffisamment d'initiatives aux citoyens.
06:45 Et dans les sondages, quand on demande aux Français, mais finalement à qui vous faites
06:52 davantage confiance, on voit que les associations sont souvent citées comme des lieux effectivement
06:59 où les citoyens se disent on va peut-être à travers la vie associative retrouver de
07:06 l'énergie et de la capacité à agir.
07:09 Et donc ça, ça me frappe beaucoup.
07:12 On est peut-être à un moment, un tournant, on l'a vu par exemple dans le mouvement des
07:17 Gilets jaunes aussi, à travers ces revendications citoyennes, revendications qui mettaient en
07:23 avant la justice sociale, la justice sociale et fiscale, c'était très fort, mais il y
07:27 avait aussi, rappelez-vous, ce référendum d'initiative citoyenne, c'était ça aussi,
07:32 l'idée d'avoir un mot à dire sur les grandes directives et le sentiment de pouvoir au moins
07:40 exprimer un avis et être actif à l'échelle des différents territoires.
07:45 Et donc il me semble que vous avez porté en quelque sorte à travers vos réflexions
07:54 cette envie de reconstruire et de repartir de la société civile, de la mobiliser davantage.
08:01 Alors ça me conduit aussi à mettre l'accent sur peut-être un point sur lequel on n'a
08:09 pas suffisamment parlé, c'est la question des conflits.
08:14 En fait, on voit souvent des conflits, il y en a beaucoup dans la société française,
08:20 il y a des grands mouvements et les autres pays européens et le monde entier nous regardent
08:26 parfois comme une capacité vraiment très forte en France à créer des conflits majeurs,
08:33 le conflit des Gilets jaunes quand même, tout le monde en a parlé dans le monde.
08:36 Et puis tout le monde s'est interrogé aussi de voir la France à ce point quasiment bloquée
08:43 par les grèves concernant le projet de réforme des retraites.
08:51 Donc on a une capacité de mobilisation dans la rue qui choquant beaucoup nos collègues.
08:57 Alors ça c'est pour le meilleur aussi d'une certaine manière parce qu'il faut quand
09:02 même voir qu'à travers ça, les luttes sociales, les conflits, ce n'est pas que
09:08 du désordre.
09:09 Le conflit est aussi mobilisateur de liens sociaux.
09:12 Parfois il faut s'opposer, agir c'est parfois s'opposer, être en désaccord, exprimer
09:18 son mécontentement, revendiquer.
09:21 Et la société civile a beaucoup justement de revendications à faire remonter.
09:26 Et je crois que c'est important d'avoir une vision peut-être positive de ces conflits.
09:31 Moi ce qui m'a beaucoup frappé autant dans le conflit des Gilets jaunes que dans celui
09:35 de la réforme des retraites et des luttes contre ce type de réforme, c'était l'aspiration
09:44 à la justice sociale.
09:45 D'habitude, en particulier dans toutes les propositions de réforme de la retraite, on
09:50 voit apparaître des revendications catégorielles.
09:53 Les différents systèmes de retraite se revendiquent finalement le maintien des avantages acquis,
10:05 etc.
10:06 Donc on a des revendications, des régimes spéciaux, c'est des revendications très
10:09 catégorielles.
10:10 Or là, il m'a semblé que c'était la première fois qu'on avait un mouvement qui mettait
10:15 en avant la question de la justice et qui partait justement d'une certaine conception
10:21 du travail.
10:22 Le travail, faire travailler effectivement deux ans de plus des personnes qui étaient
10:29 très fatiguées au travail, c'est effectivement, notamment, je parlais tout à l'heure et
10:34 on a repris ceux-là, les liens oppressants dans le travail, faire travailler deux ans
10:38 de plus certaines catégories de travailleurs, c'est effectivement beaucoup leur demander.
10:45 Et c'est injuste, effectivement, de faire peser la réforme sur justement un travail
10:50 qui comporte beaucoup de souffrance et cette souffrance étant non partagée, il me semble
10:58 que c'était effectivement très injuste.
11:00 Et c'est la raison pour laquelle il y a eu autant d'appui contre cette réforme qui
11:06 finalement est tout de même passée dans les conditions que vous connaissez.
11:10 Mais on retrouvait cette aspiration aussi à la justice sociale dans le mouvement des
11:15 Gilets jaunes.
11:16 Et peut-être que c'est aussi à travers l'observation de ces mouvements, une société
11:21 qui est en train d'évoluer vers des aspirations nouvelles qui doivent justement se traduire
11:27 par des décisions importantes qui vont relever de notre système français.
11:33 Alors maintenant, la question, et je trouve qu'on a abordé cela aussi à partir de l'intervention
11:41 de Dominique, qui m'était, et à partir de la question que vous avez posée, qui
11:45 est renvoie au supranational.
11:47 Nous vivons effectivement en Europe dans des États nationaux qui sont censés effectivement
11:54 dialoguer entre eux pour construire cette Union européenne qui vacille par moment
11:59 et qui est en partie contestée par les mouvements populistes.
12:03 Il faut quand même souligner qu'il y a, au-delà de ça, et au-delà même de l'Europe,
12:10 une aspiration que je vois très fortement en raison justement du défi climatique, de
12:17 cette exigence de protéger l'environnement à l'échelle de la planète.
12:22 On pourrait voir finalement une aspiration à un attachement supranational à l'humanité
12:28 tout entière.
12:29 Et ça, je crois que c'est quelque chose que je sens véritablement profondément,
12:33 qui est sans doute en relation avec cette idée de souveraineté solidaire, qui me semble
12:39 aussi inscrite dans un processus historique.
12:43 Mais il me semble effectivement que l'avenir de l'humanité et de la planète dépend
12:48 en grande partie de la capacité que nous allons…
12:50 Et ça, c'est un défi pour les générations à venir, à construire finalement des systèmes
12:56 de solidarité à l'échelle justement supranationale.
12:59 Et ça, c'est vraiment important.
13:01 Et quand par exemple on voit des actions de destruction de la forêt amazonienne au Brésil
13:09 après des décisions aberrantes de l'ancien président de Bolsonaro…
13:16 Bolsonaro.
13:17 Effectivement, ce qui se fait à l'intérieur de ce pays, le Brésil, ça nous concerne
13:23 tous parce qu'effectivement, c'est une atteinte à notre humanité tout entière
13:29 et à notre planète.
13:31 Donc, nous sommes concernés par ce qui se passe finalement au Brésil.
13:35 Ce n'est pas une affaire simplement nationale, c'est une affaire qui concerne l'humanité
13:39 tout entière.
13:40 Donc, nous devons aussi avoir cette ambition de dépassement, je crois, de ce qui se joue
13:47 à l'intérieur de nos pays.
13:49 Je pense que la question par exemple qui moi me frappe beaucoup, c'est que les pays européens
13:58 ont aussi une tendance parfois, et les pays qui étaient jusqu'ici pourtant très ouverts
14:06 dans des perspectives universalistes comme les pays nordiques, deviennent aussi progressivement
14:11 des pays repliés sur eux-mêmes, des pays où on voit une montée du populisme qui se
14:17 traduit par une volonté de fermer totalement les frontières.
14:21 Cela est totalement aberrant et tout à fait contraire aux évolutions de l'humanité
14:28 tout entière où il va falloir effectivement envisager l'avenir par des déplacements
14:33 de population parce qu'il va y avoir des zones dans le monde où on ne pourra plus vivre.
14:38 Et donc, il y aura forcément des migrations.
14:41 C'est évident.
14:42 On a déjà des problèmes en France avec des zones dont on sait qu'elles vont être
14:46 des zones de grande sécheresse où il va falloir penser au partage de l'eau.
14:50 Mais à l'échelle mondiale, ça va être colossal.
14:53 Et c'est ça, me semble-t-il, qui doit être aussi finalement dans nos têtes, c'est-à-dire
14:59 de construire un monde, une planète habitable, une planète dans laquelle il y aura de la
15:04 solidarité qui ne peut être seulement une solidarité telle qu'on la pense à travers
15:10 nos états-providence et nos façons de raisonner dans le cadre de nos frontières.
15:15 Voilà un petit peu ce que j'avais envie de dire dans le prolongement de vos réflexions
15:21 que j'ai trouvé très riches.
15:22 Merci Serge.
15:24 Merci.
15:25 Merci.
15:26 Merci.
15:27 Merci.
15:28 Merci.

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