Chocs du Monde avec Nikola Mirkovic - Poutine rompt le blocus diplomatique occidental

  • l’année dernière
L’humanitaire et analyste Nikola Mirkovic, auteur des essais "L’Amérique empire" (2021) et "Le chaos ukrainien" (avril 2023), mais aussi fondateur de l’ONG Ouest-Est, qui vient depuis 2014 en aide aux populations du Donbass, est l’invité d’Edouard Chanot pour "Chocs du monde", le magazine des crises et de la prospective internationale de TVL.
Vivons-nous un point de bascule en Ukraine ? Alors que le conflit s’approche de sa deuxième année, la situation semble particulièrement difficile pour Kiev et l’Occident. Après s’être illusionnés d’une contre-offensive victorieuse à l’été, les partisans de Volodymyr Zelensky ont perdu leur enthousiasme alors que l’hiver s’installe et que Vladimir Poutine semble avoir brisé le blocus diplomatique occidental autour de la Russie. Le dirigeant russe est, ce 6 décembre, en déplacement en Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis.

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Transcript
00:00 TVL a joué pleinement son rôle,
00:02 assurer la liberté de l'information en France.
00:06 Dans le même temps, les Français continuent de fuir la presse conformiste.
00:10 Servile prête à tous les renoncements.
00:12 Et pourtant, ce parti des médias s'est arrogé la somme de 2 milliards d'euros par an.
00:18 Et sur ces 2 milliards, TVL,
00:20 une réussite avérée de la presse audiovisuelle depuis 10 ans,
00:24 a touché très exactement 0,00 €.
00:29 S'ouvre à nouveau le grand défi.
00:31 Nous disposons de 30 jours pour constituer le budget d'avenir de TVL pour 2024.
00:38 30 jours pour construire 365 jours de création et de diffusion.
00:44 Nous avons besoin de votre aide personnelle.
00:47 Parce que décidément, oui, la liberté a un prix.
00:52 [Musique]
01:22 [Générique]
01:44 Bonsoir à tous et bienvenue dans Choc du Monde,
01:47 le magazine des crises et de la prospective internationale de TVL.
01:51 Vivons-nous un point de bascule en Ukraine.
01:53 Alors que le conflit s'installe et s'approche de sa deuxième année,
01:57 la situation semble particulièrement difficile pour Kiev et donc pour l'Occident.
02:02 Après s'être illusionné d'une contre-offensive ukrainienne victorieuse à l'été,
02:06 les partisans de Volodymyr Zelensky ont perdu leur enthousiasme
02:10 alors que l'hiver s'installe et que Vladimir Poutine semble avoir brisé
02:14 le blocus diplomatique occidental autour de la Russie.
02:18 Alors pour en parler, nous recevons l'humanitaire et analyste Nicolas Mirkovic,
02:22 auteur des essais "L'Amérique en pire" en 2012 et "Le chaos ukrainien" en avril 2023.
02:29 Nicolas est aussi fondateur de l'ONG West-East qui vient depuis 2014 en aide aux populations du Donbass.
02:35 Bonsoir Nicolas Mirkovic.
02:36 Bonsoir.
02:37 Alors merci d'avoir répondu présent à l'appel de Choc du Monde.
02:41 Je parlais à l'instant d'un blocus diplomatique, d'une tentative de blocus diplomatique
02:46 de l'Occident à l'encontre de Moscou, de la Russie.
02:49 Et figurez-vous qu'aujourd'hui Vladimir Poutine est en Arabie Saoudite et aux Émirats Arabes Unis.
02:55 L'Occident, à force de sanctions, à force de pression, a donc voulu marginaliser Moscou,
02:59 la Russie, Vladimir Poutine. Visiblement, est-ce raté ?
03:03 Oui, c'est complètement raté.
03:04 L'institut Wilson, qui est un institut américain plutôt pro-atlantiste,
03:08 a analysé les chiffres et les peuples qui représentent 16% de la population mondiale
03:14 sont ceux qui appliquent des sanctions contre la Russie actuellement.
03:17 C'est-à-dire que la grande majorité des pays de la Terre n'applique pas de sanctions contre la Russie.
03:23 Et si vous avez une politique de sanctions, elle peut être efficace
03:26 que si la totalité ou la quasi-totalité des pays l'appliquent.
03:29 Aujourd'hui, la Russie a juste changé ses marchés.
03:32 Donc elle a fait deux choses. Elle a commencé à produire elle-même ce qu'elle importait.
03:35 Donc elle n'a plus besoin d'importer des biens, notamment agricoles,
03:38 par exemple d'Europe de l'Ouest ou d'ailleurs.
03:41 Elle exporte à d'autres pays et la Russie ne pleure pas si elle ne peut plus exporter de gaz
03:45 vers les Pays-Bas ou le Luxembourg, si demain elle en exporte vers la Chine ou vers l'Inde.
03:51 Donc c'est un échec total et le fait que Vladimir Poutine puisse,
03:55 alors qu'il est sous normalement un mandat d'arrêt international,
03:58 que le tribunal pénal international a été sollicité par les atlantistes pour le poursuivre,
04:03 qu'il puisse se balader sur la planète avec des grands puissances dans le monde des hydrocarbures
04:09 comme l'Arabie Saoudite ou les Émirats Arabes Unis,
04:11 montre à quel point cette politique de sanction a été un échec.
04:15 Et n'oublions pas un élément, c'est que non seulement elles n'ont pas permis d'isoler la Russie,
04:21 mais elles se retournent contre nous.
04:23 Le Premier ministre hongrois Viktor Orban disait qu'il pensait que l'Europe se tirerait
04:26 une balle dans le pied avec cette politique de sanction
04:29 et qu'il se réalise que nous nous tirons une balle dans le poumon.
04:31 Pourquoi ? Parce que les Russes ont trouvé des alternatives au marché de l'Union Européenne,
04:36 mais les producteurs, les exportateurs de l'Union Européenne n'ont pas trouvé ces alternatives.
04:41 Et il y a des secteurs d'épargne entière de nos économies qui souffrent.
04:44 L'Allemagne souffre de ne plus avoir accès aux gaz bon marché de la part des Russes.
04:49 Les agriculteurs français sont peinés parce qu'ils ne peuvent plus exporter vers la Russie.
04:53 Donc cette politique est néfaste pour nous, elle ne marche pas contre la Russie
04:58 et les seuls qui semblent sortir un peu les marrons du feu sont les États-Unis
05:01 puisque eux continuent de faire du commerce non seulement un petit peu avec la Russie,
05:06 nous aussi, mais les Américains nous revendent leur gaz naturel liquéfié,
05:11 quatre fois plus cher qu'ils le vendent à leurs propres entreprises
05:14 et ils essaient de remplacer évidemment le gaz en provenance de Russie.
05:18 – Vous avez écrit dans votre livre "L'Amérique empire", je vous cite,
05:21 "Washington ne parvient pas à dompter Moscou".
05:24 Donc elle profite éventuellement de la situation,
05:26 mais a-t-elle été en fin de compte défaite devant la situation actuelle ?
05:31 – Elle a, je pense, sous-estimé, c'est le titre d'un article du "Bild",
05:35 le journal allemand qui n'est pas du tout un journal pour russes,
05:38 il se demande si les Allemands ou les Occidentaux n'auraient pas sous-estimé.
05:41 Et clairement il y a un problème de renseignement dans le camp occidental,
05:45 soit entre la qualité d'information qui a été recueillie sur le terrain,
05:48 parce qu'on aurait dû voir que les armes russes étaient super sophistiquées,
05:51 on aurait dû savoir que les Russes allaient pouvoir trouver
05:53 des marchés alternatifs aux marchés occidentaux,
05:57 soit les systèmes de renseignement n'ont pas fonctionné,
05:59 ils n'ont pas récupéré cette information,
06:00 ou alors, et c'est plus probable, il y a eu un filtre politique.
06:03 C'était l'air, je pense que c'est Hubert Védrine qui le disait il y a encore peu de temps,
06:07 on est dans l'idéologie, les responsables politiques occidentaux sont dans l'idéologie,
06:12 ne veulent pas croire dans les informations du terrain
06:14 ou pensent que ces informations sont exagérées,
06:17 et donc il y a une très grande différence entre ce que nous pensions
06:20 que les Russes allaient pouvoir faire et ce qu'ils font réellement,
06:22 et ça évidemment, ça se retourne contre nous,
06:24 parce que ces mauvais choix politiques ont un impact directement
06:28 sur les bourses des Français, des Européens,
06:30 aujourd'hui qui souffrent d'une situation économique
06:34 qui était déjà mauvaise avant la guerre en Ukraine,
06:38 la fermeture de l'économie pendant la gestion du Covid est catastrophique,
06:41 et c'est une des raisons de l'inflation que nous subissons aujourd'hui,
06:44 mais cet effet inflationniste et cette crise économique a été amplifiée
06:47 par la guerre en Ukraine à cause du dépris des hydrocarbures
06:50 et du fait qu'il y a des marchés qui ont été fermés aux occidentaux.
06:55 Alors vous dites que les Européens souffrent de la situation économique actuelle,
06:59 nous le savons, l'Occident s'est engagé moralement, financièrement pour l'Ukraine,
07:03 humainement, disons un peu moins quand même,
07:05 puisque les Européens et les Américains ne sont pas sur le front en Ukraine,
07:08 enfin en tout cas seulement, enfin officiellement.
07:10 La question du soutien financier se pose néanmoins de plus en plus,
07:15 alors Nikola Mirkovic, je vous propose de faire un point là-dessus
07:18 pour que tout soit clair pour nos téléspectateurs.
07:21 Le nerf de la guerre va-t-il manquer à Volodymyr Zelensky ?
07:24 Le Financial Times a révélé dans une enquête le 3 décembre
07:27 que Kiev pourrait perdre 50 milliards d'euros
07:30 qui lui ont été promis pour tenir jusqu'en 2027.
07:34 Le 14 décembre se tiendra en effet à Bruxelles un conseil européen consacré aux deux conflits.
07:38 Le président ukrainien s'est dit inquiet de voir la tension occidentale
07:42 se détourner de l'Ukraine en raison du conflit israélo-palestinien.
07:46 L'inquiétude est d'autant plus vive que Berlin, premier contributeur de l'UE,
07:50 s'est vu rappeler à l'ordre par sa cour suprême en novembre
07:53 en vertu de sa règle constitutionnelle dite de "frein à l'endettement".
07:57 En clair, l'Allemagne ne sera peut-être pas en mesure
08:00 de couvrir la rallonge budgétaire demandée par Bruxelles.
08:03 À cela s'ajoute le scepticisme de Viktor Orban en Hongrie et de Robert Fico en Slovaquie,
08:09 tous deux critiques du soutien aveugle à Kiev.
08:12 Pire même, le Congrès américain n'a toujours pas voté l'enveloppe de 100 milliards de dollars
08:16 demandé par Joe Biden pour soutenir Israël et l'Ukraine.
08:19 Volodymyr Zelensky doit, en principe, bénéficier de 60 milliards de dollars de cette aide,
08:25 si les conservateurs américains l'acceptent.
08:27 Alors tout cela est encore sous forme d'hypothèse,
08:34 et relativement hypothétique pour l'instant,
08:36 mais croyez-vous Nikolai Milenkovic, à l'Europe et à l'Occident, à Washington,
08:41 qui fermerait, qui couperait le robinet financier de l'Ukraine ?
08:45 Peut-être pas du jour au lendemain, parce que les conséquences seraient quand même assez graves.
08:49 Cela voudrait dire qu'on nous a fait croire, en Europe, en Europe de l'Ouest, aux États-Unis,
08:53 qu'en injectant des milliards, et là on est en train de parler de plus de 200 milliards de dollars
08:59 qui ont été versés par l'Union européenne, les États-Unis, le Japon,
09:02 les pays qui sont dans l'orbite atlantiste,
09:04 que malgré toute cette aide qui devait libérer l'Ukraine, qui devait défaire la Russie,
09:09 malgré tout cela, cela n'a pas fonctionné.
09:11 C'est-à-dire qu'on a jeté l'argent par les fenêtres,
09:14 et derrière cela, on a encouragé une guerre,
09:17 où Oleksey Arestovitch, l'ancien conseiller personnel de Zelensky,
09:21 avoue qu'il y aurait entre 200 et 300 000 soldats ukrainiens de mort.
09:26 Donc on aurait vraiment fait le mauvais calcul en envoyant tout cet argent-là
09:29 pour un résultat qui, visiblement, ne fonctionne pas,
09:31 puisque Valery Zalouzhny, le commandant-chef de l'armée ukrainienne,
09:36 avoue que la contre-offensive n'a pas atteint les objectifs et est dans l'impasse.
09:41 Zelensky a lui-même dit qu'il n'avait pas atteint les objectifs.
09:44 Donc on aurait envoyé tout cet argent.
09:46 Donc qu'est-ce qu'on continue ? Est-ce que c'est le teneau des Danaï ?
09:48 Donc continue à envoyer de l'argent tout en voyant que les Ukrainiens sont en train de perdre
09:52 ou qu'au bout d'un moment, il faut s'arrêter.
09:54 Donc les conséquences d'une défaite de l'Ukraine seraient assez graves pour les atlantistes.
09:59 C'est peut-être une bonne idée pour la paix, mais ce serait assez grave pour les atlantistes,
10:02 donc je ne les vois pas arrêter du jour au lendemain.
10:05 Pour autant, cette méthodologie, cette méthode de sanction d'un côté,
10:08 d'armement, de formation, d'accompagnement de l'OTAN, qui est majeure,
10:12 même s'il n'y a pas de soldats de l'OTAN sur place,
10:15 il y a tout l'aide de conseillers de l'OTAN, il y a les satellites de l'OTAN,
10:18 il y a de l'armement de l'OTAN, si ça ne fonctionne pas,
10:21 les atlantistes ne vont pas pouvoir continuer à financer cette situation
10:26 et cette guerre qui est en train de se...
10:28 enfin en ce moment même où nous parlons,
10:30 a l'air plutôt d'être une défaite pour Kiev et pour les atlantistes.
10:33 – Bon, c'était un peu le roller-coaster si on me permettait l'expression depuis deux ans.
10:36 Mais cela dit, la guerre semble longue, enfin possible,
10:40 c'est une guerre d'attrition, d'usure.
10:42 D'ailleurs nous voyons sur une carte réalisée par Choc du Monde
10:46 l'état actuel du front avec notamment l'offensive russe AFD-IFK dans le Donbass.
10:51 Ça c'est pour la dimension militaire,
10:54 nous avons évoqué juste avant l'aspect financier.
10:57 Politiquement, Nikolai Mirkovich, quelle issue voyez-vous ?
11:00 Vous avez dit, vous vous semblez souhaiter la paix,
11:02 la défaite ukrainienne serait dramatique pour l'Occident,
11:07 mais quelle issue voyez-vous se rapprocher ?
11:10 Je suis navré de vous demander un tel scénario prospectif,
11:12 mais c'est évidemment la question qui est sur toutes les lèvres aujourd'hui.
11:15 – La situation est compliquée, parce que la stratégie atlantiste
11:19 menée par Washington, à laquelle a adhéré l'Union Européenne,
11:23 n'a pas fonctionné, elle est même catastrophique,
11:24 elle est mauvaise pour les raisons qu'on a évoquées.
11:26 On sait maintenant, cela a été dévoilé par, on le savait déjà dans le passé,
11:31 Lev Talibénet, l'ancien Premier ministre israélien,
11:34 Melvut Savusoglu, le ministre des Affaires étrangères turque,
11:39 nous avait dit, et on le sait même, David Arakana,
11:41 qui est un député du parti de Zelensky,
11:45 il a révélé récemment dans la presse,
11:47 il y a eu des accords de paix en mars 2022.
11:50 Un mois après l'invasion russe, les Ukrainiens et Russes
11:53 sont autour de la table à Istanbul et ils sont en train de négocier la paix.
11:57 Et ils sont quasiment prêts de signer quelque chose.
11:59 C'est ce que nous disent Bennett, c'est ce que nous a dit Garry Schroder,
12:02 c'est ce qu'il nous dit Savusoglu.
12:03 Ils sont prêts à signer quelque chose et Arakana lui dit que…
12:07 Ils pensent qu'ils étaient prêts à signer un accord de neutralisation de l'Ukraine.
12:10 Exactement, c'était le grand sujet.
12:12 C'est ce que dit Arakana, ce que voulaient les Russes avant tout.
12:14 Ils étaient prêts à négocier, il le dit même, ils ont fait beaucoup de concessions.
12:18 Ce qu'ils voulaient, c'est que l'Ukraine reste neutre.
12:22 Pourquoi ? Parce qu'il faut bien garder en tête que les Russes
12:25 qui lisent encore, qui apprennent encore leur propre histoire et l'histoire de l'Europe,
12:28 se souviennent que c'est par les plaines de l'actuelle Ukraine
12:31 qu'ils ont été envahis par les Polonais, les Lituaniens, les Français,
12:35 deux fois par les Allemands, donc stratégiquement ils ne peuvent pas laisser
12:38 une organisation hostile comme l'OTAN sur leurs frontières.
12:41 Ce qui est le plus important pour les Russes aujourd'hui,
12:42 ce n'est pas du tout une conquête territoriale,
12:44 c'est de s'assurer que l'Ukraine ne puisse pas devenir un pays de l'OTAN
12:47 où seraient déployés des missiles américains et où on aurait une armée
12:52 qui serait formée pour lutter contre la Russie.
12:54 Ils étaient carrément arrivés à un accord, c'est ce que disent tous ces témoins.
12:58 Or, Boris Johnson, à l'époque Premier ministre britannique,
13:02 débarque à Kiev sans annonce, convoque Zelensky,
13:06 à Kiev il faut le faire quand même, c'est lui qui arrive et qui dit
13:08 "si vous signez cet accord, nous vous abandonnons, vous êtes seul".
13:13 Et ça a été relevé par Ukraine's Cap Ravda qui n'est pas du tout un journal pro-russe.
13:19 – Confirmé par le député Rakhamian.
13:21 – Exactement, et ça a été confirmé par le député.
13:23 Donc les Atlantistes ont une paire de responsabilités
13:25 parce qu'on aurait pu trouver une solution.
13:26 Je pense qu'à l'origine, ce que voulaient faire les Russes,
13:28 ce que voulaient faire Poutine, c'était montrer un peu les muscles en disant
13:31 "écoutez, on va rappeler à tout le monde que ça fait 8 ans qu'il y a une guerre civile au Donbass,
13:34 ça fait 8 ans qu'il y a eu un coup d'État à Kiev,
13:37 on va débarquer militairement pour essayer de contraindre Kiev à négocier
13:41 et trouver une solution à ce dossier épineux du Donbass
13:44 et des relations entre l'Ukraine et la Russie".
13:47 L'objectif n'était pas du tout d'une conquête militaire,
13:49 mais les Atlantistes ont dit non.
13:52 Et on voit dans le discours des Atlantistes, de différents députés américains,
13:56 qu'eux ce qu'ils voulaient c'est vraiment faire tomber, affaiblir la Russie.
14:00 On va dire les nostalgiques de la guerre froide ont enfin leur guerre chaude,
14:04 ce qui leur a permis d'alimenter le complexe militaire industriel depuis tant d'années,
14:09 est arrivé, ils avaient enfin l'occasion d'affaiblir la Russie
14:12 parce qu'ils voient la Russie comme un rival sur le territoire eurasiatique.
14:16 Et on sait que dans la politique étrangère américaine,
14:18 ça c'est une ligne rouge parmi les néoconservateurs.
14:21 Depuis les études de Spikeman, de Mackinder, de la doctrine de Wolfowitz,
14:25 les américains ont peur que, en Eurasie, il y ait un rival.
14:29 C'est-à-dire qu'une grande puissance qui puisse mettre les États-Unis du côté.
14:33 On sait très bien, les États-Unis ont peur qu'une Russie forte,
14:36 une orde de l'Ouest forte puisse devenir une zone particulièrement puissante
14:40 qui pourrait se passer des services de l'armée, des produits et services américains.
14:46 Et donc, ce qu'ils voulaient c'est de se battre contre la Russie.
14:49 Et malheureusement, parmi les Ukrainiens, parce qu'ils ne pensent pas tous comme ça,
14:52 mais parmi les Ukrainiens et parmi l'entourage de Zelensky,
14:55 il y a des personnes qui étaient plus Atlantistes que les Atlantistes.
14:58 Retzetnikov, qui était le ministre de la Défense de Zelensky,
15:02 dit "Nous sommes, nous accomplissons..."
15:04 Il est maugé pour corruption. Il a donné sa démission pour corruption.
15:07 Exactement. Il dit "Nous menons le combat de l'OTAN. Nous versons notre sang."
15:13 Lindsey Graham, député américain, lui dit "C'est génial,
15:17 nous nous attaquons à notre ennemi sans verser une goutte de sang."
15:20 Les Ukrainiens servent, enfin les Ukrainiens qui sont avec Zelensky,
15:24 ils servent de chair à canon dans une guerre voulue par les Américains,
15:27 voulue par les Atlantistes pour affaiblir la Russie.
15:29 Et le problème, c'est qu'aujourd'hui, cette guerre que les Atlantistes,
15:33 je pense, ont très mal préparée, ils pensaient que ce serait une balade pour eux,
15:38 comme ils l'avaient vue en Irak, comme ils l'avaient vue en Syrie,
15:40 comme ils l'avaient vue en Afghanistan.
15:41 Entre nous, c'était pas vraiment des balades, mais ils avaient la supériorité militaire.
15:46 Ils pensaient que ce serait aussi facile et qu'ils repousseraient les Russes.
15:48 Or, ce n'est pas le cas. Or, ce n'est pas le cas.
15:50 Et c'est une situation problématique.
15:52 Et nous savons aujourd'hui que tout cela aurait pu être évité
15:55 des centaines de milliers de vies de jeunes Ukrainiens,
15:58 et même aujourd'hui malheureusement des vieux,
15:59 parce que ce sont ici une armée de conscription,
16:01 aurait pu être épargnée si on avait suivi Zelensky et Poutine
16:05 qui voulaient dès mars 2022 des accords de paix.
16:08 – Alors cela dit, David Arakame, l'élu ukrainien de Zelensky
16:11 qui dirigeait la négociation à Istanbul,
16:14 a aussi estimé que les Ukrainiens ne pouvaient pas à l'époque,
16:18 ne pouvaient plus faire confiance aux Russes dans cet engagement.
16:22 Et c'est aussi ce pourquoi ils ont écouté Boris Johnson.
16:27 L'Ukraine pouvait-elle vraiment faire confiance à ce géant à côté d'eux ?
16:31 Il y a quand même cette nécessité de défendre leur souveraineté aussi.
16:35 – Tout à fait, c'est un bon point et il fallait donner,
16:37 et c'est là où en tant qu'Européens, on avait un rôle majeur à jouer.
16:41 C'est-à-dire qu'on aurait pu être les garants de cet accord,
16:44 on aurait pu, nous avons la…
16:46 on aurait pu trouver le moyen de mettre pression sur la Russie.
16:49 On a un peu du mal en ce moment, mais on aurait trouvé un accord intelligent,
16:53 percéder que la Russie, elle, ce qu'elle veut c'est la neutralité,
16:56 et je pense que c'est vraiment ce qu'elle veut,
16:58 occuper un territoire, mener une guerre, ça coûte quand même beaucoup d'argent.
17:01 On aurait pu jouer comme garant.
17:02 Et si les Russes disaient de leur côté,
17:05 "mais nous ne faisons pas confiance aux Atlantistes",
17:06 on aurait pu trouver d'autres acteurs.
17:08 Il y a la Chine, il y a les pays du Moyen-Orient
17:12 qui auraient pu être les garants de cet accord,
17:14 des pays qui ont encore des accords avec l'Ukraine,
17:16 la Turquie par exemple, qui est un pays qui joue un peu sur les deux tableaux,
17:19 mais qui a des accords avec l'Ukraine et avec les Russies,
17:21 on aurait pu trouver d'autres accords, ça aurait été triste pour l'Europe,
17:24 mais on s'est malheureusement alignés sur la stratégie américaine,
17:27 on aurait pu trouver d'autres accords pour garantir ce traité de paix entre eux,
17:32 en tout cas cet accord de neutralité de l'Ukraine entre Russie et Ukraine.
17:39 Je rappelle que dans ce traité, comme dans les accords de Minsk 2,
17:42 l'Ukraine aurait pu retrouver les territoires du Donbass,
17:46 elle aurait pu les récupérer, aujourd'hui il est quasiment certain,
17:49 à l'heure où nous nous parlons, qu'elle puisse les récupérer,
17:51 donc ça a l'air d'être perdu à tout jamais.
17:53 Donc je pense que les Ukrainiens ont beaucoup perdu à s'être alignés eux aussi
17:57 sur cette politique américaine qui a été catastrophique
18:00 et pour les Ukrainiens et pour le reste de l'Europe.
18:02 – Alors vous évoquez les territoires du Donbass, il y a eu la Crimée,
18:05 il y a aussi les territoires de Kersane entre le Donbass et la Crimée.
18:09 Vladimir Poutine déclarait en octobre au Club Valdaï,
18:12 je cite, que "la crise ukrainienne n'est pas un conflit territorial"
18:15 et donc en substance il disait que c'était un choc plus large.
18:19 En fait on se demande quelques fois si les territoires ont une vraie importance,
18:22 visiblement pour Poutine, c'est quand même secondaire.
18:24 – C'est secondaire, puisqu'il était prêt à laisser dans les accords de Minsk 2,
18:29 la République populaire de Donetsk et la République populaire de Lugansk
18:33 auraient dû réintégrer l'Ukraine,
18:35 ils auraient eu une certaine autonomie au sein de l'Ukraine,
18:39 mais la Russie était prête à laisser l'Ukraine reprendre le contrôle de ses régions
18:44 si elle a changé sa constitution et accordé de l'autonomie à ses régions
18:49 qui sont russophones et qui sont globalement très proches de la Russie,
18:54 ou se sentent proches culturellement, religieusement et politiquement de la Russie.
18:59 Donc il aurait fallu trouver un accord sur ces régions,
19:03 mais l'objectif de la Russie n'était pas de conquérir ces deux républiques au départ,
19:07 sinon il l'aurait fait, pourquoi est-ce que quand ils ont récupéré la Crimée,
19:09 ils n'auraient pas mis plus de moyens pour récupérer ces républiques
19:13 dont certaines personnes appelaient l'intervention ?
19:16 Moi j'ai fait des missions humanitaires,
19:17 ça fait 10 ans que j'en fais dans ces régions,
19:19 et dans les premières années, je disais en m'amusant,
19:22 disant "mais attendez, moi dans la presse occidentale,
19:23 je lis qu'il y a l'armée russe, mais je ne l'ai jamais vue,
19:25 je n'ai fait peut-être pas les 400 km de lignes de front qu'il y avait à l'époque,
19:27 mais j'ai fait pas mal de kilomètres sur la ligne de front,
19:29 je n'ai pas vu d'armée russe".
19:30 Et c'est eux-mêmes qui disaient non,
19:32 les habitants du Donbass disaient "les russes nous ont abandonnés,
19:34 ils ne viennent pas à notre aide, on voudrait les voir".
19:36 Donc c'était ça l'état d'esprit, et la Russie ne voulait pas jouer avec ça,
19:40 elle s'est dit "moi je ne veux pas que l'Ukraine devienne un pays membre de l'OTAN,
19:44 parce que pour des raisons historiques, je veux la protection de ma frontière".
19:47 Et donc l'objectif n'était pas de récupérer ces territoires.
19:51 Bon là la Crimée a été clairement revendiquée par la population russe.
19:56 Oui exactement, à part des raisons stratégiques,
19:58 là également il y a culturel et politique aussi,
20:01 mais surtout pour des raisons stratégiques,
20:02 parce que c'est la flotte marine de la Russie qui se trouve sur place.
20:08 Et donc c'était important,
20:09 mais le reste, les Ukrainiens ont pu récupérer ces territoires plus tôt.
20:13 Alors je vous propose Nicolas Mirkovic de changer de champ de bataille et de guerre,
20:17 parce qu'il est évident que le conflit de Gaza a changé la donne.
20:21 Poutine a-t-il profité de ce conflit ?
20:24 C'est en fait un argument que l'on retrouve très souvent, sans cesse,
20:28 dans les tribunes, dans les médias occidentaux,
20:30 depuis le 7 octobre et l'attaque du Hamas contre l'État hébreu.
20:34 En substance, ce que nous disent les médias occidentaux,
20:36 à qui profite le crime ? A Poutine.
20:38 Alors, en tout cas c'est ce que disent, semble-t-il, les esprits simples.
20:42 Est-ce le nouveau narratif occidental ?
20:45 Qu'en pensez-vous Nicolas Mirkovic ?
20:46 Je pense qu'il en profite,
20:47 mais alors le problème du narratif occidental,
20:49 c'est qu'on voudrait nous faire croire qu'il aurait organisé
20:51 cette situation quand on lit entre les lignes.
20:53 Voilà, à Poutine, lui évidemment, il discute avec et Jérusalem,
20:57 et avec Gaza.
20:59 Mais non, je pense qu'il en profite indirectement,
21:02 parce qu'en effet, les yeux sont tous focalisés sur ce qui se passe actuellement à Gaza,
21:07 et il en profite, mais ce n'est pas lui qui est à l'origine de ça.
21:10 Je rappelle que l'acteur principal dans le Moyen-Orient,
21:13 qui agit et qui interagit avec l'ensemble des pays,
21:18 ce sont les États-Unis.
21:19 Qui est-ce qui a essayé de trouver un accord entre Palestiniens et Israéliens ?
21:22 Les États-Unis, lors des accords de Camp David,
21:23 lors des accords d'Oslo,
21:25 et également sur la création de deux États dans la région.
21:28 Ce que nous voyons actuellement entre Israéliens et Palestiniens,
21:32 c'est une faillite monumentale de la politique étrangère américaine et atlantiste.
21:37 Je rappelle qu'à chaque fois que je parle d'atlantiste,
21:40 c'est-à-dire que c'est les Américains qui dirigent,
21:41 et les pays d'Europe de l'Ouest qui s'alignent.
21:44 La France aurait pu jouer un rôle intéressant dans le Moyen-Orient,
21:47 nous avions, avant que Macron s'en débarrasse,
21:51 un corps diplomatique, nous avions des informations,
21:53 nous travaillions avec toutes les parties.
21:54 Jacques Chirac a été capable de dire non aux États-Unis en 2003,
21:57 quand les États-Unis ont bombardé illégalement l'Irak.
22:02 On a perdu cette influence, on a perdu ces réseaux,
22:06 on suit les Américains et les Américains se trompent.
22:09 Regardons ce que les Américains ont fait au Moyen-Orient.
22:11 L'Irak, on va même commencer à l'Iran,
22:15 on soutient l'Irak pour envahir l'Iran,
22:17 ensuite la destruction de l'Irak, ensuite la guerre en Libye,
22:20 la guerre en Syrie, le soutien aux islamistes modérés
22:24 qui étaient en train de profiter de l'État islamique
22:28 et de la construction de l'État islamique.
22:30 C'est la guerre !
22:31 Où sont les véritables résolutions de paix ?
22:34 Où est la paix au Moyen-Orient ?
22:35 Et Poutine n'est pas responsable de cette situation,
22:37 ce n'est pas Poutine qui négocie au Moyen-Orient
22:39 depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale,
22:40 ce n'est pas Poutine qui a mis en place le petrodollar
22:43 avec l'Arabie Saoudite obligeant quasiment la totalité du monde
22:47 à acheter les hydrocarbures avec le billet vert.
22:50 Donc la situation dans laquelle on est aujourd'hui,
22:52 c'est de nouveau la faillite du modèle impérial américain.
22:55 Et au lieu d'essayer de régler le problème et de se dire
22:58 "ce modèle ne marche plus, le monde est en train de changer",
23:01 eh bien on continue, nous, en Europe,
23:03 même aux États-Unis, à montrer du doigt,
23:05 à trouver un beau commissaire, à trouver un coupable.
23:08 Ça ne peut pas être notre faute,
23:09 nous sommes trop grands, nous sommes trop bons,
23:11 nous sommes les pays des droits de l'homme et de la démocratie,
23:14 ça ne peut pas être de notre faute, c'est forcément quelqu'un d'autre.
23:16 C'est faux !
23:17 Il faut assumer notre responsabilité dans ces crises,
23:20 et en Ukraine, et au Moyen-Orient.
23:23 Et donc du coup c'est à nous de prendre du recul
23:25 et de voir ce qu'il faut faire à partir de maintenant
23:27 pour que ça ne se reproduise plus.
23:29 Vous parlez dans votre livre "L'Amérique empire",
23:32 je vous cite "d'un grain de sable russo-chinois dans l'engrenage états-unien".
23:35 C'est ce que vous venez de résumer,
23:37 mais semble-t-il, il y a une bascule,
23:39 et c'est ce grain de sable russo-chinois que vous évoquez.
23:42 Oui, parce que les États-Unis, dans les années 90,
23:44 quand l'URSS s'écroule,
23:46 pensaient qu'ils allaient pouvoir vraiment dominer le monde.
23:49 C'est pour ça qu'ils ont mené ces guerres,
23:50 ils ont détruit la Yougoslavie,
23:51 ils ont mené ces différentes guerres illégales,
23:53 sans accord du Conseil de sécurité des Nations Unies,
23:56 ils ont organisé des révolutions de couleur en Georgie,
23:58 au Quai Résistant, ils sont derrière le printemps arabe.
24:02 Ils ont, au lieu de faire jouer leur soft power sur leur pouvoir de séduction,
24:06 par les médias, par les cabinets de conseil,
24:08 ils ont montré leur force.
24:10 Il y a cette phrase qu'on attribue souvent aux Américains,
24:12 qu'eux-mêmes emploient en disant que
24:14 quand votre seul instrument c'est un marteau,
24:16 vous avez tendance à voir tous vos problèmes comme des clous.
24:18 Et c'est exactement ce qu'ils ont fait.
24:19 Sauf que le reste du monde ne le voit pas de cette manière-là,
24:21 le reste du monde ne veut pas de cette politique d'ingérence américaine dans leurs affaires.
24:25 Quand les Américains organisent un coup d'État à Kiev,
24:27 ils s'ingèrent directement dans les affaires d'une nation souveraine,
24:31 c'est complètement interdit par la charte de l'ONU.
24:33 Le reste du monde ne veut pas de ça,
24:35 personne ne veut de l'ingérence.
24:37 Qui veut en France l'ingérence d'un pays étranger,
24:39 quel qu'il soit, dans nos affaires internes,
24:40 on a déjà du mal à gérer nos problèmes nous-mêmes,
24:42 c'est pas pour qu'il y ait un État étranger qui vienne nous dicter
24:44 ou qui tire différentes ficelles dans leurs propres intérêts.
24:50 Donc aujourd'hui, ce qui se passe avec ce grain de sable,
24:54 qui est aujourd'hui plus qu'un grain de sable,
24:56 c'est quasiment une clé à monnette dans l'engrenage impérial américain,
25:00 c'est que des pays disent "stop,
25:01 nous ne voulons plus dépendre de la suprématie américaine,
25:04 nous ne voulons plus des instruments que les Américains mettent en place,
25:07 la Banque mondiale, le FMI,
25:09 toutes ces organisations qui sont pilotées quelque part,
25:12 ou en tout cas où les Américains ont un rôle prédominant,
25:15 beaucoup plus important,
25:16 nous ne voulons plus être dépendants du dollar
25:18 et nous ne voulons plus de ces guerres incessantes des États-Unis
25:22 et de ces ingérences incessantes des États-Unis dans le monde.
25:25 Il y a un excellent livre de William Blum qui s'appelle,
25:27 je pense que c'est "Le Livre noir des États-Unis"
25:29 ou dans la version originale c'est "Killing Hope",
25:31 où il décrit toutes ces guerres et ces politiques d'ingérence américaine,
25:34 c'est terrible,
25:36 il n'y a quasiment pas un coin de la planète
25:37 où les Américains n'ont pas essayé de défendre leurs intérêts
25:40 par des moyens illégaux et souvent même criminels,
25:44 c'est ce que dit William Blum.
25:45 Donc, Chinois et Russes aujourd'hui se rapprochent,
25:48 mais ils ne sont pas seuls,
25:49 on voit qu'en Amérique latine, on voit le Brésil,
25:53 on va voir ce que fait l'Argentine avec le nouveau président,
25:56 en Afrique, au Moyen-Orient,
25:57 beaucoup de pays qui n'osaient pas dire non aux États-Unis
26:00 parce qu'ils avaient peur des répercussions,
26:02 comme ils voient maintenant que la Russie a dit "stop",
26:04 que la Chine dit "stop",
26:04 que l'Arabie Saoudite commence à dire
26:06 "ok, je vais aller voir ailleurs",
26:08 que sur les différents continents,
26:09 il y a des pays qui sont en train de se soulever pour dire
26:11 "nous ne voulons plus de l'hégémonie américaine",
26:13 et bien de plus en plus de pays commencent à se dire
26:15 "ok, moi aussi je vais sortir du bois
26:17 et je dénonce cette ingérence américaine
26:19 dans les affaires de mon propre pays",
26:21 et c'est pour ça qu'on voit en parallèle
26:23 le développement des BRICS
26:24 et on voit que la Russie n'est pas du tout esselée,
26:26 ni même la Chine,
26:28 la politique américaine est en train de se retourner contre elle
26:32 et elle n'a plus les moyens dont elle disposait avant
26:34 pour continuer à mener cette politique imparallèle.
26:37 Je pense que, on va voir,
26:38 les États-Unis ont connu beaucoup de crises,
26:40 ils sont capables de rebondir,
26:42 mais je pense qu'ils sont dans une situation très très délicate
26:44 et sur la scène internationale,
26:45 et sur la scène nationale où ils n'ont jamais été autant divisés
26:48 entre Américains.
26:50 Donc vous parlez de grains de sable russo-chinois,
26:52 même de clés à molettes dans l'engrenage étasunien.
26:55 Vous avez évoqué juste avant Nicolas Mirkovic
26:57 le cauchemar américain d'une alliance entre l'Europe et la Russie,
27:01 mais à force d'ingérence en réalité,
27:04 les Américains ont peut-être réalisé pire que ce cauchemar,
27:07 c'est en fait l'alliance entre la Russie et la Chine.
27:10 Est-ce pire encore que ce qu'ils imaginaient ?
27:13 Zbigniew Brzezinski dit qu'il y a vraiment...
27:15 donc il explique la politique imparallèle américaine,
27:18 il n'emploie pas ce terme,
27:19 il explique comment est-ce que les États-Unis doivent se comporter
27:21 dans les différentes régions du monde,
27:22 il explique qu'il faut amoindrir, qu'il faut affaiblir la Russie,
27:25 il explique qu'il faut se méfier de la Chine,
27:27 et ils savent, Eliot Cohen qui est un néo-conservateur américain
27:30 qui a écrit "The Big Stick", le grand bâton,
27:32 qui était le terme employé par Roosevelt au début du XXe siècle,
27:36 Cohen dit très clairement qu'il faut faire attention à la Chine
27:39 qui est le véritable rival des États-Unis, c'est la Chine,
27:42 ce n'est pas la Russie, parce que, à cause de sa puissance économique,
27:45 à cause du plus de milliards d'habitants sur place
27:48 et à cause de sa place en Asie,
27:51 aujourd'hui, les États-Unis ont réussi à faire tout le contraire
27:54 de ce qu'avait dit Brzezinski,
27:55 et Brzezinski écrit dans son livre "Le Grand Échec",
27:57 il y a une chose à laquelle les États-Unis doivent faire attention,
28:00 c'est éviter une alliance entre la Russie, la Chine et l'Iran.
28:03 Il dit que ces trois pays, non pas pour des raisons idéologiques,
28:06 mais pour des raisons circonstancielles,
28:10 pourraient se liguer contre l'Empire américain.
28:13 Donc, ce que les Américains doivent à tout prix faire, c'est diviser,
28:16 "Divide et impéra" c'est le slogan des empires,
28:20 diviser ces régions-là, ces pays-là, pour éviter qu'ils s'allient.
28:24 Or, aujourd'hui, non seulement ces trois pays travaillent ensemble,
28:27 mais on a vu même que la Chine a réussi à mettre autour de la table des négociations
28:31 et à rapprocher l'Arabie Saoudite-Sunnite avec l'Iran-Chiite,
28:37 ou majoritairement, que ces pays-là, qui étaient censés être détestés,
28:41 qui avaient été toujours opposés par les Américains,
28:43 se sont alliés suite à l'intervention de la Chine.
28:47 C'est-à-dire qu'il y a des nouveaux joueurs aujourd'hui dans la géopolitique mondiale
28:51 qui sont en train de trouver des accords de paix.
28:53 C'est un rôle que nous, Occidentaux, malheureusement,
28:55 avions délaissé aux États-Unis avec le peu de succès que nous connaissons.
28:58 Si vous regardez, on regarde rapidement le Vietnam, la Corée, la Yougoslavie,
29:03 on regarde le Nicaragua, le Guatemala, le Congo, Israël et la Palestine,
29:08 où est la paix ? Où sont les réussites américaines ?
29:12 Il n'y en a pas. Or, il y a une partie du monde qui ne veut plus de la guerre,
29:14 qui pense que le doux commerce de Montesquieu pourrait peut-être être une solution
29:17 pour éviter ces guerres, mais en tout cas qui monte sur le devant de la scène internationale
29:21 et qui ne demande pas aux Américains leur opinion.
29:25 Ils font. Et ça, c'est quelque chose qui va se retourner contre les États-Unis
29:29 parce qu'ils sont en train de perdre leur puissance, ils sont en train de perdre leur pouvoir
29:32 et il y a une partie du monde qui va dire "écoutez, on ne veut plus écouter les États-Unis,
29:35 Washington, c'est la guerre".
29:36 Vous avez écrit "Le chaos ukrainien" sur la tragédie ukrainienne,
29:40 vous écrivez "L'Amérique empire", bientôt réédité.
29:43 Le chaos ukrainien reprend-il forme à mesure que l'Amérique empire s'efface ?
29:49 Oui, tout à fait. L'Ukraine est un exemple type de l'échec de cet empire américain.
29:55 Ce que les Américains ont réussi à travers le monde entier avec leur guerre,
29:59 avec leur ingérence depuis la fin de la deuxième guerre mondiale,
30:01 est tombé sur un bloc aujourd'hui.
30:03 Et l'Ukraine, ce que subissent malheureusement l'ensemble des habitants ukrainiens,
30:08 quel que soit leur camp, est une démonstration de cet échec de l'empire
30:13 qui, à travers le marteau, à travers le big stick, le grand bâton, la force,
30:16 l'ingérence, le sous-doiment, ne parvient plus à contrôler le monde.
30:22 C'est un exemple type "Hélas, c'est les Ukrainiens qui payent les pots",
30:26 mais je pense que le monde entier aujourd'hui, avec les informations de nos disposants, le voit.
30:31 On ne peut pas dire aujourd'hui qu'on ne savait pas ce qui est en train de se passer en Ukraine,
30:34 on ne pouvait pas dire qu'on ne savait pas que les Américains étaient omniprésents
30:37 lors du coup d'État du Maïdan, on ne peut pas dire que l'aide de l'OTAN,
30:41 les 200 milliards de dollars versés à l'Ukraine,
30:44 et qui ne servent aujourd'hui à rien, en tout cas qui ne servent pas à ramener la prospérité et la paix en Ukraine,
30:49 on ne peut pas dire qu'on ne voit pas la patte des États-Unis, qu'on ne voit pas la patte de l'empire américain,
30:54 et devant le monde entier, les États-Unis sont en train de montrer un signe de faiblesse,
30:59 et ça c'est quelque chose de particulièrement nouveau,
31:02 et qui doit encourager les Américains à se repenser, comme je le disais il y a quelques instants,
31:07 et qui montre aussi au reste du monde que peut-être que cet empire est un colosse au pied d'argile.
31:13 L'Europe sera-t-elle en mesure de sortir à son tour de l'ornière,
31:17 et peut-être à trouver des moyens d'une paix en Ukraine,
31:20 ce qui veut dire évidemment négocier avec Vladimir Poutine ?
31:23 Il faut que l'Europe sorte de cette situation.
31:26 Le suivisme atlantiste, cette pensée qui considère que les Américains
31:32 sont les seuls défenseurs de la démocratie, sont les défenseurs de nos valeurs, est erronée.
31:37 Le général Legault avait dit dans les années 60 que la grande menace pour la France,
31:41 c'était l'impérialisme américain.
31:43 Dans les années 60, déjà il y avait une idée de la souveraineté.
31:47 Quelques années plus tard, on lançait le Concorde, on avait des centrales nucléaires,
31:49 on avait envie de défendre notre souveraineté, de défendre notre identité.
31:53 Vous pouvez imaginer 60 ans plus tard, avec des vagues et des vagues de politiciens atlantistes,
31:58 avec la construction d'une Union européenne supranationale,
32:01 décorrélée des besoins des Européens, à quel point cette situation s'est aggravée.
32:07 On doit retrouver notre souveraineté, on doit travailler intelligemment entre pays européens,
32:11 ça c'est sûr et certain, dans cette plaque tectonique géopolitique qui est en train de bouger.
32:16 On ne pourra pas tout faire seul, mais on doit arrêter de suivre les États-Unis.
32:22 La guerre en Europe n'est pas profitable aux Européens.
32:24 Le fait de ne pas travailler avec un partenaire aussi riche que la Russie est défavorable pour les Américains.
32:30 Et le fait que la Russie soit en train de négocier des partenariats en Afrique dans des zones
32:34 où nous-mêmes par exemple avions une relation privilégiée, doit aussi nous remettre en question.
32:38 On a complètement failli notre politique africaine.
32:40 D'autres sont en train d'en profiter.
32:42 L'idée c'est de voir comment est-ce qu'on discute intelligemment, en donnant, donnant,
32:46 avec les différents pays du monde, entre pays européens, mais que nous arrêtons de suivre les États-Unis.
32:50 Il y a des élections européennes prochainement, je pense qu'on va voir pas mal de partis
32:56 qui vont vouloir retrouver un peu de souveraineté, qui sont contre la guerre.
32:59 Et on voit même au sein de l'Union européenne les différents majeurs qu'il y a.
33:02 Orban bloque l'envoi de milliards d'euros à l'Ukraine.
33:08 Robert Fico en Slovaquie aussi.
33:11 Et il y a d'autres pays qui disent "nous ne voulons plus de cette guerre".
33:14 En tout cas c'est la politique d'Ursula von der Leyen, de Charles Michel,
33:18 ces atlantistes qui veulent la guerre à tout prix et qui ne vont pas sur place.
33:21 Ce n'est pas à Kiev qu'il faut aller.
33:23 Je pense que si ces responsables politiques vont demain en Ukraine, qu'ils aillent au front,
33:27 qu'ils aillent dans une tranchée, qu'ils voient comment c'est.
33:30 Quelle est la conséquence de leur politique guerrière, belliqueuse en Ukraine ?
33:34 C'est là, c'est facile d'aller dans les salons feutrés de Kiev.
33:37 C'est un peu plus difficile de rentrer dans le hadou et maintenant dans les sols gelés,
33:41 de marcher sur les sols gelés du front où ils envoient les Ukrainiens se battre.
33:47 Il faut sortir de cette Union européenne atlantiste, il faut retrouver la souveraineté
33:51 et il faut pouvoir retrouver un terrain d'entente, de discussion avec la Russie
33:57 pour bâtir une nouvelle architecture de la paix en Europe comme nous l'avions
34:02 lors de l'acte final des accords de Helsinki.
34:04 Il faut se remettre autour de la table, ça va prendre un peu de temps,
34:06 c'est normal, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, ça a pris du temps,
34:08 ça reprend du temps, c'est indispensable.
34:11 Entre l'Orient antique et le Pacifique, on a un énorme espace
34:14 avec des mêmes valeurs civilisationnelles, culturelles, religieuses.
34:18 On a tout intérêt à travailler ensemble.
34:20 Tout intérêt à travailler ensemble, eh bien Nikola Merkovitch, ce sera le mot de la fin.
34:24 Merci encore d'avoir répondu présent à l'appel de Chocs du Monde.
34:28 Je rappelle que vous êtes l'auteur du "Caos ukrainien et de l'Amérique",
34:31 "Empire", bientôt réédité.
34:33 Surtout, n'oubliez pas de commenter et de partager cette vidéo.
34:38 Bonsoir à tous et merci beaucoup.
34:39 [Générique]

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