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Transcription
00:00 - On va prendre 11 heures.
00:02 - Europain Culture Média.
00:04 * Extrait de "Je veux vivre" de Alida *
00:22 - Tellement belle cette chanson d'Alida et de son compagnon Luigi Tenko qu'on peut entendre dans votre spectacle.
00:28 - Oui, oui. - Interruption.
00:30 - Donc l'idée en fait est de donner la parole à plein de femmes qui ont toutes vécu leur interruption volontaire de grossesse, mais de manière très différente.
00:37 - Très diverse, oui.
00:38 - Ça peut être tout à fait cocasse, tout à fait tragique, tout à fait banale.
00:42 - Et c'est ça qu'on voulait. On voulait d'abord laisser la parole et pour après éventuellement permettre aux gens d'en parler.
00:49 - Oui. - Parce que c'est ce qui est le plus difficile.
00:51 - Moi je pensais pas que c'était aussi tabou et que même entre nous, entre femmes, entre mères et filles, on n'en parlait pas.
00:56 - Et moi c'est ce que j'ai aimé dans votre spectacle, c'est que ça permet de sortir un peu de ce sujet des grands discours en fait.
01:02 - Bah oui c'est pas... - On a aussi bien la femme qui dit que ça a été pour elle comme de se faire arracher une dent, juste un mauvais moment a passé,
01:07 que celle qui explique que jusqu'à la dernière seconde, elle espérait que son compagnon allait changer d'avis et accepter qu'elle garde ce bébé.
01:13 - Oui, et puis en creux on laisse parler les hommes aussi, qui sont pas toujours... qui sont parfois là, parfois absents.
01:18 Et parce que si nous même on n'en parle pas, bah comment voulez-vous qu'on en parle à...
01:22 Moi j'ai mon fils, je me dis si ça arrive demain, comme si sa copine tombe enceinte, comment est-ce qu'on peut se parler, comment est-ce qu'on peut envisager
01:28 cette intervention, et sans jugement, sans idéologie, sans être binaire, et voilà.
01:34 Et on voulait avant tout que ce soit aussi un spectacle, que ce soit des interprètes.
01:38 Moi j'interprète une femme qui a vécu deux avortements très différemment,
01:43 qui veut en parler, qui veut se réconcilier avec ses parents, après être devenue maman.
01:48 - Vous interprétez en fait le rôle de Sandra Vizavona, qui a écrit...
01:52 - Oui, qui a écrit ce roman qu'on a adapté.
01:54 - Voilà, et elle écrit "la loi nous autorise à avorter, la société nous empêche d'en parler".
01:59 L'année prochaine ça fera pourtant 50 ans que la loi dépénalisant l'avortement aura été votée en France,
02:04 et ça reste encore un sujet dont il ne faut pas parler, même à ses proches.
02:08 Comment vous l'expliquez ?
02:10 - Je ne sais pas, je vous jure je ne sais pas.
02:12 Je ne sais pas si c'est lié aussi au tabou, ou au silence autour de la sexualité,
02:17 autour des relations entre infamiliales, je ne sais pas.
02:21 Il y a peut-être plusieurs faisceaux de compréhension de ce silence,
02:24 mais c'est surtout qu'aujourd'hui c'est un droit qui n'est plus effectif.
02:28 C'est-à-dire que la loi est passée, mais en fait c'est de plus en plus difficile.
02:32 Les jeunes filles ne savent pas comment faire, le panier familial est blindé,
02:37 il y a des semaines d'attente, il y a un vrai désert médical, mais que je ne soupçonnais pas.
02:41 Et encore aujourd'hui, en 2023, j'ai une amie qui n'a pas osé le dire à sa mère,
02:45 et qui s'est retrouvée embrigadée dans une situation absurde.
02:50 On l'a obligée d'écouter le Chœur de l'enfance, ce qui est interdit.
02:53 Et voilà, en fait on est un peu démuni, mais on ne se parle pas,
02:57 comme dans beaucoup de sujets.
03:00 - Et on réalise que 50 ans après, il y a encore du boulot,
03:03 et ce spectacle peut aider justement à faire parler.
03:05 - Oui, et ça reste du théâtre, c'est-à-dire que c'est un vrai spectacle.
03:09 Je partage la chaîne avec deux comédiennes géniales,
03:12 Sandra Koudriano et Kansa Lagnaoui, et c'est un plaisir, c'est très joyeux comme spectacle.
03:17 - Interruption, c'est au Théâtre Antoine, c'est du jeudi au samedi à 19h,
03:20 le dimanche à 16h, Pascal Harbiot, vous êtes notre invité,
03:23 jusqu'à 11h sur Rempart, dans deux minutes, on va dresser votre portrait sonore.