"Désirer" : la sexualité du point de vue des femmes

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00:00 Muriel, je sais pas si vous en avez entendu parler, mais le livre "Désiré" vient de sortir, il fait déjà l'événement.
00:04 Au départ, c'est un podcast qui s'appelle "Steamy", qui est écrit par des autrices en France,
00:08 et auquel a participé en réalité l'humoriste Marina Rollman, dont le spectacle est toujours disponible sur ma chaîne.
00:14 Je vous propose qu'on regarde l'extrait.
00:16 Je pense que la finalité de toute cette histoire, c'est que c'est pour ça que j'en parle sur scène,
00:20 et le seul moyen qu'on ait des vies sexuelles un peu sympathiques, c'est s'explorer tout seul et ensuite parler à son ou ses partenaires.
00:24 Il n'y a pas de secret, surtout si t'es pas équipé de la même manière, il faut juste s'explorer, se causer.
00:28 On peut pas deviner les choses, y'a pas mille endroits où on peut apprendre à part en dialoguant avec les gens avec qui on relationne.
00:33 Tu peux googler, vous ferez le test quand vous rentrez chez vous ce soir, tu peux googler comment ça fonctionne un vagin,
00:37 tu peux tomber sur un ou deux sites qui t'expliquent comment ça jouit, ok, très bien,
00:40 et très vite, tu tombes sur des sites, sérieux, répertoriés par Google, écrits par des scientifiques,
00:45 hommes cis évidemment, qui postulent que l'orgasme avec un vagin n'existe pas.
00:50 Le culot, tout ça, parce que tu sais pas faire un truc de dire que ça n'existe pas.
00:55 Moi, j'ai jamais fait de flammes-cuche, tu vois, je suis pas là pour autant, tu sais, l'Alsace, c'est beaucoup de propagande, faut pas croire.
01:01 Y'a des lobbies.
01:02 Des lobbies.
01:04 - Bonsoir, Mariana Rodman, merci beaucoup d'être avec nous, vous êtes humoriste, vous êtes aussi comédienne.
01:08 Je vous présente Muriel Robin. - Mais oui, je sais.
01:10 - Vous connaissiez Mavie, non ? - Non.
01:12 - On fait semblant, on part en vacances, en fait. - C'est ça.
01:16 - Alors, aujourd'hui, les femmes, on l'a vu, et c'est le cas de ce livre, parlent beaucoup plus du désir féminin,
01:20 elles se sont saisies du sujet, elles veulent plus être obligées, elles deviennent sujets, c'est la formule consacrée.
01:25 Vous aussi, et on s'est demandé, est-ce que ça a été facile d'écrire sur le sexe,
01:29 quand on a pour métier de faire des blagues, habituellement ?
01:31 - C'est ça un peu le propos, c'est marrant, parce que la plupart de ces nouvelles, elles ont un truc d'humour,
01:35 comme si, je sais pas, les femmes, on osait pas parler de désir directement, donc on se cachait un peu derrière les blagues.
01:39 Moi, ce que j'ai trouvé un peu difficile, c'est que comme normalement, je fais de l'humour en mon nom,
01:43 et qu'il y a un truc un peu dissertatoire, je fais pas de la fiction,
01:46 j'avais un peu de mal à donner la bonne mesure entre la théorie, ce que je voulais dire des rapports,
01:51 ce que je voulais dire de la sexualité, et puis en même temps, faire une histoire qui soit engageante, à la base, c'est une nouvelle.
01:54 - Vous dites que l'humour, c'est un lubrifiant social, mais lorsque l'humour arrive dans l'amour,
01:59 les mecs arrivent pas à recevoir vos blagues.
02:01 - Pas tous, mais c'est vrai que j'ai l'impression que chez les mecs hétéros, il y en a pas mal qui aiment faire rire,
02:05 et pas forcément... Rire, et pas forcément recevoir, parce qu'il y a un truc de prise de pouvoir,
02:10 c'est hyper puissant, je vous apprends rien, c'est hyper puissant.
02:13 - C'est pas chez tous. L'hétérobeaufe, c'est comme ça que vous l'écrivez ?
02:16 - J'ai l'impression que l'hétérobeaufe, il aime pas le rire facile, et que généralement, ça va main dans la main.
02:20 - C'est quoi un hétérobeaufe ?
02:21 - C'est quoi un hétérobeaufe ? Mais en fait, c'est méchant comme étiquette.
02:24 Je pense qu'on est tous un peu pris dans cette histoire de patriarcat, que ça fait du mal aux hommes, aux femmes, à tout le monde,
02:28 et je pense que l'hétérobeaufe, c'est quoi ? C'est le contrepoint de la pouf ? Je sais pas, en fait.
02:33 Qui est quoi ? Je sais pas exactement, en clair.
02:35 En tout cas, les mecs qui ont du mal à ce qu'une femme fasse rire et se sente menacée là-dedans, je trouve que c'est un peu limitant.
02:41 - Et il y a un truc très fort dans votre style, et c'est pour ça que je vous disais, même, on a envie de vous lire dans des romans, dans d'autres choses,
02:46 c'est qu'on a l'impression que ça procède même du même élan que le rire, en réalité, le sexe, chez vous, le désir, en tout cas.
02:51 Il y a quelque chose d'assez organique, d'assez immédiat. Soit ça marche, soit ça marche pas.
02:55 Est-ce que ça procède du même élan ? Je vous pose la question à toutes les deux.
02:58 - C'est très sensuel, de rire avec quelqu'un, c'est pas rien, quoi.
03:01 Tout de suite, ça relie deux êtres. Moi, j'oublie jamais les gens avec qui j'ai ri, que je ne reverrai jamais de ma vie.
03:07 En en parlant, les gens que je vois, ils font rire et ils ont une place spéciale, quoi.
03:13 - Mais du coup, quel statut on a, nous, qui faisons payer pour faire rire les gens ?
03:17 - Ah, nous ? Non, non, mais c'est intéressant. Moi, je viens avec une femme, alors il faut dire qu'on se marre tout le temps, donc tout le temps.
03:23 Mais je trouve ça regrettable, encore une fois. Voilà, tous les hommes ne sont pas comme ça, franchement.
03:30 - Marina, vous dites que quand on voit comment un homme rit, ça permet de deviner comme il est au lit.
03:35 - Ah oui, je crois, parce que je crois qu'en fait, les deux procèdent à un truc de lâcher prise, et qu'en plus, le sexe...
03:41 Enfin, un sexe très sérieux, c'est un peu dommage, parce qu'on fait des théâtres et des bruits ridicules.
03:46 Enfin, si on est à essayer de se poser la question si on est bien comme des statues et tout, j'ai l'impression que ça limite vachement le champ des possibles, quoi.
03:51 - C'est un jeu. - Oui, de joie. - C'est un jeu, de joie, jouer, joie.
03:55 - Et c'est ça, on a l'impression que comme humour, ça renverse un peu toute la table, quoi.
03:58 Ça retourne la table et qu'à chaque fois, que ce soit par le sexe ou par la rigolade, c'est ce que signifie la nouvelle affaire.
04:03 - La surprise et le lâcher prise. - Et dans cette nouvelle, il y a un passage extrêmement horride que je ne vais pas vous dévoiler,
04:08 où Marina Rollman explique le pouvoir des seins sensotifs. - Ah oui. - Ah oui, bien sûr.
04:12 - C'est quoi, ce pouvoir ? - C'est toujours... Bah, c'est-à-dire que surprendre quelqu'un avec...
04:16 On enlève un, ouais, en fait, il n'y a pas de soucis. En revanche, c'est quand même toujours un peu...
04:19 - Mais ça va toujours, ça ? - Ouais, c'est quand même toujours un peu l'anniversaire de quelqu'un dans l'histoire.
04:24 - Il y a des sens, hein. - Je comprends, je comprends.
04:27 - Ça donne envie de lire, en tout cas. - C'est très, très bien décrit et c'est très drôle.
04:31 Muriel Robard, vous avez dit "Si on est homosexuel, on n'est pas désirable, on n'est pas pénétrable,
04:36 et quand on n'est pas pénétrable dans le cinéma, on ne vaut rien."
04:39 Et Libération, vous a pris au mot et est allé un petit peu enquêter, ils ont sorti un papier.
04:43 Il titre "Pour les actrices lesbiennes, faire ce métier, malgré la lesbophobie,
04:47 ça demande une grande force mentale." Et le journaliste, vous a pris au mot,
04:50 il a essayé d'aller contacter un petit peu les agents, des artistes, et partout,
04:54 il a trouvé en réalité, porte-close... - Oui.
04:57 - Il a trouvé porte-close... - Ils veulent pas fumer des carrières en l'air.
04:59 - C'est ça. - Ça serait très net.
05:02 - Personne n'a voulu parler, hormis quelques-unes, elles sont peu nombreuses.
05:06 - Hétéros. - Et pour tout vous dire, non, mais ce sont des actrices,
05:09 des comédiennes de théâtre et de télévision, aucune au cinéma,
05:12 ce qui m'a fait me demander pourquoi c'est aussi difficile d'admettre
05:15 ou de dire qu'on est lesbienne au cinéma précisément.
05:18 - La réponse, moi, je ne l'ai pas, mais on est...
05:21 Tout ça tourne autour du désir, parce que je suis pas sûre
05:24 qu'il faille employer le mot d'homophobie.
05:27 Ce qui est embêtant, c'est que je suis le seul exemple,
05:30 comme je l'ai dit, au monde, de quelqu'un de très, très, très populaire,
05:34 et on voit bien que sur toutes les comédies
05:37 qui ont été tournées en France sur les 15 dernières années,
05:40 on va dire, allez, les 30 dernières années, pardon,
05:43 parce qu'ils continuent, d'ailleurs, ça continue, je n'existe pas,
05:47 si on a eu 50 de tournées par an, ça fait 1 500, ce comédie,
05:51 si on se souvient bien, je suis dans le 2,
05:54 et 2 fois choisi par Christian Clavier.
05:56 Et une fois, je suis un 2e choix, faire "Les Visiteurs"
05:59 à la place de Valéry Lemercier, qui ne veut pas le faire,
06:02 et la 2e fois.
06:04 Donc, j'ai trouvé important d'en parler
06:09 pour ceux et celles qui arrivent.
06:12 Alors, comme acteur et comme actrice,
06:15 c'est pas eux ni elles qui ont les manettes,
06:18 maintenant, ceux qui seront réalisateurs, réalisatrices,
06:21 producteurs, productrices, est-ce que ça bougera ?
06:24 Et là, c'est pour ça, je reviens au début, je parlais d'homophobie,
06:27 ils vont peut-être s'abriter sur le fait du désir,
06:30 il faut être désirable.
06:32 Donc, ils détiennent, en tout cas, les gens qu'ils détiennent,
06:35 en tout cas que moi, pendant 30 ans, je n'ai pas été désirable.
06:38 J'ai cru mourir, je suis morte, on l'a vu,
06:41 j'ai fait 100 kg, j'étais détruite.
06:44 J'étais comme ça parce que j'ai abandonné,
06:47 mais j'ai cru jusqu'au bout.
06:49 Donc, maintenant, c'est plus un sujet, ça m'a tué.
06:53 C'est vous qu'on ne veut pas, c'est tous les jours une petite mort,
06:57 parce que tous les jours, vous dites "demain, demain, demain".
07:00 Moi, mon cas, peu importe, mais qu'ils servent,
07:02 je ne dis pas aux jeunes qui arrivent, qui veulent faire ce métier,
07:05 "Cachez-vous", je dis à ceux qui font le cinéma,
07:09 qui sont les reines de ça,
07:13 "Dites-nous si quand on est homosexuel, on n'est pas désirable."
07:17 Voilà, ça me paraissait important d'en parler, c'est un vrai dossier.
07:21 -Pourquoi, maintenant ?
07:23 -Parce que je suis prête, parce que j'attends.
07:25 Maintenant, j'ai envie qu'on ait envie de moi,
07:29 mais avant, j'en avais besoin pour vivre.
07:32 Donc j'avais besoin, je pensais qu'ils allaient me prendre dans leurs bras,
07:35 et j'ai attendu ces bras.
07:37 Maintenant, c'est réglé, c'est fini, c'est peut-être là que les choses vont arriver.
07:40 La vie est faite comme ça, mais peu importe,
07:42 parce que l'essentiel de ma vie, c'est ma vie privée.
07:44 Le reste, c'est que le reste, métier compris.
07:46 Et puis peut-être essayer d'aider.
07:50 -C'est ce que j'allais dire.
07:52 En tout cas, Murielle, j'espère que vous inspirez des tas de jeunes garçons,
07:54 de jeunes filles, à assumer qui ils sont, et on les encourage aussi.
07:58 On espère que ce métier va bouger.
07:59 -Oui, il faut espérer, mais ça m'a l'air compliqué.
08:01 Je ne suis pas sûre que... Je ne sais pas comment ça va.
08:04 Il y a peut-être quelqu'un d'autre qui...
08:06 Je ne sais pas, qui trouvera des mots, une solution.
08:09 -Murielle, on va continuer le grand entretien dans un instant.
08:11 -Avec des choses plus gays, non ?
08:12 -Evidemment.
08:13 -On ne rejoint pas, on ne sait pas ce qu'il y a.
08:14 -On va rester gays.
08:15 -Vous êtes hétéro ou vous êtes homosexuel ?
08:16 -Oui.
08:17 -C'est horrible, mais de toute façon, on s'en souvient.
08:18 -Tout peut changer. La vie est longue.
08:20 -On reste super gays aujourd'hui.
08:22 Merci beaucoup, Marina.
08:23 -Merci, Marina.
08:24 -Pauline, je le rappelle, la nouvelle de Marina Rollman est à lire dans ce livre désiré,
08:28 avec notamment Emma Baker, Wendy DeLorme, Joy Majdani, Emmanuel Richard et Laurine Tizi.
08:33 Et c'est réussi. Allez lire le texte de Marina.
08:35 -Pas les autres.
08:36 -Il est exceptionnel.
08:37 -Ah, super.
08:38 -Moi, j'aime Marina. Voilà.
08:39 -Ah, merci beaucoup.
08:40 -Merci, Marina.
08:41 [SILENCE]

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