La députée LFI de Seine-Saint Denis, Aurélie Trouvé, est l'invitée d'Alexis Morel à 7h50. Elle réagit notamment au plan d'économies souhaité par le gouvernement. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-lundi-17-juillet-2023-2388230
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00:00 Bonjour Aurélie Trouvé, députée de la France Insoumise de Seine-Saint-Denis, chercheuse
00:04 en économie, vous venez de l'entendre, l'État va donc se serrer un peu la ceinture l'année
00:09 prochaine, fini clairement le quoi qu'il en coûte, à en croire Gabriel Attal, un
00:12 budget 2024 marqué pour la première fois, le disait Dominique, depuis une décennie
00:17 par une baisse des dépenses, 4 milliards d'euros, pour l'exécutif le désendettement
00:22 et je cite « une urgence nationale pour ne pas hypothéquer l'avenir des classes moyennes
00:27 ». Que lui répondez-vous ce matin ?
00:28 Et bien comme d'habitude le gouvernement utilise la dette publique en disant « ah
00:34 attention c'est terrible » comme un prétexte et un faux prétexte en réalité pour imposer
00:39 une cure d'austérité budgétaire drastique et qui va peser en particulier sur les revenus
00:44 et sur les ménages les plus modestes, il va y avoir des conséquences très concrètes
00:49 pour les gens.
00:50 On peut parler d'austérité quand on augmente le budget de l'éducation nationale, de
00:53 la planification écologique qui va recevoir des crédits bien plus importants ?
00:57 Bien sûr, quand on nous annonce une baisse des dépenses publiques relativement drastique,
01:03 mais aussi, je le dis, c'est surtout que ça va peser sur les revenus et sur les ménages
01:08 les plus modestes.
01:09 Par exemple, un déremboursement des frais dentaires.
01:13 Et ça peut vous paraître théorique, en réalité c'est très pratique.
01:19 Moi je vois dans ma circonscription, il y a plein de gens qui aujourd'hui vivent avec
01:23 une dent en moins, non remplacés avec des dents bousillées parce qu'ils ne peuvent
01:26 se payer le dentiste.
01:28 C'est ça les conséquences très concrètes, alors qu'il y a des cadeaux fiscaux maintenus
01:33 aux plus riches, aux multinationales qui coûtent des milliards d'euros à l'État.
01:37 Mais si on ne fait rien à une dette qui pourrait devenir le premier budget de l'État, une
01:41 dette à 111% du PIB, la France quasiment le seul pays européen à ne pas ramener son
01:45 déficit sous les 3% d'ici à 2026, c'est une fuite en avant.
01:49 C'est un prétexte fallacieux, je l'ai dit, d'abord cette dette a diminué, elle était
01:54 à 116%, elle est maintenant à 111%, et je vais vous dire pourquoi.
01:57 Parce que ce qu'oublient Gabriel Attal et le gouvernement, c'est qu'il y a une très
02:04 forte inflation.
02:05 Ce qui fait que ça diminue la valeur de la dette.
02:07 Ce qui fait qu'aujourd'hui d'ailleurs, la France emprunte encore à des taux d'intérêt
02:12 réels négatifs.
02:13 Donc c'est même plutôt avantageux en ce moment de s'endetter.
02:16 D'ailleurs la charge de la dette est toujours à peu près à 2% du PIB.
02:20 Ce que je veux dire, c'est qu'en fait c'est un prétexte, cette dette publique, pour imposer
02:26 une politique antisociale qui va peser sur les ménages et les plus modestes, tout en
02:30 servant toujours les intérêts des plus riches.
02:32 Et d'ailleurs Emmanuel Macron n'a jamais été autant le président des ultra-riches.
02:36 La principale économie, si on regarde dans le détail, c'est finalement la sortie du
02:39 bouclier énergétique, du bouclier tarifaire, progressivement en 2024.
02:43 Ça c'était un dispositif temporaire pour protéger des conséquences de la guerre en
02:47 Ukraine.
02:48 Il faudrait le maintenir, Advitam, Eternam ?
02:49 Justement, vous parlez du bouclier tarifaire.
02:53 C'est un vrai problème qui disparaît.
02:55 C'est grâce à ça qu'on va financer des crédits pour d'autres ministères.
02:58 Parce que dans le même temps, le gouvernement ne fait rien pour bloquer ce que nous proposons
03:02 dans la France insoumise depuis des mois et des mois, de bloquer les prix des produits
03:06 de base, des produits alimentaires ou l'énergie.
03:11 Et ce qui est terrible, c'est que cette cure d'austérité justement, elle va tomber
03:15 sur des Français, des dizaines de millions de gens qui subissent l'inflation et notamment
03:20 l'inflation des produits de base, les produits alimentaires, l'énergie notamment.
03:24 C'est ça qui est terrible.
03:25 Il faut savoir quand même que les salaires réels ont baissé l'année dernière de 2%
03:30 quand les 500 plus grandes fortunes de France ont elles augmenté de 17%, 200 milliards
03:38 d'euros à peu près.
03:39 Donc on a en plus une explosion des inégalités sociales, des ménages aux revenus modestes
03:44 qui trinquent de plus en plus face à l'inflation.
03:46 Un gouvernement qui va leur imposer une cure d'austérité budgétaire et des plus riches
03:50 qui s'en sortent super bien.
03:51 La priorité selon l'exécutif c'est de préserver en tout cas les classes moyennes.
03:55 Gabrielle Attal vous met au défi, si vous votez contre ce budget cet automne, proposez
04:00 un budget alternatif.
04:01 Voilà ce qu'il vous dit.
04:02 On peut le chiffrer avec les services de Bercy.
04:05 Vous dites banco ?
04:06 Banco, mais d'ailleurs chaque année nous proposons un budget alternatif.
04:11 Nous l'avons fait d'ailleurs l'année dernière.
04:12 Le problème c'est que ce gouvernement en plus, de toute façon il ne coûte rien de
04:17 l'opposition.
04:18 Il faut savoir quand même qu'en décembre dernier nous avions voté à la majorité
04:21 de l'Assemblée nationale par exemple +12 milliards d'euros pour la rénovation énergétique
04:26 des logements.
04:27 La majorité de l'Assemblée nationale et des députés.
04:28 Il y a eu un 49-3, le gouvernement s'y est opposé.
04:32 Et après il va nous faire du greenwashing et nous parler des endettements verts.
04:35 C'est irresponsable.
04:36 Ce gouvernement par ailleurs, encourage des politiques climaticides, a fait rouvrir une
04:41 centrale à charbon, a fait monter un port métallier pour imposer du gaz de schiste.
04:46 A une politique qui vient de décerner la Légion d'honneur au patron total ce week-end.
04:51 Et puis ensuite il vient nous faire du greenwashing et l'utilise en plus pour imposer des coupes
04:56 antisociales terribles qui vont poser sur les ménages modestes et les chômeurs.
05:00 On ne sait pas encore comment et quand, mais Emmanuel Macron devrait s'exprimer dans
05:04 les jours à venir, à l'issue des 100 jours qu'il s'était lui-même fixé pour apaiser
05:07 le pays après la réforme des retraites.
05:08 Depuis, il y a eu aussi 5 jours d'émeutes dans les quartiers.
05:12 Est-ce qu'il y a besoin de cette parole présidentielle aujourd'hui ou vous n'en
05:16 attendez rien ?
05:17 Je vais revenir sur les révoltes urbaines.
05:20 Parce qu'il se trouve que je suis députée de Saint-Denis.
05:21 Donc j'ai bien vu d'ailleurs déjà à quel point ça a pesé et ça a dégradé
05:28 notamment les petits commerces.
05:30 700 bâtiments publics dégradés, 500 communes touchées.
05:33 Je vous dis déjà qu'il y a un problème, c'est que l'État pour l'instant n'annonce
05:37 et ne met sur la table aucun euro public.
05:39 Il y a un projet de loi reconstruction en urgence qui arrive au Parlement cette semaine.
05:42 Mais il n'y a pas d'euro public mis sur la table.
05:43 Donc ce sont les collectivités locales et les entreprises publiques qui vont trinquer.
05:47 Mais surtout le plus grave, c'est que le gouvernement ne prend pas les enseignements
05:52 de ce qui vient de se passer.
05:53 Il faut comprendre les raisons de la colère pour pouvoir y répondre de manière durable.
05:58 Et notamment quand je discute avec les élus locaux de ma circonscription, ceux qui travaillent
06:03 dans les quartiers populaires, qu'est-ce qu'ils disent ? Qu'il faut enfin reconnaître
06:06 le problème qu'il y a aujourd'hui avec les forces de l'ordre et la manière dont
06:11 la police intervient dans les quartiers populaires.
06:13 Les Nations Unies le disent, il y a un problème profond de racisme et de discrimination au
06:17 sein des forces de l'ordre.
06:18 Tant que nous n'aurons pas vu ces raisons et répondu à ces raisons de la colère,
06:25 y compris la misère sociale qu'il y a aussi dans ces quartiers populaires, le besoin
06:29 de moyens dans les associations de quartiers, il n'y aura pas de réponse durable au problème.
06:33 Vous ne regrettez pas chez les Insoumis pendant cette semaine de violence de ne pas avoir
06:37 appelé clairement au calme ? Parce que vous le dites, ce sont vos électeurs, vos administrés,
06:41 les Français les plus défavorisés qui aujourd'hui subissent les conséquences de magasins qui
06:45 ont brûlé, de locales associatives qui sont parties en fumée, de voitures qui ont disparu.
06:49 Nous appelons à la justice.
06:51 Et nous le disons depuis le début.
06:52 Depuis le début, nous disons évidemment que nous ne sommes pas pour la violence.
06:56 Certainement pas, ce n'est pas ça la réponse.
06:58 Mais nous disons aussi qu'il faut comprendre les raisons de cette colère pour pouvoir
07:03 y répondre de manière durable.
07:04 Je l'ai dit, moi dans les quartiers de Seine-Saint-Denis, comme d'ailleurs dans beaucoup de quartiers
07:09 populaires, qu'est-ce qui se passe ? Il y a un manque de moyens pour les écoles publiques.
07:13 Il n'y a pas de remplacement, il n'y a pas d'infirmière, il n'y a pas d'assistant
07:16 social, il n'y a pas de médecin scolaire.
07:17 Voilà ce qui se passe.
07:18 Il y a un manque de moyens criants pour les associations qui jouent un rôle essentiel
07:23 dans les quartiers populaires.
07:24 En Seine-Saint-Denis, nous avons un taux de chômage, un taux de pauvreté bien plus important
07:28 qu'ailleurs.
07:29 Et bien les gens, et notamment les jeunes, se sentent trahis, se sentent abandonnés
07:33 par l'État.
07:34 Donc il est temps d'avoir une réelle politique de justice sociale, en particulier dans ces
07:38 quartiers populaires.
07:39 Et c'est ce que vous dites aussi à l'Assemblée, vous achevez votre première année de député.
07:42 Depuis un an, on a eu 17 motions de censure, 12 portées par l'ANU ou l'FI.
07:46 Aucun vote favorable de votre parti à la quinzaine de grands projets de loi qui vous
07:50 ont été soumis.
07:51 Est-ce que cette stratégie de bataille acharnée vous a vraiment réussi ? Pour les retraites,
07:55 ça n'a pas marché ?
07:56 Alors, je rappelle que pour les retraites, il y a eu des millions de gens dans la rue.
08:01 Et ce qui s'est passé surtout, c'est un gouvernement qui s'est imposé face à l'Assemblée
08:08 nationale, qui a refusé tout vote dans l'hémicycle, qui a volé deux ans de retraite aux Françaises
08:14 et aux Français, contre une très grande majorité de la population qui ne voulait pas de cette
08:18 réforme, contre la totalité des syndicats de salariés.
08:21 C'est ça qui s'est passé.
08:22 Et donc, oui, aujourd'hui, il est temps d'avoir une alternative à ce gouvernement.
08:25 Alors justement, l'avenir de l'ANU dans tout ça, il n'y aura vraisemblablement pas
08:28 de liste commune aux européennes.
08:30 Les écologistes viennent de désigner leur propre tête de liste, Marie Toussaint.
08:33 Est-ce que vous avez encore un espoir que l'ANU puisse être sauvegardée ? Est-ce
08:38 que l'ANU a encore un avenir ? Même Jean-Luc Mélenchon ne semble plus y croire dans son
08:41 dernier billet hier.
08:42 Eh bien, nous resterons unitaires pour tout le monde dans la France insoumise, parce que
08:47 nous pensons que pour gouverner demain, il faut l'unité, il faut la NUPES.
08:51 Donc nous nous y attachons coûte que coûte.
08:53 Et ça doit passer.
08:54 Et nous continuons à dire qu'il faut des accords électoraux, évidemment, à toutes
09:02 les élections, mais qu'il faut aussi bien plus.
09:04 Et nous l'avons, un programme qui fait aujourd'hui des centaines de mesures.
09:09 Nous allons continuer à porter cela dans la France insoumise, parce que les Français
09:12 la veulent, cette unité.
09:14 D'ailleurs, une majorité de Français veulent l'unité, en tout cas de sympathisants de
09:17 gauche, veulent l'unité aux prochaines élections européennes.
09:19 Donc nous, nous allons répondre à ça dans la France insoumise, pour une NUPES qui soit
09:24 la plus forte possible.
09:25 Parce que nous pensons que c'est la solution pour gouverner demain, et nous y croyons.
09:28 Merci Aurélie Trouvé, députée à l'Effi de Seine-Saint-Denis et invitée d'Inter ce matin.
09:34 Bonne journée à vous.
09:35 [Musique]