Pétrole, foot et cinéma : comment l’Arabie saoudite se paye le monde

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00:00 *Générique*
00:06 Reçu à l'Elysée pour un déjeuner avec Emmanuel Macron vendredi dernier, le prince saoudien Mohammed Ben Salmane
00:12 n'était pourtant pas le bienvenu pour tous les acteurs de la société civile française.
00:16 L'héritier du trône d'Arabie Saoudite d'abord vu comme un réformateur, un modernisateur progressiste
00:22 lors de sa nomination à des postes clés du pouvoir, traîne à présent de nombreuses affaires compromettantes
00:28 qui ont terni son image. L'état français compte pourtant conserver des liens forts avec celui qu'il considère
00:34 comme un allié incontournable entre investissement et échanges commerciaux, accords culturels, poids géopolitique.
00:41 Le soft power saoudien est en effet au sommet alors même au pays des droits de l'homme, l'argent peut-il encore
00:47 tout acheter ? Pour en parler nous sommes en compagnie de Fatiha Daziehni, bonjour.
00:53 *Bonjour*
00:53 Vous êtes chercheuse à l'Institut de Recherche Stratégique de l'École Militaire,
00:57 vous êtes spécialiste des monarchies de la péninsule arabique et on vous doit notamment
01:01 l'Arabie Saoudite en sans question aux éditions Talandier avec hier pour le prince héritier
01:10 depuis le Grand Palais Éphémère à Paris, Mohamed Ben Salman a présenté la candidature de la capitale du royaume
01:19 pour accueillir l'exposition universelle de 2030, c'est le dernier point d'orgue de cette visite à Paris
01:25 qui est une très longue visite puisqu'il est arrivé le 14 juin dernier et il sera dans la capitale jusqu'au 23 juin prochain.
01:33 Alors par exemple sur ce point, quel est l'intérêt de l'Arabie Saoudite de candidater pour accueillir
01:40 l'exposition universelle en 2030 sachant qu'apparemment il a toutes les chances ce royaume saoudien
01:46 de remporter cette exposition universelle ?
01:50 Ce serait pour le prince héritier une consécration puisque tout son objectif politique est de montrer
01:59 à quel point son pays a été transformé en une poignée d'années quand même.
02:04 Mohamed Ben Salman a été parachuté par son père, le roi Salman, comme ministre de la Défense
02:15 aussitôt que le roi accédait au trône en janvier 2015. Il était auparavant son directeur de cabinet
02:25 quand il était prince héritier et ministre de la Défense, donc le roi Salman.
02:29 Et donc voilà, parachuté ministre de la Défense, aussitôt arrivé il déclare la guerre au Yémen
02:35 sans culture stratégique, militaire avérée.
02:40 Pourquoi ? Quel était le but de cette guerre ?
02:41 Mohamed Ben Salman est à l'origine un homme d'affaires.
02:44 Alors le but, le roi Salman a toujours voulu effectivement promouvoir ce fils dont il est le plus proche.
02:53 Pourtant il a d'autres fils dont le ministre de l'énergie ou un autre fils qui était le premier astronaute prince de la région.
03:05 Donc des gens beaucoup plus capés, lettrés et en plus de ça avec des compétences politiques.
03:13 Lui est un novice en politique mais son ambition et son caractère autoritaire est très proche du tempérament du roi Salman.
03:24 Et donc cette proximité et le fait qu'il croit dans l'ambition de son fils et sa capacité à transformer le pays.
03:33 Alors c'est très personnalisé puisque la plupart des journaux insistent sur Mohamed Ben Salman,
03:39 ses décisions, sa manière d'exercer le pouvoir.
03:43 Qui est cet homme ? Il est moins capé que ses frères et il est présenté comme étant plutôt un moderne.
03:50 Mais dans le même temps, ce moderne, dès lors qu'il a accédé au pouvoir,
03:56 a eu un comportement qui l'a largement exposé aux critiques des ONG et de tous ceux qui défendent les droits humains.
04:05 Alors c'est un moderne très autoritaire.
04:10 Disons qu'il modernise de manière très autoritaire son pays.
04:16 Les personnes issues de la société civile n'ont absolument pas le loisir de pouvoir exprimer une opinion alternative sous peine d'être emprisonnées.
04:28 Donc il y a une volonté de totalement dépolitiser très clairement le contexte politique
04:35 et en même temps de libéraliser un peu les mœurs, d'offrir une sorte d'hédonisme à cette jeunesse très nombreuse
04:48 puisque près de 60% des jeunes ont moins de 30 ans.
04:52 Et donc de légitimer, si vous voulez, sa position vis-à-vis de la jeunesse,
04:59 sa capacité à montrer au monde que le royaume est capable de sortir un peu de cette perception moyenâgeuse, wahhabite, etc.
05:12 que tout le monde avait en tête.
05:14 Et en même temps, effectivement, une pratique extrêmement autoritaire et irascible du pouvoir.
05:20 - Oui, parce qu'il y a quelques années, l'écrivain Kamel Daoud avait dit que l'Arabie saoudite, c'était un Daesh qui avait réussi.
05:27 Est-ce qu'il est toujours possible de dire cela, selon vous ?
05:31 Ou bien est-ce aujourd'hui plus d'actualité, Fatiha Dazien ?
05:36 - Oui, effectivement, des slogans un peu caricaturaux.
05:38 C'est vrai que l'Arabie saoudite se distinguait essentiellement par son soft power religieux.
05:45 Aujourd'hui, très clairement, on est à un autre âge, à une autre ère.
05:51 C'est la consécration d'une construction d'une politique culturelle qui est conçue comme la nouvelle centralité du soft power saoudien aujourd'hui.
06:03 Donc, en faisant de l'Arabie un lieu de consécration des arts arabes avec de nombreuses galeries d'art, une biennale,
06:12 un lieu de production cinématographique du monde arabe aujourd'hui,
06:17 la vitalité culturelle est très forte et l'accent est mis là-dessus, bien sûr.
06:23 Et on a fait taire toute expression contestataire.
06:29 Et les religieux aussi sont sommés d'avoir une rhétorique assez lisse, d'ouverture tolérante.
06:37 Ça veut dire justement que sur le plan religieux, parce qu'on a toujours présenté le royaume comme une théocratie, une théocratie très dure,
06:45 est-ce que les choses ont évolué depuis ce moment où Kamel Daoud prononçait cette formule de Daesh qui a réussi ?
06:53 En fait, c'est une erreur.
06:56 Le royaume d'Arabie saoudite, effectivement, est régi par la loi islamique, la charira, bien sûr.
07:01 Mais ça n'est pas une théocratie au sens, par exemple, iranien du terme,
07:05 où les religieux sont au-dessus du politique.
07:08 Pas du tout.
07:09 Les Al Saoud ont toujours été dominants sur le plan de la gestion du royaume.
07:17 Et lorsque les Al Saoud se satisfaisaient, bien sûr, du partage du pouvoir avec les religieux,
07:27 c'est parce que, bien sûr, il y a eu cette alliance au départ du religieux et du politique pour la construction de l'Arabie saoudite,
07:37 des trois différents États saoudiens, et notamment du royaume moderne par Ibn Saoud.
07:46 C'est vrai qu'aujourd'hui, on parle du quatrième État Al Saoud avec cet affranchissement, effectivement.
07:54 Et ceci dit, l'establishment religieux est toujours soumis au politique, comme il l'a toujours été,
08:02 sauf qu'auparavant, il y avait une sorte de partage du pouvoir.
08:07 Les religieux étaient dans tout ce qui était, évidemment, juridique, éducation et société.
08:16 Aujourd'hui, le pouvoir politique contrôle l'ensemble de ces secteurs.
08:22 Donc, on a aujourd'hui une monarchie plus absolue que jamais, contrôlée par un homme.
08:28 Et alors le wahhabisme, quelles sont aujourd'hui les conséquences de ce dogme ?
08:35 Qu'est-ce qui distingue de ce point de vue-là l'Arabie saoudite, par exemple, de l'Iran,
08:40 qui est donc une autre puissance qui cherche à avoir le leadership ?
08:47 - Eh bien, écoutez, l'establishment religieux est plus que jamais soumis à l'autorité politique,
08:53 puisque ce sont des fonctionnaires qui mettent en œuvre la nouvelle volonté politique du royaume,
09:02 qui est de se présenter comme un royaume plus tolérant,
09:10 avec, évidemment, combattre l'extrémisme, le traditionnalisme, etc.
09:17 Mais c'est un establishment qui est toujours soumis aux politiques.
09:24 Donc, ça ne change pas grand-chose.
09:27 Il n'empêche que Mohamed Ben Salman, tout puissant qu'il est,
09:30 a quand même besoin de cette loyauté et de la soumission de cet establishment.
09:36 - Alors, ça, c'est donc le désir aujourd'hui de communication, mais il n'en reste pas moins que la peine de mort
09:43 est encore largement en vigueur, que les femmes ont conquis un peu plus de droits,
09:49 mais malgré tout, sont bien loin de l'égalité.
09:53 Les minorités gays sont très loin d'avoir la possibilité de vivre comme elles l'entendent.
10:01 Donc, il y a encore tous ces gros points noirs qui font que l'Arabie saoudite est encore un pays qui bafoue les droits humains.
10:10 - Comme l'ensemble des pays de cette région.
10:13 Je veux dire, vous avez effectivement des pays qui communiquent mieux
10:19 et qui présentent comme ça une facette universaliste, comme les Émirats arabes unis.
10:28 Mais on a vu lors du mondial au Qatar que les mêmes problématiques étaient soulevées.
10:34 Mais il y a une volonté.
10:36 Dernièrement, j'ai vu que l'Arabie saoudite se disait prête à accueillir des délégations LGBT, etc.
10:46 Donc, il y a une volonté quand même d'essayer de s'adapter.
10:51 Mais bien entendu, les organisations des droits de l'homme sont aujourd'hui vont debout.
10:58 Elles sont dans leur rôle.
10:59 - En termes de soft power, le royaume saoudien a misé, disiez-vous, sur la culture.
11:05 La culture, c'est par exemple Al-Ula, un site qui a été largement promu.
11:09 Peut-être quelques mots justement sur cette opération, qui est à la fois une opération de mise en valeur du patrimoine culturel
11:15 et puis également une opération de communication.
11:19 - Oui, alors bon, comme vous l'avez dit au début d'émission,
11:22 le prince héritier est essentiellement venu pour obtenir, effectivement,
11:27 pour défendre la candidature à l'Expo universelle 2030
11:33 et donc mettre en avant tout ce qui s'est produit dans le royaume.
11:40 Alors Al-Ula, la France, constitue l'un des partenaires essentiels
11:45 pour la mise en valeur de ce site archéologique nabatéen, etc.
11:51 Il y a une équipe de recherche du CNRS qui travaille depuis une vingtaine d'années sur ce projet.
11:58 C'est vrai que c'est Mohamed Ben Salmane qui a un peu décomplexé
12:03 et qui a réellement ouvert ce site pré-islamique qui était auparavant complètement proscrit
12:10 et interdit par, justement, l'établissement religieux qui avait à l'époque donc
12:18 l'emprise sur ces questions culturelles, sociales, etc.
12:22 Donc il y a cette volonté de mettre en avant le patrimoine, l'histoire longue de l'Arabie saoudite
12:30 parce que vous avez aussi une réinvention du récit national saoudien sous Mohamed Ben Salmane
12:41 avec une volonté de créer un nouveau nationalisme saoudien
12:48 alors que le nationalisme en tant que tel était totalement proscrit par l'idéologie islamique wahhabite.
12:56 Mais ce que l'on comprend mal, en fait, c'est la conjugaison à la fois de tous ces efforts pour normaliser le royaume
13:03 et un certain nombre de crimes qui ont été perpétrés par Mohamed Ben Salmane.
13:09 Par exemple l'assassinat du journaliste Khashoggi qui a été fait dans des circonstances particulièrement atroces
13:16 mais à l'émite, peu importe l'atrocité dès lors qu'il y a meurtre, pourquoi avoir perpétré ce meurtre
13:24 alors que Mohamed Ben Salmane cherchait justement à gagner en respectabilité ?
13:30 La question se pose aussi pour le déclenchement de cette guerre au Yémen qui est un désastre humanitaire terrible.
13:39 Donc la réponse que j'oserais émettre c'est due justement au côté novice politique de ce prince.
13:48 Quand il arrive comme ça parachuté au pouvoir avec d'immenses prérogatives,
13:56 il avait une culture politique internationale très faible.
14:01 C'est vrai qu'au début de sa "mandature", à partir surtout de 2016 lorsqu'il expose sa volonté de transformer le royaume par sa vision 2030
14:14 et puis ensuite en 2017 lorsqu'il y a cette révolution de Palais et qu'il s'impose au détriment de son cousin
14:21 qui était l'ancien ministre de l'intérieur et qui était une personnalité très compétente, très politique.
14:28 Lorsqu'il s'impose donc à la tête de l'état saoudien, il est encore si vous voulez sous l'influence de son mentor et voisin émiratis,
14:43 aujourd'hui le président de la Fédération des Émirats Arabes Unis Mohamed Ben Zayed,
14:47 qui lui a une culture politique internationale militaire très importante.
14:53 Il était un peu sous l'influence de son mentor.
15:00 Évidemment son mentor était beaucoup plus discret et beaucoup plus compétent
15:11 et l'a laissé comme ça se surexposer et c'est effectivement à multiplier les erreurs.
15:20 Aujourd'hui il semblerait qu'il ait acquis quand même de l'expérience et qu'il se rende compte justement des contradictions
15:30 et des erreurs stratégiques qu'il a faites avec cette brutalité qu'il le caractérise
15:37 et en même temps cette volonté de changer et de moderniser son pays en offrant tout un panel d'activités culturelles, de divertissements
15:52 et de se mettre la jeunesse de son côté.
15:56 Donc il y a effectivement une double facette du personnage qui est difficilement compréhensible.
16:02 Mais alors sur le volet par exemple de la guerre au Yémen, quelle prise de conscience dans ces conditions ?
16:08 Alors sans l'avouer explicitement, très clairement, le constat est que c'est un échec militaire patent
16:16 et qu'aujourd'hui tout est fait pour s'extraire de cette guerre.
16:21 Il est prêt. Les négociations s'apparentent quasi à une capitulation.
16:28 Les rebelles houthistes ont une emprise sur le pays, aujourd'hui sur le Yémen, qu'ils n'avaient absolument pas au début de la guerre.
16:37 Donc très clairement, aujourd'hui, il veut absolument s'extraire de cette guerre.
16:43 On a vu que par l'entremise de la Chine, il a normalisé ses relations avec l'Iran.
16:48 Et donc il y a une volonté vraiment de désescalade parce qu'il se rend compte que justement sa vision 2030
16:57 ne va absolument pas de pair avec un environnement extrêmement conflictuel.
17:04 Et donc ça, visiblement, il l'a compris.
17:06 Et c'est d'ailleurs ce que dit Emmanuel Macron puisque pour justifier la visite de Mohamed Ben Salman en France,
17:13 le président explique "nous soutenons le royaume car il est en train d'évoluer dans le bon sens.
17:18 Il faut l'aider dans son élan de modernisation et d'ouverture sur le monde".
17:22 Nous allons évoquer cet élan, voir dans quelle mesure celui-ci est réel avec vous, Fatia Daziehini.
17:31 Je rappelle que vous avez publié "L'Arabie Saoudite" en 100 questions aux éditions Talendier.
17:36 Et vous serez rejointe par la journaliste Audrey Lebel qui publie "Nos amis saoudiens" aux éditions Grasset.
17:44 Il est 8h sur France Culture.
17:46 7h, 9h. Les Matins de France Culture.
17:52 Guillaume Erner.
17:53 Mohamed Ben Salman est donc en visite en France avec un déploiement tout azimut dans le domaine du cinéma, du sport,
18:02 des investissements commerciaux pour faire valoir l'influence de l'Arabie Saoudite en France, en Europe et dans le monde.
18:11 Nous sommes en compagnie de Fatia Daziehini. Vous êtes chercheuse à l'Institut de Recherche Stratégique de l'École Militaire.
18:18 Vous avez notamment publié "L'Arabie Saoudite" en 100 questions aux éditions Talendier.
18:23 Et nous recevons la journaliste Audrey Lebel. Bonjour.
18:27 Bonjour.
18:28 Vous avez publié "Nos amis saoudiens" aux éditions Grasset, Audrey Lebel.
18:32 Et vous insistez beaucoup sur la manière dont l'Arabie Saoudite utilise des communicants, fait du lobbying en France pour asseoir son pouvoir.
18:42 Qu'est-ce que ça veut dire ? Comment cela se traduit-il ?
18:44 Cela se traduit par des agences de communication telles qu'Avass ou Publicis qui ont contribué à redorer l'image du royaume,
18:53 qui ont passé des contrats avec l'Arabie Saoudite pour, d'une part, permettre à MBS de retrouver une respectabilité sur la scène internationale,
19:05 et pour conquérir un peu les esprits.
19:09 Au cours de cette enquête, j'ai rencontré pas mal de personnes qui m'ont dit, dont François Léotard, ancien ministre de la Défense,
19:17 qu'aujourd'hui, les guerres sont aussi des guerres d'influence sur les esprits.
19:23 Et cela, l'Arabie Saoudite l'a très bien compris.
19:26 Donc, en procurant les services de communicants tels qu'Avass et Publicis, ce ne sont pas les seuls.
19:34 Il y a d'autres agences de communication en France qui ont passé des contrats.
19:39 Richard Rathias est associé, semble-t-il, si j'en crois.
19:42 Richard Rathias qui a organisé ce qui se veut l'équivalent du Forum de Davos, c'est le Forum du Désert,
19:48 où en 2017, MBS a présenté sa vision 2030 devant tout un parterre de puissants, devant toute la finance internationale.
19:59 C'est effectivement un Français qui a permis cet événement.
20:04 Et en France, ça se traduit aussi beaucoup dans le domaine de la culture, à l'Institut du Monde Arabe.
20:10 Il y a eu notamment en 2019, quasiment un an jour pour jour après l'assassinat de Jamal Rashogi,
20:16 ce journaliste qui a été tué et découpé en morceaux dans le consulat d'Arabie Saoudite à Istanbul,
20:24 à Lima, une exposition consacrée à Al-Houla, qui est un site touristique qui est présenté comme la petite sœur de Petra,
20:33 et qui est magnifique, il y a des richesses archéologiques.
20:36 Et donc, à l'Institut du Monde Arabe, une exposition entièrement financée par l'Arabie Saoudite s'est ouverte
20:43 pour présenter les richesses de ce lieu touristique.
20:48 Et alors, ça se poursuit dans le domaine du football, c'est particulièrement éclatant. Comment ça se traduit là aussi ?
20:55 On l'a vu avec Karim Benzema, qui vient de signer un contrat de 200 millions d'euros pour rejoindre un club saoudien.
21:02 Ça se traduit effectivement dans le domaine du sport. Déjà en 2020, l'Arabie Saoudite avait décroché le Paris-Dakar,
21:09 ce qui est une vitrine énorme pour l'Arabie Saoudite. Ce type d'événements internationaux, ce type d'événements sportifs,
21:18 c'est vraiment une grande possibilité pour l'Arabie Saoudite de montrer ce qu'elle veut montrer,
21:26 même si tout ça, ça reste quand même beaucoup de la poudre aux yeux.
21:31 Et c'est utilisé de manière politique. Le directeur de la course, David Castera, à l'époque disait "moi je ne fais pas de politique",
21:39 alors qu'il était interrogé sur le bien fondé de donner à l'Arabie Saoudite le Paris-Dakar.
21:45 Sauf que c'est politique, c'est fondamentalement politique.
21:48 Le cinéma ?
21:49 Le cinéma, il y a eu...
21:51 On ne va pas faire la liste et l'inventaire à l'après-verre, mais le cinéma, c'est déjà presque plus étonnant, j'ai envie de dire.
21:59 C'est inhabituel en tout cas.
22:01 Ça fait partie de la stratégie de MBS de montrer que le royaume s'ouvre, que le royaume se modernise,
22:07 ce qui est un fait, ce qui est une réalité, mais il faut quand même encore une fois le nuancer.
22:12 Donc ça se traduit dans le cinéma par notamment l'organisation du festival international du film Aceda,
22:20 où on a pu compter sur la présence de personnalités françaises non négligeables,
22:25 telles que Thierry Frémaux, le délégué général du festival de Cannes,
22:29 telle que Catherine Deneuve, qui est l'égérie du cinéma français,
22:33 telle que Jacques Lang, qui est l'ancien ministre de la Culture et l'actuel directeur de Lima.
22:39 Il y a des formations aussi qui ont été réalisées en France auprès d'étudiants saoudiens.
22:45 Notamment, il y a eu des partenariats entre des écoles françaises et saoudiennes.
22:50 Et alors on peut montrer n'importe quel film ?
22:52 Non, on ne peut pas montrer n'importe quel film.
22:55 Il faut quand même faire attention à ne pas froisser les croyants, à respecter les mœurs.
23:02 Mais là-dessus, ça a considérablement évolué.
23:06 Oui, c'est un fait.
23:08 Fatiha Daziehna.
23:09 Oui, enfin, c'est aussi la nouvelle industrie du cinéma arabe.
23:13 Aujourd'hui, l'Arabie saoudite, où tous les films se produisent par les financements saoudiens.
23:18 Et c'est un petit peu en train de voler la place à l'Égypte.
23:23 Donc il y a effectivement cet aspect international, comme vous l'avez très bien dit.
23:29 Mais il y a cette volonté de s'inscrire quand même dans le paysage culturel arabe.
23:34 C'est très important et c'est vrai que de ce point de vue-là, c'est étonnant.
23:39 C'est devenu en deux, trois ans, un festival de référence.
23:43 Oui, parce que moi, ce que j'ai appris au cours de cette enquête, c'est que l'Arabie saoudite n'avait jamais été au Festival de Cannes avant 2018.
23:52 La première fois qu'il y a un pavillon saoudien, c'est en 2018.
23:55 Et pourtant, cette année, l'édition 2023, le film qui fait l'ouverture du Festival de Cannes, celui de Maïwenn, est en partie financé par l'Arabie saoudite.
24:04 Donc on voit l'évolution et la stratégie qui fonctionnent de ce point de vue-là.
24:09 L'Arabie saoudite va financer beaucoup de films ?
24:12 L'Arabie saoudite est certainement vouée à financer beaucoup de films.
24:19 Ça fait partie, encore une fois, de sa stratégie de soft power pour faire oublier les 400 000 morts de la guerre au Yémen,
24:26 pour faire oublier les manquements aux droits de l'homme.
24:29 C'est un levier extrêmement important pour MBS.
24:32 Je vais vous poser justement une question candide.
24:34 Est-ce que ça fonctionne ?
24:35 Est-ce qu'on peut, au travers de manifestations sportives, d'achats de joueurs de foot ou de financements de films,
24:44 faire oublier les pages extrêmement noires de la politique menée par le Royaume saoudien ?
24:51 Alors, oui et non, puisqu'on rappelle à chaque fois qu'il y a tous ces manquements, encore une fois, aux droits de l'homme,
24:58 les exécutions de condamnés à mort, le nombre d'opposants politiques qui a drastiquement augmenté depuis l'arrivée de MBS,
25:05 l'assassinat, évidemment, de Jamal Rashougi.
25:08 Là où ça fonctionne, c'est que quand même, et c'est notamment pour ça aussi que l'Arabie saoudite est en France, à Paris, cette semaine.
25:16 Elle vient pour faire du lobbyisme, pour décrocher l'organisation de l'exposition universelle de 2030.
25:22 À ce titre, d'ailleurs, Jack Lang a soutenu, soutient cette candidature en ayant expliqué que c'était une grande portée symbolique et emblématique,
25:32 un choix intelligent et visionnaire.
25:34 Et ce mot "visionnaire", ça fait vraiment partie des éléments de langage des communicants qui nous ont présenté MBS comme un prince héritier visionnaire, révolutionnaire,
25:45 alors qu'à l'époque, dans le même temps, il avait, au Ritz-Carlton, emprisonné les plus hauts dignitaires saoudiens, ce qu'on n'avait jamais vu.
25:54 - Il faut nous rappeler de cette opération "main propre", je mets ces mots, entre guillemets, qui a été menée en 2017.
26:01 Une opération tout à fait étonnante. Elle consistait en quoi ? En quelques mots ?
26:05 - Elle a enfermé pendant plusieurs mois, au Ritz-Carlton.
26:09 - C'était une prison dorée.
26:11 - Oui, clairement, où il y aurait eu même des violences, où certains prisonniers auraient été battus.
26:20 Il y avait des princes qui étaient emprisonnés, il y avait des ministres qui étaient emprisonnés.
26:26 Je crois qu'il y avait eu à peu près 200 hauts dignitaires. On n'avait jamais vu ça en Arabie saoudite.
26:32 - Fatiha Adazi-Eni.
26:34 - Eni, pardon. C'était une volonté, surtout pour Mohamed Ben Salman, de se légitimer.
26:42 Et de mettre au pas l'élite politique qui, jusqu'à présent, gérait le pouvoir sous le roi Abdallah.
26:53 C'est clairement une marque punitive et une volonté de dire "désormais je suis le maître des horloges".
27:03 Et donc mettre au pas toute cette oligarchie marchande, des princes très capés.
27:10 Et c'est comme ça qu'il prend le pouvoir et qu'il dit "vous voyez de quoi je suis capable auprès de mes pères".
27:21 Donc c'est très dissuasif par rapport à toute véléité de contestation.
27:26 Donc ça a été une volonté calculée de s'imposer parce qu'il était, à cette époque, extrêmement contesté.
27:36 - Et oui, ça veut dire qu'il ne s'imposait pas naturellement.
27:38 - Non, du tout. Personne n'imaginait que Mohamed Ben Salman puisse devenir un jour le prince héritier.
27:44 - Mais alors pourquoi son père, qui aujourd'hui règne sur le royaume, l'a-t-il laissé faire ?
27:53 - Il règne de moins en moins. C'est vrai, c'est une personne assez âgée et il a très clairement délégué le pouvoir à son fils
28:03 qui est devenu d'ailleurs au mois de septembre dernier premier ministre du royaume.
28:07 Alors que le premier ministre en titre est toujours le roi en fonction.
28:11 Comme je le disais au début de l'émission, c'est deux tempéraments extrêmement proches.
28:18 Le roi Salman était réputé être le prince de sa génération le plus autoritaire.
28:24 C'était un peu l'arbitre, le pivot de la famille. Celui qui avait même instauré des prisons princières, si je puis me permettre.
28:32 Et c'était celui qui avait le contrôle sur la famille.
28:36 Et il estime que ce fils-là est le plus capable, effectivement, de transformer fondamentalement le royaume
28:45 comme lui avait transformé la capitale Riyad en mégalopole aujourd'hui.
28:49 - Ce qui est vrai, c'est que Mohamed Ben Salman, indépendamment des problèmes qu'il a rencontrés dans sa communication
28:59 et dans son image internationale, a réussi à revenir au centre du jeu pour un certain nombre de pays,
29:05 à conclure des accords notamment avec la Turquie, avec le Qatar. C'était particulièrement spectaculaire.
29:11 Quelques mots à ce sujet. Comment a-t-il réussi justement à conclure ces accords ? Dans quel but ?
29:18 - Il a très clairement engagé un processus de désescalade régionale à partir du sommet d'Al-Aula,
29:25 la réconciliation avec le Qatar en janvier 2021.
29:28 - Oui, parce qu'il faut rappeler à quel point le Qatar et l'Arabie Saoudite...
29:33 Il y avait le quartet arabe, cet ensemble de quatre pays arabes qui avaient imposé un dictat au Qatar
29:44 parce qu'ils ne partageaient pas sa politique régionale.
29:47 Donc un embargo unilatéral a été décrété le 6 juin 2017, qui a duré trois ans et demi.
29:53 Et c'est l'Arabie Saoudite qui a décidé d'y mettre fin en imposant ce sommet de la réconciliation,
30:00 qui a pris du temps quand même parce que les Émirats arabes unis viennent de rétablir
30:04 leurs relations diplomatiques avec le Qatar. Mais vraiment, ça a été annoncé hier.
30:08 Donc, échange d'ambassadeurs, ça s'est normalisé petit à petit.
30:12 Mais cette prise de conscience du prince héritier, elle vient aussi avec l'arrivée de Joe Biden,
30:20 qui avait, lors de sa campagne électorale, qualifié le royaume de royaume pariat
30:27 à cause justement de l'assassinat du journaliste saoudien qui travaillait au Washington Post.
30:33 Donc ça, c'est quelque chose qui a vraiment contribué à fortement détériorer les relations
30:38 entre l'Arabie Saoudite et les États-Unis. Et donc, l'Arabie Saoudite, comme son voisin émirati,
30:44 ont considéré que les États-Unis n'étaient plus l'allié fiable qu'il était
30:51 comme garant de la sécurité de cette région, en ne répondant pas aux provocations
30:56 et aux attaques fomentées par l'Iran, même si l'Iran n'a jamais reconnu qu'elle était à l'origine
31:03 des frappes sur les installations pétrolières en Arabie en 2019 et sur des tankeurs au large des côtes émiraties.
31:12 Et puis, bien sûr, dans l'aide logistique ou routiste qui...
31:17 - Des rebelles routistes de ceux que vous, d'ailleurs, qualifiez de rebelles au Yémen,
31:22 qui menaient la guerre, ou dont l'Arabie Saoudite avait choisi...
31:27 - Et qui attaquaient le territoire saoudien régulièrement entre 2017 et jusqu'à très récemment.
31:34 Donc, voilà pour le constat. Et depuis, effectivement, les Saoudiens comme les Émiratis
31:40 ont multiplié les partenariats stratégiques avec particulièrement les grandes puissances asiatiques,
31:47 bien sûr la Chine qui est devenue le premier partenaire commercial dans la région depuis 2015,
31:52 et d'autres puissances asiatiques comme l'Indonésie, l'Inde, bien sûr,
31:57 des puissances africaines, l'Afrique du Sud, l'Amérique latine, et le rapprochement avec Israël.
32:04 - Qui là aussi était particulièrement inattendu.
32:08 - Il était inattendu, sauf qu'effectivement la convergence de vues pour contenir l'Iran
32:13 faisait qu'ils se sont rapprochés essentiellement sur cette question.
32:17 Les Émirats arabes unis et le Bahreïn ont signé les accords Abraham.
32:21 L'Arabie Saoudite n'a pas normalisé ses relations avec Israël,
32:26 mais a des relations commerciales, des agences de renseignement, c'est un secret de police chinel.
32:34 Donc ils se sont considérablement rapprochés.
32:37 Aujourd'hui l'Arabie Saoudite fait office de médiateur, par exemple, dans cette tragédie au Soudan.
32:47 Donc il y a très clairement un changement radical.
32:51 - Ce qui veut dire que finalement notre regard d'Européens, de Français, sur l'Arabie Saoudite,
32:57 qui est plutôt critique, n'est peut-être pas celui qui prévaut dans d'autres pays ou dans d'autres continents.
33:05 - Les États-Unis ont été quand même beaucoup plus loin dans les critiques.
33:10 - Je pensais pas du tout aux États-Unis, je pensais notamment à ce qui se passe en Asie,
33:16 à ce qui s'est passé par exemple pendant la Coupe du monde du Qatar,
33:20 où on a pu se rendre compte que ce qui nous passait pour une évidence en France,
33:24 notamment le fait de dénoncer la manière dont les droits humains étaient bafoués au Qatar,
33:29 n'était pas du tout quelque chose qui prévalait ailleurs, en Asie, dans le monde arabe.
33:36 - Non, c'est vrai que l'essentiel des observations dans le monde,
33:43 c'était la très très bonne préparation de ce mondial, la parfaite organisation, l'ambiance bon enfant,
33:51 et puis surtout il s'est avéré dans les stades,
33:55 notamment à chaque fois que l'équipe du Maroc, qui a été quand même très loin dans cette compétition,
34:00 la question palestinienne était loin d'avoir été oubliée par la population arabe.
34:07 Et que là, pour le coup, le Qatar, évidemment qui faisait une opération marketing considérable,
34:15 avait une petite revanche à prendre par rapport aux voisins, notamment Emiratis,
34:19 qui avaient normalisé leurs relations avec Israël.
34:22 Donc c'était quand même aussi un pied de nez entre voisins.
34:27 - Audrey Le Bel, dès lors, la phrase d'Emmanuel Macron que j'ai citée tout à l'heure,
34:31 "Nous soutenons le royaume car il est en train d'évoluer dans le bon sens,
34:35 il faut l'aider dans son élan de modernisation et d'ouverture sur le monde",
34:39 comment l'interpréter ? On en voit les conséquences avec cette visite,
34:44 mais c'est peut-être le signe que cette politique de communication a en partie réussi ?
34:50 - C'est le signe que ça a en partie réussi, oui.
34:53 Et d'ailleurs, ce qu'il faut préciser, c'est que certaines personnes qui travaillaient
34:59 chez Havas ou chez Publicis, donc ces communicants, ont ensuite été
35:04 les hommes de l'ombre de l'Elysée et de Matignon.
35:08 Parmi les communicants proches, notamment d'Emmanuel Macron ou de Jean Castex,
35:16 quand il était Premier ministre, il y a une femme, c'était l'ancienne
35:20 directrice générale d'Havas, Mayada Boulos, qui, avant d'arriver à Matignon,
35:26 s'occupait de la communication du Royaume saoudien.
35:30 Elle avait notamment organisé au musée des arts décoratifs,
35:34 lors de la venue de MBS au printemps 2018, une soirée en son honneur
35:41 et une soirée pour fêter les contrats qui avaient été passés dans le domaine de la culture.
35:47 Emmanuel Macron, ça a été le premier chef d'État occidental à se rendre
35:51 en Arabie Saoudite en décembre 2021.
35:54 MBS, quand il est venu à Paris en juillet 2022, c'était le premier pays aussi
35:59 en Occident où il se rendait depuis l'assassinat de Jamal Khashoggi.
36:02 Donc Macron a réhabilité MBS.
36:04 Et tout ça, ça s'est fait au détriment des citoyens français.
36:07 Parce que tout ce que je révèle dans le livre, c'est que...
36:11 - Nos amis saoudiens.
36:13 - Nos amis saoudiens. Il y a un exemple précis.
36:15 Actuellement, la quasi-totalité des salariés français de l'ambassade d'Arabie Saoudite
36:20 est comme pris en otage. Elle ne peut pas partir à la retraite
36:25 parce que le Royaume saoudien n'a pas versé pendant 13 ans ses cotisations sociales,
36:30 ce qui est pourtant une obligation.
36:32 L'Ursaf a été mis au courant de ces faits.
36:36 Aujourd'hui, les salariés qui ont tous à peu près 80 ans
36:40 ne peuvent pas partir à la retraite parce qu'il y aurait un tel manque à gagner que...
36:44 - Pourtant, c'est à priori un royaume solvable.
36:47 - C'est à priori un royaume solvable.
36:49 Mais elle a en France, en tout cas, pas mal d'ardoises,
36:53 notamment à la PHP et dans d'autres secteurs.
36:56 Le Royaume saoudien, ce n'est pas un très bon payeur, malgré ce qu'on croit.
37:00 - Leur solvabilité.
37:01 - Le propos d'Emmanuel Macron, c'est bien souvent ce que l'on dit
37:05 lorsqu'on est face à un pays autoritaire ou une dictature.
37:08 On dit que le fait de le couper du monde va freiner le processus de modernisation et d'ouverture.
37:15 Qu'est-ce que vous en pensez, Audrey Lebel ?
37:17 C'est strictement de la com' où il y a quand même des choses...
37:20 Tout est interprétable en signe de politique de communication,
37:25 mais il y a peut-être aussi des faits.
37:28 - Les Français ont toujours...
37:31 Parce que les privilèges dont bénéficie l'Arabie saoudite,
37:35 les passe-droits dont ils bénéficient en France,
37:38 à la décharge d'Emmanuel Macron, ça ne date pas seulement d'Emmanuel Macron.
37:41 C'était déjà le cas sous François Hollande, sous Nicolas Sarkozy,
37:45 et même sous François Mitterrand.
37:48 Les Français, de ce que certains de mes interlocuteurs m'ont expliqué,
37:54 c'est qu'à partir de l'arrivée de Barack Obama à Washington,
37:58 où les relations se tendent entre Riad et Washington,
38:02 les Français se disent "on va pouvoir être les outsiders des Américains,
38:05 on va essayer de se placer, c'est une occasion pour nous
38:08 d'essayer de décrocher des contrats dans d'autres domaines que l'armement,
38:12 d'essayer d'être vraiment un partenaire stratégique commercial extrêmement important".
38:16 Sauf que tout ça, et à chaque fois c'est encore une fois, c'est un peu des mirages,
38:22 on fait espérer des contrats mirobolants à la France.
38:29 Mais le contrat Mixa, par exemple, dans les années 2000,
38:34 qui consistait à la surveillance des frontières du Royaume Saoudien,
38:38 Nicolas Sarkozy nous disait que ça allait rapporter 7 milliards à la France,
38:41 il n'a jamais eu lieu, ça ne s'est jamais concrétisé.
38:44 On n'a jamais rien réussi à leur vendre, Fatiha Dazieni ?
38:46 Faut pas pousser quand même.
38:48 Non, c'est vrai que la France, pour l'Arabie Saoudite ou les Emirats Arabes Unis...
38:53 A priori en matière d'armement, ils achètent...
38:55 Ça se porte bien.
38:56 Non, mais la France a toujours été un petit peu cette carte à jouer
38:59 pour diversifier les relations au sein même de l'Occident en fait.
39:04 Mais sinon, tout se passe très clairement en Asie, pour les pays du Golfe.
39:09 Le pivot vers l'Asie a été fait il y a 10 ans.
39:14 Cela ne veut pas dire bien sûr que l'Occident ne compte plus.
39:19 Non, la France délire.
39:21 Mais aujourd'hui, il y a très clairement cette réflexion qui est faite
39:26 d'une perte de vitesse quand même du "camp occidental",
39:34 sachant que dans le Golfe, on fait le distinguo entre les Etats-Unis et les pays européens.
39:41 C'est pour ça que la France bénéficie un petit peu de cette sympathie auprès des pays du Golfe.
39:50 Un mot de conclusion, Audrey Lebel ?
39:53 Moi, je serais plus critique à l'égard de ce que rapportent à la France, à l'État français
40:01 et aux contribuables les contrats avec l'Arabie Saoudite.
40:04 Parce que certes, dans le domaine de l'armement, l'Arabie Saoudite, c'est le premier client de la France.
40:10 C'est surtout dans le domaine maritime qu'on a vendu et qu'on vend beaucoup d'armements.
40:15 Pas seulement des armements, mais aussi des munitions, aussi des formations.
40:19 On forme sur le territoire français des soldats saoudiens.
40:23 On a formé notamment à Saint-Cyr le général Ahmed Al-Assiri,
40:28 qui était le chef de l'opération Tempête Décisive lancée au Yémen en 2015
40:33 et qui s'est révélé être soupçonné d'être aussi le chef du commando qui a assassiné Jamal Rashougi.
40:39 Comme je l'ai dit, ça se fait au détriment des citoyens français.
40:43 Et hormis le domaine de l'armement, il n'y a pas tellement de grands contrats qui véritablement rapportent à l'État français.
40:54 Il se positionne dans la transition énergétique, la culture, le tourisme. Il y a d'autres niches aussi.
41:03 Merci Fathia Dazi-Eni. Je renvoie à l'Arabie saoudite en 100 questions.
41:09 Le livre que vous avez publié aux éditions Talendier, Audrey Lebel, nos amis saoudiens, aux éditions Grasset.
41:16 Dans quelques secondes, le point sur l'actualité.

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