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00:00 Bonjour à tous, pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis Benoît des éditions Philippe
00:05 Rey. Philippe Rey s'excuse de ne pas pouvoir être là ce matin. Je vais essayer de le
00:09 remplacer dignement et de vous présenter notre très belle rentrée littéraire. Comme
00:16 tous les ans, on se concentre sur deux titres, un roman étranger, un roman français, avec
00:23 une rentrée vraiment dans l'ADN de la maison. Un premier roman écrit par Éric Chacour,
00:29 à côté de moi, "Ce que j'ai c'est eux, toi", et une autrice plus confirmée, que
00:34 vous connaissez très bien, Joyce Maynard, et son douzième roman, "L'hôtel des oiseaux".
00:41 Je vais commencer avec quelques mots sur Éric et son roman. Je sais que c'est toujours
00:46 dérangeant quand quelqu'un parle de soi à côté de soi. Éric a écrit un premier
00:52 roman, "Ce que j'ai c'est eux, toi", qui a été publié aux éditions Alto au Québec
00:57 en janvier. C'est un roman que nous on a remarqué très vite par l'abondance des
01:02 coups de cœur libraires dessus. C'est un roman qui a eu un très très beau succès,
01:07 qui continue d'avoir un très beau succès, et on est très fiers de pouvoir le publier
01:12 dans cette rentrée. Est-ce que tu veux que j'en dise un peu plus ou je te laisse la
01:17 parole ? Vas-y, vas-y, tu en parles mieux pour moi. Premier roman québécois, mais
01:21 surtout un grand roman égyptien, "L'action se passe au Caire", du début des années
01:26 60 au début des années 2000. On va suivre un personnage principal, Tarek, qui a une
01:32 vie sur des rails, une vie bien rangée, et c'est un grand roman du dévoilement successif.
01:40 Éric, je te laisserai en dire un peu plus. Vous verrez, dès les premières pages, on
01:45 est très intrigués parce que c'est un narrateur qui s'adresse au personnage, qui
01:49 s'adresse à Tarek. C'est un roman à la deuxième personne. C'est très troublant,
01:53 très déroutant, très intriguant surtout. Et au fur et à mesure des pages, on va se
01:57 demander "mais qui est ce mystérieux narrateur ?" et c'est là où on peut vraiment parler
02:03 d'une prouesse littéraire, d'écriture. On va le découvrir qu'à la moitié du roman
02:09 et on va avoir envie de relire toute la première partie. Et d'autres dévoilements vont arriver.
02:16 C'est un roman qui nous tient en haleine. C'est un roman qui nous a marqué surtout
02:20 par la subtilité, la délicatesse de l'écriture. C'est un premier roman, mais ça pourrait
02:25 être un cinquième, un dixième roman tellement il est abouti. Je te laisse en dire un peu
02:31 plus. Alors bonjour à tous, ça me fait vraiment plaisir d'être avec vous. La dernière fois,
02:37 Philippe m'avait présenté en disant que j'étais un auteur québécois, ce qui est
02:40 factuellement vrai. Alors ça a créé des scènes de grande déception. Les gens n'ont
02:44 pas entendu l'accent québécois. Certains ont rendu leur livre à la fin, ont dit "falsification".
02:49 J'ai eu passion. Je suis vraiment content de vous rencontrer tous. Un premier roman,
02:56 c'est une arrivée en gare dans une gare étrangère où personne vous attend. Puis là, la gare
03:01 est pleine et ça fait un plaisir fou. Benoît l'a dit, c'est vraiment un roman qui a été
03:05 fait par les libraires, les libraires et les diffuseurs. J'ai plein d'anecdotes dessus,
03:10 puis ça me fera plaisir d'en parler avec vous à l'heure du café. Un roman qui a été
03:15 porté par beaucoup d'amour. Alors l'histoire, je ne vais pas la refaire. Benoît l'a décrite
03:21 de manière assez extensive. Quelques mots peut-être sur l'intention. Moi, j'avais
03:25 envie de raconter l'Egypte de mes parents. Mes deux parents sont nés en Egypte. Ma mère
03:28 Alexandrie, mon père Okair, ils se sont rencontrés à Montréal où je suis né. Une Egypte un
03:34 peu différente de celle que vous avez peut-être visitée en tant que touriste parce que c'est
03:38 une Egypte qui n'existe presque plus. Celle d'une communauté, une petite communauté
03:42 de Levantin, des Syriens libanais d'origine qui parlaient souvent français avant de parler
03:48 arabe, qui étaient plutôt chrétiens, assez occidentaux dans l'âme. Une communauté en
03:53 déclin et je voulais ce déclin là comme toile de fond pour une histoire d'amour et
03:58 puis une histoire d'exil, un exil à Montréal d'un narrateur qui, à un moment, je pense
04:04 que tu as dit le bon terme, Benoît a déraillé. Il y a eu un déraillement. Il était sur
04:08 des rails. Il faisait le même métier que son père. Il avait pour amis les enfants
04:12 des amis de ses parents. Il avait la même place dans la communauté que le reste de
04:17 sa famille. Et d'un coup, une étincelle, quelque chose qui fait tout dérailler. J'avais
04:21 envie de raconter ça et j'avais envie de le raconter aussi avec un peu d'humour, avec
04:27 un peu de lumière. Je voulais pas un truc. Parfois j'entends les journalistes qui racontent
04:31 factuellement tout ce qui se passe dans le livre et je me dis mon Dieu, j'irais écrire
04:34 les misérables. C'est vraiment triste. Il se passe que des choses terrifiantes, mais
04:39 non, je pense que c'est un roman. En tout cas, je l'ai voulu comme ça, assez lumineux.
04:43 Voilà ce que je pouvais vous dire sur ce roman. Ce que je sais de toi, une rentrée
04:50 littéraire, c'est toujours un grand bain. On est noyé au milieu de centaines de romans.
04:55 C'est assez étourdissant. Mais encore une fois, c'est pas mal les libraires qui ont
05:00 voulu porter ce livre là et qui l'ont amené à leur lecteur et je leur en suis infiniment
05:05 reconnaissant. Alors ça me fait plaisir de vous rencontrer aujourd'hui et de prolonger
05:09 cet échange tout à l'heure. Merci.
05:16 Quelques mots peut être en complément. Si tu veux bien. On fait jamais assez long.
05:26 Ils sont pas contre à chaque fois. Je me fais remonter les bretelles. Ce qui est passionnant
05:32 aussi dans le roman d'Eric, c'est toute la galerie de personnages, notamment les personnages
05:36 féminins. Je sais pas si tu veux en dire un mot. La grand mère, la soeur.
05:41 Ça, c'est si, si, c'est un point important. Merci. Merci de le ramener. C'est vrai que
05:44 c'est un roman. Il a l'air très masculin comme ça. Il y a un homme sur la couverture.
05:48 Ce que je sais de toi, on découvrira que le jeu et le toit sont tous les deux des hommes
05:54 et tel que je voulais raconter. J'ai parlé principalement de Tarek, qui est un personnage
06:00 masculin. Mais je pense que c'est un roman qui est éminemment féminin. En fait, c'est
06:05 l'histoire d'une absence et c'est l'histoire d'une absence racontée par tous les membres
06:09 de la famille. L'absence d'un mari, l'absence d'un père, l'absence d'un frère, l'absence
06:15 d'un fils. Et je voulais avoir cette galerie de personnages féminins là qui racontait
06:20 tous cette absence qui finit par prendre toute la place. Vous savez, il y a parfois des
06:24 absences qui sont plus envahissantes que la présence de n'importe qui. J'avais envie
06:29 d'avoir ce regard féminin là. Donc peut être que c'est quelque chose que vous noterez
06:33 aussi en le lisant. Et juste en complément, parce que c'est quelque chose d'assez rare,
06:42 au mois de mars, donc très tôt en amont de cette rentrée, on a envoyé le livre à
06:46 tous les éditeurs poche et les cinq principaux éditeurs poche ont voulu en acquérir les
06:52 droits. Il y a eu des enchères qui ont une très belle preuve de confiance qu'ils ont
07:00 pu nous accorder. C'est les éditions Folio qui publieront en poche "Ce que je sais de
07:06 toi". Quand on sait la difficulté d'avoir une place dans ce catalogue magnifique alimenté
07:12 essentiellement par Gallimard, c'est plutôt un bon présage pour l'avenir du livre et
07:19 ça monte à la fois sa qualité littéraire. Vous verrez, l'écriture est incroyable et
07:25 aussi la force narrative de ce texte. Voilà, "Ce que je sais de toi" d'Eric Chacour.
07:33 On passe à notre autre roman, Joyce Maynard, "L'autel des oiseaux". Vous la connaissez,
07:40 vous la connaissez très bien et je voulais commencer surtout par vous remercier. Joyce,
07:46 c'est son douzième texte chez nous, son onzième roman. On a fait plusieurs rentrées littéraires
07:50 avec elle et à chaque fois on voit son public augmenter. C'était une évidence avec "Où
07:56 vivait les gens heureux" qu'on a publié il y a deux ans. L'audience de Joyce en augmentation,
08:04 c'est à vous qu'on la doit. On sait que vous la portez depuis le début et je tenais
08:08 vraiment à vous remercier. C'est une autrice qu'on adore et c'est toujours un plaisir de
08:13 la retrouver et là encore en cette rentrée littéraire. "L'autel des oiseaux" c'est
08:17 un roman assez différent de ce qu'elle a pu écrire jusqu'à maintenant. Il y a quelques
08:22 jours elle me confiait que c'est un roman, c'est le roman avec lequel elle s'est sentie
08:26 le plus libre. En effet, c'est un roman qui se passe en Amérique latine à la différence
08:30 de tous ces autres romans qui se passent aux Etats-Unis. Et en effet, cette liberté, cette
08:35 jouissance de l'écriture, on le sent à chaque page. C'est un grand roman Maynardien dans
08:41 le sens où on va suivre une femme, Amelia, qui a été fortement abîmée par la vie.
08:47 Elle a perdu sa mère enfant. Elle va perdre assez rapidement son mari et son fils. Je
08:53 vous dévoile pas grand chose, c'est les premières pages. La scène d'ouverture, en fait, on
08:57 découvre Amelia sur le Golden Bridge, prête à enjamber la rambarde et à sauter. Et dans
09:04 un dernier sursaut de vie, elle va partir. Elle va monter dans le premier bus qui passe
09:10 à la gare routière à côté. Ce bus va l'emmener dans un pays qu'elle nomme pas. On sait que
09:16 c'est en Amérique latine. On sait que Joyce vit une partie de l'année depuis près de
09:20 30 ans au Guatemala. Donc, on peut deviner que c'est le Guatemala. Et Amelia va échouer
09:27 dans un petit village, la Esperanza, dans un endroit complètement idyllique, au bord
09:33 d'un lac, dans une nature luxuriante, avec un volcan qui surplombe. Et elle va plus particulièrement
09:41 échouer dans un hôtel un peu à l'abandon. Il s'agit de l'hôtel des oiseaux, qui a
09:46 donné son titre, tenu par une femme un peu haute en couleur, Leila, qui est une femme
09:50 qui a eu mille vies, qui est sans âge, qui pourrait avoir 60, 70, 80 ans, qui est elle-même
09:58 abîmée par la vie et qui a de très belles paroles à la fois sur son hôtel. Elle dit
10:03 que ce n'est pas les touristes qui décident de venir dans son hôtel, mais c'est l'hôtel
10:07 qui choisit ses hôtes. Et elle a aussi de très belles paroles sur cet endroit idyllique.
10:15 Elle dit "dans tout paradis, il y a des serpents". Et c'est là où on retrouve toute la finesse
10:19 de Joyce. Elle ne dépeint pas un monde idéal où Amelia va pouvoir se reconstruire. Amelia
10:26 reste heurtée. Il y a des problèmes, il y a des tensions. C'est là où on voit que
10:30 Joyce connaît très bien le lieu. Il y a des tensions avec les villageois, avec les
10:34 gringos, avec les américains qui débarquent. Et c'est un grand roman de la reconstruction.
10:39 Alors je sais que le thème, le terme, pardon, est un peu galvaudé, la résilience. Mais
10:45 si on doit attribuer ce nom à un roman, je pense que c'est celui-ci. Joyce, comme elle
10:51 sait toujours si bien faire, elle prend des personnages avec une immense générosité.
10:55 On voit que même les personnages les plus antipathiques, elle les choix, elle leur donne
11:02 une profondeur, une finesse psychologique. Et là, on a vraiment affaire à un très
11:06 grand roman ménardien. Joyce sera de passage en France début septembre pour accompagner
11:13 la promotion de son livre. On sait que l'accueil sera magnifique. Elle a déjà fait de nombreux
11:19 entretiens avec des journalistes. On aura une très belle presse aussi dès l'apparition.
11:22 C'est le cas d'Eric aussi. Voilà, donc deux très beaux romans pour cette rentrée.
11:29 On compte sur vous comme toujours. On sait que vous êtes au rendez-vous de toute façon.
11:33 Je vous souhaite une bonne lecture, un bel été et bon courage pour la journée.
11:39 [Applaudissements]
11:46 (Applaudissements)