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Transcription
00:00 ambassadrice, ambassadeur, cher Robert.
00:03 Alors, en effet, depuis que le Globesec a ouvert ses portes
00:05 en 2008, de nombreux dirigeants et responsables politiques
00:08 sont venus au Bratislava Forum,
00:11 mais je crois qu'il s'offrira de ma part
00:12 pas encore de président français,
00:15 ce qui était sans doute une incongruité.
00:18 Et ce ne serait plus encore aujourd'hui,
00:19 alors que se joue justement avec la guerre
00:24 lancée par la Russie contre l'Ukraine voisine,
00:28 tout simplement l'avenir de notre continent
00:30 et qu'il se joue aussi pour beaucoup dans cette région.
00:34 Et d'autant que nous sommes aussi à l'orée d'un mois
00:36 qui résume l'ampleur de nos enjeux stratégiques
00:38 avec le sommet de la communauté politique européenne
00:42 demain à Kichinau,
00:44 puis un Conseil européen important
00:46 pour l'avenir de notre Union au mois de juin,
00:48 et enfin le sommet de l'OTAN à Vilnius.
00:50 Et au fond, avec ces échéances, je crois utile de vous livrer
00:54 avec beaucoup de liberté comment je vois les choses
00:57 du moment que vit notre Europe sur le plan géopolitique.
01:02 Voilà presque 20 ans,
01:04 notre Union ouvrait ses portes à la Slovaquie
01:08 et à d'autres pays libérés de l'emprise soviétique.
01:12 Ce n'était alors pas seulement un élargissement de notre Union,
01:14 c'était le retour dans notre famille
01:17 de ceux dont nous avions été trop longtemps séparés.
01:22 Et je ne crois pas en effet qu'il y ait une Europe occidentale
01:24 et une Europe orientale, au fond, une vieille Europe
01:27 et une Europe nouvelle.
01:29 Ce serait perpétuer la frontière artificielle
01:31 imposée pendant des décennies par l'Union soviétique.
01:34 Il n'y a qu'une Europe.
01:38 Une seule trame faite d'histoires mêlées, de diversités,
01:43 mais avec cette volonté d'unité géographique, géopolitique
01:48 et de bâtir, au fond, un récit commun.
01:51 Et je crois que c'est ce qui nous réunit tous,
01:54 c'est d'ailleurs ce projet qui n'écrase pas
01:56 nos identités nationales et nos projets nationaux,
01:59 mais nous permet de les conjuguer dans un récit qui les dépasse.
02:03 Rappelons-nous à cet égard les derniers mots
02:06 du directeur de l'agence de presse de Hongrie
02:07 quelques minutes avant d'être écrasé par l'artillerie russe
02:09 en novembre 1956.
02:12 "Nous mourrons pour la Hongrie et pour l'Europe."
02:16 Le rideau tombait sur notre continent,
02:19 mais c'était bien déjà l'unité de celui-ci qui était en jeu.
02:22 Il annonçait des décennies d'éloignement forcé,
02:24 des décennies d'Occident kidnappé
02:27 pour reprendre la belle formule de Milan Kundera
02:30 que nous pouvons faire nôtre aujourd'hui.
02:33 Et j'ajouterai à vous qui êtes ici aujourd'hui
02:36 que même après l'entrée de la Slovaquie
02:38 et de beaucoup d'autres pays dans l'Union,
02:40 nous n'avons pas toujours assez entendu
02:42 cette voix que vous portiez,
02:44 qui appelait à reconnaître votre histoire
02:47 et vos mémoires douloureuses.
02:51 D'aucuns vous disaient alors que vous perdiez des occasions
02:53 de garder le silence.
02:55 Je crois aussi que nous avons parfois perdu
02:57 des occasions d'écouter.
02:59 (Applaudissements)
03:00 Ce temps...
03:01 (Applaudissements)
03:04 Ce temps est révolu, et aujourd'hui,
03:07 cette voix doit être notre voix à tous.
03:10 Alors mon message est simple.
03:12 Dans ce moment que nous vivons,
03:14 nous ne devons pas laisser l'Occident être kidnappé
03:17 une 2e fois.
03:19 Nous ne laisserons pas l'Europe être kidnappée
03:22 une 2e fois.
03:24 Alors les enjeux sont de taille quand la guerre est à nos frontières.
03:28 Et en effet, l'agression de l'Ukraine, au fond,
03:31 est la dernière manifestation,
03:32 la manifestation extrême, évidemment,
03:37 de fragilité, d'une contestation de notre unité européenne
03:40 qui s'est jouée durant ces 15 dernières années.
03:44 15 années durant lesquelles les tentatives de la Russie
03:48 pour bousculer tout l'édifice de sécurité européenne
03:50 et remodeler, selon ces termes, celui-ci, se sont déployées.
03:54 Les étapes en sont connues,
03:56 le discours de Vladimir Poutine à Munich de 2007,
03:59 l'agression contre la Géorgie de 2008,
04:01 contre l'Ukraine en 2014,
04:03 contre l'Ukraine encore en 2022,
04:05 et la vassalisation rampante de la Biélorussie.
04:09 Au fond, ce que demande la Russie
04:11 et qu'elle avait codifiée dans les projets de traité
04:13 brandi à la veille de son invasion,
04:14 il y a un peu plus d'un an,
04:16 c'est l'affaiblissement et la neutralisation de l'Ukraine
04:19 et, au fond, la mise en vulnérabilité
04:21 de toute une partie de l'Europe
04:23 en contrepartie d'engagements légers
04:26 et largement invérifiables.
04:29 Face à cela, et il faut le reconnaître,
04:32 nous n'avons pas su apporter une réponse européenne
04:35 ni organiser une architecture qui nous prémunisse
04:38 via l'OSCE ou les autres projets envisagés à l'époque
04:42 contre ces agressions.
04:45 Quant à la réponse de l'OTAN, c'était, au fond,
04:47 trop ou trop peu.
04:49 Une perspective offerte à l'Ukraine et la Géorgie
04:52 qui exposaient ces 2 pays à la vindicte russe
04:54 sans pour autant les protéger
04:56 et avec des garanties qui étaient beaucoup trop faibles.
04:59 Et nous avons manqué de cohérence en tant qu'Européens.
05:03 Nous avons apporté des garanties insuffisantes
05:05 à certains pays qui étaient à nos frontières.
05:08 Nous n'avons pas engagé la Russie
05:10 dans un dialogue de sécurité pour nous-mêmes.
05:13 Et au fond, nous avons délégué ce dialogue à l'OTAN,
05:16 ce qui n'était pas sans doute le meilleur moyen d'y arriver.
05:20 Et dans le même temps, nous ne sommes pas sortis
05:22 des dépendances que nous avons plutôt continuées
05:24 de renforcer à l'égard de la Russie,
05:25 en particulier en matière énergétique.
05:28 Et donc nous devons être lucides sur nous-mêmes.
05:29 Nous n'avons pas été cohérents dans notre approche.
05:34 En venant ici, je sais qu'elle a été l'expérience
05:36 de nombreux d'entre vous pendant la période soviétique
05:38 et je sais pourquoi, avec raison,
05:39 chacun est déterminé à ce que cela ne se reproduise pas.
05:43 Et c'est aussi mon engagement.
05:45 Tout pays a le droit de choisir ses alliances
05:48 et ce n'est jamais une menace pour les voisins
05:50 que d'opter pour la liberté, la démocratie, la transparence.
05:54 Comme j'ai pu le vérifier avec force
05:55 avec les grands partenaires du G7 au Japon il y a quelques jours,
05:59 le fondement de la Charte des Nations unies
06:01 demeure l'égalité souveraine
06:03 et il n'a jamais été la souveraineté limitée.
06:06 Et c'est à ce titre aussi que ce qui se joue en Ukraine aujourd'hui
06:10 n'est pas simplement une question européenne,
06:13 mais bien une question pour l'ordre international
06:15 et la paix partout dans le monde.
06:18 Mais ce que montre la guerre en Ukraine,
06:20 ce n'est pas seulement que ses prétentions
06:22 à mettre une partie de l'Europe sous tutelle
06:24 sont illégales et inacceptables,
06:26 c'est aussi que, vu du raisonnement froid
06:28 des rapports de force,
06:31 elles sont désormais irréalistes.
06:34 A Kiev, à Kharkiv, à Kherson,
06:38 de vastes armées russes ont reculé
06:40 avant de se consumer ensuite à Barmouth
06:42 et ailleurs pour dégains infimes.
06:45 La guerre est loin d'être finie,
06:46 mais je crois pouvoir dire aujourd'hui qu'une chose est claire,
06:50 l'Ukraine ne sera pas conquise.
06:53 Et d'ores et déjà, ce qui était, il y a un peu plus d'un an,
06:56 une opération spéciale,
06:58 s'est soldé par un échec géopolitique à date,
07:02 qui s'est traduit par l'adhésion de la Finlande
07:04 et, j'espère, bientôt de la Suède à l'OTAN,
07:05 et donc une fermeture de l'accès à la Baltique pour la Russie,
07:10 mais aussi par la défiance aggravée de tous les voisins,
07:14 par, également, une délégitimation de la Russie
07:18 dans le concert des nations,
07:21 avec le non-respect de la charte.
07:23 La situation sur le terrain ne donne aucune crédibilité à la Russie
07:26 pour exiger par la menace ce qu'aucun droit déjà ne justifiait.
07:30 Et donc il n'y a pas de place en Europe
07:32 pour un fantasme impérial.
07:34 C'est très important de le reconnaître,
07:36 et cela conditionne, à mes yeux,
07:37 toute organisation future de la paix.
07:41 Alors, la manière dont nous sommes arrivés là
07:43 dit plusieurs choses de nous.
07:46 Il faut les retenir pour essayer de bâtir l'avenir.
07:49 La 1re, c'est la force de notre alliance.
07:52 Dès les 1ers jours du conflit,
07:53 l'OTAN a assuré la sécurité de ses frontières
07:55 avec beaucoup d'efficacité.
07:57 L'article 5 a joué tout son rôle,
07:59 et je suis convaincu qu'il tient aussi la Russie en respect.
08:02 Et nous devons, à cet égard, être reconnaissants
08:04 à nos alliés américains qui ont fourni une part majeure
08:07 du soutien en équipement et en renseignement à l'Ukraine.
08:10 J'avais, en décembre 2019,
08:12 une phrase sévère à l'égard de l'OTAN,
08:15 soulignant à l'époque, je vous le rappelle,
08:17 les divisions qui existaient en son sein
08:20 entre la Turquie et plusieurs autres puissances.
08:22 En parlant de mort cérébrale,
08:24 je pourrais dire aujourd'hui que Vladimir Poutine
08:27 l'a réveillé avec le pire des électrochocs.
08:30 La 2e chose qui me frappe,
08:32 c'est le rôle exemplaire aussi de l'Union européenne.
08:37 Nous avons été unis, rapides et clairs.
08:40 Et je crois que très peu, à commencer par la Russie,
08:42 s'attendait à ce que l'Union européenne puisse réagir ainsi.
08:46 67 milliards d'euros d'aide au total,
08:49 dont 14 milliards d'euros d'aide militaire,
08:52 des sanctions, de l'aide d'urgence,
08:53 l'accueil de millions de réfugiés,
08:56 une réorganisation complète et profonde
08:58 en quelques mois de notre organisation énergétique
09:00 qui était très dépendante de la Russie.
09:03 Et donc ça a été une démonstration d'unité,
09:06 de clarification stratégique sous la contrainte,
09:09 elle aurait dû être faite avant, mais on doit s'en satisfaire,
09:11 et aussi l'adoption d'une clarté de doctrine
09:14 dont je me félicite.
09:16 L'Europe a choisi l'autonomie stratégique
09:18 et la souveraineté européenne.
09:20 Et l'agenda de Versailles que nous définissons dès mars 2022,
09:24 au fond, est bien loin de ce que certains qualifiaient
09:26 il y a 5 ans de lubie française
09:28 lorsqu'à la Sorbonne, je parlais de souveraineté européenne.
09:31 Et donc, je crois que la 2e chose
09:34 aux côtés de la force de l'Alliance
09:35 que nous devons retenir de ces derniers mois,
09:38 ça a été l'unité, la clarification idéologique
09:40 de notre Union européenne,
09:42 et aussi sa clarté en termes de soutien
09:44 militaire, humanitaire, économique à l'égard de l'Ukraine.
09:47 La France a pleinement joué son rôle à cet égard.
09:50 Je pourrais y revenir dans les questions,
09:52 et j'y reviendrai aussi dans les prochaines semaines
09:55 et les prochains mois.
09:57 Cependant, tout cet effort collectif ne vaut
09:59 que s'il s'inscrit dans la durée.
10:03 Et quand je regarde maintenant devant,
10:04 en rapport de ce que je viens de dire de l'analyse du passé,
10:06 de la situation des derniers mois,
10:08 je voudrais essayer de dessiner notre avenir.
10:12 La tentation est certainement grande à Moscou
10:14 d'espérer que là où les armées n'ont pas réussi,
10:16 le temps viendra aider en supplétif la Russie
10:18 à la faveur de telle ou telle élection
10:20 ou de telle ou telle lassitude des opinions.
10:24 Je pense qu'il nous faut être très clairs
10:26 sur ce qu'il nous revient de faire à court et moyen terme.
10:30 Il nous faut aujourd'hui aider l'Ukraine
10:34 par tous les moyens pour mener une contre-offensive efficace.
10:36 C'est indispensable.
10:39 C'est ce que nous sommes en train de faire.
10:40 Nous devons l'intensifier,
10:41 car ce qui se joue dans les prochains mois,
10:43 c'est la possibilité même d'une paix choisie et donc durable.
10:47 La 2e chose, c'est que nous devons être très clairs
10:49 sur ce qu'on appelle la paix.
10:52 La paix en Ukraine et sur notre continent,
10:54 ça ne peut pas être un cessez-le-feu
10:56 qui consacre l'état de fête,
10:59 qui reviendrait à recréer un conflit gelé
11:02 et qui, en quelque sorte, viendrait consacrer
11:04 la prise de territoire
11:06 contrevenant à tous les principes du droit international,
11:08 parce qu'au fond, ce conflit gelé,
11:11 ce serait la guerre à coup sûr demain ou après-demain
11:13 et notre affaiblissement à tous.
11:15 Il n'y a qu'une paix,
11:17 celle qui respecte le droit international,
11:19 qui est choisie par celui qui est agressé,
11:21 c'est-à-dire le peuple ukrainien,
11:23 et qui est une paix qui puisse être durable
11:25 et qui donc respecte ses équilibres,
11:28 avec également, et j'y reviendrai, des garanties crédibles.
11:32 Et donc, il nous faut nous préparer
11:36 à ce que ce conflit dure
11:39 et à ce que les conséquences de ce conflit durent,
11:40 avec beaucoup de lucidité.
11:43 J'espère que les prochains mois permettront,
11:45 après une contre-offensive victorieuse,
11:47 de remettre tout le monde autour de la table
11:49 et de bâtir une paix durable,
11:51 aux conditions que je viens de préciser,
11:53 choisies par l'Ukraine et respectant le droit international.
11:56 Mais nous aurons, nous le savons encore,
11:58 des années et des années de reconstruction,
12:01 de situation humanitaire à gérer.
12:04 Mais nous devons aussi, pour être crédibles
12:06 vis-à-vis de la Russie,
12:08 nous mettre en situation, nous, nos opinions publiques,
12:11 de soutenir dans la durée l'Ukraine
12:15 dans un conflit de haute et moyenne intensité.
12:19 Et pour cela, il nous faudra,
12:21 avec l'ensemble de nos partenaires,
12:23 revoir et réanalyser durant l'été
12:26 la nature, justement, de notre soutien
12:29 et ce qu'il faut pour pouvoir aboutir
12:31 aux résultats que j'évoquais.
12:33 Dans le même temps, il nous faut convaincre le Sud,
12:37 parce que nous avons, dans le contexte que j'évoquais,
12:40 une fragilité sur laquelle il faut être lucide.
12:43 C'est qu'aujourd'hui, si grâce à l'engagement du Japon
12:45 et de quelques autres,
12:48 cette guerre n'est pas simplement celle de l'Occident,
12:52 eh bien, beaucoup de puissances émergentes
12:55 considèrent que ça n'est pas leur guerre.
12:58 Quand bien même ils reconnaissent que c'est une agression
12:59 et qu'elle ne respecte pas la charte des Nations unies,
13:05 ils le marmonnent à peine entre leurs lèvres,
13:09 parce qu'ils considèrent que leurs principaux problèmes
13:11 sont de lutter contre la pauvreté dans leur pays,
13:13 qu'on leur a mis suffisamment de contraintes,
13:15 qu'il y a des doubles standards
13:16 et qu'on ne s'est pas occupé de la propre sécurité
13:18 il y a d'autres temps
13:19 et qu'ils vivent à plein les conséquences de cette guerre,
13:22 là où, quand eux-mêmes étaient menacés dans leur sécurité,
13:24 nous n'avons pas réagi avec la même vigueur.
13:27 Nous devons entendre ce message.
13:29 Le risque sinon étant que tous ces pays soient récupérés
13:33 par d'autres pour bâtir un ordre international alternatif
13:38 et deviennent de manière choisie, lucide
13:44 ou de fait par des effets de composition
13:47 des alliés objectifs dans la durée d'un chemin russe.
13:52 Et donc il nous faut absolument,
13:54 dans le même temps que nous produisons
13:56 les efforts de soutien, la préparation de la paix durable,
13:58 faire ce travail de conviction
14:00 à l'égard des pays du Sud et de plusieurs émergents
14:03 et donc aussi nous réengager dans l'aide
14:05 que nous devons leur apporter
14:06 dans la clarification de notre agenda.
14:08 Maintenant, une fois que je vous ai dit tout cela,
14:12 regardant notre avenir,
14:14 la question qui nous est posée
14:17 est de savoir quelle est, dans la durée, au fond,
14:21 pour notre Europe, l'avenir possible
14:26 et comment notre Europe peut rebâtir
14:31 une paix, une sécurité, une stabilité durable
14:33 pour elle-même.
14:36 Nous avons très bien réagi à court terme.
14:37 Les Etats, par leur engagement, l'ont montré.
14:39 L'OTAN a montré sa crédibilité à son flanc est
14:43 et l'Union européenne par son engagement.
14:46 Mais est-ce suffisant dans la durée ?
14:48 Nous devons aujourd'hui nous féliciter
14:50 d'avoir une administration américaine
14:52 qui s'est engagée à nos côtés,
14:54 qui a fourni autant d'efforts que les Européens,
14:56 mais qui accroît très clairement notre crédibilité collective.
15:00 Soyons reconnaissants et remercions
15:01 les Etats-Unis d'Amérique.
15:04 Est-ce que cette administration sera la même pour toujours ?
15:08 Nul ne sait le dire.
15:10 Et nous ne pouvons déléguer notre sécurité collective
15:13 et notre stabilité
15:15 au choix des électeurs américains dans les années qui viennent.
15:20 Dans le même temps, les mêmes Américains
15:21 nous demandent depuis des années,
15:22 quelles que soient les administrations,
15:24 de partager mieux le fardeau,
15:25 de nous occuper davantage de notre sécurité
15:27 et de notre voisinage.
15:29 Et c'est donc en cela
15:31 que oui, une Europe de la défense,
15:33 un pilier européen au sein de l'OTAN,
15:34 est indispensable.
15:36 C'est le seul moyen d'être crédible pour nous-mêmes,
15:38 d'être crédible dans la durée, de réduire nos dépendances
15:43 et de prendre cette part légitime du fardeau qui est le nôtre.
15:45 Parce que qu'on le veuille ou non,
15:48 notre géographie ne changera pas.
15:51 Nous habiterons la même place
15:53 et la Russie restera la Russie
15:55 avec les mêmes frontières et la même géographie.
15:57 Et il nous faut, nous, bâtir un espace
16:00 qui, demain, devra être cet espace de paix durable,
16:03 parce que le peuple ukrainien aura été respecté
16:06 dans ses droits et le droit international rétabli,
16:08 mais qui nous permette de cohabiter
16:10 de la manière la plus pacifique, sans naïveté aucune,
16:13 avec la Russie de demain.
16:16 Je le redis, il ne s'agit dans ce projet
16:19 ni d'avoir de la naïveté à l'égard de la Russie,
16:21 je n'en ai jamais eu.
16:23 Mais enfin, de ne pas nier la géographie
16:25 et de ne pas considérer que nos choix devraient être...
16:29 Comme si nous vivions avec un océan entre la Russie et nous.
16:33 Et mon objectif n'est nullement d'essayer de remplacer l'OTAN
16:36 par autre chose.
16:38 Et je veux ici écarter tous les fantasmes
16:40 parce que je sais combien ils peuvent être répétés,
16:44 déformés.
16:46 Je ne veux pas remplacer l'OTAN
16:47 par une forme de condominium franco-allemand.
16:48 Non. Je pense que c'est une Europe large, puissante,
16:51 avec des pays comme le vôtre, comme la Pologne et beaucoup d'autres
16:54 qui doivent prendre leur part dans cette Europe de la défense,
16:58 mais qui assume sa propre sécurité de manière croissante
17:01 et ses questions de voisinage.
17:04 Alors, pour ce faire,
17:06 il nous faut maintenant, dans l'urgence,
17:09 procéder à une forme d'accélération de nos choix stratégiques
17:12 et de la mise en oeuvre de ce que nous avons commencé à décider.
17:16 Et c'est un peu cet agenda qu'il nous faut bâtir
17:19 pour construire ce destin commun.
17:21 D'abord, il nous faut construire une capacité européenne
17:25 plus souveraine
17:26 en matière énergétique, technologique et militaire.
17:29 C'est un peu l'agenda que nous avons assis à Versailles
17:32 en mars 2022.
17:34 Maintenant, il faut le mettre en oeuvre
17:37 de manière accélérée, très concrète,
17:40 c'est-à-dire construire européen, acheter européen,
17:43 innover européen de plus en plus.
17:46 Sur le plan militaire, c'est aussi ça qu'il nous faut faire,
17:50 avec un effort national que nous devons produire.
17:53 La France n'a pas attendu cette guerre.
17:54 Nous avons accru notre effort dès la loi de programmation
17:58 portée sous mon 1er mandat,
17:59 et nous sommes en train de la croître de 100 milliards d'euros
18:01 par rapport à la période précédente
18:03 pour atteindre un total de 413 milliards d'euros.
18:07 Avec la loi de programmation qui se porte,
18:09 mais avec l'horizon des 2% du PIB,
18:12 nous devons aussi adjoindre des objectifs concrets,
18:14 des déploiements, des capacités réelles
18:16 qui crédibilisent cet effort collectif,
18:18 comme, par exemple, la France l'a fait
18:20 quelques jours après l'agression russe en Ukraine
18:23 en déployant des forces en Roumanie.
18:25 Moins d'8 jours après, nous avions des centaines de soldats
18:27 en Roumanie.
18:29 C'est la crédibilité d'une Europe de la défense
18:31 dans le cadre de l'OTAN,
18:32 mais il faut un choix souverain des capacités,
18:35 des dépenses et une capacité d'engagement.
18:38 Cette autonomie stratégique, cette souveraineté militaire,
18:41 c'est aussi un effort industriel.
18:43 Nous avons bien compris ces derniers mois,
18:44 en vidant nos arsenaux,
18:46 que nous ne possédions avec certitude
18:48 que ce que nous produisions.
18:50 Nous devons en tirer les conséquences.
18:52 Et quand je vois certains pays qui accroissent
18:54 leurs dépenses de défense pour acheter massivement
18:56 du non européen,
18:58 j'ai leur dit simplement, vous préparez vos problèmes de demain.
19:02 Il nous faut utiliser ce moment
19:04 pour produire davantage en européen.
19:07 Nous avons su faire ensemble
19:10 une invention, produire quelque chose de nouveau
19:12 sur les munitions.
19:14 Formidable avancée pour aider l'Ukraine.
19:17 Nous devons aller beaucoup plus loin.
19:19 Nous devons harmoniser nos standards européens
19:21 parce que nous nous faisons trop de concurrence entre nous.
19:23 Il y a beaucoup plus de standards entre Européens
19:25 qu'il y en a aux Etats-Unis d'Amérique.
19:27 Mais ce faisant, nous devons développer
19:29 une base industrielle, technologique,
19:32 de défense vraiment européenne
19:35 dans tous les pays qui sont intéressés
19:38 et déployer des équipements pleinement souverains
19:41 sur le plan européen.
19:43 Il nous faut réduire en effet nos dépendances.
19:46 Et il nous faut continuer de construire
19:47 une intimité stratégique pour cet effort collectif.
19:51 Je pense évidemment à l'initiative européenne d'intervention
19:57 que nous avons lancée il y a 5 ans
19:58 et qui garde toute sa pertinence aujourd'hui.
20:00 Plusieurs d'entre vous sont venus avec nous
20:02 lutter contre le terrorisme en Afrique,
20:04 montrant que la solidarité oeuvre dans les 2 sens,
20:06 et je l'aurai en ségré.
20:08 Et même si la présence française en Afrique change,
20:10 la nécessité de continuer à être engagés ensemble demeure.
20:14 Et donc il faudra réfléchir à des coopérations possibles
20:16 dans tous ces espaces,
20:18 mais bâtir des capacités entre Européens
20:21 en s'appuyant sur l'interopérabilité de l'OTAN,
20:24 mais en allant au-delà,
20:25 en sachant engager ensemble des forces d'action communes
20:28 sur des théâtres d'opérations nouveaux dans nos voisinages,
20:31 mais également dans le cyber, dans l'espace,
20:32 dans le maritime, etc.
20:35 Plus largement, vous le voyez,
20:37 ce 1er pilier qui est au fond
20:39 de renforcer notre souveraineté militaire,
20:41 c'est de se dire "Regardons où nous vivons,
20:44 "c'est à nous, Européens, dans l'avenir,
20:46 "d'avoir notre propre capacité à nous défendre
20:50 "et à gérer nos voisinages."
20:52 Et à ce titre, ne nous précipitons pas forcément
20:56 dans les capacités pour gérer les guerres d'hier ou d'aujourd'hui.
21:02 Ou pour gérer les conflits qui sont simplement
21:03 ceux qui apparaissent aujourd'hui.
21:05 Gérer notre voisinage,
21:06 ce n'est pas simplement notre flanc oriental.
21:08 C'est la Méditerranée, Méditerranée orientale
21:10 et Méditerranée du Sud.
21:12 Et ce sont les nouveaux espaces de conflictualité,
21:15 le cyber, le spatial et le maritime.
21:18 Et ils sont au moins aussi importants
21:21 que des guerres continentales terrestres
21:22 qu'on a vues ressurgir à cause de l'agression russe
21:26 et qu'on pensait voir disparaître,
21:28 mais qui n'enlèvent pas les nouvelles formes
21:29 de conflictualité qui vont être croissantes.
21:32 Donc ayons aussi cette lucidité stratégique
21:34 pour préparer les conflits d'avenir
21:35 qui ne manqueront pas d'arriver.
21:38 Au-delà de cet axe de souveraineté européenne,
21:41 technologique et militaire, le 2e défi,
21:42 c'est de faire que l'Europe,
21:44 au lieu de subir les évolutions stratégiques
21:46 de son environnement,
21:47 en devienne l'actrice de plein droit.
21:51 J'ai été frappé, moi, ces dernières années,
21:53 de voir au fond que nous n'étions pas sortis
21:57 de l'état de minorité géopolitique, nous, Européens.
22:00 C'est très dur pour un président français
22:02 de dire ça de manière aussi crue.
22:04 Ca produit de l'énervement, de la contrariété.
22:07 Mais moi, j'ai connu cette expérience
22:10 d'arriver à un sommet de l'OTAN
22:12 avec une autre administration européenne,
22:14 une autre administration américaine,
22:16 qui nous aimait moins,
22:18 mais qui, en nous notifiant à peine
22:19 et en coordonnant de manière très bureaucratique
22:22 les choses avec les Européens,
22:24 nous a notifié qu'elle arrêtait avec le traité FNI,
22:28 en disant "Les Russes ne le respectent plus".
22:30 L'année 2019, nous, Européens, nous avons découvert
22:32 qu'un traité qui nous couvrait face à des missiles
22:36 qui touchaient notre sol,
22:38 le non-Respirus et la décision américaine
22:40 pouvaient nous laisser nus,
22:42 parce que nous n'étions pas partis à celui-ci.
22:45 De la même manière,
22:46 lorsque la Russie prend méthodiquement des gages
22:50 et suspend l'application du traité New Start
22:52 en février dernier,
22:53 puis qu'on revient clairement à l'acte fondateur
22:55 "Autant Russie en mars", etc., etc.
22:59 Je le dis très clairement, nous, Européens,
23:02 nous devons être les acteurs de ces traités
23:05 qui couvrent notre sécurité
23:08 et qui construisent le cadre à venir.
23:11 Si nous le déléguons à d'autres,
23:15 la Russie, les Etats-Unis d'Amérique ou que sais-je,
23:17 nous ne serons jamais des acteurs crédibles.
23:20 Et donc, oui, nous devons construire
23:22 ces solutions diplomatiques d'avenir.
23:24 Pour ce faire, il nous faut d'abord
23:28 maîtriser pleinement les armements,
23:29 ce qui revient avec ce que je disais
23:30 sur notre lucidité industrielle.
23:33 L'Europe a été absente des traités
23:34 comme le traité sur les forces nucléaires intermédiaires
23:36 ou le traité New Start,
23:38 alors que sa sécurité était en jeu.
23:40 Pour ça, elle doit peser.
23:42 Et donc, elle le fera avec d'autant plus de crédibilité
23:45 qu'elle sera actrice et non spectatrice de ses équilibres.
23:47 C'est pourquoi j'ai appelé les Européens
23:49 à se doter d'une capacité de frappe dans la profondeur
23:52 qui renforcera notre sécurité
23:54 et qui nous donnera également un atout
23:55 pour toutes les négociations futures.
23:58 Et je souhaite donc lancer des discussions
23:59 avec les partenaires européens qui seront intéressés
24:02 pour explorer une coopération dans ce domaine.
24:05 Le second qui est lié, c'est celui de la défense antiaérienne.
24:08 La guerre en Ukraine a montré son importance vitale.
24:11 C'est un sujet stratégique
24:12 avant d'être un sujet de capacité industrielle,
24:14 mais très clairement, il doit reposer
24:18 sur un équilibre d'action offensive et d'action défensive.
24:21 Il doit prendre en compte clairement la dissuasion nucléaire.
24:24 Et c'est pourquoi, comme je m'y étais engagé à Munich,
24:26 une conférence sur ce sujet sera organisée à Paris le 19 juin.
24:30 J'invite tous les ministres de la défense des pays européens
24:33 ici représentés à s'y rendre.
24:34 Et elle nous permettra de poursuivre ensuite le travail.
24:38 Et le 3e, c'est plus largement la manière pour l'Europe
24:41 de sécuriser son environnement.
24:43 Nous devons en effet bâtir ces nouveaux traités
24:47 en étant pleinement acteurs et autour de la table.
24:50 Et pour cela, soyons très clairs,
24:52 la question de la sécurité à notre voisinage va se poser.
24:57 Nous y reviendrons sans doute dans les questions.
24:59 Mais la sécurisation de notre environnement
25:02 est un élément clé de cette crédibilité
25:04 et d'une Europe pleinement actrice.
25:06 Nous devrons apporter à l'Ukraine
25:08 des garanties de sécurité solides
25:10 pour marquer un coup d'arrêt aux déstabilisations à répétition.
25:14 Et si la Russie persiste à vouloir déstabiliser l'Europe,
25:16 elle doit être prête à en payer le prix géopolitique.
25:20 J'entends tous les débats que nous avons,
25:23 mais nous serions d'étranges acteurs géopolitiques
25:27 à dire "Nous armons massivement l'Ukraine,
25:32 "mais nous ne voulons l'inclure
25:33 "dans aucun débat stratégique de sécurité."
25:37 Je lisais Henry Kissinger,
25:38 qui n'est pas le diplomate le moins expérimenté,
25:41 il avait raison de dire,
25:43 "En un an, tous ceux qui a bon droit ont aidé l'Ukraine,
25:45 "en ont fait un acteur tellement puissant
25:47 "il vaut mieux le réinclure
25:50 "dans ces architectures de sécurité existantes."
25:52 Et je crois partager plutôt cette vision.
25:56 Et donc, si nous voulons une paix crédible, durable,
26:00 si nous voulons peser face à la Russie,
26:03 si nous voulons être crédibles vis-à-vis des Ukrainiens,
26:07 nous devons donner à l'Ukraine
26:09 les moyens d'empêcher toute nouvelle agression
26:12 et nous devons inclure l'Ukraine
26:15 dans un ensemble et une architecture de sécurité crédible,
26:18 y compris pour nous-mêmes.
26:20 C'est pourquoi je suis favorable,
26:22 et ce sera l'objet des discussions collectives
26:23 dans les prochaines semaines d'ici au sommet de Vilnius,
26:26 mais de donner des garanties de sécurité
26:29 tangibles et crédibles à l'Ukraine.
26:32 Pour 2 raisons.
26:35 L'Ukraine, aujourd'hui, protège l'Europe.
26:37 Elle apporte des garanties de sécurité à l'Europe de fait.
26:40 Et la 2e raison, c'est que l'Ukraine, aujourd'hui,
26:42 est dotée de tellement d'armements que c'est notre intérêt
26:45 qu'elle ait des garanties de sécurité crédibles avec nous
26:47 dans un cadre multilatéral,
26:49 avec soit des soutiens multilatéraux,
26:51 soit des soutiens bilatéraux.
26:52 C'est ce que nous aurons à discuter.
26:54 Il nous faut être beaucoup plus ambitieux
26:56 que nous ne le sommes parfois
26:57 dans les discussions aujourd'hui sur ce sujet.
27:01 A plus moyen terme, c'est évidemment
27:03 la stabilité de notre Europe
27:06 et sa sécurité qu'il nous faudra bâtir
27:08 sur la base de cette paix solide en Ukraine,
27:11 de ces garanties de sécurité à notre voisinage,
27:13 et la question demain de la Biélorussie et d'autres se posera,
27:17 et d'un cadre transparent de confiance
27:22 permettant d'éviter une escalade des capacités dans l'avenir
27:27 pour à un moment sortir de cet état de guerre
27:29 quand la paix sera négociée et stable.
27:33 Or, nous avons tellement surarmé notre flanc est
27:36 la Russie a engagé un tel armement qu'il nous faudra reconstruire,
27:39 et je parle là du moyen terme, un cadre de désescalade,
27:42 mais ce sera à ce moment-là aux Européens
27:44 de le construire vraiment dans un cadre transparent
27:47 où nous devrons être acteurs de ces traités,
27:50 autour de la table pour négocier
27:52 et autour de la table pour juger de leur bon respect
27:55 et de leur évolution,
27:56 contrairement à ce que nous avions fait par le passé.
27:58 C'est pourquoi dans ce cadre,
28:01 nous devons aussi penser une Europe plus large,
28:03 et je conclurai mes propos sur ces points.
28:05 Cette Europe plus large, c'est celle que j'ai voulu proposer
28:08 il y a un peu plus d'un an à Strasbourg,
28:10 celle de la communauté politique européenne.
28:13 Pourquoi ? Parce qu'il nous faut penser notre Europe
28:15 pas simplement d'un point de vue sécuritaire
28:17 dans le cadre de l'OTAN
28:19 et pas simplement dans le cadre de l'Union européenne.
28:21 C'est pourquoi la communauté politique européenne
28:23 n'est ni un concurrent de l'OTAN
28:24 ni un substitut à l'élargissement,
28:27 mais elle est un cadre de discussion stratégique
28:31 dont l'ensemble des pays ont besoin
28:34 pour bâtir, je l'espère, une architecture institutionnelle
28:36 innovante et nouvelle,
28:37 mais en matière d'énergie, d'interconnexion,
28:39 de mobilité, de sécurité, de stratégie,
28:41 construire des solutions communes,
28:43 sans attendre le parachèvement de l'élargissement
28:46 et sans se réduire à une approche otanienne.
28:48 Nous le poursuivrons donc demain à Kishinau
28:52 et nous dirons notre volonté d'aller aussi loin que possible
28:54 dans ce format qui permet, je le crois,
28:56 une discussion apaisée et de faire émerger
28:59 des sujets d'intérêt commun.
29:01 En particulier, j'aurai l'occasion d'y proposer
29:04 l'extension de la cyber-réserve européenne
29:06 à l'ensemble des pays de la CPE
29:08 parce que c'est notre intérêt d'être solidaires
29:10 pour préserver notre sécurité.
29:13 A cet égard, la communauté politique européenne
29:15 est un laboratoire géopolitique,
29:17 je crois pouvoir le dire,
29:19 et il nous faut poursuivre en ce sens.
29:22 Mais comme je le disais, ça n'est pas un substitut
29:24 à l'élargissement.
29:26 Et la question pour nous, et je conclurai sur ce point,
29:30 elle n'est pas de savoir si nous devons élargir.
29:32 Nous y avons répondu il y a un an,
29:34 ni même quand nous devons le faire.
29:36 C'est pour moi le plus vite possible.
29:38 Mais bien comment nous devons le faire ?
29:40 Plusieurs s'en souviennent, la France avait porté
29:42 le changement de la méthode d'élargissement en 2018.
29:46 Mais au fond, la guerre en Ukraine
29:48 et la situation aujourd'hui qui se dégrade
29:50 dans plusieurs zones des Balkans occidentaux
29:54 nous montrent une chose, c'est que notre méthode actuelle
29:56 ne marche pas.
29:58 Alors je pense qu'il y a 2 erreurs qu'il nous faut éviter.
30:01 La 1re erreur, ce serait de se dire
30:03 la situation se dégrade, restons comme on est,
30:07 et au fond, donnons des espoirs aux Balkans occidentaux,
30:09 à l'Ukraine, à la Moldavie, et jouons avec le temps.
30:12 On sait très bien faire ce sport, on l'a longtemps pratiqué.
30:15 Si nous faisons ça, je pense que, de fait,
30:18 nous donnerons plus d'espace à tous ceux
30:21 qui veulent déstabiliser l'Europe en son sein,
30:24 et nous donnerons plus d'espace à ceux qui veulent
30:26 dégrader l'Europe.
30:27 Et je pense que nous nous réveillerons dans quelques années
30:29 avec une situation qui se sera largement dégradée.
30:32 Largement dégradée.
30:33 Il y a une 2e erreur qui serait de dire,
30:39 élargissons, c'est notre devoir, notre intérêt géopolitique,
30:41 parce qu'il faut ancrer la Moldavie, l'Ukraine,
30:44 les Balkans occidentaux dans notre Europe.
30:46 Allons-y.
30:48 On verra après pour réformer.
30:51 Ce serait une catastrophe aussi,
30:53 parce que ce serait une Europe impuissantée.
30:56 En fait, de ses lourdeurs parfois trop bureaucratiques,
30:59 de sa lenteur et surtout d'une énorme divergence.
31:03 C'est que vous voyez bien qu'en Europe,
31:04 il y a au fond 2 forces profondes.
31:07 Les 2 se respectent.
31:09 Celle qui consiste à dire, on a besoin de plus d'unités
31:11 géopolitiques, d'ancrer les Balkans occidentaux,
31:13 la Moldavie, l'Ukraine dans cette Europe.
31:15 Elle doit être unie, elle doit se penser dans cet espace
31:18 sur le plan de la sécurité, de la géopolitique,
31:21 de l'énergie, des migrations.
31:23 Et de l'autre côté, on a une Europe qui dit,
31:25 mais on a besoin d'intégrer davantage
31:27 les politiques économiques, d'avoir encore plus d'exigences
31:30 sur l'Etat de droit.
31:33 Et elle crée en quelque sorte une centralité
31:35 qui est parfois rejetée par certains Etats.
31:38 Il nous faut penser, ce paradoxe, c'est que notre Union européenne
31:40 n'a pas été pensée pour s'élargir à Newton
31:42 jusque à ses frontières.
31:44 Elle a été pensée pour toujours s'approfondir davantage.
31:47 Et elle est allée vers un projet de plus en plus intégré.
31:51 Il nous faut donc, c'est le moment que nous vivons,
31:53 et tout arrive un peu ensemble, mais c'est comme ça,
31:56 un très grand moment de clarification théorique
31:59 et géopolitique de notre Union européenne.
32:02 Oui, elle doit s'élargir.
32:04 Oui, elle doit être repensée dans sa gouvernance
32:06 très profondément et dans ses finalités.
32:09 Oui, elle doit innover, sans doute,
32:11 pour inventer plusieurs formats
32:14 et clarifier les finalités de chacun de ces formats.
32:17 C'est le seul moyen de répondre à l'attente légitime
32:21 des Balkans occidentaux, de la Moldavie et de l'Ukraine
32:24 qui doivent rentrer dans l'Union européenne
32:26 et de garder une efficacité géopolitique,
32:29 mais aussi en matière de climat, d'Etat de droit,
32:33 d'intégration économique de l'Union européenne
32:35 telle qu'elle vit aujourd'hui.
32:37 Et donc, il nous faut aussi réarticuler et repenser
32:40 le couple intergouvernemental et politique communautaire
32:43 et savoir comprendre également
32:45 ce qui ressort de plusieurs Etats membres
32:47 lorsqu'ils ne comprennent plus l'Europe telle que je chemine.
32:51 Ce moment est pour maintenant, et nous aurons à y travailler
32:54 avec plusieurs de nos partenaires dans les semaines à venir.
32:57 J'ai déjà été trop long, pardon, président,
32:59 et mesdames et messieurs,
33:00 mais voilà quelques-uns des points que je voulais évoquer.
33:03 Et donc, au fond, vous l'avez compris,
33:05 se joue notre capacité à bâtir une paix juste et durable
33:09 en Ukraine, sans aucune faiblesse,
33:12 mais se joue également l'avenir de notre continent,
33:16 je le crois très profondément,
33:17 dans les mois et les 2, 3 ans qui viennent.
33:22 Pas beaucoup plus.
33:24 Je crois que le réveil conceptuel et stratégique,
33:27 l'Europe l'a vécu, mais il faut qu'elle aille au bout
33:29 des conséquences à en tirer pour elle-même et son voisinage.
33:34 Dans ce cadre, je crois que vous l'avez compris,
33:36 ma présence veut dire cela.
33:39 Vous pouvez compter sur la France.
33:40 Elle a parfois été perçue comme arrogante
33:44 ou lintenne ou ne s'intéressant pas à cette partie de l'Europe.
33:47 Pour ma part, durant mon 1er mandat,
33:49 j'ai visité chaque pays membre de l'Union européenne.
33:52 Chacun. Parce que je considère que l'Union européenne,
33:55 ce n'est pas simplement Bruxelles.
33:57 C'est l'ensemble des capitales.
33:59 Et c'est ce dialogue toujours pluriel
34:00 et c'est l'absence d'hégémonie.
34:02 Mais vous pourrez dans la durée compter sur la France,
34:04 mais je sais aussi que la France pourra compter sur vous tous
34:07 pour que nous bâtissions ensemble une Europe plus forte,
34:11 plus souveraine, plus capable d'assurer sa sécurité.
34:14 Et on ne le fera pas à 1, à 2 ou à 3.
34:19 On le fera à 27 et même davantage,
34:22 en incluant dans ce débat stratégique
34:24 tous ceux qui seront demain avec nous à Kishinev,
34:26 dans cette capacité à avoir un dialogue franc, ouvert,
34:30 large, puissant, ambitieux,
34:33 en acceptant nos différences, en les respectant
34:36 et en clarifiant nos finalités.
34:38 Au fond, assumons ensemble
34:42 ce que notre Europe doit être,
34:45 une grande puissance démocratique,
34:49 diverse, mais unie.
34:52 Merci beaucoup.
34:53 (Applaudissements)
34:57 On va faire là.
34:59 Merci, M. le Président.
35:00 (...)

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