Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Retrouvez "Voyage en absurdie" sur : http://www.europe1.fr/emissions/chronique-en-absurdie
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00:00 - Allez Manuel Ducroc, c'est à vous du journal L'Opinion dans l'Himalaya ce matin.
00:06 La saison 2023 de l'ascension de l'Everest vient de débuter parce qu'en effet on ne peut pas y grimper toute l'année.
00:12 Cette saison va durer jusqu'à la fin du mois de juin. En fait c'est assez bref.
00:16 Et on a déjà commencé à compter les morts Emmanuel.
00:19 - 6 morts la semaine passée sur les pentes de l'Everest, 2 autres ce dimanche.
00:22 Depuis le début de la saison, c'est-à-dire moins de 2 semaines, 11 personnes ont déjà laissé la vie sur les pentes de la montagne, 2 ont disparu.
00:29 La saison s'annonce noire parce qu'en moyenne ce sont 5 personnes qui meurent chaque année en tentant l'ascension.
00:34 - Est-ce que ce décompte macabre est une conséquence de la fréquentation qui est toujours plus importante des pentes de l'Everest Emmanuel ?
00:41 - Oui mais c'est un chiffre entre emploi et ça mérite d'être décortiqué.
00:43 Alors ce qui est sûr c'est qu'il y a de plus en plus d'alpinistes qui se lancent sur les sommets de l'Himalaya et particulièrement sur l'Everest.
00:50 Le plus haut il y a des statistiques.
00:51 Entre 1990 et 2005, en 15 ans donc, 2 200 alpinistes avaient tenté pour la première fois d'atteindre le point culminant.
00:58 Pour les 15 années suivantes, c'est-à-dire de 2006 à 2019, ils étaient 3 600, 64 % de fréquentation en plus.
01:05 Cette année le Népal a émis 466 permis d'ascension de l'Everest, ce qui est un record et ça n'est certainement pas fini.
01:12 Avec les guides ça veut dire que 900 000 personnes vont tenter l'ascension cette année.
01:17 Alors en moyenne sur les 30 dernières années, le taux de mortalité est assez stable.
01:20 C'est 1 à 2 % sur les pentes de l'Everest.
01:23 L'augmentation du nombre de morts est proportionnelle finalement au nombre de grimpeurs.
01:28 Il n'y a pas vraiment de surmortalité.
01:30 - De quoi meurt-on quand on fait l'Everest ?
01:32 - Entre 1990 et 2019, on a des statistiques assez précises.
01:36 119 personnes sont mortes en gravissant l'Everest au printemps.
01:40 Les deux tiers à cause de maladies comme le mal des montagnes, l'épuisement, les engelures.
01:45 C'est peut-être là qu'on trouve l'impréparation et peut-être l'âge des grimpeurs qui est plus élevé.
01:51 Environ 25 % des gens sont morts de chutes et 5 % à cause d'avalanches ou d'effondrements de pierres.
01:56 Et là, il y a une alerte.
01:57 Les guides constatent que le changement climatique bouleverse la physionomie de la montagne.
02:01 Elle fait s'élargir les crevasses, ça crée des zones instables
02:04 et surtout, ça rend la météo plus imprévisible avec des hivers doux.
02:07 D'autres au contraire très très froid, tous les repères sont bouleversés.
02:10 Et ça c'est une source d'accident, finalement beaucoup plus que l'inexpérience qui est souvent pointée du doigt.
02:15 - La surfréquentation du lieu, ça reste malgré tout un problème Emmanuel Dupont ?
02:19 - Il y a trop de monde sur le toit du monde.
02:21 Chaque année, les mêmes images des cohortes de grimpeurs à la queue leu-leu,
02:24 les mêmes reportages sur les décharges à ciel ouvert en altitude,
02:27 les mêmes critiques sur le marché qui est devenu l'Everest avec ses camps de base qui ressemblent à des center parks,
02:32 des alpinistes armateurs suraccompagnés par des entreprises touristiques qui leur mâchent la grimpette.
02:37 Ça explique aussi qu'il y ait moins d'accidents, ils sont chouchoutés, ils sont dans du coton.
02:41 Les sommets de la grande solitude sont devenus des autoroutes.
02:44 Et l'aventure Disneyland des sommets, on est bien bien loin d'Edmund Hinder et de Tenzing Norgay.
02:48 Les premiers à avoir gravi l'Everest.
02:51 Le Népal, qui distribue la plupart des permis d'ascension, envisage régulièrement de fermer le robinet,
02:56 de restreindre l'ascension aux alpinistes qui ont déjà une autre expérience sur un autre sommet himalayen
03:01 pour éviter que la montagne instable devienne un piège pour des groupes entiers.
03:05 Mais il y a toujours renoncé, parce que derrière l'Everest, il y a une économie,
03:09 des sociétés de tourisme, des Sherpas, des habitants qui en vivent et puis des devises.
03:13 Parce que le permis pour l'Everest coûte l'équivalent de 12 000 euros.
03:16 - Tiens, il se trouve que Gaspard Proust, qui aime la montagne, vous a écouté et vous souhaitez réagir.
03:20 Gaspard, l'Everest, ça vous touche ?
03:22 - C'est vous, Dimitri, qui avez dit que 1 à 2% de mortalité, c'était beaucoup, je crois.
03:26 Il faut juste savoir que le sommet où il y a le taux de statistique de mortalité le plus fort,
03:30 c'est le K2, où vous avez une chance sur deux de ne pas revenir, en gros.
03:34 Donc sur toutes les expés, c'est un peu moins, c'est 45%.
03:37 Donc quand il y en a deux qui partent, vous êtes à peu près sûr qu'il y en a un qui va y rester.
03:40 - Et comment ça se fait que le K2 soit beaucoup plus dangereux que l'Everest, Gaspard, vous le savez ?
03:45 - C'est plus technique, c'est plus éloigné, c'est quasi aussi haut.
03:49 C'est à peine moins haut, 200 mètres, quand on est à 8 800, bon, ça fait pas grand-chose.
03:54 - Le sommet de la terreur.
03:56 - Peut-être que l'encadrement est moins professionnalisé aussi ?
03:59 - Non, non, c'est même plus professionnalisé.
04:02 C'est encore plus difficile, donc a priori, les mecs qui vont là-bas,
04:05 l'Everest, c'est un peu la montagne à vaches pour les Alpines,
04:08 pour les mecs qui font l'Himalaya, juste pour...
04:10 - Non, je voulais dire professionnalisé dans l'encadrement.
04:12 - Merci beaucoup. - Non, non, ça reste...
04:14 - Bon, merci beaucoup d'être travaillé vos dossiers, Emmanuel Ducrox.
04:18 - Il ne manquerait pas Gaspard avec vos conseils.
04:20 - Merci, monsieur le guide, en tout cas, on prend tous les conseils.
04:22 Merci beaucoup, Emmanuel Ducrox.