Lundi 22 mai 2023, SMART JOB reçoit Claudia Ruzza (Directrice générale de, Positive Planet)
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 [Musique]
00:11 Bien dans son job, on parle beaucoup de cette transformation de pôle emploi en France Travail.
00:16 On a beaucoup parlé évidemment de ce rapport porté par Thibault Guilhuis.
00:20 99 propositions pour accompagner et améliorer l'accompagnement des demandeurs d'emploi.
00:25 Et on va parler des quartiers prioritaires de la ville.
00:28 On en parle avec Claudia Arruzza. Bonjour Claudia.
00:30 Bonjour.
00:31 Ravie de vous accueillir. Directrice générale de Positif Planète.
00:33 Avant de parler, j'allais dire presque de votre coup de gueule, parce que c'est un peu un coup de gueule.
00:37 Ressituons Positif Planète, institution, association créée par Jacques Attali en 2008, 2006.
00:45 Vous ne faites pas que de l'écologie, on est bien d'accord.
00:47 Non, on n'en fait pas d'écologie en tant que telle.
00:49 Nous, notre mission c'est d'encourager, de renforcer et de développer l'inclusion économique des habitants des quartiers
00:55 en les accompagnant vers la création de leur entreprise.
00:58 Donc, on est réparti sur cinq régions. Il y a 80 collaborateurs, 250 bénévoles.
01:02 On est implanté au cœur des territoires en hyper proximité.
01:06 Ce qui vous donne une légitimité pour prendre la parole sur ce sujet.
01:09 Alors, il y a un projet de loi en préparation en juin.
01:12 Il y a eu un rapport qui donne déjà les grandes lignes.
01:15 Vous vous dites, pour le dire simplement, tout ça est très intéressant,
01:18 mais il n'y a pas de focus ou de spécificité d'accompagnement des jeunes et des moins jeunes,
01:24 d'ailleurs, dans les quartiers prioritaires de la ville.
01:26 C'est quoi ? C'est un vrai coup de gueule que vous portez là ?
01:28 Oui, c'est un coup de gueule. Nous, on ne fait pas de politique.
01:30 Ce n'est pas notre objectif.
01:32 En revanche, nous, c'est de faire en sorte que les habitants,
01:34 ils aient les mêmes chances que les autres d'être insérés dans la société.
01:37 Concrètement, quand on lit le rapport, il y a trois mentions des quartiers, deux entre guillemets.
01:41 Enfin voilà, ils n'ont pas une place prioritaire.
01:43 Alors que la Cour des comptes, pour le coup, le dit, quand des populations font face à des freins spécifiques,
01:48 et notamment les QPV, les quartiers prioritaires de la politique de la ville,
01:50 il faut mettre en place des dispositifs spécifiques.
01:53 Et nous, notre coup de gueule, c'est de dire, le plein emploi, il ne sera pas sans les quartiers.
01:57 Donc, quelle va être la place demain dans la loi qui va être présentée dans quelques semaines ?
02:02 On aimerait bien que les quartiers aient leur place.
02:05 Il y aura évidemment le dévoilement au Conseil des ministres de ce texte.
02:08 Vous allez forcément l'analyser, le regarder.
02:11 De quoi ont besoin spécifiquement ces jeunes ?
02:13 On parle souvent des jeunes, mais il n'y a pas que des jeunes au chômage.
02:17 Il y a des femmes, des familles monoparentales.
02:19 De quoi ont-ils besoin en particulier et qui n'est pas encore inclus dans ce rapport ?
02:24 Alors, en fait, c'est l'accompagnement en tant que tel qui doit être spécifique.
02:27 Donc, il y a plein de choses intéressantes dans ce rapport, mais c'est déjà d'être dans l'aller vers.
02:32 Première chose, c'est comment on accède à cette population-là, parce que ce qu'on ne dit pas là-dedans, c'est ça la problématique.
02:37 Comment on va les chercher ?
02:38 Et donc, c'est vraiment une démarche d'aller vers.
02:41 Si on reste dans son bureau derrière, ça ne fonctionne pas dans les quartiers.
02:44 Donc, nous, on a vraiment des gens qui sont issus de ces territoires, qui les connaissent.
02:47 Ils vont jouer avec eux au foot le week-end.
02:49 Ça, c'est la première approche.
02:50 Après, c'est comment on lutte finalement sur la méconnaissance de ces dispositifs qui existent.
02:56 Et donc, ça, c'est dans la même approche, c'est d'aller être au cœur des territoires, en bas de tour, etc.
03:01 Et après, dans l'accompagnement en tant que tel, c'est comment on rend accessible la pédagogie entrepreneuriale.
03:08 C'est bien sûr, quand on est entrepreneur, on est le même, qu'on soit de quartier ou pas de quartier, ce n'est pas ça le sujet.
03:13 Mais c'est comment on lève les freins, notamment d'accès au financement, de confiance en soi, de légitimité, de rôle modèle, etc.
03:20 – Quand même quelques chiffres pour qu'on y voit plus clair.
03:22 Le taux de chômage, alors qu'on n'a jamais eu un taux de chômage aussi bas depuis 1982,
03:27 c'est ce que le gouvernement nous indiquait, et c'est une bonne nouvelle.
03:30 32,9% pour les 15-29 ans, qui est le taux de chômage moyen des quartiers prioritaires de la ville.
03:37 22% chez les 30-49 ans.
03:39 Il faut quand même vraiment s'atteler sérieusement au sujet.
03:42 – Vous vous dites quand même, chez Positif Planète, vous en êtes la directrice générale,
03:46 il y a quand même la porte de l'entrepreneuriat.
03:49 Est-ce qu'il y a un fort désir d'entreprendre et de monter sa boîte ?
03:52 – Oui, il y a un fort désir d'entreprendre, je pense, parce que dans les quartiers,
03:55 pour y avoir été quand j'étais au collège et au lycée,
03:58 il y a aussi ce sens un peu de "j'ai envie de me créer une meilleure vie",
04:02 et puis aussi parce que parfois quand on fait face à des discriminations,
04:05 c'est parfois plus facile finalement de trouver des clients qu'un patron.
04:09 Et donc ça participe aussi à cet élan.
04:12 – Est-ce qu'il faut que les entreprises, parce que ça c'est une réflexion
04:14 que mène malgré tout Hibougui lui, faire venir les entreprises dans les quartiers,
04:18 parce qu'il y a souvent beaucoup de travailleurs sociaux,
04:20 beaucoup de dispositifs sociaux, ils existent, ils ne sont pas absents,
04:24 ce n'est pas suffisant.
04:25 Est-ce qu'il faut que l'entreprise, concrètement, physiquement,
04:28 que les patrons aillent à leurs rencontres, fassent des conférences ?
04:31 Comment on peut recréer, retisser ce lien et ce lien de confiance ?
04:34 – Ce serait une piste, après on a vu qu'il y a eu des dispositifs
04:37 pour que des entreprises s'installent.
04:39 – C'est vrai, les zones franches.
04:40 – Voilà, et parfois c'était avec des boîtes aux lettres,
04:42 parfois ça a été d'autres choses, mais donc ça peut être une piste,
04:46 ça ne peut pas être suffisant.
04:47 En revanche, ce qu'il faut faire, c'est, je pense, arrêter,
04:49 il faut créer des ponts, donner des perspectives d'avenir à ces jeunes,
04:53 parce qu'en fait, là on est en train de leur dire,
04:56 vous n'êtes pas importants, d'une certaine manière.
04:58 Et donc nous, c'est comment on les replace au centre de l'échiquier,
05:01 parce qu'ils font partie de la solution à ce plein emploi.
05:04 – Il y a des talents, vous évoquez ces personnes inspirantes,
05:07 depuis une trentaine d'années, c'est un sujet,
05:09 c'est un vieux sujet la question des quartiers de banlieue.
05:13 Aujourd'hui, des jeunes issus de ces quartiers de banlieue
05:15 ont réussi, parfaitement réussi leur vie,
05:17 pas uniquement dans le cinéma et dans le sport,
05:19 aussi dans l'entreprise, ils doivent être aussi des moteurs.
05:22 Est-ce que vous les encouragez aussi à se montrer, à parler,
05:25 à aller à la rencontre de ces jeunes ?
05:28 – Bien sûr, et nous, on est entourés de ces gens,
05:30 et nous c'est de leur dire, prenez la parole,
05:32 donnez envie aux autres d'entreprendre, et ils le font,
05:35 parce que ça donne aussi d'autres exemples de réussite,
05:38 de montrer qu'on peut être dirigeant et venir des quartiers.
05:40 Et donc oui, notre mission c'est d'être fiers,
05:42 c'est aussi d'en faire une fierté.
05:44 Parfois, on discute avec certains, et on dit,
05:46 "j'ai pas envie de le mettre en avant",
05:47 parce que j'ai l'impression qu'en fait,
05:49 et nous on essaie de transformer ce regard-là sur les quartiers,
05:51 et de leur dire, "prenez la parole, inspirez les autres",
05:54 parce que vous avez déjà finalement une partie du chemin
05:58 pour les autres jeunes qui un jour entreprendront.
06:01 – Quelques chiffres quand même, parce qu'on voit le boulot que vous faites,
06:03 45 000 personnes accueillies pour un premier rendez-vous,
06:06 c'est colossal depuis 2002, 3 800 personnes accueillies en 2002,
06:11 24 000 personnes accompagnées sur la voie de l'entrepreneuriat.
06:14 J'imagine que vous avez un tableau de bord,
06:15 entre ceux qui disent, "moi je veux créer ma boîte",
06:18 et ceux qui la créent vraiment et qui la font durer,
06:20 c'est quoi la durée de vie et la pérennité de tout ça ?
06:23 – La pérennité, on est aux alentours de 69% à 3 ans,
06:27 selon une étude qu'on a menée en 2018,
06:29 ce qui est bien notamment parce qu'on a beaucoup de micro-entreprises,
06:32 c'est-à-dire au démarrage, ils se lancent comme ça,
06:34 après ça peut être une première étape pour transformer leur société par la suite.
06:38 Donc nous vraiment, on en accompagne à peu près 2 700 par an,
06:44 donc 4 000 accueillies, pardon, 2 700 accompagnés par an,
06:47 1 200 qui créent, mais nous notre objectif,
06:49 ce n'est pas aussi de pousser tout le monde à entreprendre,
06:51 parce que l'idée ce n'est pas de créer des entrepreneurs précaires,
06:54 on se louperait complètement dans notre mission.
06:55 – C'est de les faire durer.
06:56 – C'est de les faire durer et de leur transmettre des compétences entrepreneuriales
06:59 qui même s'ils ne créent pas, vont leur être utiles
07:01 pour s'insérer dans la société et dans une entreprise.
07:04 – En tout cas, vous êtes venue nous dire sur ce plateau pour terminer cet échange
07:06 qu'aller chercher ces talents dans les quartiers,
07:09 il y a une foultitude de jeunes filles et de jeunes hommes qui sont des vrais talents,
07:14 c'est quoi ? C'est un manque de confiance ? C'est la peur de passer le périph ?
07:17 Qu'est-ce qui bloque ?
07:18 – Ce qui bloque, il y a plusieurs choses qui bloquent,
07:20 mais déjà il y a la méconnaissance des dispositifs,
07:22 comme je le disais précédemment, il y a je pense beaucoup de freins psychologiques aussi,
07:26 en fait, nous c'est juste de dire tout est possible,
07:28 si quelqu'un te dit que ce n'est pas possible,
07:29 c'est qu'en fait il te dit ça pour te décourager,
07:31 mais c'est possible et vas-y, et tu as les capacités pour le faire.
07:34 Nous c'est notre message et ce qu'on défend.
07:36 – Merci Claudia Arruzza d'être venue nous éclairer sur ce petit combat,
07:40 parce qu'évidemment il ne fait que commencer,
07:42 quand vous allez recevoir ce projet de loi,
07:43 j'imagine que vous allez lobbyiser pour faire en sorte
07:46 que les quartiers prioritaires de la ville soient bien insérés,
07:48 bien accompagnés sur ces dispositifs, France Travail et le message est passé.
07:53 Merci d'avoir répondu à notre invitation.
07:56 On fait du droit, le droit c'est important,
07:58 et on accueille notre invité, c'est Smart et Réglo, vous connaissez notre rubrique.