Anne Fulda reçoit Dominique Bona pour son livre «Les Partisans. Kessel et Druon, une histoire de famille» dans #HDLivres
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00:00 - Bonjour Dominique Bonnat. Alors tout le monde vous connaît, vous êtes académicienne, vous êtes bien connue pour
00:05 notamment les merveilleuses biographies que vous avez écrites de Zweig,
00:09 de tant d'autres, de Romain Garry, d'autres écrivains. Et là vous êtes consacrée à deux monstres de la littérature,
00:15 "Les Partisans", c'est le titre de votre livre, "Kessel et Druon, une histoire de famille" et c'est paru chez Gallimard.
00:22 Alors quelle histoire ! Alors le livre, je vous le dis tout de suite, il est passionnant, on ne le lâche pas, c'est un vrai bonheur de lecture.
00:29 Alors ces deux-là étaient liés par des
00:31 par des liens de famille, ce que tout le monde ne sait pas, puisque Kessel était l'oncle de Druon.
00:36 Mais il y avait d'autres choses qui l'y liaient. Qu'est-ce qu'ils avaient en commun ces deux-là ?
00:40 - Alors en effet, ils avaient en commun d'une part
00:43 cette généalogie de Kessel, la Russie en arrière-fond.
00:48 Ils avaient en commun surtout un drame familial, puisque le père de Druon s'est suicidé à l'âge de 20 ans.
00:57 Mais ils avaient bien d'autres choses. Le goût, je pense, de l'aventure, le goût de l'action.
01:02 Et puis finalement, ce sont quand même deux écrivains.
01:05 Donc les deux ont commencé très tôt à écrire, aussi bien Kessel que Druon, à l'âge de 20 ans.
01:12 Ils écrivent déjà des romans,
01:14 des romans d'amour ou d'aventure. Et donc c'est le fait d'être écrivain qui finalement
01:20 sera leur lien le plus solide. Ce qui est remarquable entre les deux hommes, c'est cette tendresse, cette affection,
01:27 qui est là dès l'enfance de Druon, dès l'adolescence, mais qui va durer
01:32 vraiment jusqu'à leur dernier souffle et qui résistera à toutes les épreuves, qui résistera à la guerre, qui résistera même
01:39 à la rivalité des écrivains. - Ils ont vraiment en commun le fait d'être écrivains, ce qui n'a pas empêché... Ils ont des oeuvres
01:46 tellement différentes, certaines rivalités entre eux. Alors ils entrent tous les deux à l'académie,
01:51 puis il y a ce succès des Rois maudits qui emportent tout et qui, sur le moment, semblent effacer Kessel. Je dis bien sur le moment.
01:59 - Oui, alors Druon,
02:01 évidemment, c'est le cadet. Il y a l'aîné dans cette relation entre neveux, très nettement, Kessel, qui
02:08 dès que Druon a 20 ans, représente le grand écrivain, l'homme à succès, qui non seulement
02:14 couvre la planète de ses grands reportages, est appelé par tous les éditeurs,
02:20 par tous les grands patrons de journaux,
02:22 mais
02:24 Druon est en quelque sorte un fils, ou un presque-fils,
02:28 qui a tout de suite le succès. Dès l'âge de 30 ans, il a le Goncourt pour les grandes familles.
02:33 Et effectivement, les Rois maudits sont un succès planétaire. Les ventes se chiffrent en millions d'exemplaires
02:39 dès qu'ils sont écrits dans les années 50. Mais
02:42 Kessel, de son côté aussi,
02:46 la même année ou presque que les Rois maudits, publie "Le Lion", qui a aussi une audience internationale
02:51 immense. Il y aura ensuite "Le Succès des Cavaliers". Donc ils n'ont rien à s'envier finalement l'un l'autre. Et puis je dirais que
02:59 la rivalité n'est pas inscrite dans leur gêne. Je crois que vraiment l'affection, la tendresse,
03:04 de la part de Kessel, un regard affectueux sur le plus jeune, et de la part de Druon, on le voit dans toutes les interviews,
03:12 quand on l'interroge sur son oncle, on voit le visage s'illuminer et
03:16 immédiatement un sourire de reconnaissance, de gratitude vis-à-vis de Kessel.
03:21 - Et puis Dominique Bonin, il y a la Russie qui est présente chez les deux, mais beaucoup plus chez Kessel.
03:26 Et ça se perçoit même dans le tempérament, dans les références et dans le tempérament aussi.
03:30 - Oui, chez Kessel, la Russie était un véritable paysage auquel il est très attaché. Je dirais d'ailleurs que c'est un
03:37 paysage de nostalgie. Il est né en Argentine, il a peu vécu à
03:41 Orambourg, qui est le berceau maternel sur les bords du fleuve Ural, mais il y a vraiment construit tout son imaginaire.
03:48 Et à Paris, quand il est dans les boîtes de nuit, de préférence russe,
03:52 il aime entendre cette musique tzigane,
03:56 qui lui donne de la mélancolie, qui le fait pleurer,
04:00 mais qui est vraiment
04:03 une couleur même de ces livres, qui ne quittera jamais Kessel.
04:07 Alors que Druon, lui, s'est construit différemment. Même si la Russie est en quelque sorte le paysage atavique
04:14 par ce père naturel, ce père qu'il n'a pas connu, Lazare Kessel, et bien il y a bien d'autres
04:20 sources. Je dirais, il y a la Russie, bien sûr, mais il y a le Brésil
04:25 de sa mère, il y a les ancêtres anglociens, dont un ancêtre qui était l'ancien roi d'Arocanie.
04:32 Mais lui, son paysage préféré,
04:34 c'est l'Italie, c'est la Grèce, c'est tout ce décor antique avec des temples grecs. Et finalement, Druon, c'est un personnage
04:43 qui va très bien avec le temple grec. Autrement dit, il y a des colonnes d'oriques, quelque chose à la fois de
04:49 majestueux, mais surtout d'organisé,
04:51 par rapport à Kessel, qui est beaucoup plus dans le romantisme, le lyrisme
04:57 et l'imaginaire.
05:00 En tout cas, je vous conseille vraiment très vivement ce livre. Ça s'appelle "Les Partisans, Kessel et Druon,
05:05 une histoire de famille, l'histoire de ces deux monstres de la littérature". Et c'est paru chez Gallimard. Merci beaucoup, Dominique Bonin. Merci.
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