Cécile a 32 ans et en paraît pourtant le double, elle est atteinte de Cutis Laxa, une maladie rare qui affecte son tissu conjonctif, responsable de la fermeté et de l'élasticité de la peau et des organes. En grandissant, elle subit les moqueries et le rejet des autres à cause de son apparence, auxquels elle apprend à faire face avec humour et autodérision.
Aujourd'hui, Cécile est en paix avec elle-même et a décidé de partager son parcours pour aider les autres à mieux comprendre sa maladie. Elle souhaite également souligner les complexités de sa maladie au-delà de l’apparence physique, telles que des problèmes cardiaques et une opération à venir.
Merci à Cécile pour sa confiance et pour son témoignage. Vous pouvez la retrouver sur instagram : https://www.instagram.com/cecisuisse/
Suivez O-Rigines le nouveau média qui s’intéresse à l’histoire des histoires.
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Graphisme miniature : Studio Amico
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AmusantTranscription
00:00 J'ai que 32 ans et pourtant, on dirait que j'en fais beaucoup plus.
00:04 J'ai régulièrement utilisé ma maladie quand on était avec mes copines
00:08 pour acheter de l'alcool, pour rentrer en boîte.
00:11 J'ai joué au casino, j'avais 13 ans.
00:13 Et c'est passé comme une lettre à la poste.
00:15 Et je suis passée devant les physionomistes, nickel, tout allait bien.
00:19 Depuis ma naissance, ma peau pendait en grand pli.
00:22 Comme si je flottais dans un costume trop grand, en fait.
00:26 Du coup, ma mère a décidé de se rendre dans l'hôpital où je suis née.
00:30 L'interne, finalement, de Dermato, qui était présent et qui m'a vu arriver,
00:34 m'a tout de suite mis dans une salle à part,
00:37 où ensuite le professeur qui a posé le diagnostic est venu,
00:42 m'a regardé, m'a ausculté.
00:43 Et c'est à ce moment-là que la cutislaxa,
00:45 enfin le mot cutislaxa, a été posé sur moi.
00:50 Déjà, quelque chose qui est très, très important à savoir,
00:53 c'est que la cutislaxa, ce n'est pas un vieillissement accéléré.
00:57 La cutislaxa, c'est, pour vous donner un exemple,
01:00 c'est les fibres élastiques.
01:02 L'élastique, c'est tous les petits élastiques de l'ensemble de mon corps,
01:06 qu'ils soient externes ou internes,
01:09 qui sont abîmés, voire complètement inexistants.
01:12 En gros, ils ne font pas leur travail.
01:14 Le seul endroit où il n'y en a pas, c'est les muscles et les os.
01:17 Donc pour donner un exemple, j'aime beaucoup montrer ça,
01:20 mais tu prends ta main, tu tires la peau, comme ça.
01:24 Donc toi, si tu la relâches, ou quelqu'un qui n'a pas la cutislaxa,
01:27 quand il la relâche, la peau, elle va se remettre nickel,
01:30 toute tendue, toute bien, comme si tu n'avais jamais tiré dessus.
01:34 Moi, en fait, ce qui se passe,
01:36 eh bien, c'est que ça garde un pli, en fait.
01:40 La peau, elle ne revient pas.
01:41 Il faut savoir que j'ai fait un lifting,
01:44 quand j'avais huit ans.
01:45 Ça a été fait à ma demande.
01:46 J'insistais énormément là-dessus auprès de mes parents.
01:49 Sauf que le problème, c'est que ça ne tient pas.
01:52 Parce que tu vas faire, je vais te donner un exemple,
01:55 tu fais un nœud, un élastique qui a pété.
01:58 S'il est abîmé, s'il est déjà fragilisé,
02:00 il va péter à un autre endroit.
02:02 Donc c'est en fait exactement ce même principe.
02:04 Tu vas tendre la peau, oui, effectivement.
02:06 Alors, sur le coup, ça va être assez sympathique et ça va bien faire.
02:11 Mais avec, malheureusement, le vieillissement naturel,
02:14 parce que j'ai toujours un vieillissement naturel,
02:16 même si je ne me vois jamais vieillir, au final.
02:18 Mais avec ce vieillissement naturel,
02:20 le peu de fibres élastiques que j'ai,
02:21 qui fonctionnent encore à peu près bien,
02:23 au fur et à mesure que je grandis, que je vieillis,
02:26 c'est des fibres élastiques qui continuent de se désagréger,
02:30 qui continuent de vieillir, finalement.
02:32 Le jour même où le diagnostic a été posé,
02:34 je me souviens être nue sur une table
02:38 et on me prenait en photo.
02:40 Et le premier truc qui revient, c'est pourquoi ?
02:46 Pourquoi on me prend en photo ?
02:48 Qu'est-ce qu'il y a ? Qu'est-ce qui se passe ?
02:51 Il faut savoir que moi, je suis la seule de ma famille à l'avoir
02:53 parce que je suis une mutation spontanée.
02:55 C'est-à-dire que ni ma mère, ni mon père n'ont le gène qui fait défaut.
03:00 Mais au moment de la fécondation entre l'ovule et le spermatozoïde,
03:05 il y a eu un bug, il y a quelque chose qui n'a pas fonctionné.
03:08 Et donc, du coup, c'est pour ça,
03:10 c'est comme ça que la maladie est apparue chez moi.
03:13 Donc, étant donné que j'ai été toute seule à l'avoir,
03:16 ça a toujours été assez compliqué à ce niveau-là,
03:18 dans le sens où le physique,
03:22 quand on est enfant, ado,
03:24 c'est quelque chose de très important
03:26 parce que c'est quelque chose qui nous permet
03:28 de nous identifier à quelque chose, de nous identifier à quelqu'un.
03:31 Moi, pendant très longtemps, je me suis sentie très seule
03:34 parce que je n'avais personne à qui m'identifier.
03:37 Et bien évidemment, avec toute la méchanceté gratuite
03:41 qu'on peut avoir à l'école,
03:42 mais finalement, avec beaucoup de recul aujourd'hui,
03:46 je sais que c'est tout simplement de la méconnaissance.
03:49 Et c'est un processus qui est juste typiquement humain.
03:53 Quand on ne connaît pas quelque chose,
03:55 quand il y a quelque chose qui est face à nous,
03:57 dont on n'a pas connaissance, qui nous semble bizarre,
04:00 il y a deux procédés.
04:01 Soit on va être curieux et on va chercher à savoir ce que c'est,
04:05 soit ça va nous faire peur
04:06 et du coup, on va utiliser des systèmes défensifs
04:09 parce que ça nous fait peur
04:10 et c'est à ce moment-là qu'on va être méchant.
04:12 Donc oui, j'en ai bavé, bien évidemment,
04:15 au collège, au lycée, avec des insultes.
04:19 Tu peux imaginer lesquelles, Cécile.
04:23 De toute façon, avec la gueule que t'as,
04:24 tu ne pourras jamais trouver quelqu'un qui t'aime.
04:26 Va dans une maison de retraite, t'auras peut-être une chance.
04:29 Achète-toi un fer à lisser pour te lisser la peau,
04:31 ça pourrait t'être utile.
04:32 Avec la gueule que t'as, tu ne pourrais même pas être une pute.
04:35 Donc j'ai été plutôt rebelle,
04:38 plutôt à envoyer bouler tout le monde
04:40 et à envoyer chier tout le monde.
04:41 Je n'avais pas la prétention d'apprendre la vie à quiconque,
04:44 à qui que ce soit,
04:45 je voulais juste qu'on me foute la paix.
04:47 Là aussi, concernant les garçons,
04:50 c'est qu'à un moment donné, je me suis sursexualisée.
04:54 Dans le sens où, et ça a duré pendant un moment,
04:57 pendant un très très long moment.
04:59 Dans le sens où à un moment donné,
05:00 j'en suis arrivée à me dire,
05:02 on ne va pas m'aimer pour mon physique,
05:04 mais on va m'aimer parce que je suis bonne au lit.
05:06 Et avec ce côté, je vais devenir la meilleure,
05:09 je vais tester tout ce que je peux tester,
05:11 je vais dépasser mes limites.
05:13 Mais au moins,
05:15 même si à l'heure actuelle, on ne me donne pas d'amour,
05:17 malgré tout, je vais réussir à avoir un petit peu du corps à corps,
05:21 à avoir un regard posé sur moi,
05:24 à ressentir un petit peu de désir,
05:26 même si ce n'est que du désir sexuel.
05:29 Mais je ne savais pas me faire aimer telle que j'étais finalement.
05:33 Et derrière ce côté très affirmé, très femme finalement,
05:38 je ne laissais pas la possibilité aux gens de véritablement creuser
05:42 et de savoir qui j'étais.
05:43 Le jour où j'ai pris conscience finalement qu'on pouvait m'aimer
05:47 telle que je suis, et pas simplement parce que...
05:51 Voilà, pas simplement pour mes faveurs au lit.
05:55 Eh bien...
05:57 C'est le jour où j'ai rencontré mon mari.
05:59 Et le premier jour où on s'est rencontrés,
06:02 je lui ai balancé à la gueule tout ce qui peut faire fuir un mec.
06:05 Je lui ai dit tout ce que je voulais.
06:06 J'ai dit "moi, je veux fonder une famille,
06:07 je veux me marier, je veux avoir des enfants.
06:09 Là, à l'heure actuelle, je suis en train d'acheter une maison.
06:12 Si tu veux me suivre là-dedans, tant mieux, sinon moi aujourd'hui,
06:15 mon objectif, c'est de faire un enfant toute seule."
06:17 Voilà, je lui ai balancé tout ça à la gueule, mais vraiment.
06:21 Et finalement, c'est à partir du moment où j'ai réussi à définir
06:24 véritablement ce que je voulais, moi,
06:27 et où au final, j'ai accepté mes propres choix.
06:30 Que ça s'est décanté et puis que j'ai rencontré la perle rare.
06:32 Maintenant que je veux avoir des enfants,
06:34 enfin qu'on veut avoir des enfants et qu'on veut fonder notre famille
06:37 avec mon mari, ce qui est difficile et compliqué,
06:41 c'est que d'une certaine manière, je reprends ma maladie en pleine gueule.
06:45 Il faut savoir que c'est qu'une grossesse demande beaucoup au corps.
06:49 Et bien évidemment, demande aussi beaucoup au cœur.
06:52 Et c'est là où j'ai été finalement dans des examens plus poussés
06:56 que ce que j'avais pu avoir jusqu'à maintenant.
06:58 Il faut savoir que du coup, j'ai été suivie tous les deux ans
07:01 pendant toute ma vie jusqu'à aujourd'hui.
07:04 J'ai été suivie par un pneumologue et par un cardiologue
07:09 pour vérifier l'avancée finalement de mon emphysème et de mon anévrisme aortique,
07:16 qui sont les deux éléments les plus importants au niveau des atteintes internes,
07:21 donc qui représentent le plus de risques.
07:23 Et on va dire que jusqu'à présent, ça n'avait jamais alerté personne.
07:29 Et où on s'est rendu compte au final que mon anévrisme aortique
07:33 n'était pas dangereux du tout.
07:35 On s'est rendu compte finalement que les mesures qui avaient été faites par le passé
07:40 n'avaient pas été bien faites et donc les mesures étaient erronées.
07:44 Étant donné qu'on n'est qu'entre 500 et 550 dans le monde,
07:48 il est super important d'être accompagné justement par des médecins qui connaissent,
07:54 par des spécialistes qui ont l'habitude, par des experts de l'acutis laxa.
08:00 Et du coup, c'est là où ça peut porter préjudice finalement à la personne
08:04 parce qu'elle n'a pas les bons éléments, elle n'a pas les bonnes informations
08:07 et du coup, elle peut se retrouver dans des situations délicates et chaotiques
08:11 pour sa propre vie finalement.
08:13 Pour vous expliquer un peu plus précisément ce qu'est un anévrisme aortique,
08:16 alors vous avez le cœur qui est là, c'est mon point,
08:19 et puis il faut savoir que la horte c'est l'artère principale de votre corps.
08:24 Donc la horte, elle va faire un effet de crosse comme ça
08:27 puis elle va redescendre le long de la colonne vertébrale.
08:30 Eh bien moi en fait, mon anévrisme là où il est situé,
08:33 c'est qu'au niveau de l'entrée de la horte dans le cœur,
08:36 eh bien cette partie-là, elle est plus grande.
08:39 C'est-à-dire qu'au lieu de faire ça, elle fait ça.
08:43 Et là où ça provoque des risques, c'est qu'avec le flux sanguin,
08:48 avec la pression artérielle, avec la pression du sang à l'intérieur,
08:52 eh bien ça va forcer sur les parois et puis ça peut péter.
08:57 Et moi encore plus, je suis sujette à une chirurgie
09:02 parce que vu que moi, quand ça se dilate un peu trop,
09:06 ça revient pas forcément, ça fragilise forcément.
09:09 Donc le fait que ça fragilise, le jour où ça pète,
09:13 ma cache mes couilles, mes caleurs.
09:14 De se le prendre en pleine gueule aujourd'hui,
09:16 c'est quand même assez compliqué.
09:18 Dans le sens où je culpabilise énormément
09:21 de ne pas avoir assez pris soin de moi
09:24 et de ne pas avoir été assez attentive finalement à ces éléments-là par le passé
09:31 et d'avoir été un peu plus en mode,
09:33 "ouais bah vas-y c'est pas grave, je vis, je profite et en avant-gardeant.
09:37 J'ai été fumeuse pendant très longtemps, à fumer un paquet par jour."
09:41 Donc de la culpabilité de faire vivre ça à mon mari,
09:43 qui au final, lui, n'avait rien demandé,
09:45 même s'il est d'un soutien sans faille exceptionnel
09:50 et il est magique.
09:53 Vraiment, il est magique.
09:54 Et surtout, beaucoup de frustration, de la tristesse.
09:58 C'est plein d'émotions qui sont mélangées à la fois.
10:01 Bon, bah ma foi, OK, d'accord, il y a une opération,
10:04 une opération qui va être lourde,
10:06 quelque chose qui va être dur à vivre
10:08 parce qu'on va arrêter mon cœur, me mettre une prothèse,
10:11 on va rebrancher mes coroner,
10:14 enfin bref, c'est une opération qui va être très très lourde,
10:16 qui va devoir par la suite y avoir un mois d'hospitalisation,
10:21 le temps que je reprenne un peu tout ça.
10:22 Donc ça déjà, ça fait peur,
10:24 parce qu'on a le risque zéro n'existe pas
10:26 et personnellement, je n'ai pas spécialement envie d'y rester.
10:28 Je ne me suis pas mariée pour être mariée que six mois, déjà.
10:32 Et puis, donc voilà, c'est plein de sentiments mélangés,
10:35 c'est de la peur, c'est de la colère, c'est...
10:39 D'un autre côté, pas le choix, il faut l'accepter.
10:41 Je veux dire, c'est là, c'est comme ça,
10:43 c'est sur mon chemin de vie, c'est comme ça,
10:45 c'est pas autrement et puis je dois passer cette étape
10:48 pour pouvoir réaliser mes autres projets.
10:51 Moi, je me suis toujours dit,
10:53 depuis que je suis toute petite,
10:54 Cécile, de toute manière, tu n'as pas le choix.
10:57 Tu es née comme ça, ça t'est tombé dessus.
10:59 OK, tu es comme ça, tu as deux possibilités.
11:02 Soit tu passes ta vie,
11:03 la totalité de ta vie, à te plaindre,
11:06 à te dire "Oh mais mon Dieu, mais ma peau, elle est comme ça.
11:09 Oh, mais je ne ressemble pas à toutes mes copines.
11:12 Oh, mais je parais plus âgée."
11:14 Donc soit tu es dans ce leitmotiv-là et finalement,
11:18 tu ne vis pas, tu es malheureuse,
11:20 tu n'es pas bien dans ta peau,
11:21 tu n'es pas à l'aise dans ce que tu es, dans qui tu es.
11:25 Soit tu dis "Ouais, OK, ça fait chier, ça me pète les couilles.
11:29 Je n'ai pas envie d'être comme ça.
11:31 J'aimerais être comme mes copines.
11:32 J'aimerais qu'on me prenne pas pour la mère ou la grand-mère ou la tante.
11:39 Et j'aimerais être prise pour moi, Cécile,
11:42 celle que je suis quand j'avais 15, 16, 18, 20, 25 ans.
11:47 Oui, j'aimerais, mais je ne peux pas."
11:49 "Ma foi, tu ne peux pas, alors vis avec et avance.
11:53 Et puis kiffe.
11:54 Et puis si les gens ne comprennent pas, eh bien tant pis.
11:56 Ce n'est pas pour rien que j'ai régulièrement utilisé
11:59 ma maladie quand on était avec mes copines pour acheter de l'alcool,
12:03 pour rentrer en boîte.
12:04 J'ai joué au casino, j'avais 13 ans.
12:07 C'était à l'époque où on n'avait pas besoin de présenter les cartes d'identité.
12:10 Et ça, c'était mon père.
12:11 C'était un truc de mon père.
12:12 En fait, on partait chez ma soeur et mon père m'avait dit
12:15 "Ah bah écoute, Cécile, avec ta mère, ta soeur et ton beau-frère,
12:19 on va aller au casino.
12:20 Et puis toi, tu resteras à la maison, garder ton neveu."
12:24 Moi, j'ai regardé mon père, je dis "Mais papa, avec la gueule que j'ai, moi je rentre."
12:27 Et en fait, il s'est pris au mot.
12:29 Et donc, ils m'ont grimé de la tête aux pieds.
12:31 Maquillage, collier de perles, robe noire, les talons, enfin bref.
12:36 Ils m'ont vraiment...
12:38 maturisé, on va dire ça comme ça.
12:41 Ou en tout cas, j'ai vraiment joué pour le coup le personnage.
12:44 Et je me souviendrai toujours, quand on était dans la voiture,
12:47 mon père m'a dit "Maintenant, tu fermes ta gueule,
12:49 parce que si tu l'ouvres, on est morts."
12:50 Et c'est passé comme une lettre à la poste.
12:52 Et je suis passée devant les physionomistes, nickel, tout allait bien.
12:56 Donc en fait, j'ai quand même joué de certains "avantages".
13:01 Si tu veux, à un moment donné, t'as pas le choix, t'es comme ça,
13:06 on va tirer au cil positif de chaque chose.
13:08 Mais il faut savoir que ça n'a pas toujours été le cas.
13:10 Et puis, il y a des moments où ce qui a été le plus compliqué,
13:13 c'est de voir justifié.
13:14 Principalement, dans tout ce qui est présenter les papiers.
13:18 J'ai un exemple, avec mes ex-petits copains,
13:22 on est partis ensemble au Ghana, parce que lui était originaire du Ghana.
13:26 Donc il était parti là-bas pour rencontrer sa famille, etc.
13:29 Donc ils ont eu aucun problème à me laisser rentrer au Ghana,
13:32 mais c'est pour repartir.
13:33 En fait, j'ai dû présenter un justificatif médical,
13:37 parce qu'ils pensaient que mon passeport était un faux
13:39 au vu de ma date de naissance.
13:41 J'ai été envoyée dans une salle avec un traducteur à Sermonté.
13:45 J'ai dû leur montrer le site internet, etc.
13:48 Parce qu'ils voulaient pas, j'ai failli louper mon avion.
13:50 J'ai failli repartir du Ghana,
13:52 parce qu'ils croyaient pas ma pièce d'identité.
13:54 Donc c'est là aussi où c'est un peu délicat,
13:58 et où ça a parfois été dur,
14:00 c'est de voir justifier de qui on est.
14:02 Parce que les gens ne nous croient pas.
14:04 Et c'est, je crois, ce qui au final a toujours été le plus dur.
14:08 Finalement, c'est pas les insultes, c'est pas les méchancetés gratuites,
14:11 parce que ça, ma foi, c'est des gens qui sont cons,
14:13 c'est des gens qui sont stupides.
14:14 Mais par contre, qu'on ne nous croit pas,
14:18 et principalement qu'on ne me croit pas,
14:20 que je sois obligée de me justifier,
14:23 j'ai mis du temps avant de pouvoir décrocher des entretiens d'embauche.
14:27 J'ai eu des entretiens d'embauche
14:29 à partir du moment où j'ai enlevé la photo de mon CV.
14:32 Comme si j'allais mentir là-dessus.
14:35 Donc c'est là où c'est finalement dur,
14:38 et où c'est "toi tu sais qui t'es".
14:41 "Toi tu sais qui t'es".
14:42 Oui, OK, t'as ça, t'as cette maladie génétique,
14:45 c'est pas facile, c'est pas évident.
14:47 Mais quand t'as des gens qui en fassent,
14:48 qui en plus de ça, ne te croient pas,
14:51 je crois que c'est finalement ça qui est le plus compliqué à gérer,
14:55 c'est de justifier en permanence de qui on est.
14:57 Alors après, c'est peut-être la maturité,
14:59 et puis mon âge aussi aujourd'hui qui fait que
15:02 c'est des choses qui me touchent plus,
15:04 et qui au contraire me dépitent
15:06 sur la mentalité de certaines personnes face à la différence.
15:13 C'est des choses qui me dépitent.
15:15 Mais ce que les gens ne se rendent pas compte,
15:17 c'est "putain, mais heureusement qu'on est différents".
15:20 "Mais heureusement qu'on n'est pas tous pareils".
15:23 "Heureusement qu'on n'est pas des copies et des clones".
15:26 Mais mon Dieu, mais on se ferait chier,
15:27 vous pouvez même pas imaginer à quel point on se ferait chier.
15:32 On s'emmerderait, il n'y aurait rien d'intéressant,
15:34 il n'y aurait pas de suspense.
15:36 Enfin, la vie serait terne s'il n'y avait pas de différence.
15:40 Moi personnellement, la vie aujourd'hui, je la kiffe, je la vis.
15:44 J'ai un mari exceptionnel qui me soutient au quotidien,
15:49 une famille exceptionnelle qui est toujours là derrière moi à me soutenir.
15:53 Bon nombre de fois, quand j'ai été plus petite,
15:56 j'ai failli baisser les bras.
15:58 Et quand je vois là où je suis aujourd'hui,
16:00 je me dis que j'ai bien fait d'y croire.
16:02 Donc on va continuer à y croire, tout simplement.
16:04 Que la vie, elle est belle,
16:06 que la vie, elle mérite d'être vécue pour n'importe qui.
16:09 Et on va continuer à croire au bonheur, tout simplement.
16:12 Sous-titrage Société Radio-Canada
16:14 C'est un documentaire réalisé avec la participation de CINEMA CONTROLleurs.
16:19 [SILENCE]