Allocution de Macron : "On a une forme d’enfilage de perles, un discours assez convenu et classique"

  • l’année dernière
"On a une forme d’enfilage de perles, un discours assez convenu et classique. L’absence de mesures fortes ou de symboles pour clore cette période. Aucune remise en cause" relève Loïc Hervé, sénateur (Union Centriste) de Haute-Savoie.

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00:00 – Bonjour Louis Carré. – Bonjour.
00:01 – Merci de nous accompagner pendant cette première demi-heure.
00:03 Vous êtes élu de la Haute-Savoie, membre du groupe Union centriste.
00:06 On va longuement revenir sur cette intervention d'Emmanuel Macron.
00:09 Vous l'avez entendu, 100 jours pour apaiser le pays.
00:11 C'est le cap qu'il a donné hier soir, c'est le bon cap pour vous ?
00:15 – C'est le cap de l'été.
00:16 Ce qui me surprend énormément dans l'intervention du président de la République hier soir,
00:21 c'est l'absence de mesures fortes ou de symboles
00:28 pour clore cette période.
00:30 En réalité, on a une forme d'enfilage de perles,
00:35 un discours assez convenu, assez classique,
00:39 et une perspective qui, à aucun moment, ne lui permet de se remettre en cause lui
00:47 ou son gouvernement dans la manière dont ils ont géré cette réforme des retraites.
00:51 Comme si c'était un mal nécessaire, qu'il fallait passer par là
00:54 et que c'était utile de faire ainsi.
00:56 Ce manque d'introspection, de recul et de jugement sur ce qui s'est passé
01:02 me laisse penser que les 100 jours qui viennent auront énormément de mal
01:06 à être, comme il le dit, 100 jours d'apaisement pour le pays.
01:09 C'est là que je suis inquiet, parce que les difficultés auxquelles les Français
01:16 se sont confrontés, les inquiétudes sur la situation internationale,
01:19 les questions de pouvoir d'achat restent des questions extrêmement fortes.
01:22 Il n'en a finalement que très peu parlé.
01:25 Donc, pas de changement de méthodologie, pas d'autocritique.
01:32 En somme, est-ce qu'il y a une nouvelle étape du deuxième quinquennat d'Emmanuel Macron
01:38 qui s'ouvre ? J'en doute vraiment.
01:40 Et je suis assez inquiet sur la relation qui existe entre l'exécutif et le pays.
01:44 Le Parlement affaibli l'Assemblée nationale et le Sénat, malgré sa bonne volonté,
01:49 auront énormément de mal à jouer ce rôle-là si le Président de la République
01:53 ne prend pas du recul et ne fait pas confiance aux corps intermédiaires
01:57 et à la vie démocratique du pays, c'est-à-dire le Parlement et les collectivités territoriales.
02:01 – On va y venir, parce qu'il aura tendu la main sur la réforme des retraites.
02:04 Alors, il a continué à la défendre, en disant qu'elle était nécessaire,
02:08 mais il a quand même reconnu qu'elle n'était pas acceptée. C'est un poupon ?
02:13 – Oui, mais comme s'il considérait qu'il n'y avait pas joué de rôle
02:17 ou que lui-même et le gouvernement d'Elisabeth Borne n'avaient pas
02:21 une responsabilité dans la manière dont les choses se sont passées.
02:24 Il prend comme exemple hier soir la question de la conférence nationale sur la fin de vie.
02:31 Enfin, si c'est ça le mode de gouvernement des 100 jours qui viennent,
02:34 à faire des conférences thématiques avec des citoyens tirés au sort,
02:37 pour dire en gros ce que le gouvernement a envie que les citoyens disent, ça ne marchera jamais.
02:42 On ne peut pas tenir le pays et ses représentants à l'écart de la décision publique.
02:51 Regardez par exemple sur la question de l'immigration, pas un mot hier soir.
02:54 On avait un projet de loi qui était inscrit à l'ordre du jour du Sénat, qui a été retiré.
02:59 Qu'est-ce qu'on en fait ? On n'en sait rien. On va aller vers les grands événements…
03:04 – On a dit un petit mot quand même, il faut prendre des mesures sur l'immigration.
03:07 – Il faut prendre des mesures, d'accord. Et alors ?
03:09 On va attendre l'année semaine prochaine que Mme la Première Ministre
03:12 nous annonce l'agenda parlementaire jusqu'au 14 juillet ?
03:16 C'est ça la nouvelle méthode de gouvernement du président de la République ?
03:19 C'est pour ça que je suis extrêmement inquiet. On va parler des institutions, très bien.
03:24 Alors il dit qu'avec le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat,
03:28 on va annoncer des choses en matière de sujet. Très bien.
03:31 Et on ne parle pas du tout de la manière dont le pouvoir est incarné,
03:34 notamment par un certain nombre de ministres.
03:37 Il ne parle pas de cette une de Playboy de Mme Schiappa, qui a été une erreur.
03:43 D'ailleurs c'est une erreur sur le fond, mais une erreur sur la forme qui est considérable.
03:47 Donc il n'y a pas d'autocritique hier soir. Je n'ai pas entendu d'autocritique et ça m'inquiète beaucoup.
03:54 Sur la réforme des retraites, est-ce que maintenant la porte de sortie, c'est le référendum pour vous ?
03:59 Jamais. Jamais. Parce que le référendum en France, dans la culture plébiscitaire du référendum,
04:07 fera en sorte que les Français ne répondront pas à la question qu'on leur pose.
04:11 Je prends pour exemple le référendum de 69, qui est le référendum du départ du général de Gaulle,
04:16 dedans il y avait la régionalisation, la réforme du Sénat, et finalement les Français disent non au général de Gaulle.
04:23 Donc il y a un vrai risque institutionnel à ce que ce référendum soit une occasion de dire autre chose que la question qui est posée.
04:31 Ça pose une autre question.
04:32 Donc même si le Conseil constate le valide, vous souhaitez que le Sénat rejette ce référendum ?
04:37 Moi je voterais contre cette idée-là. Je pense que c'est une très mauvaise idée.
04:41 Ça nous emmènerait d'ailleurs sur un timing qui n'est pas le bon.
04:45 Vous savez, moi je me suis abstenu sur la forme des retraites.
04:47 Donc j'aurais beaucoup de choses à dire sur cette réforme-là, sur le fond et sur la manière dont elle a été conduite.
04:53 Mais le retour devant le peuple sous cette nouvelle forme du RIP ou du RIC, c'est ça ?
05:01 – Du RIP, oui. – C'est une mauvaise idée.
05:04 – Il a tendu la main aux syndicats. Vous dites qu'il faut renouer le dialogue avec les syndicats.
05:07 Il leur a tendu la main, il les a invités à nouveau aujourd'hui à l'Élysée,
05:10 sauf que le patronat y va, mais les syndicats refusent d'y aller pour le moment.
05:14 Le Robert G, il dit qu'il faut un délai de décence. Ils ont raison pour vous ?
05:16 – Pas complètement. Ils vont lui poser un lapin ce matin, c'est tout à fait logique.
05:22 La négation dans ce pays des corps intermédiaires, c'est-à-dire de ceux qui représentent quelque chose
05:29 lié au mouvement social, au monde associatif, au monde économique, c'est la négation du pays réel.
05:37 Et on peut considérer que le président de la République a un problème avec le pays réel,
05:42 avec le pays profond. Donc il y a une responsabilité à avoir coupé les ponts avec Laurent Berger,
05:50 avec la CFDT, avec cette forme de syndicalisme social-démocrate, constructif,
05:56 qui avait d'ailleurs soutenu la réforme par points en 2019.
06:00 Oui, c'est une évidence. Ne pas les avoir reçus au moment où il y avait une forme de colère dans le pays.
06:10 Et dire "la porte était toujours ouverte aujourd'hui", c'est une ironie qui est insupportable
06:15 pour ces représentants-là. Donc je comprends qu'ils n'aillent pas à la réunion aujourd'hui.
06:20 Et puis les autres sujets, ça va être quoi ? Ça va être par exemple toutes les mesures
06:23 que le Sénat a votées et que le Conseil constitutionnel a fait sauter.
06:26 – Dont il n'a pas reparlé hier. Vous le regrettez ?
06:29 – Évidemment ! Ça a été une des raisons pour lesquelles un certain nombre de sénateurs
06:34 ont voté cette réforme. Ça a été une raison pour laquelle un certain nombre de députés,
06:38 notamment les Républicains, étaient prêts à la voter.
06:41 Et il faudra qu'on en reparle de ces sujets-là.
06:43 Il faudra quand même qu'on reparle d'un certain nombre de sujets dans le domaine du pouvoir d'achat.
06:47 – Dans une loi travail, vous souhaitez que les mesures retoquées par le Conseil constitutionnel
06:51 soient dans une loi travail prochainement ?
06:53 – Oui, sauf que la difficulté, c'est que la Première ministre a annoncé
06:56 qu'elle ne recourrait plus au 49-3 et qu'il faudra trouver une nouvelle majorité sur ce sujet-là,
07:01 y compris avec la gauche de la majorité présidentielle.
07:03 – Et sur la loi travail, ça ne vous paraît pas possible ?
07:05 – La question est totalement ouverte.
07:08 Le 49-3 a été utilisé pour cette réforme des retraites.
07:11 Est-ce que le gouvernement est prêt à l'utiliser à nouveau sur des mesures
07:15 qui ont été sorties de ce projet de loi de financement rectificatif de la Sécurité sociale ?
07:21 – Emmanuel Macron a tendu la main aux oppositions et aux maires,
07:25 notamment il veut relancer une nouvelle coalition.
07:28 On en parle avec notre journaliste parlementaire Alex Coussart.
07:31 [Générique]
07:38 – Bonjour Alex. – Bonjour Yann.
07:39 Bonjour Louis Carré. – Bonjour.
07:40 – Et Alex, Emmanuel Macron a essayé d'apporter quelques réponses
07:43 à la crise politique que nous connaissons.
07:44 – Oui, alors même si le chef de l'État ne parle pas explicitement de crise démocratique
07:48 comme le font ses opposants ou comme le font les syndicats,
07:51 Emmanuel Macron a reconnu hier en creux qu'il y avait une défiance des citoyens
07:55 vis-à-vis de nos institutions, de la démocratie
07:58 et qu'il fallait les faire évoluer ces institutions.
08:01 Écoutez le Président de la République.
08:03 – Rénover l'ordre républicain et démocratique signifie également
08:06 que nous devons lutter contre le sentiment persistant que voter ne serait plus décidé.
08:13 Je proposais à cet égard, en lien avec la Présidente de l'Assemblée nationale,
08:17 le Président du Sénat, le Président du Conseil économique, social et environnemental,
08:22 des grandes pistes pour que le fonctionnement de nos institutions
08:25 gagne en efficacité mais aussi en participation citoyenne,
08:29 comme nous venons d'ailleurs de le faire avec la Convention citoyenne sur la fin de vie.
08:33 – Une réforme des institutions qui se décide,
08:36 mais Emmanuel Macron ne parle plus de la fameuse commission transpartisane
08:39 qui devait regrouper toutes les forces politiques, y compris les oppositions,
08:43 pour dessiner cette réforme des institutions.
08:46 En revanche, le Président de la République s'est montré ouvert à travailler
08:50 dans la suite de son quinquennat avec tous ceux qui le souhaitent écouter.
08:54 – Je sollicite toutes les forces d'action et de bonne volonté, nos maires, nos élus,
08:58 nos forces politiques, nos syndicats, tous ensemble.
09:02 Je compte mieux les associer en relançant dès le mois de mai
09:04 des coalitions et alliances nouvelles sur les bases solides
09:07 du Conseil national de la refondation au plus près du terrain.
09:12 Et chacun d'entre vous avait un rôle à jouer.
09:15 – À voir maintenant si Emmanuel Macron va réussir à rassembler autour de son action.
09:19 Ce n'est pas gagné quand on connaît sa relation avec les oppositions.
09:23 En tout cas, le Président veut utiliser ses 100 jours aussi
09:24 pour restaurer l'unité du pays.
09:27 Loïc Hervé, on l'a vu, le Président de la République va travailler
09:30 sur des grandes pistes pour réformer nos institutions.
09:33 Selon vous, quelles mesures doivent être prises
09:36 pour réformer notre système démocratique ?
09:38 – Pour moi, c'est des mesures qui tiennent à l'exécutif
09:45 et à la manière dont l'exécutif fonctionne.
09:47 Le couple Président de la République-Premier ministre et le gouvernement,
09:52 notamment le gouvernement dans sa relation avec le Parlement.
09:54 Je m'explique.
09:55 Aujourd'hui, le Président de la République est dans une posture
09:58 non-gaullienne des choses, c'est-à-dire qu'il est très impliqué
10:01 dans les affaires intérieures.
10:02 La Première ministre, en fait, exécute,
10:04 elle est forme de secrétaire général de l'Élysée,
10:07 super secrétaire général de l'Élysée, et le gouvernement est pléthorique
10:11 avec des ministres inconnus, dont un certain nombre,
10:15 font des choses que le Parlement ignore.
10:18 C'est-à-dire qu'on ne sait pas trop ce que tel ou tel secrétaire d'État
10:21 ou ministre délégué fabrique.
10:23 Donc il faut un gouvernement resserré, politique,
10:26 une Première ministre qui soit vraiment en charge de la gestion du pays,
10:31 ce que la Constitution prévoit, et un Président de la République
10:34 qui prenne de la distance et qui soit en capacité, s'il l'appelle,
10:39 d'être justement ensemblié et d'aller chercher des alliés
10:46 pour un gouvernement de mission, pas pour aller exécuter un programme
10:50 qui est forcément le programme que lui seul aura décidé.
10:52 Mais ça suppose, non pas une réforme constitutionnelle,
10:55 mais un changement complet de manière d'être et d'agir,
10:59 d'abord, d'entre nous, quel Président de la République veut-il lui-même
11:04 abandonner une partie de ses prérogatives,
11:06 veut-il en confier davantage à sa Première ministre
11:09 et veut-il avoir des ministres politiques
11:11 qui travaillent avec le gouvernement de manière intelligente ?
11:14 Moi, il se trouve qu'ici, dans cette maison, au Sénat,
11:17 je travaille sur les questions de sécurité intérieure et de sécurité civile.
11:21 Donc quand des textes arrivent à la Commission des lois
11:23 avec d'autres collègues comme Marc-Philippe Dobresse,
11:25 nous travaillons par exemple sur les questions de police,
11:28 de gendarmerie, sur des questions intérieures.
11:32 Nous avons un ministre référent qui est très politique
11:35 qui s'appelle Gérald Darmanin. Il n'y a aucun problème.
11:38 Mais je plains mes collègues qui travaillent dans d'autres domaines
11:42 où ils ont des référents au gouvernement qui sont des référents techniques,
11:48 jamais politiques, où il est très difficile d'avancer sur tel ou tel sujet
11:52 parce que le ministre est tenu par ses collaborateurs,
11:56 son cabinet, ou n'ose pas faire de la politique.
11:59 Il faut que dans ce pays, on arrive à faire de la politique.
12:01 On est dans une situation de minorité à l'Assemblée nationale,
12:04 de majorité relative, si l'on veut.
12:06 Et donc il faut juste accepter cette réalité-là
12:09 et que le fonctionnement institutionnel du pays,
12:12 vous savez la Vème République est robuste,
12:14 mais il faut que le fonctionnement du pays s'adapte à la nouvelle réalité politique.
12:17 Je ne suis pas sûr qu'il faille aller modifier la Constitution
12:19 pour changer quoi que ce soit.
12:20 – Plus de ministres comme Gérald Darmanin.
12:22 – Il faut plus de ministres politiques comme Gérald Darmanin,
12:25 il faut moins de ministres en général,
12:26 et il faut qu'on ait des interlocuteurs et des personnes
12:29 qui prennent les sujets à bras-le-corps et qui les fassent avancer.
12:33 – Donc pour vous, il faut déprésidentialiser finalement le régime ?
12:36 – Je suis un centriste, je suis un parlementariste militant,
12:42 et je pense que sans avoir le risque de retomber sous la 4ème République,
12:48 il faut qu'on ait une capacité d'assumer que nous sommes une démocratie parlementaire
12:53 et que nous fassions confiance au Parlement, Assemblée et Sénat,
12:59 et que nous fassions confiance au corps intermédiaire.
13:01 C'est juste que l'exécutif se rende compte qu'en face de lui, il y a le pays réel.
13:06 – Bon, mais hier il a appelé à relancer les coalitions, les alliances solides,
13:10 est-ce que vous pourriez participer à ça ?
13:12 – Alors, la participation d'un certain nombre de formations politiques
13:17 qui concourent d'ailleurs à l'exercice de la démocratie dans la Constitution
13:21 à un gouvernement nommé par Emmanuel Macron,
13:26 supposerait qu'on ait un gouvernement de mission,
13:28 c'est-à-dire que pour une durée donnée, il y ait un pacte de gouvernement précis.
13:36 Durée donnée qui n'est pas forcément d'ailleurs le terme du mandat présidentiel,
13:39 mais qui serait de dire que,
13:41 et d'ailleurs c'est ce que Emmanuel Macron aurait dû faire après les législatives,
13:44 c'est-à-dire à l'Allemande de dire
13:47 "nous avons un certain nombre de choses à faire dans l'intérêt du pays",
13:52 il y avait retraite, mais on voit bien comment ça se finit,
13:55 il y a les sujets d'immigration qui sont des sujets importants,
13:58 il y a les sujets travail, pouvoir d'achat,
14:00 et dans cette durée-là de dire "voilà le programme que je propose"
14:05 et sur cette base-là, construite d'ailleurs ou pas
14:08 avec un certain nombre de formations politiques
14:09 qui ne sont pas aujourd'hui dans la majorité…
14:11 – Mais vous souhaitez qu'il le fasse, il est encore temps pour vous ?
14:14 – Ce que j'ai entendu hier soir, à part des incantations
14:17 et je vous avais dit, une forme d'enfilage de perles,
14:20 ce n'est pas le chemin qu'on prend, mais c'est…
14:22 – Vous le détestez qu'il n'ait pas tendu la main à la droite et au centre hier ?
14:25 – C'est le seul moyen de faire avancer le pays, le veut-il vraiment ?
14:29 – Et vous ?
14:31 – Moi je crois que c'est le seul moyen si on ne veut pas…
14:33 Moi si vous voulez, ma seule inquiétude,
14:36 c'est qu'aux prochaines élections présidentielles,
14:38 on n'est pas un président de la République
14:40 qui vienne de la France insoumise ou du Rassemblement national.
14:43 C'est le seul sujet qui me préoccupe, qui m'empêche vraiment de dormir
14:47 parce que je pense qu'on prend vraiment le chemin de cela,
14:51 entre Pif Gadget, Playboy et le bras d'honneur
14:54 du ministre de la Justice à un parlementaire,
14:57 dans la séquence, qu'à aucun moment on ait eu une remise en ligne du gouvernement
15:03 en disant que maintenant il s'agirait de siffler la fin de la récré
15:07 et que les ministres, notamment un certain nombre d'entre eux,
15:10 se mettent vraiment à avoir des attitudes acceptables
15:13 dans la période de gravité qu'est la nôtre.
15:15 On n'est pas des saints, ça j'en suis bien conscient,
15:19 on est des êtres humains, hommes et femmes, parlementaires, ministres, etc.
15:23 Mais il faut un peu d'essence quand même.
15:27 – Alors la Première ministre Elisabeth Borne est maintenue
15:29 au moins jusqu'au 14 juillet, au terme de ses 100 jours.
15:31 Est-ce que ça peut être la bonne chef de gouvernement
15:34 de ce gouvernement de mission politique que vous souhaitez ?
15:38 – Il faudra qu'Elisabeth Borne ait davantage d'empathie
15:42 et de capacité à trouver des dialogues.
15:47 Je l'ai rencontrée pour un certain nombre de fois,
15:49 c'est une femme que j'estime honnête, travailleuse,
15:53 pleine de bonne volonté, mais il faut qu'elle fasse davantage de politique.
15:59 Je reviens sur ce sujet-là, encore une fois,
16:02 elle vient d'une haute fonction publique,
16:07 elle a une dimension de technicienne, elle connaît très bien ses sujets,
16:10 mais il faut qu'elle fasse de la politique.
16:12 Et faire de la politique, ça suppose d'un moment donné d'ouvrir aussi
16:16 sa personne, de craquer un peu l'armure vis-à-vis des Français
16:20 et vis-à-vis des formations politiques,
16:24 d'être capable aussi d'élargir le spectre.
16:27 Vous savez, la majorité présidentielle,
16:30 elle s'est rendue compte qu'elle était face à des difficultés importantes
16:33 avec les dernières législatives.
16:36 Mais de cette prise de conscience aux actes,
16:40 il y a parfois encore du chemin, c'est vrai pour la Première ministre,
16:43 mais c'est vrai aussi pour certaines attitudes à l'Assemblée nationale,
16:46 parfois on a encore l'impression d'être en 2017.
16:49 – Dernière question.
16:49 – Dernière question, sur cette méthode du Conseil national de la refondation
16:53 qui est déclinée en plusieurs thématiques,
16:55 Emmanuel Macron a estimé que c'était une réussite
16:57 et il voulait approfondir cette méthode,
16:59 qu'est-ce que vous en pensez ?
17:00 – Il faut tout arrêter, il faut tout arrêter,
17:02 il faut arrêter de faire croire au peuple et à ses représentants
17:09 qu'il y aurait une forme de démocratie spontanée
17:14 qui viendrait du simple fait que le Président de la République
17:16 appuierait sur un bouton qui s'appelle CNR
17:18 et que de ce Conseil national de la refondation,
17:22 on aurait pu employer en plus un terme qui nous rappelle 43-44,
17:28 on aurait tout de suite des bonnes idées qui émergeraient comme ça du pays
17:33 par une forme de spontanéité démocratique.
17:36 Mais non, ça ne marche pas ça.
17:38 Et donc autant le CNR que les histoires,
17:41 les conventions citoyennes du climat ou fin de vie,
17:45 il faut arrêter le plus vite possible ce type de méthode-là
17:49 parce qu'en fait c'est se foutre de la figure du Parlement
17:54 et des corps intermédiaires et du monde des élus locaux.
17:58 On a largement dans le pays, entre le Conseil économique et social,
18:02 les associations d'élus, le Parlement,
18:05 on a largement de quoi faire sans à nouveau créer de nouveaux bidules
18:10 qui serviraient en plus à servir la soupe à l'exécutif.
18:14 Parce que moi je peux vous dire que les conclusions de la Convention nationale
18:19 sur la fin de vie, on aurait pu les écrire avant.
18:23 Et quand on regarde qui est intervenu devant cette Convention nationale,
18:27 y compris chez les philosophes qui étaient tous favorables
18:29 au suicide assisté et à l'euthanasie,
18:32 il y a honnêtement de quoi remettre en cause complètement ce type-là.
18:35 Donc ce type de méthode-là, je le dis au Président de la République,
18:38 il faut arrêter tout ça et pas dire "sur les bases solides du CNR".
18:40 Oui enfin pardon, tu parles.
18:42 – Mais sur la fin de vie, le Parlement aurait évidemment de dernier mot.
18:45 Il y a un projet de loi qui va être présenté.
18:48 Mais ça veut dire que vous le voterez ?
18:50 – Ah ben si voter les conclusions du CNR, jamais de la vie.
18:58 Jamais de la vie.
19:00 Moi je suis pour les soins palliatifs,
19:04 je suis pour qu'on aille au bout de l'application de la loi Claes-Leonetti,
19:09 mais le suicide assisté et l'euthanasie dans mon pays, jamais.
19:13 Et je me battrai sur ces sujets-là.
19:15 C'est des sujets qui renvoient chez moi
19:18 aux raisons d'être de mon engagement politique
19:21 et finalement à ce qu'est un être humain.
19:25 Aux raisons d'être de ce qu'est la personne humaine.
19:31 Et donc ce ne sont certainement pas ces conclusions-là que je voterai.
19:34 J'ai beaucoup de choses à dire sur ce sujet-là.
19:37 – On en reparlera évidemment avec vous.
19:38 On va remercier Alex d'abord, à tout à l'heure.
19:41 – On se retrouve dans le club pour parler des chantiers économiques
19:43 que veut lancer Emmanuel Macron.
19:44 – Ce sera dans le club et on va voir l'actualité dans votre région
19:46 avec nos partenaires de la presse régionale.
19:49 Bonjour Frédéric Thiers, merci beaucoup d'être avec nous,
19:52 chef d'agence du Dauphiné Libéral Saint-Jean de Morienne.
19:55 On va parler d'un tout autre sujet.
19:56 Avec vous, on va parler du lion curin. On en est où ?
20:00 Alors le lion de Turin, aujourd'hui ce sont deux réalités,
20:02 ou plutôt une réalité, le tunnel en lui-même,
20:05 un tunnel de base en pleine construction,
20:07 et puis une virtualité sont les accès au lion de Turin.
20:10 Le tunnel, un double tube, 2 x 57 km entre Saint-Jean de Morienne,
20:14 en Savoie et Suse, de l'autre côté des Alpes, plus des galeries annexes.
20:18 On a déjà creusé environ 17%, la livraison de l'ouvrage c'est pour 2032.
20:23 L'objectif c'est faire passer dedans 40 millions de tonnes de marchandises par an.
20:28 Ça a un coût bien sûr, le tunnel c'est 8,6 milliards d'euros,
20:32 et le financement prévu au départ c'était l'Europe 40%, l'Italie 35%, la France 25%.
20:38 Vous me direz pourquoi l'Italie paie plus que la France ?
20:41 À l'origine Rome avait accepté cette participation,
20:44 parce qu'un tunnel neuf qui débouche de chaque côté sur un réseau vieillissant,
20:49 ça ne sert à rien, il faut des accès à ce tunnel.
20:52 Or entre Turin et Suse, il n'y a que quelques dizaines de kilomètres,
20:55 la plupart c'est à plat.
20:57 Les Italiens ont déjà phasé et financé ces accès,
21:01 ils nous disent qu'ils seront livrés en même temps que le tunnel, en 2032 donc.
21:05 En France c'est plus compliqué,
21:07 il faut réaliser le contournement ferroviaire de la Gomération lyonnaise, le fameux Cefal,
21:12 et aussi une ligne nouvelle entre Lyon et Saint-Jean-de-Maurienne,
21:14 ça fait 140 kilomètres et une grande partie c'est en sous-terrain.
21:18 Les accès français ont été validés par une déclaration d'utilité publique en 2013,
21:24 mais depuis il n'y a plus rien.
21:26 Aucune décision, pas d'argent mis dans le dossier, rien du tout.
21:29 L'Europe est prête, elle a encore à financer jusqu'à la moitié de ses accès,
21:34 mais la France ne lui a même rien demandé du tout.
21:36 Du coup l'Union s'impatiente, et l'Italie aussi.
21:39 L'Italie se demande si elle n'est pas en train de se faire avoir par la France,
21:43 qui lui a fait payer plus pour le tunnel de base,
21:45 en échange d'accès qu'elle ne fera jamais.
21:48 Du côté de l'Europe, c'est pour l'avenir du réseau ferroviaire continental qu'on est inquiet.
21:53 Le lion-thurin en effet c'est le maillon d'un corridor qui est bien plus long,
21:58 qui va du sud de l'Espagne ou de Lisbonne jusqu'à Budapest,
22:01 et puis sans doute plus tard jusqu'à Kiev.
22:03 Et c'est aussi un des très rares axes est-ouest en Europe,
22:06 alors que tous les réseaux européens sont aujourd'hui plutôt orientés du nord vers le sud.
22:11 Alors la question qu'on a envie de vous poser Louis Kervé,
22:13 c'est est-ce qu'il y a urgence à faire avancer ce dossier,
22:16 ou alors est-ce qu'on peut attendre encore un petit peu,
22:18 comme le suggère le Conseil d'orientation des infrastructures,
22:21 qu'il verrait bien ces axes repousser à 2042 voire 2045 ?
22:27 C'est une excellente question et bravo pour ce résumé extrêmement précis
22:32 de ce qu'est le projet lion-thurin.
22:33 Vous savez, comme vous j'imagine, moi je vis dans une vallée alpine qui s'appelle la vallée de l'Arve,
22:38 et comme la vallée de la Maurienne par exemple,
22:39 nous sommes confrontés depuis des années au sujet de l'engorgement et de la pollution de l'air.
22:47 Je le dis avec une certaine émotion et aussi une certaine irritation.
22:52 Quand on parle de renvoyer les accès français à 2045,
22:57 on tourne le dos à des engagements français vis-à-vis de l'Union européenne
23:01 qui touchent à la vie quotidienne des Hauts-Savoyards et des Savoyards.
23:05 Et en fait, je n'ai pas d'humour avec ce sujet-là.
23:08 Ici, nous sommes des dizaines et des dizaines de parlementaires,
23:12 alors autour d'Étienne Blanc la semaine dernière,
23:15 mais aussi des parlementaires de la majorité présidentielle qui sont montés au créneau.
23:20 C'est qu'on veut simplement qu'on arrête de nous prendre pour des imbéciles
23:24 et on veut simplement qu'on honore la parole du pays de réaliser les choses.
23:30 Il y a cinq ans, quand le mouvement 5 étoiles en Italie remettait en cause les accès du côté italien,
23:36 j'avais posé une question d'actualité au gouvernement à Elisabeth Borne,
23:40 qui était ministre des Transports.
23:41 J'ai retrouvé cette question et elle dit clairement qu'il faut honorer la parole de l'Italie vis-à-vis de l'Union européenne,
23:48 comme d'ailleurs nous devons honorer la parole de la France vis-à-vis de ce projet.
23:52 Le Lyon-Turin, il faut le faire.
23:54 Le tube principal est en cours.
23:56 Moi, je suis allé sur le chantier.
23:58 C'est un projet extraordinaire.
23:59 C'est un des grands investissements.
24:01 Imaginez qu'on ait fait le tunnel sous la Manche sans faire Londres-Douvre ou Paris-Calais.
24:07 Ce serait ridicule.
24:09 C'est le même sujet en fait. Il faut faire les accès en même temps que le tube principal
24:15 et livrer l'intégralité de l'infrastructure.
24:18 L'État doit être au rendez-vous.
24:19 – Un dernier mot Frédéric ?
24:22 – Oui, selon vous, Louis Carré, qu'est-ce que peuvent faire des parlementaires de surcroît d'opposition ?
24:27 En d'autres termes, est-ce que la voix de l'élu, la voix du politique,
24:31 la force des traités signés ont encore quelques poids face à celui de l'administration
24:36 ou au moins de certaines administrations dont on sait qu'elles traînent des pieds,
24:40 c'est le moins qu'on puisse dire ?
24:42 – Eh bien, il faut rappeler au Conseil d'orientation des infrastructures
24:47 qu'il n'est pas le Parlement, que c'est le Parlement qui fait la loi dans ce pays
24:50 et que l'exécutif est en charge d'exécuter, c'est le cas de le dire,
24:54 les lois et les engagements internationaux qui ont été pris.
24:57 La force de ce projet, c'est qu'il a été soutenu par l'intégralité des gouvernements
25:03 au pouvoir dans notre pays depuis une vingtaine d'années,
25:07 qu'il s'agisse de gouvernements de gauche ou de gouvernements de droite, etc.
25:11 Donc on a une force, c'est de… au-delà de l'opposition,
25:16 parce que vous savez, il y a Joël Giraud qui soutient notre initiative,
25:20 donc on ne peut pas dire que Joël soit dans l'opposition,
25:23 où il y a des parlementaires comme moi qui sont des parlementaires modérés
25:26 et qui n'avons jamais voulu faire de la politique politicienne sur ce sujet-là.
25:29 Et puis il y a des gens qui sont beaucoup plus à gauche ou beaucoup plus à droite que moi
25:33 et qui soutiennent. Donc c'est une espèce de front commun que nous faisons
25:36 pour dire au gouvernement, à la Première Ministre et aux ministres des Transports,
25:40 nous devons réaliser ce projet dans les temps, il y a urgence.
25:45 – Merci Frédéric, merci d'avoir été avec nous.
25:48 100 jours pour se relancer, c'est à la une du Dauphiné,
25:51 aujourd'hui évidemment, ça parle de la locution d'Emmanuel Macron.
25:54 Merci beaucoup d'avoir été avec nous.
25:56 Merci Loïc Harvey d'avoir été notre invité pendant cette première demi-heure.
25:59 Et à très vite évidemment dans cette émission,
26:01 dans 20 minutes dans le Club des Territoires,
26:03 on revient sur la locution d'Emmanuel Macron,
26:05 débat entre deux économistes, Jean-Marc Daniel et Mathieu Plade.
26:08 Ce sera à suivre et on en parle tout de suite avec notre prochaine invitée.
26:11 Quel bon petit matin !

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