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Transcription
00:00 Vous venez de le voir dans le sujet il y a quelques instants. On poursuit tout de suite avec notre invité du jour, c'est Bruno Cotteres.
00:04 Bruno Cotteres, bonjour. Chercheur CNRS au Cevipof, enseignant par ailleurs à Sciences Po.
00:13 Le chef de l'État qui donne donc rendez-vous aux Français ce soir à 20h. On en parlait il y a quelques instants, il ne reste que d'y avoir du monde devant le petit écran.
00:20 D'autant que sa parole, elle est quand même assez rare au chef de l'État.
00:23 Oui, puis il a voulu donner une certaine solennité à l'occlusion à 20h depuis l'Elysée. Donc on est dans un moment que le chef de l'État a voulu, un moment solennel.
00:33 Il y aura sans doute beaucoup de monde. Le pays est extrêmement concerné, le pays est extrêmement tendu sur cette question des retraites.
00:39 Donc beaucoup de gens ont envie d'entendre les explications d'Emmanuel Macron. Pourquoi on en est là ? Pourquoi cette crise qui a duré autant de mois ?
00:47 Puis peut-être aussi de dégager quelques perspectives, de donner du sens à cette réforme.
00:52 Vous dites écouter ces explications justement parce qu'il y a encore des éclairages à apporter.
00:56 On dit que l'objectif de cette allocution, c'est de refermer le chapitre douloureux de la séquence retraite. Ça fait trois mois que ça dure.
01:03 Passez aussi à autre chose, se tourner vers la suite du quinquennat. Est-ce que ce n'est pas un peu trop tôt ?
01:09 C'est un peu tôt. Alors c'est vrai que le chef de l'État ne peut sans doute raisonnablement passer à la suite que s'il revient un peu sur cette question des retraites.
01:18 Ce n'est pas vraiment le fond. Parce que maintenant, le fond pour le chef de l'État, c'est fait. La réforme a été validée par le Conseil constitutionnel. Donc c'est fait.
01:25 La loi promulguée d'ailleurs ce week-end.
01:27 La loi a été promulguée quelques heures après. Mais par contre, ce qui manque toujours au chef de l'État, c'est de revenir au fond sur la méthode qu'il a utilisée,
01:35 qui a beaucoup choqué, beaucoup, beaucoup. Les Françaises, les Français ont été très marqués par la multiplication de ces instruments législatifs
01:43 qui à la fin donnent toujours le sentiment que c'est toujours le pouvoir exécutif qui a raison et qui gagne de toute façon à la fin.
01:49 Beaucoup de déceptions aussi autour de la décision du Conseil constitutionnel. Donc il faut que le chef de l'État quand même revienne sur ce moment.
01:55 Parce qu'il ne pourra pas simplement nous présenter quelques mesures en disant "moi je considère que la parenthèse est fermée".
02:01 Donc la parenthèse est fermée, elle n'est pas fermée du tout dans l'opinion.
02:05 On témoigne ces chiffres. Il y a beaucoup de sondages en ce moment.
02:08 Si beaucoup de Français devraient suivre cette allocution du chef de l'État, 9 Français sur 10 selon un dernier sondage élab pour BFMTV
02:16 estiment que ça ne va changer absolument rien au sujet que la colère va rester très forte.
02:20 Oui c'est un peu le paradoxe. Il y aura sans doute beaucoup, beaucoup de monde qui vont regarder le chef de l'État ce soir.
02:24 Mais alors par contre, beaucoup de monde qui vont regarder le chef de l'État en disant "maintenant Emmanuel Macron, on le connaît bien, ça fait 6 ans qu'il est là.
02:31 Il nous a habitués à de très belles allocutions. C'est vrai qu'Emmanuel Macron est un président qui travaille beaucoup ses discours, ses allocutions.
02:38 Donc sans aucun doute que ce soir il y aura un très beau discours. Mais beaucoup de Françaises et de Français vont regarder en disant "d'accord, très beau discours.
02:45 Mais au fond, de toute façon, il veut toujours avoir raison".
02:49 Et donc beaucoup vont regarder, mais sans avoir beaucoup d'illusions.
02:52 Et d'une certaine manière ont déjà acté que le chef de l'État a pratiquement gagné sur cette adoption des 64 ans.
03:00 Le risque, c'est quoi ? Peut-être parlons des syndicats. Il y a une invitation qui leur a été lancée pour demain, fin de non recevoir.
03:07 Apparemment l'invitation reste sur la table. On a peu d'espoir de les voir retourner là-bas.
03:13 Après la séquence avec Elisabeth Borne, tout le monde s'en souvient.
03:16 Les syndicats, cette phrase de Laurent Berger, le patron de la CFDT jusqu'au bout.
03:22 Le mépris, y compris Laurent Berger, qu'on a cru un moment possible, avec qui on a cru un moment possible de négocier, de discuter.
03:29 Avec l'entourage d'Emmanuel Macron, à tenter plusieurs approches.
03:32 On voit que là aussi, ça reste toujours fermé. L'intersyndical, elle fait toujours front uni. Ça, c'est complètement inédit.
03:38 Oui, alors l'histoire des syndicats, il y a deux aspects.
03:41 Je dirais qu'à la fois, c'est peut-être la chose la plus inattendue de toute cette crise.
03:46 On était habitué à des syndicats qui avaient un peu perdu le contrôle,
03:49 qui a donné le sentiment d'avoir une faible capacité à mobiliser, qui montraient souvent une image de division.
03:54 Et puis là, on a eu tout le contraire. Des syndicats qui, en cadre, jouent parfaitement leur rôle d'expression publique à travers la société civile,
04:01 qui sont arrivés organisés à douze reprises des journées de mobilisation et qui ont maintenu une unité syndicale très forte.
04:08 Avec des chiffres constants, puisque la population continue de suivre.
04:12 Je crois que les Français sont toujours derrière eux. Je crois que les derniers sondages, c'était 62%.
04:19 Voilà, donc la difficulté, c'est qu'on voit qu'il y a une sorte de bijou qui est ressorti de cette mobilisation des retraites.
04:28 On disait que la France, le point faible, c'était le dialogue social, le rôle des syndicats.
04:32 Là, on voit qu'ils sont revenus sur le devant de la scène.
04:35 Donc il y a là quelque chose qui est très intéressant, très important pour le fonctionnement démocratique du pays.
04:40 Et en même temps, on est dans une séquence où les syndicats disent « Ben nous, finalement, le chef de l'État, il nous a marché dessus, il nous a humiliés ».
04:46 Et donc on a là quelque chose qui est à la fois potentiellement très important pour l'avenir de notre système démocratique,
04:51 mais en même temps porteur de beaucoup de choses inquiétantes.
04:55 Si jamais, au fond, les Françaises, les Français disaient « Ça n'a servi à rien. On s'est mobilisés 12 fois. On a perdu des journées de salaire.
05:02 On a cru que les syndicats feraient bouger les choses. Finalement, ça n'a pas marché ».
05:06 Alors là, par contre, ça serait absolument dramatique, parce que les partis politiques sont faibles et pas du tout populaires.
05:12 Les syndicats ne sont pas très forts et sont moyennement populaires.
05:15 Donc si la conclusion qu'on tire, c'est que tout ça ne sert à rien, alors là, c'est terrible.
05:19 Ça, c'est la question que j'allais vous poser. On sent bien aussi du côté, y compris des syndicats, ce changement dans la rétorique qu'appellent.
05:25 Donc la prochaine journée de mobilisation qu'ils appellent de leur vœu, c'est celle du 1er mai, jour très symbolique.
05:29 Ils appellent à casser la baraque. On entend ici et là certains dire « Il faut durcir ce mouvement ».
05:36 Et je crois que les Français adhèrent de plus en plus à ces nouveautés, à cette thèse.
05:42 Il y a 5 points de plus sur les sondages. 45% de la population estime qu'il faut que le mouvement se durcisse.
05:51 Ça, c'est aussi une nouveauté.
05:53 Oui, c'est vrai qu'on a constaté en France depuis ces dernières années, à plusieurs reprises, des séquences où on a à la fois de la mobilisation sociale,
06:02 mais aussi des scènes de violence dans la rue. On se rappelle quand même tous de cette crise des Gilets jaunes,
06:07 qui a été quelque chose qu'aucun autre pays européen n'a connu. À la fois une crise d'exaspération sociale, une crise démocratique assez profonde,
06:15 de la violence de partout, à la fin un grand débat national. On se demande où sont passées les conclusions du grand débat national d'ailleurs, un peu aujourd'hui.
06:22 Et puis là, on a à nouveau une nouvelle crise sociale avec aussi à nouveau un retour de certaines formes de violence,
06:29 mais par contre une bonne capacité, ce coup-là, des syndicats à être vraiment sur le devant de la scène, à être les organisateurs.
06:35 C'est une grande différence avec la crise des Gilets jaunes. Donc il ne faudrait effectivement surtout pas qu'on s'habitue progressivement à ce que
06:42 les institutions démocratiques ne marchent pas et qu'il n'y aurait que la violence pour se faire entendre.
06:46 Est-ce que ce n'est pas ce qui est un peu en train de se passer ? Parce qu'au moment des Gilets jaunes, à l'époque des Gilets jaunes,
06:50 on se souvient que ces scènes de violence avaient finalement clos le dossier, étouffé le dossier. Les Français et l'opinion publique s'étaient désolidarisés largement.
06:57 Aujourd'hui, on voit que ça ne fonctionne pas, ça n'opère pas de la même manière.
07:00 Non, justement, parce que les syndicats ont été là, ont marqué une très forte capacité à canaliser l'expression publique, à canaliser l'exaspération sociale.
07:09 Ils ont pleinement joué leur rôle. Et c'est de ce point de vue-là qu'il ne faut surtout pas que du point de vue de l'exécutif,
07:15 on soit dans une séquence où on ne va pas, au fond, tirer des conclusions importantes. C'est très important. Il y a eu 12 journées de mobilisation.
07:23 Il y a eu plein de gens qui ont été dans la rue, qui ont accepté de perdre des journées de salaire. On ne peut pas simplement dire « il ne s'est rien passé ».
07:29 Donc c'est une ressource pour le pays. Notre système démocratique ne va pas bien.
07:34 Beaucoup de Françaises et de Français disent que le système démocratique en France ne fonctionne pas.
07:38 Là, on a eu un coup où ça fonctionne. Les syndicats ont joué leur rôle.
07:41 Il ne faut surtout pas que les syndicats ressortent de tout ceci avec une image d'inutilité et l'image que tout ça n'a servi à rien.
07:48 Merci beaucoup Bruno Cotteres. Vous étiez notre invité du jour à quelques heures de cette allocution du chef de l'État qu'on vous fera vivre.

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