• il y a 2 ans
L'utilisation hier de l'article 49 alinéa 3, pour faire passer la réforme des retraites, ne serait-elle pas la goutte qui va faire déborder le vase de la contestation ? C'est le sujet du Talk franceinfo. Tous les soirs, à partir de 18 heures, Manon Mella et ses invités débattent avec les internautes de la chaîne Twitch de franceinfo.

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00:10:41 Bonsoir tout le monde, bienvenue dans le Talk de France Info.
00:10:44 Je commence avec déjà le micro complètement sur le côté, on sent que c'est la fin de la semaine.
00:10:49 Antoine Antigone, salut les "talkers".
00:10:51 Eh mais c'est bien ça comme nom donné à la communauté du talk, je n'y avais jamais pensé.
00:10:57 Et recoucou Manon.
00:10:58 Oui recoucou parce qu'on se parle en réalité avec les "talkers" du coup,
00:11:03 les "talkeuses" sur Discord toute la journée depuis ce matin.
00:11:07 Voilà donc bonsoir, bonsoir à toutes et à tous, bienvenue dans le talk.
00:11:11 Je rappelle un petit peu, le talk c'est une heure de débat, de discussion sur Twitch,
00:11:16 sur un sujet d'actualité, un sujet de société.
00:11:19 On est au plateau avec des invités, ça commence à 18h.
00:11:24 Et le talk existe aussi en podcast audio, je le dis si jamais il y a des gens qui préfèrent nous écouter.
00:11:31 Très très heureuse en tout cas de vous retrouver, petit dragon vert de rage.
00:11:37 Très drôle vos pseudos, "bonsoir Manon, le tchat et les modos".
00:11:40 Oui bonsoir les modos, je crois que c'est Tiffany encore la modératrice qui va modérer le tchat ce soir.
00:11:46 N'hésitez pas d'ailleurs les amis à vous abonner à la chaîne Twitch de France Info,
00:11:53 comme ça vous recevez bien les petites notifs de stream.
00:11:56 Et puis vous voyez bien quand est-ce qu'on est en live ou pas.
00:12:00 Et puis vous pouvez aussi vous abonner au podcast audio si jamais,
00:12:04 pareil pour être averti quand on fait un nouvel épisode.
00:12:08 On a un programme chargé ce soir, à votre avis de quoi on va parler ?
00:12:13 Franchement pas de surprise, tintintin, suspense.
00:12:17 On est au lendemain du recours à l'article 49 alinéa 3, le jour d'après.
00:12:24 On a beaucoup entendu aujourd'hui à la radio et à la télé.
00:12:27 L'article 49.3 que le gouvernement a donc choisi d'actionner pour faire adopter sa réforme des retraites sans vote.
00:12:36 Le gouvernement répétait pourtant qu'il n'en voulait pas de ce 49.3, qu'il allait aller jusqu'au vote.
00:12:42 Mais en fait non.
00:12:44 Et Laurent Berger d'ailleurs, qui est le patron de la CFDT,
00:12:48 avait prévenu le gouvernement en disant que s'il recourait au 49.3 alinéa 3,
00:12:54 que la colère allait être immense, qu'elle serait difficile à empêcher,
00:13:00 et que cette option serait la pire.
00:13:03 Sauf que c'est en fait bien elle qui a été choisie.
00:13:06 La pire option selon Laurent Berger.
00:13:09 Il y a un député Renaissance, j'ai oublié son nom, pardon,
00:13:13 mais qui a dit aujourd'hui "on a peut-être manqué d'audace".
00:13:17 Est-ce que vous trouvez que le gouvernement a manqué d'audace ?
00:13:20 Ce passage en force en tout cas, il résonne comme un aveu d'échec.
00:13:24 Passage en force qui a provoqué plusieurs rassemblements,
00:13:28 hier soir mais aussi aujourd'hui, un petit peu partout en France.
00:13:31 Des manifestations, des blocages qui ont eu lieu,
00:13:34 blocage devant des universités, blocage du périphérique parisien ce matin,
00:13:39 blocage à Bordeaux aussi, au niveau des voies de la gare SNCF.
00:13:43 Bref, la question qu'on se pose aujourd'hui, c'est "que va-t-il se passer ?"
00:13:49 Quels sont les scénarios possibles ? Est-ce que la mobilisation va changer de nature ?
00:13:53 Aujourd'hui, il y a deux motions de censure qui ont été déposées.
00:13:56 Est-ce que vous avez vu ça ?
00:13:58 Je sais que Jean Macia en a pas mal parlé tout à l'heure sur son stream.
00:14:03 Deux motions de censure déposées par le gouvernement.
00:14:06 La première par le groupe des députés indépendants Liott.
00:14:11 Oui, la France découvre l'existence du groupe Liott, en tout cas moi personnellement.
00:14:17 C'est un tout petit groupe à l'Assemblée nationale.
00:14:19 Liott, ça veut dire "liberté indépendant, outre-mer et territoire".
00:14:22 Bref, ils ont déposé une motion transpartisane qui rassemble 91 signataires
00:14:28 de cinq groupes politiques d'opposition.
00:14:31 Les Républicains n'en font pas partie.
00:14:33 Et la deuxième motion de censure, elle a été déposée par le Rassemblement national dans l'après-midi.
00:14:41 Alors, est-ce qu'une motion de censure va être adoptée ?
00:14:44 Est-ce que le gouvernement actuel peut être renversé ?
00:14:47 Que va-t-il se passer dans la rue ?
00:14:49 Comment va évoluer la mobilisation ?
00:14:51 Est-ce qu'elle va dépasser le cadre syndical par exemple ?
00:14:55 La Ve République est-elle à bout de souffle ?
00:14:58 Je ne sais plus qui l'a mentionné dans le chat tout à l'heure,
00:15:00 mais j'ai vu une remarque en ce sens, une remise en question de notre modèle de la Ve République.
00:15:07 On va parler de tout ça avec nos invités.
00:15:10 Hello ! Est-ce que je vous ai mis dans le bon... Oui, c'est bon, Régis Nicolas, bonsoir.
00:15:16 - Bonsoir, merci d'invitation. - Bienvenue.
00:15:18 Bah ouais, de rien, merci d'être venu.
00:15:20 T'étais déjà venu d'ailleurs dans le talk, alors c'était au mois d'octobre.
00:15:24 C'est dire combien on parle de la réforme des retraites et à quel point c'est dans le débat depuis hyper longtemps.
00:15:31 C'était en octobre et je crois que c'était à l'époque 65 ans.
00:15:34 On avait fait un... Est-ce qu'on se sent vraiment de travailler jusqu'à 65 ans ?
00:15:37 Il y avait un flou, il y avait plein de ballons d'essai sur qu'est-ce que ça pouvait être potentiellement.
00:15:42 Il y avait un flou qu'on pense un peu intentionnel sur ce qu'allait être le projet,
00:15:46 parce qu'il y avait d'autres sujets à l'époque, l'assurance chômage, l'inflation,
00:15:49 et du coup c'était dur pour l'opposition aussi de se positionner vu qu'il n'y avait pas le projet final.
00:15:54 C'était au tout début. Donc Régis Nicolas, t'es porte-parole du collectif Nos Retraites.
00:15:59 En deux mots, le collectif Nos Retraites...
00:16:01 C'est un collectif qui s'est créé pendant le projet de réforme des retraites précédents de Macron en 2019
00:16:06 pour décrypter et vulgariser le débat public.
00:16:09 Merci d'être là. Dorian Dreuil, bienvenue.
00:16:12 Bonsoir Manon.
00:16:13 Ça va bien ?
00:16:14 Très bien, très content d'être de nouveau dans cette émission.
00:16:18 Et de tester les nouveaux fauteuils. J'espère pouvoir revenir pour les prochaines configurations.
00:16:25 J'aime bien parce que le chat suit l'évolution du studio et du setup du talk,
00:16:30 mais les invités aussi... Il y a encore de nouveaux canapés qui arrivent.
00:16:34 Ils seront jaunes.
00:16:36 On reviendra peut-être pour parler...
00:16:38 Ce teasing. Dorian Dreuil, tu es politologue, expert associé à la Fondation Jean Jaurès.
00:16:44 C'est tout bon.
00:16:45 Tout à fait.
00:16:46 Très heureuse de vous accueillir en tout cas. Le chat vous accueille aussi.
00:16:50 Salut Dorian, salut Régis. Oui c'est Régis, pardon. Nicolas, c'est ton nom.
00:16:54 Bonsoir les invités. Voilà. Théo le zombie qui dit ça a l'air confort en tout cas.
00:16:59 Oui, Antoine Antigone, ils vont être beaux les nouveaux canapés.
00:17:02 Oui, parce que j'ai demandé à la communauté de choisir la couleur.
00:17:06 Tout ça est très participatif.
00:17:09 On va déjà lancer, si ça vous dit, Tiffany la modératrice, peut-être un petit sondage dans le chat.
00:17:14 Si ça vous dit. A votre avis, est-ce que la motion de censure va être adoptée ?
00:17:19 Oui, non, je ne sais pas. Allez-y. Les pronos sont lancés.
00:17:23 Et puis je vous poserai la question à vous tout à l'heure.
00:17:26 Déjà, peut-être, on peut peut-être commencer par là.
00:17:29 Une réaction quand vous avez reçu le push, la notification sur le 49.3 ?
00:17:38 C'était une option et ça prouve une chose, c'est que la pression populaire a marché.
00:17:43 Parce qu'en fait, jusqu'au dernier moment, on sait qu'ils ont compté le potentiel voix.
00:17:48 Et on sait qu'il y a eu déjà au Sénat des sénateurs de droite qui s'étaient abstenus.
00:17:53 On sait que des députés LR avaient annoncé qu'ils voteraient contre.
00:17:58 Donc on savait, même du côté de la majorité, qu'il y avait une vraie tension.
00:18:04 Et le fait que le mouvement social était aussi fort dans toutes les villes,
00:18:09 on dit que c'est le mouvement social des sous-préfectures,
00:18:11 qu'il était aussi présent, on sait que les gens ont interpellé leurs députés localement.
00:18:17 Donc pour moi, le 49.3, je l'interprète comme la confirmation qu'il y avait
00:18:24 une telle pression populaire qu'ils n'ont pas voulu prendre le risque de la passer en loi.
00:18:29 Dorian, le 49.3 est le reflet d'une peur ?
00:18:37 Il y a une forme de double échec.
00:18:40 Un petit coup de panique ?
00:18:41 Double échec à la fois de la démocratie sociale, dans la capacité,
00:18:46 qui n'était pas qu'au 49.3 mais bien avant,
00:18:49 à avoir un dialogue avec les corps intermédiaires, à co-construire, à fabriquer,
00:18:54 à utiliser les corps intermédiaires aussi comme des capteurs de l'opinion, de ce qui se passe.
00:18:59 Et un deuxième échec qui est celle du compromis en politique,
00:19:02 qui est cette difficulté, comme ça, dans une configuration d'Assemblée nationale particulière,
00:19:07 sous la Ve République, de cette difficulté de trouver, de créer des coalitions.
00:19:12 Et je trouve que c'est intéressant dans ce que ça révèle là-dessus,
00:19:15 sur notamment Les Républicains.
00:19:17 Moi j'avais une formule que j'utilisais souvent, qui était de dire
00:19:20 c'est finalement le groupe qui va être faiseur de loi.
00:19:23 Et hier, ils ont été faiseurs de désarroi.
00:19:25 C'est-à-dire que cette tension sur la capacité du groupe Les Républicains à voter la réforme,
00:19:30 a placé le gouvernement un peu au pied du mur dans cette configuration.
00:19:34 Et donc, il y a comme ça le révélateur de quelque chose d'intéressant
00:19:39 sur l'incapacité de notre monde politique à adopter cette culture du compromis,
00:19:44 cette culture de la coalition et de la sincérité aussi dans des formes d'engagement.
00:19:50 C'est ça que j'ai trouvé assez révélateur.
00:19:52 Et puis, le deuxième aspect, qui était fort, je trouve, dans la journée d'hier,
00:19:56 c'est d'abord le moment de tension qu'il y a eu tout au long de la journée.
00:19:59 Presque, on se croirait dans un épisode de Borghain ou de House of Cards.
00:20:03 - C'était hallucinant, il y avait même un décompte sur BFM,
00:20:07 en mode "quand est-ce qu'on fait des décomptes ? Je sais pas, pour le Nouvel An ?"
00:20:11 - Un condom, oui. - C'était un truc de la...
00:20:14 - Il y avait une mise en tension autour de cette journée, autour de ce moment.
00:20:18 Et derrière, ce qui était intéressant à observer, c'est comment est-ce que ça a été capté
00:20:22 dans l'opinion, dans les réactions spontanées que ça a suscité.
00:20:26 Et ce qu'on voit, c'est que finalement, cet outil,
00:20:29 peut-être qu'on en débattra ou pas, de la qualité démocratique de cet outil du 49.3,
00:20:34 finalement, on voit bien que dans l'opinion, aujourd'hui,
00:20:37 c'est considéré comme une brutalité démocratique.
00:20:39 Cet outil, qui est constitutionnel, il est en décalage
00:20:42 avec les nouvelles exigences de démocratie de la société et des citoyens.
00:20:46 - Mais même, je dirais qu'il y avait une énorme attente du côté de l'opinion
00:20:50 avant que le 49.3 ait été dégainé.
00:20:53 Par exemple, je crois que c'était mardi soir, mais en tout cas, en moins de 48 heures,
00:20:57 on a lancé un site qui s'appelait "pas-de-majorité.fr"
00:21:00 pour interpeller de façon un peu automatique des députés sur "allez-vous voter ou non la loi ?"
00:21:05 Et en moins de 48 heures, on a eu plus de 100 000 connexions.
00:21:08 Ce qui est quand même assez fort.
00:21:10 Il y avait quand même une attente qui s'est manifestée au moment de l'annonce du 49.3
00:21:15 par beaucoup d'expressions de colère, beaucoup de manifestations spontanées.
00:21:18 Et en fait, pour moi, ce que ça dit quand même de tout ça,
00:21:22 c'est qu'il y a un problème en termes d'écoute du côté de l'exécutif.
00:21:27 Et en fait, ce n'est pas tout récent là.
00:21:30 Je me souviens que pendant les concertations avec les syndicats depuis l'automne,
00:21:35 qui sont passées un peu sous les radars des médias,
00:21:40 les gens ne sont pas trop rendus compte.
00:21:43 Ce que le gouvernement mettait sur la table,
00:21:46 il n'y avait pas vraiment de place pour la négociation.
00:21:50 Quand on parle par exemple sur l'emploi des seniors,
00:21:52 ce qu'ils ont proposé aux syndicats, c'était réduire l'assurance chômage
00:21:56 ou faire le cumul emploi retraite.
00:21:59 Donc pas vraiment de réponse sur le gros problème qu'est l'emploi des seniors
00:22:02 et qui est ressorti très régulièrement dans le débat public.
00:22:05 Tout ça pour dire que le gouvernement semble avoir posé un débat
00:22:09 sans laisser la possibilité de débattre,
00:22:12 sans pouvoir laisser la possibilité de négocier.
00:22:14 Je pense que c'est pour ça qu'il y a eu une telle tension sur des sujets aussi populaires
00:22:18 quand il n'y a pas eu d'expression pour lui donner un débouché.
00:22:23 - Et pourtant, le gouvernement, en tout cas Elisabeth Borne,
00:22:26 dit que le texte final n'est pas du tout le même que celui du départ.
00:22:32 Il a quand même évolué, il a quand même avancé, selon elle.
00:22:36 - Ça pour moi, c'est un peu un effet d'annonce
00:22:38 parce qu'il y a peu de choses qui ont été modifiées.
00:22:41 Le gros, qui est de faire des économies sur le fait de faire travailler davantage de gens
00:22:46 et l'absence de possibilité de refinancer le système de retraite, n'a pas bougé.
00:22:51 Et sur toutes les grosses annonces, il y a eu des reculs.
00:22:54 Les grosses annonces, quand même, au début, c'était "ça va favoriser les femmes,
00:22:57 il y aura le minimum de 1 200, on va travailler sur la pénibilité".
00:23:01 Et sur toutes ces choses-là, le gouvernement s'est discrédité
00:23:05 au moment où il a fallu décortiquer, décrypter ce qui était vraiment proposé.
00:23:09 - Dorian, du point de vue social, ce 49-3, ça peut être un petit peu la goutte d'eau ?
00:23:16 Jusque-là, les mobilisations se passaient hyper bien.
00:23:22 C'est le centième, donc il y a déjà une goutte d'eau sur cette utilisation de cet outil
00:23:27 qui, à mon avis, n'est plus considéré comme suffisamment démocratique par la société.
00:23:33 Et en ce qui concerne cette réforme-là, il y a, et c'est un danger qui est mis en exerbe
00:23:38 par l'intersyndical, notamment, le risque que ça s'enflamme, que ça s'embrase,
00:23:44 et que ce qui était une crise politique devienne aussi une crise de régime.
00:23:49 Si elle ne l'est pas déjà, car on peut, indépendamment qu'on soit pour ou contre
00:23:56 la réforme, pour ou contre le report de l'âge légal de départ,
00:24:01 il y a quelque chose qui doit embêter tout le monde, c'est que l'Assemblée nationale,
00:24:06 la représentation nationale n'aura pas voté ce texte.
00:24:09 Sur un projet de réforme de société majeure, qui engage les générations futures,
00:24:13 qui cristallise dans l'opinion, il n'y aura pas eu de vote.
00:24:16 Il y aura un vote de motion de censure, mais il n'y a pas de vote sur ce texte-là.
00:24:20 Il n'y en a pas eu lors de la première lecture, il n'y en a pas eu maintenant,
00:24:23 alors que le texte est revenu en deuxième lecture après le Sénat.
00:24:27 Donc il y a, de mon point de vue, ça risque de cristalliser au-delà des risques de débordement,
00:24:33 ou en tout cas de la difficulté pour l'intersyndical de garder des mouvements populaires,
00:24:39 festifs, joyeux, le risque que ça déborde, que ça dérape, que ça s'enlise,
00:24:44 et qu'on assiste à des mouvements peut-être plus violents, plus vindicatifs.
00:24:51 Il y a aussi, dans le coup d'après, une difficulté d'acceptation du corps social.
00:24:54 Une telle réforme, on a du mal à imaginer une acceptation dans la société,
00:25:00 dans le corps social, à partir du moment où le corps politique, déjà,
00:25:04 a du mal à trouver un compromis, un consensus autour de ce texte.
00:25:07 - Hyper intéressant, Régis.
00:25:10 - Là-dessus, je rejoins totalement. Il y a quand même une chose qu'on a appris avec tout ce mouvement ces derniers mois,
00:25:16 c'est qu'on a eu un rappel de pourquoi les syndicats sont importants.
00:25:19 Parce qu'en fait, ils ont beaucoup été démonétisés ces dernières années,
00:25:22 personne ne vote, etc. - Voilà, c'est retour en force.
00:25:25 - Et là, on a bien compris, c'est pas parce que tout le monde n'a pas sa carte,
00:25:28 qu'ils ne sont pas les porte-parole des travailleurs.
00:25:30 Et en fait, c'est un peu historique ce qui s'est passé, parce que là, l'intersyndical,
00:25:34 il faut se rappeler que la dernière intersyndicale, c'était il y a 12 ans,
00:25:38 pendant la réforme des retraites de Sarkozy.
00:25:40 Et même à l'époque, c'était différent, puisqu'on avait les syndicats réformistes,
00:25:44 qui étaient donc la CFDT, enfin, dit réformiste, la CFDT, l'UFTC,
00:25:49 qui étaient encore dans des possibilités de négociations, etc.
00:25:52 Là, en fait, les lignes rouges qui ont été posées par tout le monde,
00:25:56 même les syndicats dit réformistes, en fait, n'ont pas été respectés dès le début.
00:26:00 Donc encore une fois, il n'y avait pas de place pour la démocratie sociale, en fait, comme on l'appelle.
00:26:04 Et en fait, on entend beaucoup, là, les élus de la majorité qui disent
00:26:08 "Nous, on a eu le vote, on se retrouve dans cinq ans",
00:26:10 et en fait, il faut bien comprendre que ça, c'est un danger d'annoncer ça comme ça.
00:26:13 La démocratie ne peut pas se résumer aux seules élections.
00:26:16 Et en fait, la démocratie, c'est la liberté de la presse, c'est ne pas écraser les minorités,
00:26:20 c'est respecter les corps intermédiaires, comme les syndicats,
00:26:23 qui en fait font vivre la politique au quotidien.
00:26:26 Et donc, c'est pour ça que je pense qu'il y a eu une telle brutalité,
00:26:28 c'est parce qu'il n'y avait pas de place pour cette démocratie sociale.
00:26:31 - Dorian, et après, je vous pose une question du tchat.
00:26:34 - Régis, justement, parce que la journée d'hier, ce 49.3,
00:26:39 la manière dont ça fait réagir l'opinion et les mobilisations,
00:26:43 - Spontanée, mobilisation spontanée, en plus, en tout cas à Concorde.
00:26:47 - C'est le révélateur, le cas concret, le cas d'exemple précis,
00:26:51 ou en tout cas le plus illustratif de ces dernières années,
00:26:53 que nos institutions sont dans une situation de limite,
00:26:56 de limite dans la capacité à organiser la coexistence
00:27:00 de différentes légitimités démocratiques.
00:27:02 La légitimité de l'élection, de la démocratie représentative, en est une.
00:27:07 Mais elle ne peut pas être la seule.
00:27:08 Il y a aussi une légitimité démocratique des mobilisations sociales,
00:27:11 de l'avis associatif, de l'engagement citoyen, de la démocratie syndicale.
00:27:15 Et nos institutions, aujourd'hui, ne produisent plus ce dialogue
00:27:19 qui permet de trouver de la légitimité politique derrière.
00:27:23 Alors, ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de légitimité politique
00:27:25 dans la démocratie représentative,
00:27:27 mais la légitimité politique, à son maximum,
00:27:29 elle provient, elle naît, elle procède de ce dialogue
00:27:32 entre différentes voies d'expression qui sont importantes dans le pays,
00:27:35 surtout à un moment où on le voit dans la montée de la défiance
00:27:39 vis-à-vis des institutions.
00:27:40 Il y avait une enquête du Cevipof qui est sortie il y a deux jours.
00:27:43 - Oui, apparemment, on est au pire niveau.
00:27:46 - Oui, dans des scores historiquement bas,
00:27:48 pas loin de ceux qui étaient connus au moment des Gilets jaunes, d'ailleurs.
00:27:52 Et le miroir est assez saisissant à faire entre les deux quinquennats,
00:27:55 de ce point de vue-là.
00:27:57 Donc, il y a une limite, il y a quelque chose de roué,
00:28:00 d'un rouage qui ne marche plus dans notre architecture institutionnelle, aujourd'hui.
00:28:04 Et c'est pour ça que, de ce point de vue-là,
00:28:06 le chantier de la réforme des institutions,
00:28:08 il devient urgent, en fait, il devient criant,
00:28:10 parce qu'il y a un décalage entre les institutions telles qu'elles existent aujourd'hui
00:28:14 et les aspirations démocratiques de la société.
00:28:16 - On va revenir là-dessus, sur la crise démocratique, évidemment.
00:28:19 Je voulais quand même vous poser une question qui revient.
00:28:22 Une question de Macalbarne.
00:28:25 Pardon si je ne prononce pas bien ton pseudo.
00:28:28 Donc, sa question, c'est "Est-ce que le 49-3, ce n'est pas surtout
00:28:32 par peur d'un échec de la motion de rejet en cas de vote ?"
00:28:36 Est-ce que vous avez la réponse ? Moi, pas, personnellement.
00:28:39 - Si j'ai bien compris la question, c'est l'intérêt du 49-3 pour le gouvernement, quoi,
00:28:44 par rapport à avoir laissé le vote.
00:28:47 - Dorian, est-ce que c'est par peur d'un échec de la motion de rejet en cas de vote ?
00:28:52 - Je suis pas sûr, parce que... - Pourquoi est-ce qu'ils ne sont pas allés jusqu'au vote ?
00:28:55 J'imagine que c'est ça, ils auraient pu tenter.
00:28:58 - Parce que les calculs n'étaient pas bons.
00:29:00 - Oui, mais est-ce qu'il y a une sorte de dignité à y aller quand même par respect démocratique ?
00:29:06 Et puis, si ça ne marche pas, ça ne marche pas. C'est le jeu.
00:29:10 - Le problème, je pense, pour le gouvernement et pour le président de la République,
00:29:13 surtout, c'est qu'il y a un côté de haut mur, parce que cette réforme est devenue un totem.
00:29:19 C'est devenu un symbole du deuxième quinquennat Macron.
00:29:22 Alors certains disent que c'est un symbole du premier, qui n'a pas réussi à porter au premier quinquennat,
00:29:28 qu'il faudrait mettre là. - C'est ce qu'il dit dans le tchat aussi.
00:29:30 - Donc, à partir du moment où il y a une dimension symbolique aussi forte
00:29:33 qui imprègne le débat public sur ces sujets, c'est très difficile d'aller au vote
00:29:37 et de perdre le vote à quelques députés prêts.
00:29:41 Donc, il y a plutôt la volonté de, coûte que coûte, sauver ce texte.
00:29:44 Et pour sauver ce texte, l'outil à disposition du gouvernement, c'est le 49-3.
00:29:48 - Il y a quand même une forme de jusqu'au boutisme. Je ne sais plus quelle est la source.
00:29:52 Je crois que c'était dans l'opinion. Mais à l'Élysée, il disait "Macron ira jusqu'au bout,
00:29:57 il faudrait que Paris soit en feu ou qu'il y ait un mort pour reculer".
00:30:00 Ce qui montre quand même la radicalité de la posture.
00:30:03 Et Macron, il ne va pas se représenter.
00:30:06 Donc, lui, il veut rester. Il veut marquer l'histoire avec son truc.
00:30:10 Il veut être celui qui a tenu face au mouvement social.
00:30:13 Il veut être vu comme le réformateur, etc.
00:30:16 - Est-ce que ce n'est pas une erreur politique ?
00:30:18 Est-ce qu'on ne va pas retenir de lui, justement, celui qui est allé jusqu'au bout ?
00:30:22 - Mais lui, il n'a pas grand-chose à perdre, en fait, parce qu'il ne se représente pas,
00:30:26 encore une fois, à la fin du quinquennat. Donc, lui, il crame et borne ou quoi.
00:30:30 Donc, là, par exemple, l'intérêt du coup du 49-3 par rapport à la loi,
00:30:34 c'est que la loi, il pouvait la perdre facilement.
00:30:36 Là, 49-3, beaucoup de députés de droite seront beaucoup plus frileux à faire tomber le gouvernement.
00:30:42 Et surtout qu'il y a quand même une forme d'incohérence
00:30:46 à avoir chaque année présenté au Sénat la retraite à 64 ans et ne pas voter là.
00:30:52 Mais, mine de rien, on a une fronte de ces élus de droite
00:30:55 qui sont quand même assez bien connectés à leur terrain.
00:30:57 Parce qu'on a beaucoup d'élus de droite dans des circonscriptions riches
00:31:02 qui sont partis chez les macronistes.
00:31:04 Donc, on a un renouveau de députés de droite dans des circons un peu plus populaires.
00:31:08 Et qui, du coup, en fait, leur disent "ça ne sera pas possible".
00:31:12 En fait, juste, on n'y arrivera pas.
00:31:15 Donc, c'est pour ça que c'est intéressant ce qui se passe.
00:31:18 C'est un rebattage des cartes à droite, quoi.
00:31:20 C'est pour ça qu'ils s'accusent les uns les autres.
00:31:22 On va reparler de la droite et des républicains.
00:31:25 Avant ça, je voulais quand même vous donner peut-être deux, trois infos.
00:31:28 Alors, il y a de nouvelles manifestations qui sont annoncées,
00:31:32 donc déjà dès demain, en fait.
00:31:34 Des menaces aussi sur l'organisation des épreuves de spécialité du BAC.
00:31:40 Prévues de lundi à mercredi, plusieurs syndicats appellent à la grève des surveillants de ces épreuves.
00:31:46 Jeudi prochain aussi, le 23 mars, il y a l'intersyndical qui prévoit une nouvelle
00:31:50 journée de mobilisation nationale contre la réforme.
00:31:53 Est-ce qu'on doit craindre une forme d'embrasement, de hausse de la violence, en tout cas,
00:31:58 dans les mobilisations, les manifestations ?
00:32:02 - Encore une fois, les syndicats canalisent l'expression sociale.
00:32:07 Donc, à partir du moment où ce canal, il n'est pas respecté,
00:32:11 le risque, c'est qu'il échappe, que l'expression sociale échappe à ce canal.
00:32:18 Et donc, il y avait un vrai débat, je sais, parmi les syndicats, hier soir, pour savoir
00:32:24 qu'est-ce qu'on fait, parce que l'idée, c'est quand même de prendre le temps
00:32:29 de mobiliser les gens de façon ordonnée pour la semaine prochaine.
00:32:31 Et en même temps, il y a une colère à très court terme qui a envie de s'exprimer.
00:32:34 Donc, je sais qu'il y a un appel des syndicats à suivre tous les rassemblements locaux
00:32:39 qui sont faits de façon organisée, sans violence.
00:32:41 Mais de fait, on sait qu'il y a une colère qui est sans déboucher.
00:32:46 Et quand on entend des députés de la majorité dire "on se retrouve dans quatre ans pour en discuter",
00:32:53 je pense que les gens ne sont pas très satisfaits de cette réponse.
00:32:57 - Dorian, est-ce qu'on doit craindre un engrenage, une hausse de la violence ?
00:33:04 Est-ce que la mobilisation pourrait sortir du cadre syndical, justement, qui doit contenir tout ça ?
00:33:09 - C'est en tout cas les craintes qui animent, je pense, le gouvernement aujourd'hui.
00:33:14 Ils l'exposent d'ailleurs, ils craignent la formule "gilets jaunis" du mouvement.
00:33:22 L'intersyndical et les têtes de ponte syndicales alertent là-dessus depuis plusieurs jours déjà.
00:33:28 Ils mettent en garde sur leur incapacité à garder le contrôle d'un mouvement
00:33:36 qui considérerait qu'il y a une forme de brutalité trop forte, une brutalité démocratique trop forte.
00:33:43 Et ce 49.3, on a le sentiment aujourd'hui qu'il est vécu comme ça, il est vécu comme tel.
00:33:50 On se retrouve presque dans une situation assez similaire à celle du cinquième ou septième acte du mouvement des Gilets jaunes en 2019,
00:33:58 avec une situation bloquée où il n'y a pas de gagnant possible.
00:34:03 Il n'y a pas de gagnant, il peut y avoir que des perdants sur cette histoire.
00:34:07 Il faut trouver une manière qui va être inventée pour trouver un débouché politique à cette crise qui est sociale et qui se transforme en crise presque...
00:34:19 Oui, il faut trouver un débouché à cette colère. En 2019, ça avait été le grand débat national.
00:34:25 Qu'est-ce qui pourrait aujourd'hui, c'est ça la question, être un canal d'expression encadré de cette colère ?
00:34:36 Régis, il faut un débouché politique ?
00:34:40 En fait, le mouvement n'est pas fini. Les syndicats avaient déjà annoncé que si la loi était passée, ils continueraient la mobilisation.
00:34:49 Il faut voir les trois grosses réformes qui ont été bloquées de ces 20 dernières années.
00:34:58 Il y a eu 1995, gros mouvement de grève. 2006, la loi a été votée, promulguée, mais pas appliquée.
00:35:06 Donc, même après le vote, la mobilisation était encore en cours.
00:35:12 Et puis, il y a 2019, Macron a déjà reculé. Il n'y a pas que le Covid.
00:35:17 Il y a eu un vrai retournement d'opinion sur quelque chose qui était très bien vendu, comme Juste, Universel, etc.
00:35:23 Et après un an de débat, les gens se sont rendus compte qu'en fait, ils allaient être perdants.
00:35:27 Et en fait, c'était devenu trop impopulaire de l'appliquer au moment où il y avait le Covid.
00:35:32 Là, il pourrait, enfin, ça n'est pas fini. Il y a la grève de jeudi, et ce sera quand même énorme.
00:35:38 Moi, je suis assez étonné que le 7, là, il y a eu, je pense, il y a des analystes qui disent, c'est sûrement la plus grosse manifestation de l'après-guerre.
00:35:46 Et en France, d'après les chiffres de la police et des syndicats, et moi, j'étais étonné d'entendre très peu ça dans les médias,
00:35:53 alors que c'était absolument historique. Et on a des grosses grèves, certes, qui ne sont pas aussi massives,
00:35:58 pas aussi bloquantes, disons qu'en 95, par exemple, mais tout le corps social est quand même très marqué par ça.
00:36:08 Et on a une constance dans le soutien au mouvement qui est assez exceptionnel.
00:36:12 - La stratégie de l'escalier, je crois. - Non, mais là, ça fait quand même une demi-année qu'on a un mouvement social qui est soutenu par les trois quarts de la population.
00:36:20 - Et qui s'essouffle par peu. - Si on prend les travailleurs, en gros, il n'y a que les retraités qui ne sont pas concernés, qui sont majoritairement pour cette réforme.
00:36:28 Et si on regarde les Gilets jaunes, c'est que janvier, deux mois après le mouvement, l'opinion était avec elle, mais c'était très inconstant.
00:36:37 Alors que c'est resté dans l'histoire, quand même, les Gilets jaunes. C'était beaucoup moins de gens.
00:36:40 Et là, on a un truc qui est plus massif, intersyndical et uni, opinion qui ne bouge pas.
00:36:45 Et donc, pour moi, ce rapport de France n'est pas fini. Enfin, il y a encore, il reste ce qui va se passer ce week-end et le jeudi.
00:36:52 Et nous, par exemple, on continue à encourager les gens à interpeller leurs députés sur 49-3.fr, dont je te parlais, pour que, justement, les gens votent contre,
00:37:02 pour le 49-3, je veux dire, puisque le gouvernement lui-même a dit "c'est ça, le vote de la réforme".
00:37:06 - Donc c'est quoi ? C'est un site pour demander à son député de voter ?
00:37:10 - C'est ça, c'est un site pour interpeller les députés qui sont de l'opposition plutôt de droite ou centre, sur les réseaux, pour leur dire "est-ce que vous allez voter le 49-3 ?"
00:37:18 - Dorian ?
00:37:19 - Oui, il y a un double miroir qui est intéressant, je trouve. D'abord, le miroir des mobilisations syndicales aujourd'hui versus les mobilisations Gilets jaunes.
00:37:26 On voit, au moment des Gilets jaunes, que l'opinion, elle commence à bouger quand il y a une exacerbation des violences.
00:37:32 Parfois des violences symboliques, de l'arc de triomphe, et là, jusqu'à présent, sur le mouvement syndical, il y avait une adhésion très très forte de l'opinion.
00:37:41 Donc ça va être intéressant de voir aussi si, dans les dernières formes de violences qu'on a pu voir hier, ou s'il y a une sorte de décréchendo dans la radicalité du mouvement,
00:37:52 si l'opinion reste toujours favorable ou pas à la mobilisation.
00:37:56 Et l'autre miroir intéressant, il est sur l'objet "réforme des retraites", puisque ça devient le serpent de mer depuis 2017.
00:38:06 Le sujet était déjà venu en 2019. Au départ, il n'est pas très mal accueilli.
00:38:10 C'est une réforme paramétrique, c'est le système à points.
00:38:14 Là, le moment où ça se corse, c'est quand il y a le débat de l'âge pivot qui vient.
00:38:18 - La CFDT était OK avec ce système à points.
00:38:20 - C'est le moment où la question de l'âge pivot qui survient dans le débat, c'est le moment où ça se corse, où ça se cristallise, où la CFDT lâche et dit "on ne touche pas à l'âge".
00:38:30 Et là, c'est pareil sur cette réforme. Ce qui cristallise, le point de cristallisation, c'est le report de l'âge illégal.
00:38:35 - Je peux en parler des heures sur comment les deux débats se sont passés de façon très différente, parce que vraiment, sur la réforme d'à points, c'était long à expliquer déjà ce qu'était le point, ce qu'était l'âge pivot, etc.
00:38:44 Et ensuite, il y a eu un vrai retournement d'opinion, parce qu'au début, elle était plutôt favorable.
00:38:48 - En fait, c'était plus simple quand même. Et les gens, même quand ils n'avaient pas les détails...
00:38:51 - Plus simple d'être pour ou contre, quoi.
00:38:53 - C'était plus simple de comprendre ce qui allait se passer. Parce que le truc numéro un du débat, c'est comprendre ce qui allait se passer.
00:38:57 Et là, c'est super intéressant ce qui s'est passé, parce que nous, en gros, depuis les annonces de Macron à la présidentielle, ça fait quand même un an qu'on explique ce qu'il y a derrière ce projet.
00:39:04 Ça n'intéressait pas grand monde jusqu'aux annonces de Borne en janvier, là. Et là, il y a eu un vrai retournement, parce qu'à partir du moment où on avait le projet final sur lequel vraiment analyser,
00:39:13 et bien là, on a pu soulever les loups, que nous, on savait, puisqu'on avait les gros ordres de grandeur, des milliards qu'ils voulaient économiser.
00:39:19 Et donc, toutes les annonces, "ça va favoriser les femmes", "le minimum pension à 1200 euros pour tout le monde",
00:39:25 que toute la majorité a répété partout, alors que ça ne concernait personne.
00:39:28 Donc, pas tous les loups, parce qu'il y a encore plein de loups qui n'ont pas été levés.
00:39:33 Par exemple, la pénibilité prise au cas par cas, qui veut dire qu'en fait, on supprime les garanties collectives,
00:39:38 et pour voir si quelqu'un a eu la pénibilité, on attend qu'il soit cassé, on fait un rendez-vous avec le médecin, on constate "ah oui, il y a eu pénibilité",
00:39:45 ce qui est trop tard, c'est pas comme ça qu'on prévient la pénibilité.
00:39:47 Bref, donc ça fait partie des loups qui n'ont pas été sortis.
00:39:50 Mais là, on a parlé des syndicats comme Voix de Courroie, du Débat, d'Animation, mais il y a aussi eu les universitaires, là.
00:39:59 Tout le monde a entendu parler, enfin, beaucoup de ceux qui ont suivi ont entendu parler de l'économiste Michael Zemmour,
00:40:04 qui, avec d'autres, ont vulgarisé, décrypté ce qu'il se passait.
00:40:08 Un moment, il y a eu le rapport du corps, tout le monde disait "ah, mais tout le monde l'interprète comme ce qui est comme ça, selon..."
00:40:13 Mais en fait, c'est une bonne chose, ça veut dire que tout le monde avait une base de données un peu fiable,
00:40:17 sur laquelle se positionner, sur laquelle il y avait du débat qualifié, enfin, objectivé, vérifiable, avec les études de l'adresse, etc.
00:40:25 - Les ingrédients étaient là, les supports étaient là.
00:40:27 - Forcément, donc, on a eu un bon débat, et c'est juste qu'à un moment, les syndicats et les universitaires ont été relayés par les journalistes,
00:40:33 et on a pu avoir, ça a pu être confronté au débat public.
00:40:36 Et en fait, c'était intéressant. C'est là d'où la brutalité du mur de non-négociation du gouvernement derrière.
00:40:42 Il y a eu un décalage entre la vivacité du débat et le peu de place laissée à la négociation sur ce projet.
00:40:52 - Il y a Antoine Antigone dans le chat qui dit "trouver un débouché, mais lequel ? Comment apaiser la situation sur du long terme de manière efficace et directe ?"
00:41:01 Dorian ?
00:41:02 - Sur le long terme, l'enjeu c'est la crise démocratique et la crise des institutions qu'on traverse.
00:41:08 Qui n'est pas nouvelle, qui arrive à bout maintenant.
00:41:12 - On comprend mieux les gens qui disent "bah à quoi bon voter ?"
00:41:15 - Tout à fait, et c'est quelque chose qui est très puissant dans l'opinion depuis de nombreuses années,
00:41:21 quand on regarde justement les cahiers citoyens du Grand Débat National.
00:41:24 La question de la place du citoyen dans les institutions, la question du pouvoir du citoyen sur la vie politique,
00:41:30 la question de l'organisation des pouvoirs, des contre-pouvoirs.
00:41:33 C'est très prégnant dans les préoccupations de l'opinion.
00:41:37 Il y avait encore récemment, on a cité l'enquête du Cévipoff sur la défiance vis-à-vis des institutions,
00:41:43 c'est aussi une alarme.
00:41:45 Les taux d'abstention qui frôlent des scores historiques, c'est aussi une alerte.
00:41:50 Donc il y a finalement tout un faisceau d'alertes, d'alarmes, de crises démocratiques sous-jacentes à tout ce qu'on vit.
00:41:57 Et donc le débouché, il doit aussi être dans la capacité à réformer les institutions.
00:42:02 C'est aussi d'ailleurs une promesse du président de la République.
00:42:05 Et ce débat, il devra être engagé pour l'avenir, pour les prochaines réformes,
00:42:10 qui comme ça seront des réformes de changement, des réformes qui engagent une vision de la société.
00:42:16 Il faudra trouver le moyen de démocratiser les institutions,
00:42:21 démocratiser la République, démocratiser la société, en réalité.
00:42:24 - Mais je rejoins sur le côté démocratique, parce que là il y avait un côté sur le débat.
00:42:29 Pour une fois, il y avait la possibilité pour tout un chacun de s'exprimer.
00:42:33 C'était pas juste le débat d'experts.
00:42:35 Et ça, c'est encore une autre victoire de ce mouvement, c'est qu'on a parlé de conditions de travail.
00:42:39 On a parlé de salaire.
00:42:41 - Le travail était au centre de tout.
00:42:43 - Et ça, n'importe qui est légitime.
00:42:45 Et ça, qu'on rappelle aux gens que n'importe qui, quel que soit son niveau d'éducation, de formation, de politisation,
00:42:51 est légitime pour s'exprimer, pour avoir un avis, c'est ça aussi qui a fait que la mayonnaise a pris.
00:42:57 Et c'est pour ça qu'à chaque fois, les réformes des retraites mobilisent.
00:42:59 C'est parce qu'on parle de choses extrêmement concrètes.
00:43:02 C'est des années de vie sur des conditions de travail.
00:43:05 Les gens se voient tout de suite en situation, ils voient tout de suite leurs proches.
00:43:09 Donc c'est extrêmement concret.
00:43:11 Et l'autre chose sur le plus long terme, c'est que...
00:43:15 Alors je rejoins le côté démocratique, mais il y a aussi un côté social.
00:43:18 C'est-à-dire qu'à plus long terme, le fait qu'il y ait autant de résistance aujourd'hui,
00:43:23 fait qu'il prépare le rapport de force des prochaines réformes.
00:43:27 Parce que là, en fait, il y aura des prochaines réformes.
00:43:30 Et ça, ça crée quand même le terrain de, en France, quelle est la place qu'on laisse au public,
00:43:34 quelle est la place qu'on laisse au marché.
00:43:36 Parce qu'en fait, si cette réforme était passée comme une lettre à la porte,
00:43:40 ça préparait un peu le terrain de la capitalisation.
00:43:42 - À la poste.
00:43:44 - À la poste, oui, tout à fait, je raconte n'importe quoi.
00:43:47 Non mais oui, si la réforme était passée comme ça, sans résistance,
00:43:50 ça préparait en fait le terrain à la capitalisation.
00:43:52 Parce qu'en gros, dès qu'on affaiblit le système de retraite,
00:43:55 ceux qui ont les moyens, ils se tournent vers les assurances privées.
00:43:58 C'est pour ça qu'on est bombardés de pubs.
00:44:00 En fait, on compense, il y a un effet de transfert.
00:44:02 Il n'y a pas de vase communiquant de l'argent économisé,
00:44:05 il ne va pas sur d'autres politiques publiques.
00:44:07 Donc tout ça pour dire que demain, les politiques qui vont vendre d'autres réformes de retraite,
00:44:12 et ils le préparent, j'ai entendu des parlementaires de droite dire
00:44:15 "de toute façon, c'est insuffisant, donc il faudra penser dans 5 ans à se retrouver".
00:44:19 Et je crois que Bruno Le Maire avait fait une sortie un peu dans ce sens,
00:44:24 de préparer le terrain pour la prochaine réforme de retraite.
00:44:27 En fait, toutes les résistances d'aujourd'hui,
00:44:30 préparent l'acceptabilité ou la direction politique des réformes de demain.
00:44:34 Donc ce n'est pas rien ce qui se passe.
00:44:36 Ce n'est pas juste "même si on perd",
00:44:38 en fait ça crée quand même de la résistance pour les prochaines réformes plutôt régressives socialement.
00:44:47 - Il y a énormément de choses dans ce que tu...
00:44:49 - Je ne veux pas que je parle de...
00:44:51 - Mais non, mais c'est très bien.
00:44:52 Beaucoup de choses dans ce que tu viens de dire.
00:44:54 Dorian, est-ce que ce qui a fait en sorte que la mayonnaise, on va dire, sociale prenne,
00:44:59 c'est parce que la réforme des retraites, ça a permis de mettre sur le devant de la scène le sujet du travail ?
00:45:06 On est entré dans la vie des gens, on les a écoutés ?
00:45:10 - On est rentré dans la vie des gens sur le sujet qui préoccupe les gens, justement.
00:45:16 Puisque c'est ce qu'il y a en filigrane dans tous les débats qu'on entend,
00:45:21 c'est le rapport à la vie, le rapport à la dignité de la vie,
00:45:24 le rapport au sens qu'on donne à sa vie.
00:45:26 Si on regarde les différentes enquêtes d'opinion là-dessus, il y a 40 ans,
00:45:32 le travail était une valeur, le travail était fondamental, cardinal, il organisait la vie.
00:45:36 Aujourd'hui, beaucoup moins, le travail est beaucoup moins perçu comme une valeur fondamentale
00:45:41 qui organise et qui structure la vie.
00:45:43 Ou au contraire, il y a une envie, une appetence, et ça s'est accéléré par le Covid,
00:45:48 de penser la vie en dehors de son temps de travail.
00:45:52 Et donc le totem de l'âge légal, la cristallisation du report de l'âge légal,
00:45:57 il vient aussi de là et il touche derrière d'autres agrégations de peur,
00:46:02 de crainte qui sont vraiment au fond de l'opinion publique aujourd'hui.
00:46:08 Et qui arrivent en plus à un moment où il ne faut pas sous-estimer
00:46:12 les chocs successifs qu'a encaissés la société.
00:46:15 Il y a eu les mobilisations sociales comme on ne les avait pas connues depuis des dizaines d'années.
00:46:21 Ensuite, le coronavirus. Ensuite, le retour de la guerre en Europe.
00:46:25 Une élection qui a été considérée comme presque inexistante par la population.
00:46:31 Tout ça sont aussi des chocs auxquels il faut penser quand on touche aussi le corps social.
00:46:37 Et j'avais, sur ce que tu disais tout à l'heure, sur la capacité du citoyen
00:46:42 à avoir un regard politique sur un objet qui le touche.
00:46:45 Ça me fait penser à une métaphore du psychologue.
00:46:49 Un psychologue américain qui s'appelle John Dewey, qui est passionnant,
00:46:52 notamment sur la démocratie par la pédagogie.
00:46:54 D'habitude, c'est Game of Thrones.
00:46:55 Oui, et là, c'est John Dewey aujourd'hui.
00:46:57 Et qui dit en fait, celui qui porte une paire de chaussures sait où est-ce qu'elle fait mal.
00:47:03 Il peut aller voir un cordonnier pour la faire réparer, mais celui qui a mal, c'est celui qui la porte.
00:47:08 Et donc il y a un sujet intéressant là-dessus, sur l'expertise citoyenne,
00:47:11 ce qu'on appelle le savoir d'usage.
00:47:13 Tous ces chocs dont on parle, ces signaux, l'abstention,
00:47:19 le fait que les Français n'aient plus confiance dans les institutions,
00:47:23 la crise du Covid, les mobilisations sociales.
00:47:27 Mais j'ai envie de dire tout ça, les politiques le voient, ils le savent.
00:47:31 Est-ce qu'ils se jettent pas complètement dans la gueule du loup en sortant comme ça, ce 49.3 ?
00:47:39 Est-ce que les politiques entendent suffisamment ces signaux, ces signes ?
00:47:47 Il y a un côté, pas loin de passer du côté obscur, de la force démocratique.
00:47:51 Et c'est précisément intéressant à observer avec le président de la République, Emmanuel Macron,
00:47:59 qui avait pour objet en 2017 de révolutionner le monde politique.
00:48:03 C'était le nom du bouquin, c'était le nom du "on change la pratique de la vie politique".
00:48:07 Cinq ans après, quand il est réélu, il annonce "je vais changer de mode de gouvernance".
00:48:12 On ne peut plus gouverner comme avant, on ne peut plus juste se donner rendez-vous une fois tous les cinq ans
00:48:17 pour régler les grands problèmes et puis donner un blanc-seing à celui ou celle qui est élu.
00:48:21 Il y a besoin de respiration démocratique.
00:48:23 Et c'est vrai que c'est assez perturbant de voir que l'analyse dans le temps de campagne,
00:48:28 elle est bonne, elle est juste sur la compréhension des exigences démocratiques.
00:48:32 - Et quand on est élu, l'analyse change.
00:48:35 - L'analyse change ou en tout cas la capacité à transformer sur ce sujet change.
00:48:39 Et il y a une analyse que je trouvais assez intéressante, je ne sais plus où je l'ai lue,
00:48:44 mais je trouvais ça assez révélateur.
00:48:49 Un président élu, il a une forme de génie dans sa campagne.
00:48:55 Il capte quelque chose de changement dans la société ou auprès des citoyens pour être élu.
00:49:02 Et dès qu'il est élu, on a le sentiment qu'il n'y a plus cette capacité à sentir le pays,
00:49:07 à sentir les choses, à sentir les grands mouvements de fond qui traversent une société.
00:49:13 Et c'est un peu le sentiment qu'on pourrait avoir aujourd'hui dans le cas de figure.
00:49:19 Après, il y a un autre enjeu qui joue beaucoup, c'est la capacité à avoir des capteurs dans l'opinion.
00:49:24 Les syndicats ont aussi ce rôle-là, de faire remonter ce qu'ils entendent.
00:49:28 Les syndicats, ce n'est pas juste des manifs, ce n'est pas juste les merguez, ce n'est pas juste les âgés,
00:49:34 ce sont des salariés qui font remonter aussi les signaux faibles, les tendances de fond de ce qu'ils observent
00:49:42 dans la société à travers l'entreprise qui est, qu'on le veuille ou pas, le lieu de socialisation
00:49:47 peut-être le plus important dans la vie des gens.
00:49:51 Il y a aussi cette part dans le dialogue social qui est indispensable aujourd'hui
00:49:55 entre la légitimité de la démocratie représentative et la légitimité de la démocratie sociale.
00:49:59 Cette capacité à sentir les choses, à sentir le pays.
00:50:02 - Il y a, oh là là, mais je l'ai perdu, attendez que je le retrouve,
00:50:06 Si Macalbarne qui dit "mais est-ce que cette utilisation du 49.3 et surtout ce côté
00:50:11 "je dirige sans m'occuper du peuple, sans me préoccuper du peuple ni des institutions"
00:50:15 ne sera pas profitable aux extrêmes, pour les prochaines élections notamment ?
00:50:22 - Ça dépend de vous ! Je ne pense pas, parce qu'il y a quand même...
00:50:27 - La colère quand même, elle s'exprime dans les urnes un petit peu de cette façon.
00:50:32 - Je suis d'accord, il y a un côté en fait, quand on méprise les autres formes de démocratie
00:50:39 que les élections, on accrédite le discours notamment de l'extrême droite
00:50:45 qui consiste à dire "les institutions ce n'est pas important".
00:50:48 "Surtout les autres formes de démocratie, ce n'est pas important".
00:50:51 Donc faites-nous confiance, pour moi c'est un peu le mythe de l'homme fort qui va tout résoudre.
00:50:57 Pour moi effectivement, quand il y a du mépris des corps intermédiaires, etc.
00:51:00 ça peut être la cause.
00:51:02 Après, moi ce que je constate quand même sur ces derniers mois de débat,
00:51:06 c'est qu'on a parlé de travail, de salaire, de conditions de travail
00:51:10 et c'est quand même pas quelque chose où on entend beaucoup, par exemple, le RN.
00:51:14 Si on prend quelque chose de tout simple comme les augmentations de SMIC,
00:51:18 ils votent quand même systématiquement contre.
00:51:20 Il y a quand même beaucoup de choses sur lesquelles, sur les questions sociales,
00:51:25 ils ont beaucoup de paroles mais moins d'actes.
00:51:28 - En tout cas oui, pendant la campagne présidentielle, ils étaient quand même beaucoup sur la pénibilité.
00:51:35 - Sur les discours, ils sont très sociaux.
00:51:36 Mais c'est là où le débat public est important.
00:51:38 C'est-à-dire la question entre les perceptions et les réalités.
00:51:42 C'est pour ça qu'on a besoin de politologues,
00:51:44 on a besoin de gens qui décryptent le réel pour qu'il ne s'épasse juste les commentaires
00:51:49 et les questions d'humeur qu'on entend parfois sur les chaînes de télé en continu.
00:51:53 En fait, il y a beaucoup de gens qui commandent mais des gens qui décryptent.
00:51:56 Moi sur les retraites, franchement, c'était fou.
00:51:58 Au bout d'un moment, on a commencé à connaître les journalistes qui avaient le temps de décrypter.
00:52:04 Juste les gens en France qui ont le temps de décrypter des dossiers de 200 pages du Corps,
00:52:09 le dossier de presse de Born, etc.
00:52:11 Et en fait, il y a des gens super comme Catherine Gaste, comme Bertrand Bissuel,
00:52:16 comme Dan Israel sur Mediapart.
00:52:18 Je prends des gens qui sont dans des rédactions différentes.
00:52:20 Et en fait, il y en a peu qu'on retrouve sur les plateaux.
00:52:23 Je veux dire, beaucoup de gens se permettent de donner beaucoup de choses
00:52:27 sans avoir eu le temps de décrypter, de travailler.
00:52:29 Dans le meilleur des cas, par faute de temps.
00:52:31 Dans le pire des cas, un peu par manque de déontologie.
00:52:34 Mais tout ça pour dire que la perception versus la réalité, ça dépend de ça.
00:52:39 Donc typiquement, sur les extrêmes, est-ce qu'ils défendent les intérêts sociaux
00:52:43 qui ont été au cœur des débats ?
00:52:45 Ça, ça dépend de à quel point on comprend le débat public
00:52:49 et la place du RN dans sa position politique, par exemple.
00:52:52 - Dorian, sur la "tentation", le risque des extrêmes,
00:52:57 dans un contexte comme ça de colère sociale, de ras-le-bol, de désillusion,
00:53:02 de perte de confiance ?
00:53:04 - Le parti politique qui a pris rendez-vous là-dessus, c'est l'extrême droite.
00:53:08 C'est Marine Le Pen qui a déjà donné rendez-vous en 2027 en disant
00:53:13 "Puisque cette loi va passer, moi, le totem de ma campagne, ça sera de la brogée".
00:53:17 - Là, le barrage républicain va prendre un coup.
00:53:20 - Il y a déjà un rendez-vous politique qui est donné.
00:53:22 Et je pense qu'il ne faut pas sous-estimer la capacité de Marine Le Pen
00:53:27 à porter des sujets, ou en tout cas à mettre à son programme
00:53:30 des sujets qui portent dans l'opinion.
00:53:32 Je pense par exemple à la question du pouvoir d'achat
00:53:35 sur laquelle elle a fait campagne tout du long de 2022,
00:53:39 au moment où d'autres étaient moins sur ces thématiques.
00:53:42 Et en fait, on voit qu'au moment de la campagne, le sujet, dans l'opinion,
00:53:45 était déjà présent, mais revient avec force et se porte sur elle.
00:53:51 Mais au-delà de l'enjeu politique, je pense qu'il y a vraiment
00:53:55 la question de l'enjeu démocratique, qui doit être le toile de fond
00:54:02 des années qui doivent nous amener à 2027, à un moment,
00:54:06 dans un contexte international où les autocraties progressent dans le monde,
00:54:09 à un moment où la démocratie recule dans le monde,
00:54:12 à un moment où dans le monde, il n'y a jamais eu aussi peu de gens
00:54:15 qui vivent dans un régime démocratique.
00:54:17 Il faut ouvrir ce grand débat, ce moment de débat collectif
00:54:21 sur comment est-ce qu'on fait progresser la démocratie,
00:54:23 comment est-ce qu'on invente le renouveau démocratique.
00:54:26 Et pour ça, le meilleur moyen d'apaiser des formes de colère
00:54:30 vis-à-vis des institutions, vis-à-vis de la vie politique,
00:54:33 il est d'associer les citoyens à ce type de réforme,
00:54:36 à ce type de moment. On ne peut pas imaginer de réformer les institutions
00:54:40 ou ouvrir ce grand débat sur la vie démocratique
00:54:43 ou comment est-ce qu'on réinvente la vie démocratique
00:54:45 sans faire participer précisément celles et ceux qui en sont les premiers usagers.
00:54:50 Et ça, c'est un marqueur fort aussi dans l'opinion.
00:54:53 On le voit, la réaction par rapport au 49-3,
00:54:55 c'est une réaction aussi vis-à-vis de la vie démocratique.
00:54:58 Donc ça parle au fond des tripes des gens.
00:55:01 Et même dans l'opinion sur la volonté d'être associé à la réforme,
00:55:05 il y a un sondage qui était assez intéressant d'Opinion Way
00:55:07 pour des ONG Agoralab, démocratie ouverte et mieux votée,
00:55:11 qui montrait que plus de 8 Français sur 10 voulaient être associés à une telle réforme.
00:55:15 Et donc ça pour moi, c'est le chantier qui permettra aussi de sortir
00:55:18 de cette tension politique et démocratique,
00:55:22 notamment créée par des outils considérés comme brutaux comme le 49-3.
00:55:26 - Et justement à ce sujet, il y a Etomite dans le chat qui dit
00:55:30 "Franchement, à la place de Macron, ne serait-il pas temps de faire une réforme constitutionnelle ?
00:55:35 Nous sommes tous d'accord sur le constat que la démocratie ne fonctionne pas bien
00:55:38 et n'ayant pas de possibilité pour 2027, Macron serait gagnant.
00:55:42 En plus, la seule chose qui l'intéresse, c'est la marque qu'il aura laissée dans l'histoire de France."
00:55:47 - Je suis d'accord, mais je rejoins le sujet démocratique totalement.
00:55:53 - C'est le moment de repenser nos institutions.
00:55:57 - Je trouve qu'on fantasme un peu comme s'il y avait un État démocratique parfait
00:56:01 qui n'a jamais existé. Ça n'a jamais existé en fait.
00:56:03 Il n'y a aucun droit social. On parlait du droit de vote des femmes avant l'émission.
00:56:07 Il n'y a rien qui a été attribué au peuple dans des salles entre gens raisonnables
00:56:12 qui attribuent des droits. En fait, toutes ces choses-là ont été conquises
00:56:16 à travers des luttes, des rapports de force, plus ou moins violents, plus ou moins pacifiques.
00:56:20 Mais mon propos principal, il est de dire que ce qui compte, c'est que les gens
00:56:24 se sentent légitimes pour s'impliquer en politique, pour être dans des syndicats,
00:56:28 pour donner leur avis, pour débattre, pour écouter un avis divergent,
00:56:33 exprimer leur avis divergent. - Le risque, c'est de se détourner de la politique.
00:56:35 - Exactement. Pour moi, la crise démocratique, elle est à partir du moment
00:56:38 où les gens se disent "ça sert à rien". Et là, moi, je trouve qu'on recule sur ces sujets.
00:56:42 Enfin, on recule sur l'idée que ça sert à rien. Là, en fait, je trouve que les gens
00:56:47 comprennent l'intérêt de se mobiliser. Et même quand on voit tous les mouvements
00:56:51 écologistes et féministes, les gens comprennent bien que ça ne se joue pas
00:56:54 que à l'Assemblée, ça ne se joue pas qu'entre gens raisonnables, ça se joue
00:56:58 dans sa boîte, dans sa famille, dans sa ville et au niveau peut-être de son parti,
00:57:04 de son syndicat, peu importe. Mais ce qui compte, le sujet numéro un,
00:57:07 c'est que les gens se sentent légitimes pour en être. Donc, en fait, il n'y a pas besoin
00:57:11 du grand soir ou de la démocratie parfaite. En fait, à partir du moment
00:57:14 où les gens s'organisent, se respectent et se donnent l'envie collective d'avancer,
00:57:18 je trouve que c'est ça. Là, on a gagné, on a avancé.
00:57:22 - Mais d'ailleurs, dans le tchat, pardon, je fais une mini pause, le tchat,
00:57:25 dites-nous, est-ce que cette réforme des retraites, tous ces débats-là,
00:57:30 vous donnent justement envie davantage de vous engager en politique ou dans des
00:57:37 assos, dans des syndicats, etc. Ou est-ce qu'au contraire, ça provoque chez vous
00:57:41 une sorte de recul vis-à-vis de tout ça, de la politique ?
00:57:45 Dites-nous un petit peu comment vous vous situez, Dorian ?
00:57:48 - Oui, pour rebondir sur ce que tu disais, Régis, je pense qu'il y a quand même
00:57:51 un enjeu constitutionnel. Parce que la constitution et l'architecture institutionnelle
00:57:56 organisent à la fois les pouvoirs, mais aussi les contre-pouvoirs,
00:58:00 organisent aussi la manière dont on fait vivre la démocratie.
00:58:05 Et aujourd'hui, ce qui est exprimé par les citoyens, c'est une volonté
00:58:09 de faire cohabiter différentes formes de démocratie.
00:58:12 La démocratie, elle est polymorphe, elle ne peut pas être uniquement
00:58:15 par l'élection, par l'élu et par le débat en chambre, comme on dit.
00:58:18 Elle doit aussi exister par des formes plus délibératives, plus participatives.
00:58:22 Et ça, c'est un enjeu fondamental qui est un enjeu institutionnel.
00:58:26 Nos institutions sont aujourd'hui en décalage avec ces aspirations
00:58:30 démocratiques de la société. Et les institutions de la Ve République,
00:58:33 elles sont faites pour évoluer. Elles sont déjà beaucoup évoluées.
00:58:35 Il y a eu 24 lois de révision constitutionnelle depuis 1958.
00:58:38 La constitution de la Ve aujourd'hui, elle a plus grand chose à voir
00:58:42 avec celle de 1958. On ne votait pas pour le président de la République à l'époque.
00:58:46 Donc il y a encore une étape à franchir pour démocratiser la société
00:58:51 et permettre à chacune et à chacun de participer à la vie de la cité,
00:58:55 ce qui est la promesse de la démocratie.
00:58:58 Donc il y a un temps de renouveau démocratique qui est urgent à opérer
00:59:02 parce que c'est par ce temps de renouveau démocratique qu'on apaisera aussi
00:59:05 d'autres formes de tensions économiques, sociales et environnementales.
00:59:11 - Alors, des réactions mitigées dans le tchat.
00:59:15 Il y a à la fois des gens, des viewers qui nous disent que oui,
00:59:19 ça leur donne envie de s'engager. D'autres qui disent qu'au contraire,
00:59:24 il y a un certain découragement, l'impression que ce sont toujours
00:59:27 les mêmes qui sont favorisés. Et il y a quand même beaucoup de gens
00:59:31 dans le tchat qui disent, qu'en fait, désolé de le dire comme ça,
00:59:34 mais ça leur donne envie de tout cramer.
00:59:37 Il y a quand même cette tentation-là de la violence aussi.
00:59:43 - Il y a une question de cueillir de la colère, c'est normal.
00:59:46 La question, elle est de savoir où est-ce qu'on est le plus utile.
00:59:49 Et déjà, on est le plus utile quand on s'organise avec les autres,
00:59:52 quand on prend le temps de discuter, quand on se met d'accord
00:59:55 pour se donner des objectifs communs.
00:59:58 Donc de toute façon, le pouvoir, il ne se fait que de façon collective.
01:00:03 Mais là où je rejoins, mon propos, il n'était pas du tout de dire
01:00:06 que les institutions, ça ne compte pas. Et au contraire, je trouve que
01:00:09 la surpersonnalisation du pouvoir autour de la figure du président,
01:00:14 où en gros, il y a des gens qui ont le discours de comme si la politique,
01:00:19 ça se résumait à un choix entre Macron, Mélenchon et Marine Le Pen.
01:00:22 Mais ce n'est pas ça, en fait, la politique. Ça se joue tous les jours.
01:00:25 Et justement, je trouve que la colère, c'est un bon sujet,
01:00:28 parce que la colère, moi, je ressens de la colère comme pas mal d'autres gens
01:00:32 dans le moteur de mon engagement. Et justement, moi, je sens que c'est important
01:00:35 de le canaliser dans des choses. Justement, je la canalise là où je sens que c'est utile.
01:00:39 Typiquement transmettre, faire du débat. Ça me donne envie de travailler
01:00:44 en dehors de mon boulot. Ça me donne envie de faire du bénévolat.
01:00:47 Ça me donne envie, je ne sais pas, ce n'est pas mon cas.
01:00:50 - Oui, ça te motive. Ça motive, j'ai vu tout à l'heure dans le chat.
01:00:52 - Oui, en fait, c'est ça qui fait le truc que je vais travailler de façon gratuite.
01:00:56 Que ce soit pour donner des cours de français à un migrant,
01:00:59 que ce soit pour aider le petit vieux dans ma cage d'escalier,
01:01:03 que ce soit pour dénoncer dans mon boulot les comportements sexistes,
01:01:07 que ce soit pour faire comme dernière rénovation,
01:01:09 aller s'embêter à bloquer un truc de sport pour la rénovation de logement.
01:01:15 Vous voyez ce que je veux dire ? Il y a une question de...
01:01:18 On canalise sa colère parce que sinon c'est frustrant.
01:01:20 Sinon, on se tourne contre soi ou contre les autres.
01:01:23 Justement, la politique, elle canalise les besoins, les aspirations des gens.
01:01:27 C'est pour ça que la politique, ce n'est pas juste les élections.
01:01:30 Et c'est pour ça que les gens investissent tous ces autres espaces politiques
01:01:34 qui ne sont pas... En fait, c'est ça le quotidien.
01:01:37 Le quotidien, c'est quoi les rapports de force dans mon entreprise ?
01:01:39 C'est quoi les rapports de force dans ma famille s'il y a des comportements discriminatoires ?
01:01:43 C'est quoi les rapports de force dans ma ville, dans mon quartier ?
01:01:46 Et puis, si on a la patience, dans mon parti, dans mon syndicat et dans la politique nationale.
01:01:51 Mais pour moi, c'est une question de canaliser ces énergies vers là où c'est utile.
01:01:57 Et après, c'est une question de patience et de travail.
01:01:59 Dorian, tu veux réagir là-dessus ou sinon on avance sur le côté...
01:02:03 Tous les espaces politiques, finalement, vont connaître une forme de regain d'engagement.
01:02:09 Oui, et on ne peut que la comprendre, je trouve, cette colère.
01:02:14 C'est pour ça que sans dramatiser la période,
01:02:19 il faut quand même avoir conscience d'un moment de tremblement.
01:02:25 Quand je parlais de crise de régime tout à l'heure, c'est peut-être un poil exagéré.
01:02:31 Mais ce que je veux dire par là, c'est qu'il y a une période de turbulence.
01:02:37 Pas que pour la vie politique des élus.
01:02:39 Il y a une période de turbulence pour l'ensemble de la société.
01:02:42 Et c'est des moments où je pense qu'il y a un enjeu pour le personnel politique
01:02:49 de réfléchir à des sujets de cohésion nationale, de vivre ensemble.
01:02:54 Alors ça fait un peu poncif, aligné comme ça.
01:02:57 Mais la période le demande. Et les citoyens le demandent aussi.
01:03:02 Et ce qu'ils demandent aussi, c'est de voir plus de compromis,
01:03:07 de changements de culture, de manières de faire de la politique.
01:03:10 On le disait tout à l'heure, il y a d'autres régimes politiques autour de nous
01:03:15 où le compromis est au cœur de la discussion.
01:03:19 Dans notre régime politique, non.
01:03:21 Aujourd'hui, on doit avoir raison sur tout le monde,
01:03:24 ou tous les autres doivent avoir tort.
01:03:27 Il y a cette manière d'envisager le débat, ou le programme, ou la campagne,
01:03:31 qui veut qu'on est ou gagnant, ou perdant,
01:03:34 ou dans une opposition farouche, ou dans une autorité absolue.
01:03:38 Or, la démocratie organise les différences, organise les différents,
01:03:43 doit permettre le débat, doit aussi permettre le consensus, le compromis.
01:03:47 Le compromis, ce n'est pas la compromission.
01:03:49 Beaucoup de régimes démocratiques modernes autour de nous,
01:03:51 des gouvernements de coalition qui mettent des mois à se monter.
01:03:54 En Allemagne, il faut des mois de négociations, de discussions.
01:03:57 Et après ça déroule.
01:03:58 Et là, on a l'impression par contre, dans notre culture politique,
01:04:01 que c'est un truc qui n'est pas possible.
01:04:03 C'est un truc qui n'est pas possible parce qu'on ne pourrait pas avoir raison
01:04:06 autrement que tout seul face à tout le monde.
01:04:08 - Et c'est intéressant, il y a dans le chat "chien GPT",
01:04:12 très drôle ce pseudo,
01:04:13 - Trois ou quatre.
01:04:14 - Qui dit "derrière la question de l'engagement, c'est surtout de savoir
01:04:17 par quel moyen le changement adviendra.
01:04:20 Y a-t-il un vrai problème de représentation ?"
01:04:24 - Bah, le changement, il vient par la culture, par les gens, par le débat typiquement.
01:04:29 Je vais prendre deux exemples par rapport...
01:04:31 - Devenez député.
01:04:32 - Pour reboucler sur la réforme de l'entraide.
01:04:34 Mais oui, non, mais c'est ça, lancez-vous en fait.
01:04:36 Prenez la patience de discuter avec des gens avec qui vous n'êtes pas d'accord
01:04:39 pour essayer de les convaincre en respectant leur point de vue,
01:04:41 en partant de leur point de départ.
01:04:43 Mais je vais prendre deux exemples sur par où ça change.
01:04:46 Là, dans le projet, je reboucle sur la réforme de l'entraide,
01:04:50 il y a le projet d'index senior.
01:04:52 C'est le bon exemple de mauvaise façon de faire vivre,
01:04:57 de rétablir, de corriger une injustice sociale,
01:05:01 qui est le fait qu'on vire les seniors du marché du travail.
01:05:04 Donc deux exemples, on a sur les femmes,
01:05:07 on a des index depuis très longtemps, ça ne donne rien.
01:05:10 Qu'est-ce qui fait bouger sur les femmes ces dernières années ?
01:05:12 Le fait qu'on en discute.
01:05:14 Par exemple, je crois que la question du viol, qui est une question grave,
01:05:17 il y en a très peu qui aboutissent à des condamnations, des plaintes.
01:05:21 En fait, je crois que c'est 2% des questions de viol.
01:05:23 Pourquoi je dis ça ? Parce qu'en fait, qu'est-ce qui va changer sur les viols ?
01:05:27 Le changement de culture, le fait qu'on discute,
01:05:30 il y a une acceptabilité de moins en moins forte du virilisme,
01:05:35 de la violence envers les femmes.
01:05:37 Donc pour moi, le changement, il advient par la culture
01:05:39 et par les discussions entre les gens.
01:05:41 Autre exemple pour reboucler sur la question de l'index senior,
01:05:46 on prend quelque chose qui est beaucoup plus contraignant
01:05:48 que le projet d'index senior, qui est l'obligation de recruter
01:05:51 des personnes en situation de handicap à 6%.
01:05:54 Ça existe depuis 20 ans ce truc ?
01:05:56 Et personne ne le respecte, il y a des pénalités financières.
01:05:59 C'est sans conséquence.
01:06:00 Donc qu'est-ce qui se change sur ces choses-là ?
01:06:02 - On paie les amendes.
01:06:03 - C'est culturel.
01:06:04 Est-ce qu'on se dit en tant que culturellement
01:06:06 que les handicapés c'est important,
01:06:09 que les injustices hommes-femmes c'est important,
01:06:11 que les questions climatiques c'est important,
01:06:13 que la justice envers les retraités c'est important
01:06:19 versus faire confiance au marché pour gérer les assurances.
01:06:22 Et ça, sur les retraites, pour reboucler,
01:06:24 c'est notre plus grosse réussite en France depuis la Seconde Guerre mondiale.
01:06:28 À un moment, on s'est dit, on va arrêter de laisser crever les vieux
01:06:31 et on a organisé la solidarité pour que les vieux aient des conditions correctes de vie.
01:06:37 Donc en fait, je pense que tout ça, ça nous dit une énorme envie de justice des gens.
01:06:42 Et pour moi, c'est des changements culturels ensuite.
01:06:47 C'est où en est l'opinion, où en est la société
01:06:50 sur la légitimité de chacun de participer au débat,
01:06:53 sur les questions sociales, sur les questions de justice,
01:06:55 sur les questions de discrimination, etc.
01:06:57 Donc le changement, c'est maintenant, c'est autour de vous.
01:07:00 Non mais le changement, c'est ce que vous voulez.
01:07:03 C'est la motivation que vous avez à amener du changement positif autour de vous.
01:07:07 Il faut toujours être humble et modeste en se disant,
01:07:10 je commence par moi, aide bien moi et ensuite mon entourage.
01:07:13 Et si j'ai le temps, la patience, l'envie de travail, pour d'autres.
01:07:17 Est-ce que ça vous dit qu'on parle un petit peu des motions de censure ?
01:07:21 Donc là, il y en a deux qui ont été déposées.
01:07:25 Il va se passer quoi, là, dans les jours à venir ? Lundi ?
01:07:29 Ce qui va se passer, c'est que,
01:07:31 donc il y a deux motions de censure qui sont soumises
01:07:34 au vote de l'Assemblée Nationale, le vote qui aura lieu lundi.
01:07:38 Et pour qu'une motion de censure soit adoptée,
01:07:42 il faut avoir la majorité absolue des députés élus.
01:07:46 - 289.
01:07:48 - Alors ça bouge un peu parce qu'il y a eu des invalidations d'élections.
01:07:51 Donc le nombre de membres de l'Assemblée Nationale aujourd'hui a un peu bougé
01:07:55 parce qu'il y a des législatives partielles à venir.
01:07:58 Mais il y a une majorité absolue des membres de l'Assemblée Nationale
01:08:01 à avoir pour adopter une motion de censure.
01:08:04 Ce qui se passe quand elle est adoptée, on dit que le gouvernement tombe.
01:08:07 Et là, qu'est-ce qui se passe ?
01:08:10 On n'est pas bien avancé parce que le président de la République
01:08:14 nomme un ou une nouvelle première ministre
01:08:17 qui devra avoir un vote de confiance à l'Assemblée Nationale.
01:08:20 Donc il y a deux options, en cas de motion acceptée,
01:08:24 où le président nomme un premier ministre ou une première ministre
01:08:28 de sa majorité, de sa coalition présidentielle,
01:08:32 où il y a une majorité alternative qui se forme.
01:08:35 Le tout, c'est d'arriver à compter jusqu'à 289 pour voter la confiance.
01:08:39 Donc ça, c'est les deux scénarios possibles de la motion de censure.
01:08:42 Après, ce n'est pas les deux seuls scénarios de continuum
01:08:46 du débat parlementaire sur la réforme des retraites.
01:08:49 Parce qu'il y a aussi la possibilité d'un référendum d'initiative partagée,
01:08:54 ce qui agite quelques partis parlementaires.
01:08:57 Oui, tout à fait.
01:08:59 Ce qui est assez difficile parce qu'il y a des conditions techniques,
01:09:02 de diversité de députés et de sénateurs,
01:09:05 mais il y a surtout la nécessité de requérir 5 millions de signatures.
01:09:08 Ce qui n'est pas une mince affaire.
01:09:11 En revanche, à partir du moment où le référendum d'initiative partagée
01:09:15 est déclenché, la procédure suspend l'application de la loi.
01:09:18 Donc ça veut dire que la loi ne peut pas être promulguée et mise en application
01:09:22 à partir du moment où il y a cette procédure de référendum d'initiative partagée.
01:09:25 Donc c'est quand même intéressant à voir dans les potentiels
01:09:28 deuxièmes épisodes ou saison 2 de la vie de ce texte
01:09:32 à l'Assemblée, au Parlement.
01:09:34 Et ces motions censures, surtout la transpartisane
01:09:37 qui a été déposée par le groupe Lyot,
01:09:40 elle peut être adoptée ?
01:09:42 C'est celle qui a le plus de chances d'être adoptée.
01:09:44 Alors si on fait un peu de popole...
01:09:46 Il faudrait combien de députés LR ?
01:09:48 Si on fait un peu de Borghain ou de House of Cards,
01:09:51 en gros, il y a un enjeu, c'est que
01:09:55 la France Insoumise et la NUPES
01:09:57 ne souhaitent pas voter une motion de censure
01:09:59 déposée par le Rassemblement National.
01:10:01 C'est pour ça qu'ils en ont fait deux.
01:10:03 Ils n'ont pas envie, ils ne peuvent pas l'empêcher,
01:10:05 mais ils ne le souhaitent pas que le Rassemblement National
01:10:07 signe leur motion de censure.
01:10:09 C'est pour eux pas acceptable.
01:10:11 Donc le groupe Lyot est notamment emmené par Bertrand Porchet,
01:10:15 je crois que c'est son président,
01:10:17 et le désormais député star Charles de Courson,
01:10:20 se propose pour être le point de reconnaissance
01:10:25 de tous les autres partis
01:10:27 qui ne voudraient pas signer la motion de censure de Lyot.
01:10:30 Ce qui n'empêche pas que le Rassemblement National
01:10:32 a quand même déposé la sienne,
01:10:34 parce qu'ils se sentent un peu ostracisés,
01:10:36 donc ils veulent déposer la sienne,
01:10:38 mais certains annoncent qu'ils voteront la motion de censure de Lyot.
01:10:40 Ce qui va faire la différence, c'est 35 à 40 députés LR,
01:10:44 et de savoir s'il y a 35 ou 40 députés LR
01:10:47 qui vont voter cette motion de censure.
01:10:49 Certains l'ont annoncé qu'ils le voteraient,
01:10:51 d'autres laissent encore planer le doute,
01:10:54 ou sont encore en réflexion.
01:10:56 Donc on peut dire que la motion de censure Lyot
01:10:58 est celle qui a le plus de chances de pouvoir passer,
01:11:01 sans qu'on en soit véritablement sûr.
01:11:03 Il y a la secrétaire générale des Républicains,
01:11:06 Annie Gennevard,
01:11:08 Gennevard, je ne sais pas comment on prononce,
01:11:11 qui a dit que la situation était suffisamment grave aujourd'hui
01:11:15 pour qu'on ajoute une crise politique majeure à une crise sociale.
01:11:18 Mais elle a quand même admis que certains députés LR
01:11:21 étaient tentés de signer une motion de censure.
01:11:25 Il y a dans le chat Brolhénia qui dit
01:11:28 "Est-ce que le Président peut être renversé ?"
01:11:30 Il y a des procédures de destitution,
01:11:35 mais qui ne peuvent pas être appliquées dans le cas présent de la réforme des retraites.
01:11:38 En revanche, l'autre carte qui est dans les mains du Président de la République,
01:11:42 c'est la dissolution.
01:11:44 C'est l'autre possibilité qu'il a,
01:11:46 c'est de dissoudre l'Assemblée Nationale
01:11:48 et de dire "tout le monde repart en campagne"
01:11:50 et on verra à l'issue de cette campagne
01:11:54 quelles sont la configuration des forces politiques à l'Assemblée Nationale.
01:12:00 - Et c'est arrivé qu'une fois dans la Ve République
01:12:04 qu'une motion de censure soit adoptée ?
01:12:08 C'est en 1962, pour la petite info.
01:12:12 Dans tous les cas, il va faire quoi ?
01:12:16 Par exemple, si la motion de censure n'est pas adoptée,
01:12:18 qu'est-ce qu'il peut faire Emmanuel Macron ?
01:12:20 Que se passe-t-il ?
01:12:22 - Aucune idée.
01:12:24 Dissolution, renouveau gouvernement.
01:12:26 Mais en tout cas, les choses ne sont pas jouées.
01:12:29 Ce n'est pas exclu que ça passe et que le mouvement social continue.
01:12:35 Parce que tout n'est pas joué encore.
01:12:39 D'ailleurs, je vous encourage à ne pas contribuer à mettre la pression
01:12:43 en allant sur 49-3.fr pour interpeller un maximum de députés
01:12:49 qui pourraient voter la motion de censure.
01:12:51 Ce qu'on sait, c'est que les syndicats ont appelé à mobiliser après.
01:12:57 Donc ça dépend aussi de la tournure du débat public et du mouvement social
01:13:03 après l'éventuel passage, si ça passe.
01:13:07 - La loi peut être promulguée, puis elle peut être retirée.
01:13:11 C'est le précédent CPE en 2006.
01:13:13 - Parfait, tu viens de dire ce que je voulais dire.
01:13:15 - Je suis visé dans le chat de loin.
01:13:17 - Donc 2006, trois mois de mobilisation sociale, 49-3 et projet retiré.
01:13:25 - Il pourrait retirer son projet ?
01:13:29 - Il y a eu le 49-3 sur la réforme de la retraite aussi, de Macron lui-même.
01:13:35 Donc il y a déjà eu un recul post-49-3 par Macron en 2020.
01:13:39 - Et puis il y a aussi un enjeu de constitutionnalité.
01:13:41 C'est un sujet qui remonte beaucoup, qui revient beaucoup.
01:13:45 Il y a un très bel article du Monde qui le détaille aujourd'hui,
01:13:49 notamment sur la qualité de la sincérité des débats parlementaires
01:13:53 et la surmultiplication des outils qui altèrent,
01:13:57 ou qui pourraient être considérés comme altérant, je ne sais pas si ça se dit,
01:14:01 de la qualité du débat parlementaire.
01:14:03 Le 47-1 au Sénat, le vote bloqué, 49-3.
01:14:07 Donc il y aura aussi un sujet constitutionnel.
01:14:11 Ce qui est intéressant, s'il fallait dédramatiser un peu le contexte,
01:14:17 c'est que c'est un cas typique de blocage.
01:14:23 Ça montre toutes les difficultés qu'il y a à passer une réforme aussi engageante politiquement
01:14:31 dans un corps social qui est opposé, avec une majorité politique relative à l'Assemblée.
01:14:37 - Antoine Antigone qui dit "2 500 personnes à la Concorde ce soir".
01:14:43 Alors j'avoue que... Mais je peux regarder sur le site de France Info.
01:14:46 Je voulais juste faire part d'un petit message que nous a laissé un talker,
01:14:52 du coup Kyle CM dans notre Discord aujourd'hui,
01:14:56 et qui a dit "J'ai l'impression que si on en est là,
01:14:59 aujourd'hui c'est parce que la présidentielle n'a pas permis de trancher les sujets de société.
01:15:03 Plus j'y pense et plus je me dis que la solution à cela serait la dissolution de l'Assemblée.
01:15:07 Avec une question clairement posée aux Français,
01:15:09 quel projet politique pour les cinq prochaines années ?
01:15:13 - C'est vrai qu'il y a quelque chose qui est un peu faux dans l'annonce du gouvernement
01:15:19 de dire "J'ai le mandat puisque j'ai été élu pour".
01:15:22 - Donc j'ai la légitimité.
01:15:24 - Alors qu'il nous disait entre les deux tours "Chers électeurs de gauche,
01:15:28 je ferai mon quinquennat en pensant à vous".
01:15:32 Donc déjà il y a quand même quelque chose là-dessus.
01:15:36 Mais encore une fois, tout ne dépend pas des élections.
01:15:39 Il y a le mouvement social qui est encore en cours.
01:15:45 Donc évidemment s'il y a une dissolution, ça rebat totalement les cartes politiques.
01:15:50 Mais ce n'est pas l'alpha et l'oméga.
01:15:53 Il y a d'autres choses qui jouent et c'est ce que nous a montré ce mouvement social.
01:15:57 On a vu quand même une diversité de modes d'expression,
01:16:02 de canaux, de formes de débats.
01:16:06 Là, à très court terme, je n'enterrerai pas la fin du mouvement social aussi rapidement que ça.
01:16:14 - Dorian, peut-être une petite réaction ?
01:16:17 - Je trouve la remarque intéressante.
01:16:20 - Certains sujets de société n'ont pas été suffisamment débattus pendant la campagne.
01:16:24 - Il y a aussi la possibilité d'un référendum.
01:16:26 On ne l'a pas évoqué, mais c'est aussi une porte de sortie possible
01:16:29 par la voie référendum quand on parle de retour au sujet du peuple.
01:16:34 Mais oui, il y a le sentiment, sur cette élection en particulier,
01:16:38 que le débat, les débats, n'auraient pas permis d'évacuer les passions.
01:16:45 C'est-à-dire qu'on aurait eu le sentiment qu'il n'y avait pas l'espace suffisant
01:16:50 ou le débat n'aurait pas été d'assez bonne qualité en termes de nombre de débats, par exemple,
01:16:56 pour expurger un peu cette situation et donner un mandat politique clair.
01:17:01 Et donc, là où c'est intéressant, c'est qu'effectivement, Président de la République,
01:17:06 tous les députés de l'Assemblée nationale ont une légitimité démocratique.
01:17:11 En revanche, le sujet que montre cette réforme des retraites, c'est
01:17:15 à quel point est-ce qu'on peut avoir raison démocratiquement et politiquement tort ?
01:17:20 - C'est bien résumé. Le mot de la fin, Régis ?
01:17:25 - Euh... - La pression !
01:17:28 - Je sais pas, mais en tout cas, moi je trouve que tout ça, ce mouvement m'a prouvé que
01:17:33 les gens, à partir du moment où on leur dit "vous avez la place de vous exprimer",
01:17:38 les gens s'impliquent. Parce qu'il y a quelques années, on parlait quand même beaucoup de les gens...
01:17:43 - Qui sont dépolitisés. - Qui sont dépolitisés, qui se désengagent, blablabla,
01:17:47 les syndicats enterrés, tout ça. Bon, ben c'est pas vrai. On a une forme quand même de vivacité
01:17:52 du débat qui s'est manifesté là, qui est très intéressante. Et la place qu'ont pu avoir
01:17:56 certains universitaires, j'y reviens, est quand même très intéressante.
01:18:00 Donc potentiellement, si on peut retrouver ça sur d'autres débats, ça serait intéressant.
01:18:05 La réforme de l'assurance-chômage est passée comme une lettre à la poste.
01:18:08 Là, on a vu tout un corps social extrêmement vivant, quoi.
01:18:13 - Dorian, ton mot de la fin à toi ?
01:18:16 - Moi, ça serait qu'il faut espérer qu'il y ait une sortie de crise politique de ce sujet.
01:18:25 Et que derrière, on puisse très vite poser la question du renouveau démocratique,
01:18:29 du progrès démocratique, comment est-ce qu'on enclenche ce sujet-là.
01:18:32 Parce que je pense qu'il est important de réinventer une architecture d'institutions
01:18:37 qui permettent de faire vivre différentes formes de mobilisation sociale, associative, syndicale, politique,
01:18:45 différentes manières de s'engager dans la vie de la cité,
01:18:49 et différentes formes de participation citoyenne,
01:18:52 soit des formats plus délibératifs, plus participatifs.
01:18:57 C'est généralement ce qui est possible de faire quand on voit qu'une élection n'arrive pas à trancher un débat dans une société.
01:19:04 On peut aussi remettre ce débat-là par d'autres formes de démocratie,
01:19:09 de conventions citoyennes, tout un tas de formats qui existent,
01:19:13 qui font leur preuve à l'étranger, dont il serait sain et heureux de pouvoir s'inspirer.
01:19:17 - Merci à vous, Volkachou, dans le tchat qui dit "le référendum partagé", je le sens bien, perso.
01:19:21 Merci beaucoup, mais c'était passionnant, j'ai trouvé.
01:19:24 Trop contente qu'on ait fait ce débat.
01:19:27 - On revient pour les canapés.
01:19:29 - Ouais, c'est ça, dans huit semaines je crois qu'ils vont arriver.
01:19:33 Merci beaucoup.
01:19:34 Et puis je viens de lire sur le site de France Info, je vous le donne au cas où,
01:19:37 la Direction Générale de l'Aviation Civile, qui a demandé aux compagnies aériennes d'annuler lundi
01:19:42 30% de leurs vols à Paris-Orly et 20% à Marseille,
01:19:47 en raison du mouvement de grève des contrôleurs aériens contre la réforme des retraites.
01:19:52 À suivre, week-end chargé, semaine à venir qui s'annonce...
01:19:58 - Il y aura des rassemblements locaux.
01:20:00 - Mouvementé politiquement et socialement, en tout cas.
01:20:02 - Ça a été annoncé à la CIVI, fait des termes.
01:20:03 - Voilà, mais on va suivre tout ça, et puis on va très probablement refaire un stream sur le sujet lundi, ou mardi.
01:20:11 Mais lundi, je pense.
01:20:12 Merci beaucoup, le tchat. Est-ce que ça vous a plu, ce stream ?
01:20:15 Dites-nous un petit peu. Merci Dorian Dreuil, politologue, expert associé à la Fondation Jean Jaurès.
01:20:20 Et merci Régis Nicolas, porte-parole du collectif Nos Retraites.
01:20:23 Et est-ce que tu peux peut-être, je me permets de te poser la question, parce que j'ai vu ça dans le tchat,
01:20:28 mais redonner, les gens demandent l'adresse du site dont tu as parlé.
01:20:31 Parce qu'apparemment, ça n'a pas fonctionné.
01:20:33 - À 49-3.fr.
01:20:39 - Voilà. Merci beaucoup, merci le tchat. Merci à l'équipe du Tolk aussi.
01:20:43 Merci le tchat, c'était trop cool. Merci de nous avoir suivis cette semaine.
01:20:48 Antoine qui dit merci, Manon merci Régis, merci Dorian, voilà.
01:20:52 Sergent, Bacon, merci aux participants. Piscaflash, merci, très intéressant.
01:20:57 Merci à vous, trop contente. Maintenant, c'est le week-end.
01:21:01 - Merci les Tolkers.
01:21:03 - C'est bien ça. Merci les Tolkers, on va le garder ça.
01:21:05 Merci vraiment. Encore merci, c'était trop bien, Volkachou.
01:21:09 Ça fait du bien de cracher son venin. Bonne fin de soirée.
01:21:13 Allez, salut. Alain dit merci encore à vous en tout cas.
01:21:16 Et merci à Cyril qui est en régie.
01:21:20 Sous-titrage ST' 501
01:21:23 ...
01:21:52 ...
01:22:16 ...
01:22:45 ...
01:23:14 ...
01:23:43 ...
01:23:48 *Bruit de clavier*

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