Elisabeth Lévy : "Les ONG sont en quelque sorte des passeurs bénévoles"

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Transcript

00:00 - Bonjour Elisabeth Lévy. - Bonjour Patrick, bonjour à tous.

00:04 - Après la noyade de 70 personnes au large de la Calabre de l'Italie,

00:10 le pape François demande l'arrestation des trafiquants d'êtres humains.

00:15 - Oui, c'était dimanche pendant l'Angélus et le pape revenait sur le terrible naufrage

00:20 d'un bateau surchargé de migrants qui arrivait du port turc d'Yezmir

00:24 et sur environ 200 passagers, on n'est pas très sûr.

00:28 Il y a eu, qui venait d'Irak, d'Iran, de Syrie, d'Afghanistan, il y a eu au moins 70 morts,

00:34 dont une vingtaine d'enfants.

00:36 Voilà ce qu'a dit le pape, que ces voyages d'espoir ne se transforment plus jamais en voyages de la mort.

00:41 Et il a ajouté que les trafiquants d'êtres humains soient arrêtés,

00:46 qu'ils ne continuent pas à disposer de la vie de tant d'innocents.

00:51 Alors on sait que le pape François est très sensible aux sorts de migrants,

00:55 ce n'est pas la première fois d'ailleurs qu'il dénonce les passeurs,

00:57 c'est tout de même la première fois qu'il les désigne comme les principaux responsables des noyades

01:02 et qu'il demande leur arrestation.

01:04 Et c'est d'autant plus remarquable qu'en Italie, c'est le ministre des Transports, le gouvernement,

01:09 et le ministre des Transports, Matteo Salvini, qui a été sur la sellette pour l'arrivée tardive des secours.

01:15 - C'est vrai, c'est vrai. Alors est-ce que ce n'est pas un peu facile ?

01:16 Parce que l'Europe a aussi sa part de responsabilité, bien sûr, non ?

01:21 - C'est la position traditionnelle du pape, d'habitude.

01:25 Il pustige l'égoïsme des Européens et prône l'accueil inconditionnel.

01:30 Or cette position est intenable.

01:32 L'Europe ne peut tout simplement pas accueillir toute la misère du monde

01:36 et elle en prend déjà sa large part.

01:39 Alors le hasard du calendrier, c'est fait que d'une certaine façon,

01:43 si on ose dire, la justice des hommes a rejoint la justice divine.

01:47 Parce que saisie par un contribuable parisien,

01:49 la Cour administrative d'appel a annulé vendredi, 3 mars, donc vendredi dernier,

01:54 une subvention de 100 000 euros accordée en 2019 par la municipalité parisienne

01:59 à SOS Méditerranée.

02:01 Alors pour quelle raison ?

02:03 Eh bien c'est que cette subvention, l'activité d'SOS Méditerranée,

02:07 n'est pas d'intérêt local, il n'y a aucune raison de la faire financer

02:10 par le contribuable parisien.

02:11 Et surtout qu'elle représente une émission de la municipalité

02:15 dans la politique étrangère, dans la politique migratoire,

02:18 qui est une prérogative du gouvernement.

02:20 Et selon la Cour administrative d'appel, dans sa délibération,

02:24 quand elle a accordé la subvention, la municipalité reprenait à son compte,

02:28 d'une certaine façon, les critiques de l'ONG

02:31 contre la politique migratoire européenne.

02:34 Vous savez, ces ONG nous accusent aussi, comme le pape, d'être égoïstes.

02:39 Et si cette décision est confirmée par le Conseil d'Etat,

02:42 eh bien ce risque d'être très problématique pour ces associations

02:45 qui sont très dépendantes des subventions.

02:48 Alors que montre cette décision ?

02:49 Elle montre que les ONG ne se contentent pas de secourir,

02:52 mais qu'elles agissent bien comme convoyeurs.

02:55 Elles sont en quelque sorte des passeurs bénévoles

02:58 et donc les complices objectifs des passeurs dénoncés par le pape.

03:02 Bien sûr, elles ne le font pas pour de l'argent, c'est pas pareil.

03:05 Mais tout de même, inciter les gens à partir, à prendre des risques,

03:09 leur garantir qu'ils seront secourus,

03:11 leur faire croire qu'ils trouveront ici une vie meilleure,

03:14 alors que la plupart des sociétés européennes sont bien au-delà

03:17 de leur capacité d'accueil et d'intégration,

03:19 eh bien c'est irresponsable.

03:21 Et d'une certaine façon, le pape et le tribunal administratif

03:25 nous rappellent que les bons sentiments

03:28 peuvent avoir des conséquences dramatiques.

03:30 Merci Elisabeth Lévy.

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