Frédéric Mortier : "La presse m'a traîné dans la boue et catalogué de professeur raciste !"

  • l’année dernière
Avec Frédéric Mortier, enseignant et maire LR de Longué-Jumelles (Maine-et-Loire), auteur “l’auteur d’un enseignant” édition Artège

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Transcript
00:00 - Sud Radio Bercoff dans tous ses états, le face à face.
00:06 - Vous êtes bien dans le face à face d'André Bercoff avec Frédéric Mortier, enseignant,
00:10 aussi maire de Longues et Jumelles, auteur de "L'honneur d'un enseignant" aux éditions Arteges.
00:14 Bonjour Frédéric Mortier. - Bonjour à vous, merci de cette invitation.
00:17 - Alors Frédéric Mortier, c'est vrai que vous racontez dans "L'honneur d'un enseignant"
00:21 cette histoire qui vous est arrivée, et on se dit avant, on dirait "c'est pas possible,
00:26 ça peut pas se passer comme ça, même s'il y a eu peut-être erreur ou maladresse de votre part".
00:32 Mais enfin, on va raconter cette histoire, et vous allez réagir ensuite aux liteurs de Sud Radio,
00:38 parce que quand même, on est, et ça s'est passé en 2021, c'est bien ça, fin 2021,
00:45 et on est quand même dans une situation de fait où on voit très bien que la réalité n'existe plus,
00:51 c'est la perception qu'ont certains de la réalité, et que l'hystérie est devenue un mode,
00:56 je ne dirais pas de gouvernance, un mode d'existence.
00:59 C'est quand même, alors c'est vrai qu'il y a eu les sorcières de Salem, c'est vrai qu'il y a eu,
01:03 mais on prend que les procès d'inquisition, alors on va pas comparer.
01:05 Enfin, l'inquisition c'était il y a quelques siècles, et ben non, non, non, ça dure encore là.
01:10 Je voudrais que vous racontiez, Frédéric Mortier, qu'est-ce qui est arrivé exactement
01:14 un certain jour de décembre 2021 dans votre collège, c'était un collège catholique, c'est ça ?
01:19 - C'est un lycée professionnel catholique. - Un lycée professionnel catholique, voilà.
01:23 Alors, il est arrivé, vous racontez dans votre livre, effectivement,
01:26 qui est un livre vraiment très intéressant à lire,
01:30 et pour ce qu'il dévoile de notre contexte, de notre réalité,
01:35 il vous est arrivé donc de discuter avec des élèves, raconter.
01:39 - Nous sommes un certain mercredi du mois de décembre, en toute fin de journée,
01:43 avec une classe que je connais assez peu,
01:45 avec une ambiance qui me paraît tout à fait agréable à vivre,
01:50 et le sujet du débat, parce que je suis un homme dont la pédagogie est d'abord le débat,
01:55 porte sur les origines et les fondements du droit.
01:59 On en vient tout doucement, mais sûrement, au fait que nous sommes dans un établissement catholique,
02:05 et là je sens une levée de boucliers avec quelques élèves qui me précisent
02:10 que dans un établissement quel qu'il soit, on ne parle pas de catholique,
02:14 on parle de laïcité, puisque la religion...
02:17 - Vous parlez des fondements du droit qui sont des fondements chrétiens, c'est ça ?
02:21 - Évidemment, judéo-chrétien même.
02:24 Et donc je sens que le débat s'installe, ce qui me va bien, puisque j'ai l'habitude de cela,
02:28 et encore une fois, ma pédagogie à moi, c'est de raccrocher les concepts à l'actualité,
02:34 ou à un débat qui s'installe, l'idée étant que chacun s'exprime,
02:37 et que chacun se fasse son opinion, loin de moi l'idée d'apporter une opinion personnelle.
02:42 Et puis j'ai un élève en fond de classe qui m'interpelle et qui me dit
02:46 "Mais vous savez que mon voisin est musulman, et je lui réponds au second degré,
02:50 et je m'adresse à cet élève en particulier, évidemment,
02:53 mince, ça c'est un problème, et il va falloir que tu deviennes catholique."
02:56 - Vous l'avez dit en forme de boutade ?
02:58 - Évidemment, je le dis sur le ton de l'humour, ce qui n'est pas reçu de la sorte,
03:02 vous l'aurez compris, et qui donne suite à un élève qui veut sortir de la classe,
03:07 et qui devient un peu tendu, on va le dire comme cela,
03:13 jamais aucun élève en 28 ans de carrière n'est sorti de ma classe,
03:17 - Oui, 28 ans de carrière dans le sénat.
03:19 - 28 ans de carrière, plusieurs années comme directeur des orphelins d'Auteuil en collège et en lycée,
03:25 je crois savoir mener un débat, en tout cas je le pensais jusqu'ici,
03:29 et j'ai voulu discuter, ce qu'il a refusé, voilà.
03:34 - Il a dit "on va régler ça entre hommes", et il a pris ça pour une agression.
03:38 - Alors en fait j'ai utilisé plusieurs stratégies pédagogiques, plutôt même didactiques,
03:42 pour essayer de récupérer un peu le moment, et essayer de remettre la classe en discussion,
03:47 en débat, ce qu'il a refusé à ce moment-là.
03:51 - Mais pardon, pardon, monsieur Mortier, est-ce que ce n'était pas imprudent,
03:56 peut-être que, hélas, en ce moment, enfin en ce moment, depuis, je ne sais pas,
04:00 à l'époque, le premier et le second degré ne passent plus, on le voit dans les réseaux sociaux quelquefois.
04:05 - Alors c'est ce que je dis dans ce livre, puisque ce livre a été pour moi l'occasion d'abord de poser un peu les choses,
04:13 de me demander si je n'avais pas raté quelque chose à ce moment-là du jeu,
04:17 et même peut-être d'une manière un peu plus lointaine.
04:20 Nous avons changé de prisme pédagogique et didactique depuis quelque temps,
04:26 en particulier depuis le Covid, je trouve,
04:28 et puis c'était aussi l'occasion pour moi, ce livre, de prendre de la hauteur sur la situation telle qu'elle se présente à nous,
04:34 nous les enseignants, de manière plus globale,
04:36 et notamment les enseignants de la partie catholique,
04:40 pour se rendre compte de ce que vous venez de dire,
04:42 c'est-à-dire qu'effectivement, mon imprudence a sans doute été celle de ne pas avoir saisi tout à fait le moment ou l'instant
04:48 dans lequel je me trouvais.
04:50 Voilà, c'est aussi ce que j'écris.
04:54 - Alors qu'est-ce qui est arrivé ? Je comprends.
04:55 Alors qu'est-ce qui s'est passé ? Cette télé est sortie, et il s'est passé quoi après ?
04:59 - Alors comme toujours, normalement, on se retrouve devant le conseil d'éducation ou devant le directeur,
05:03 et on en discute éventuellement avec les parents, et on essaie de mettre un peu les choses au point.
05:07 - Et ça vous a été refusé, ça ?
05:09 - Il est un fait que ça n'a pas été possible.
05:12 - Vous n'avez pas pu rencontrer ni les parents, ni avoir une discussion avec l'élève ?
05:17 - Ni même l'élève, à nouveau.
05:19 - La conseillère d'éducation vous a... ?
05:21 - Elle m'a précisé par un logiciel d'éducation nationale qui s'appelle Pronote,
05:27 que je devais aller voir la réponse sur Pronote,
05:29 et la réponse que j'ai eu le lendemain midi, c'est "ils ont porté plainte".
05:33 - Ils ont porté plainte.
05:35 On va en reparler tout de suite, on va continuer, parce que c'est une histoire, hélas, malheureusement exemplaire.
05:41 On va, juste après une petite pause, on continue.
05:44 - Vous avez la parole sur Sud Radio pour interpeller Frédéric Mortier au 0826-300-300, à tout de suite.
05:51 - Ici Sud Radio.
05:54 Les Français parlent au français.
05:59 Je n'aime pas la blanquette de veau.
06:02 Je n'aime pas la blanquette de veau.
06:05 - Sud Radio Bercov dans tous ses états.
06:08 - Et on poursuit l'histoire, l'histoire à la fois choquante, à la fois, hélas, tristement exemplaire,
06:16 de Frédéric Mortier, qui est par ailleurs maire LR de Longueuil et jumelle d'Armène et Loire,
06:22 et qui vient d'écrire "L'Honneur de l'enseignant" aux éditions Arteges,
06:25 et qui est un livre vraiment à lire parce que, il explique la chose, il explique ce qui s'est passé.
06:29 Donc Frédéric Mortier, vous nous racontiez un peu ce qui s'est passé dans cette salle de classe.
06:33 Il est parti, ensuite, pas pu voir les parents, pas pu rediscuter avec l'élève,
06:39 on vous a dit, eh bien voilà, ils ont porté plainte, disiez-vous.
06:43 Alors, qui a porté plainte ? La famille ? L'élève ?
06:46 - La famille.
06:47 - La famille a porté plainte.
06:48 - La famille, puisque l'élève était mineur à ce moment-là.
06:50 Je ne sais pas trop s'il est encore mineur ou pas, mais...
06:52 Donc évidemment, la famille se porte.
06:55 - Alors, qu'est-ce qui s'est passé depuis, enfin après ?
06:58 - Eh bien, la famille porte plainte et quelques jours après, je reçois un coup de fil de la police nationale en juin,
07:05 qui me demande de venir les rencontrer.
07:09 Je pose la question de savoir s'il s'agit d'un simple entretien ou d'une garde à vue.
07:13 Là, on me répond qu'on ne sait pas et qu'il faudra voir sur le champ.
07:17 Et puis, quand je me retrouve...
07:20 - Arrangé ?
07:21 - C'est passé arrangé, absolument.
07:23 Quand je me retrouve nez à nez devant le commandant de police, je m'aperçois que je vais y rester sans doute un certain temps.
07:30 Ce qui ne manque pas d'être le cas.
07:33 Donc, je subis 24 heures de garde à vue, une présentation au parquet le lendemain matin,
07:38 sans lacets, sans ceinture, bien sûr, sans tout ce qui peut...
07:41 - Comme si vous aviez vraiment agressé violemment quelqu'un, comme ça se passe dans les accidents...
07:45 - Voilà, comme un...
07:47 - Mais on vous dit pourquoi, garde à vue ? Enfin, vous avez dû poser la question.
07:50 - Alors oui, bien sûr, on m'explique au départ qu'il y a un dépôt de plainte pour trois chefs d'accusation.
07:58 Le troisième est assez étonnant, puisque moi-même j'avais déposé plainte,
08:02 puisque l'élève m'avait bousculé et m'avait traité de raciste en classe.
08:07 Donc, j'avais considéré qu'il s'agissait d'éléments suffisants pour pouvoir aller déposer plainte.
08:14 En tout cas, c'est ce que j'avais lu, et je l'explique dans le livre...
08:18 Je suis un très vieux syndicaliste CFTC chrétien, et c'est ce que j'avais lu,
08:22 et donc il me semblait nécessaire de le faire.
08:24 Voilà, on me le reproche, et on me reproche même à ce moment-là du jeu.
08:28 Alors le courant de police me dirait que ce n'est pas un jeu,
08:30 mais j'essaie de le vivre comme ça pour essayer de le vivre bien.
08:33 On me reproche d'avoir dénoncé de manière calomnieuse, pour avoir moi-même déposé plainte.
08:39 Et donc, propos racistes, harcèlement moral d'un jeune que je n'ai pas vu plus de 5 ou 6 fois...
08:47 D'ailleurs, il déclare lui-même...
08:50 - Non mais en quoi ça mérite une garde à vue ?
08:53 - Alors ça c'est une bonne question, et c'est la question que je me pose encore aujourd'hui.
08:58 C'est une décision du procureur, visiblement, je ne sais plus très bien en fait, qui décide de quoi aujourd'hui.
09:04 - Donc on vous garde 24 heures ?
09:06 - Donc on me garde 24 heures, je descends au trou à 19h, dans des conditions évidemment totalement lamentables.
09:12 Alors là, je comprends les gens qui se plaignent des conditions de nos prisons
09:16 et de ce qui se trouve dans les sous-sols de nos polices nationales ou de nos armeries,
09:21 parce que c'est totalement indigne, et je suis donc censé passer la nuit.
09:27 Donc je l'explique beaucoup dans ce livre, c'est un moment très très compliqué pour moi.
09:32 Je suis un fan de Steve McQueen, donc je me remémore le film "Papillon"
09:36 et j'essaie de me mettre dans sa situation en me disant, même s'il faut manger des cafards, je les mangerais, je résisterais.
09:40 - Hygiène, saleté...
09:42 - Oui, évidemment, ça sent extrêmement mauvais, l'urine est là, on est sur une planche de bois, il fait extrêmement froid.
09:49 - D'accord.
09:50 - Je le raconte un peu plus dans le livre, j'ai quelques éléments avant même cette garde à vue,
09:56 qui me font penser qu'effectivement je vais y rester.
10:00 Et puis le lendemain, il y a une nouvelle série de questions vers 7h ou 8h du matin,
10:05 et là on me défère devant le procureur en m'expliquant qu'on ne va pas me mettre les menottes parce que je ne suis pas un voyou.
10:10 C'est un peu la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
10:13 Et quand vous êtes devant la vice-procureure, qui ne vous entend pas,
10:17 qui ne sait pas du tout, enfin qui ne sait pas du tout,
10:20 qui je crois n'a pas saisi vraiment la situation, qui ne veut pas m'entendre,
10:24 elle m'explique que je vais finir devant le juge des libertés,
10:26 qui lui-même m'explique que je suis un homme dangereux.
10:30 Et donc quand on me relâche quelques minutes après dans la rue, dans les rues,
10:34 dans chez, pour récupérer mon véhicule,
10:37 je passe en fait en quelques minutes d'un homme dangereux,
10:40 de l'état d'un homme dangereux, à l'état d'un homme libre.
10:44 Et là on ne sait plus très bien ce qui se passe vraiment.
10:47 - Et donc à ce moment-là, effectivement vous vous retrouvez,
10:51 et quand est-ce qu'on vous annonce votre suspension de l'enseignement de ce collège canadien ?
10:57 - De manière quasi-automatique, dès lors que vous êtes convoqué au pénal,
11:01 vous êtes automatiquement suspendu.
11:03 - Ah quand vous êtes convoqué au pénal, vous êtes automatiquement suspendu ?
11:05 - Oui, oui, c'est arrivé dans les jours qui ont suivi.
11:08 - D'accord. Et que vous dit vos autorités, votre rectorat ?
11:13 - Ils ne me disent rien, je n'ai aucune relation, ils ne prennent aucun coup de fièvre.
11:18 - Pas de mail, pas de... - Un simple arrêté écrit que vous recevez dans votre boîte aux lettres,
11:23 et qui vous explique que le rector vous suspend jusqu'à ce que le procès ait lieu.
11:29 - Question suspens, sans indemnité, sans rien, ou au moins vous touchez votre...
11:34 - Alors sans indemnité, avec une petite indemnité qui est prévue par je ne sais quel code,
11:40 je ne sais quel règlement, d'un petit millier d'euros qui est censé me faire survivre.
11:46 - Un millier d'euros mensuel ? - Monsieur.
11:49 - Et pour le reste, en 10 ans, vous êtes suspendu, durée indéterminée, pas de durée, rien ?
11:54 - Pas de durée, rien, jusqu'à ce que le procès ait lieu, et à ce moment-là du jeu,
11:58 j'imagine qu'il y aura un deuxième procès administratif, qui en fonction du premier,
12:03 c'est-à-dire du pénal, décidera ou pas de mon avenir.
12:07 - D'accord. Et pour le moment, ni le procès administratif, ni le procès pénal n'ont eu lieu ?
12:11 - Pour l'instant, rien n'a eu lieu. - C'est-à-dire que ce serait en octobre ?
12:14 - Voilà, c'est prévu le 4 octobre, effectivement.
12:16 - Donc d'ici-là, nous sommes actuellement en mars, c'est-à-dire que depuis donc fin décembre 2021,
12:23 vous ne pouvez pas exercer ? - Tout à fait.
12:26 - Et alors, vous avez essayé, vous me disiez aussi, parce que c'est quand même...
12:29 Donc vous disiez, ok, peut-être que là, il y a eu ce qu'il y a eu, je ne peux pas exercer là,
12:33 mais vous avez demandé à pouvoir enseigner, 28 ans d'enseignement ailleurs,
12:37 surtout, encore une fois, il n'y a pas une question de vol, de viol, d'harcèlement systématique,
12:43 ou quoi que ce soit, et on vous l'a refusé ?
12:46 - Alors, en tout cas, on ne me l'a pas permis.
12:48 - On ne vous l'a pas permis. - C'est-à-dire que le premier contrôle judiciaire
12:51 porte sur une interdiction d'enseigner à l'échelle de la nation,
12:54 et lorsque le premier procès, qui devait avoir lieu en mai 2022, et qui a duré 20 minutes,
13:03 donc s'est déroulé, le juge a eu entre les mains, par le biais de mon avocat,
13:08 l'ensemble des témoignages, et ils étaient extrêmement nombreux,
13:10 d'anciens élèves qui me soutenaient, et de collègues également,
13:13 et son discours a été de dire "mais il semblerait que vous ne soyez pas tout à fait l'homme que l'on décrit,
13:21 et donc on va simplement garder le contrôle judiciaire sur l'établissement dans lequel vous êtes".
13:26 - C'est le juge qui vous dit ça ? - C'est le juge qui dit ça.
13:29 Et donc nous sommes en mai, j'ai demandé une mutation pour pouvoir enseigner ailleurs,
13:33 et en début juillet, on me répond qu'il n'y a pas de poste pour moi,
13:39 et que mes demandes ne peuvent pas aboutir administrativement.
13:43 Donc je reste en poste là où je suis, donc je suis toujours suspendu dans l'établissement.
13:48 - C'est intéressant, mais ça n'a pas d'un refus, c'est formidable.
13:50 On ne vous dit pas de ne pas, mais comme vous ne pouvez pas faire, mais ailleurs, il n'y a pas de possibilité.
13:55 - Il n'y a pas de possibilité. - Et aucune... non mais, il n'explique pas, il ne donne pas de raison.
14:00 - Ah non, il n'y a pas de raison, la seule raison est administrative,
14:02 c'est-à-dire que mon concours a priori ne permet pas d'enseigner ailleurs.
14:07 Dans un moment où les enseignants sont plutôt recherchés.
14:10 - Alors, juste un mot, on va continuer à en parler, parce que, encore une fois, c'est très important d'en parler.
14:19 Vous êtes maire de Longueuil et Jumel, comment réagit-vous aux administrés,
14:25 ou certains, est-ce que vous avez des témoignages, quel genre de réaction, dites-moi ?
14:29 - Écoutez, les réactions sont plutôt globalement très bonnes,
14:31 puisque j'étais en dédicace justement dans ma ville ce samedi,
14:36 et nous avons vendu un peu plus de 200 exemplaires du livre,
14:39 bon, c'est sur une ville de 7000 habitants, vous allez me dire que ça ne représente pas la population entière, mais...
14:44 - Non mais autrement, vous avez eu des témoignages...
14:46 - Oui, oui, j'ai des témoignages tous les jours, évidemment, de gens qui viennent me soutenir,
14:49 et puis après, je suis dans une commune qui a toujours connu un peu d'opposition politique,
14:53 et donc l'opposition joue son rôle, évidemment.
14:55 - Bien sûr, bien sûr. On va continuer à en parler après une petite pause.
15:00 Frédéric Mortier, l'honneur d'un enseignant, et on peut en parler aujourd'hui,
15:05 parce que quand on dit que les enseignants, c'est l'autorité,
15:08 mais quand l'autorité devient elle-même victime, il y a quelques légers problèmes.
15:14 A tout de suite.
15:15 - Vous avez des anecdotes, des témoignages à nous rapporter,
15:18 vous nous appelez au 0826 300 300 pour interpeller Frédéric Mortier et son livre,
15:22 "L'honneur d'un enseignant", à tout de suite sur Sud Radio, 0826 300 300.
15:27 - Les Français parlent au français.
15:32 - Les carottes sont cuites. Les carottes sont cuites.
15:37 - Sud Radio Bercov, dans tous ses états.
15:40 - Et Frédéric Mortier, enseignant, auteur de "L'honneur d'un enseignant",
15:45 à qui il est arrivé, ce qu'il est arrivé, enfin, quelque chose d'assez dramatique,
15:49 quand même, qui révèle beaucoup, beaucoup de choses,
15:51 même s'il a fait lui-même quelques erreurs de degrés d'humour, etc.
15:57 Mais il y a quand même quelque chose qui est grave, alors qu'on le suspend,
16:02 on le suspend complètement, on le met en garde à vue.
16:07 Et justement, Frédéric Mortier, alors, deux choses,
16:11 vous avez parlé, on a parlé, vous êtes maire par ailleurs,
16:16 et beaucoup de gens de votre ville ont réagi, ont réagi,
16:21 effectivement, d'une manière plutôt solidaire.
16:26 Mais je voulais savoir deux choses, comment réagit le corps enseignant,
16:30 ou surtout à la hiérarchie enseignante, parce que je rappelle que vous êtes dans une école catholique,
16:35 donc vous ne dépendez pas du tout de l'État, si j'ai bien compris, c'est bien ça ?
16:39 - Nous sommes sous contrat d'association avec l'État, donc rémunérés par l'État.
16:43 - D'accord, alors est-ce que l'État a autorité sur ce genre d'incidents ou d'accidents que vous avez eus ?
16:49 - Il a autorité, s'il souhaite avoir autorité, effectivement.
16:52 - Il peut l'avoir ?
16:53 - Il peut l'avoir, et il l'a d'ailleurs, puisqu'il devra se positionner par rapport à la décision de la justice.
16:58 - D'accord, mais alors pour le moment, en attente de la décision de la justice, ça veut dire octobre,
17:02 dans le meilleur des cas, est-ce que vous avez eu des manifestations où vous avez cherché à en avoir de la hiérarchie,
17:07 à tout niveau, que ce soit du niveau ministériel et en descente ?
17:13 - De la direction d'établissement jusqu'aux représentants de l'État, évidemment, j'ai cherché à avoir quelques retours,
17:19 et je n'en ai eu absolument aucun.
17:23 - Même la directeur de votre établissement ?
17:25 - Même le directeur de l'établissement, qui m'a appelé une fois pour m'expliquer que la presse allait se faire l'écho de la situation.
17:32 Je ne l'ai plus jamais eu au téléphone, et je n'ai plus jamais obtenu aucun soutien, ni même aucune explication.
17:39 - Rien ?
17:40 - J'ai souhaité m'expliquer aussi, vis-à-vis de l'enseignement catholique,
17:44 et à aucun moment on ne m'a autorisé à le faire.
17:49 Je le dis dans le livre, je croise même le directeur départemental au bout d'une rue à un moment donné,
17:56 et il fait en sorte de ne pas m'adresser la parole.
17:58 Alors même que je suis maire d'une commune de 7 000 habitants, qui a deux écoles privées, un collège privé, et que je finance,
18:07 pour beaucoup, l'école privée, quasiment à 70 %,
18:12 - En tant que maire ?
18:14 - En tant que maire, oui.
18:15 Donc j'aurais pu attendre de sa part qu'il y ait au moins une discussion.
18:18 Qu'il soit d'accord ou pas avec ce qui se soit passé, mais au moins une discussion.
18:23 - Comment vous expliquez ça ? Ça paraît quand même assez... Je suis confondant !
18:28 - C'est ce que je dis dans le livre. C'est l'enseignement catholique d'aujourd'hui qui a beaucoup changé, qui a beaucoup évolué.
18:33 De mon point de vue dans le mauvais sens, moi je suis un enseignant depuis les années 90,
18:37 j'ai choisi l'enseignement catholique, j'ai le même concours qu'un enseignant des établissements publics,
18:42 1993, c'est le premier vrai concours qui permet de faire un choix privé au public,
18:49 et que lorsqu'on fait un choix privé, on reste dans le privé.
18:52 Un candidat de public peut venir enseigner dans le privé, mais l'inverse n'est pas vrai.
18:56 - Ah oui, vous ne pouvez pas, par exemple, aller au public ?
18:58 - Absolument pas. Et donc c'est un vrai choix, celui d'un enseignant qui a eu un parcours d'école, de collège et de lycée,
19:06 privé, catholique, classique. Donc j'y vais avec des convictions, et ces convictions se sont évidemment aujourd'hui complètement fissurées,
19:14 puisqu'on voit bien qu'il n'y a aucun soutien de la part de l'enseignement catholique,
19:20 et qui a l'image de l'Église, je le dis aussi dans le livre, fait en sorte de se recroqueviller dans sa coquille,
19:28 et de ne pas voir quelles sont les vraies difficultés.
19:30 - Comment vous expliquez ça ? Parce que vous n'êtes pas le seul à le dire dans d'autres domaines, etc.
19:36 Comment vous expliquez cette espèce de repli sur soi, soit d'abandon, on peut dire, quelque part ?
19:43 - Il y a sans doute... Les faits sociétaux sont là, ça correspond à...
19:49 Ça relève d'une... Et vous le dites souvent dans vos émissions, ça relève d'une...
19:55 D'une désocialisation de l'ensemble qui existe depuis quelques années, et puis probablement aussi d'un manque de courage.
20:03 - Je crois que ça joue beaucoup, ça aussi.
20:05 - Oui, absolument. Alors je n'ai jamais été de ceux-là, y compris dans ma toute petite carrière de politicien local.
20:12 Je pense que le courage, c'est aujourd'hui ce qui manque, pour faire revenir les électeurs aux urnes,
20:17 et dans le domaine de l'enseignement, c'est un vrai, vrai manque aujourd'hui, c'est très, très clair.
20:22 - Et du point de vue alors de la presse, qu'est-ce qui s'est passé ? Parce que vous en parlez effectivement dans votre livre,
20:29 et vous dites qu'il y a eu effectivement la "Ouest France", puis beaucoup d'autres,
20:33 et l'impression que vous avez eue, c'est intéressant, c'est que...
20:36 Ils avaient déjà, enfin certains avaient déjà leur idée toute faite, avant même de vous parler,
20:41 on avait déjà, voilà, on savait ce que c'était, qui était le coupable, qui était la victime, etc.
20:46 - Évidemment. Évidemment. Toute la PQR m'est tombée dessus, sans même vouloir m'écouter.
20:51 - La presse quotidienne régionale. - La presse quotidienne régionale, voilà.
20:54 Et puis, ce qui m'a beaucoup étonné, c'est que les médias nationaux sont venus jusque-là,
20:58 Mediapart, qui m'en a remis une couche, J'ai eu Libération, Figaro, tout y est passé en fait.
21:05 Et à mon humble niveau, je me suis toujours demandé pourquoi moi, pourquoi à ce niveau-là,
21:11 et pourquoi on entendait un seul son de cloche, alors même que dans le dossier,
21:17 il y a bien un coupable éventuel et un requérant qui peut-être, voilà, a...
21:24 - Une idée de ce qui s'est passé. - Qui peut s'expliquer aussi,
21:28 mais qui peut être entendu de manière un peu différente que celle-là, quoi.
21:31 - C'est-à-dire que tous, vous présentez de la même façon, vous étiez, en grosso modo,
21:36 en schématisant le pro-fraciste qui avait harcelé une victime en raison islamophobe, etc.
21:42 Vous étiez islamophobe, raciste, etc. - Exactement.
21:45 - Vous voulez dire que quand vous parliez aux médias et autres,
21:49 ils ne disaient pas "Ah oui, peut-être que même c'est plus compliqué que ça",
21:53 c'est-à-dire c'était le blanc et noir, c'était manichéen, c'était quoi ?
21:56 - Ah, c'était complètement manichéen. Les premiers qui m'ont appelé, c'est West France,
22:01 et je leur ai demandé s'ils allaient me citer, si mon nom allait paraître.
22:05 Parce que souvent, évidemment, lorsqu'on gère du pénal, lorsqu'on écrit sur du pénal,
22:10 et qu'on est journaliste de PQR, on ne met pas le nom, le prénom ou le pédigré de la personne qui est en cause.
22:16 En l'occurrence, la réponse que j'ai obtenue, c'est "Vous êtes un homme public,
22:20 et donc vous allez figurer dans nos journaux avec votre nom, votre prénom et votre pédigré."
22:26 Et là, j'ai compris, à partir de ce moment-là, que je n'avais plus la main sur rien.
22:31 Le fait que je sois un maire de droite, qui, à un moment de sa vie,
22:36 a été secrétaire général de Boulafrance pour Nicolas Dupont-Aignan,
22:40 faisait que de toute façon, je ne m'en sortirais pas.
22:43 - Vous étiez marqué du saut de la famille. - Complètement.
22:46 - Ah bon, donc ça s'applique à l'ère... - J'en suis convaincu, en tout cas.
22:50 - Oui, c'est ce que vous pensez. En tout cas, c'est intéressant à voir comment tout cela fonctionne.
22:56 Et donc, aujourd'hui, vous en êtes au stade de l'attente du procès. - Tout à fait.
23:01 - Et rien n'a bougé... - Rien n'a bougé, si ce n'est le plaisir de bien vous rencontrer.
23:07 - Non mais écoutez, ce qui est tout à fait fascinant, encore une fois,
23:11 c'est qu'Octo qui disait qu'il aimait bien, qu'il était temps que les miroirs réfléchissent.
23:15 Et je crois que votre livre, il est temps de réfléchir là-dessus.
23:20 Moi, je veux bien. On peut dire, oui, que vous avez, quand vous lui avez dit,
23:24 "Ouais, il faut se convertir au catholicisme", et vous l'avez dit, on voit très bien, en tout cas dans le livre,
23:28 que ce n'était pas une envie, "Allez, convertissez-vous, infidèles et mécréants", etc.
23:34 Mais que ça ait pris ses proportions est quand même intéressant,
23:38 parce que ça veut dire qu'il y a un parti pris, au sens littéral du terme.
23:42 Un parti pris, et que ce parti pris, évidemment, était condamné à vous,
23:47 à aller contre vous comme une meule, quoi.
23:51 - Comme un rouleau compresseur, et vous tomber dans les abîmes, vraiment.
23:56 Et, je ne veux pas être intimiste, Frédéric Mortier, comment vous, votre famille, comment vous le vivez ?
24:04 - Oh, ça se vit très mal. Ça se vit forcément très mal.
24:10 C'est l'avenir qui est en jeu, en fait.
24:12 C'est-à-dire que j'étais moi-même en situation de reprendre une direction d'établissement scolaire,
24:17 j'étais en validation d'acquis d'expérience, tout était en route pour, voilà, reprendre un peu de responsabilité.
24:22 - Vous avez femme et enfant, en fait.
24:24 - Enfant, effectivement, et tout ça tombe à l'eau, voilà, disparaît,
24:30 puisque une fois que vous êtes sur les réseaux sociaux, dans ce pays, en plus, vous êtes marqué d'un certain saut.
24:36 Donc oui, pour la famille, c'était évidemment très très compliqué.
24:39 - Sauf que ça peut changer, soyons clairs. Vous n'êtes pas à "ad vitam aeternam", enfin, je l'espère pour vous, mais...
24:44 - Que Dieu vous entende !
24:46 - Non, les réseaux sociaux, ça bouge, et il y a des pouvoirs et contre-pouvoirs.
24:51 - Mais enfin, c'est vrai que c'est une situation tout à fait tristement étonnante, il faut le dire.
24:56 Lucia, est-ce que nous avons des auditeurs ?
24:58 - Nous avons des auditeurs, et vous continuez de nous appeler au 0826 300 300,
25:03 et on accueille Madeleine de l'ESPAR dans le MEDOC. Bonjour, Madeleine.
25:06 - Bonjour, Madeleine.
25:07 - Bonjour, monsieur Bercoff, je suis ravie de vous avoir, et bonjour à votre grand professeur.
25:13 - Bonjour, madame.
25:14 - Je suis collègue, j'ai travaillé 42 ans pour l'enseignement catholique,
25:20 et je suis en train de me demander en tant que salariée comment il se fait que vous ne soyez pas défendu par les auges,
25:25 les appels, la direction de l'Ursuéthène, qu'est-ce qu'ils font ces gens-là ?
25:28 Ils se servent de nous, je vais vous le dire, moi.
25:31 - Attendez, c'est une bonne question, Madeleine, pourquoi vous n'êtes pas défendu par les organismes dont parle Madeleine ?
25:38 - C'est une bonne question.
25:39 - Vous les avez contactés ou pas ?
25:42 - Non, non, c'est plus compliqué que ça. Je pense qu'il y a sans doute une affaire dans l'affaire.
25:47 - Ah bon ?
25:48 - C'est-à-dire que je pense que si la direction d'établissement n'a pas joué le rôle qu'elle aurait dû jouer de manière un peu légale en fait,
25:54 ou réglementaire, c'est qu'il y a peut-être d'autres raisons, donc on va attendre la fin du procès, et puis on verra ce qui se passe après.
26:02 - D'accord. Madeleine, vous vouliez ajouter quelque chose ?
26:05 - Oui, je voulais dire que nous sommes quand même assez déconsidérés, parce qu'on fait le même travail que nos collègues du public.
26:13 Et moi, j'ai 23% de moins de retraite, au nom de quoi on a fait le même boulot, on avait 35 élèves par classe, et eux ne font rien pour nous défendre.
26:21 - Oui, c'est une vraie question, Madeleine, c'est vrai.
26:24 - Parce que c'est général et qu'il faudrait monter au créneau.
26:27 Il faudrait que les jeunes, maintenant qu'ils sont dans l'enseignement privé, je veux dire, ils ont une collègue, il faudrait quand même monter au créneau, il y a des choses qui vont plus, quoi.
26:32 - Ah, je vais vous dire, Madeleine, il faut toujours monter au créneau.
26:35 Croire qu'on va régler les problèmes, quels qu'ils soient, et de quel niveau, et de quel statut qu'on soit,
26:40 croire qu'on va les régler en ne bougeant pas, et bien malheureusement, ce n'est pas le cas.
26:44 Merci, Madeleine, en tout cas.
26:46 - Bonne journée, merci, au revoir.
26:48 - Merci beaucoup, Madeleine. On tourne une rapide page de pub et on retrouvera Jean de Montpellier à tout de suite sur Sud Radio 0826 300 300.
26:55 - Ici Sud Radio.
26:58 Les Français parlent au français.
27:03 Je n'aime pas la blanquette de veau.
27:06 Je n'aime pas la blanquette de veau.
27:09 Sud Radio Bercoff dans tous ses états.
27:12 - Vous êtes bien sur Sud Radio dans le face-à-face d'André Bercoff avec Frédéric Mortier pour son livre
27:17 "L'honneur d'un enseignant édition Arteige" et vous avez la parole au 0826 300 300.
27:22 On accueille tout de suite Jeanne de Montpellier. Bonjour Jeanne.
27:25 - Bonjour Jeanne.
27:27 - Oui, bonjour M. Bercoff. Merci. Bonjour aussi à votre...
27:31 - À Frédéric Mortier, oui.
27:34 - Je n'ai pas tout à fait entendu le début de l'émission parce que je n'étais pas chez moi. Quand je suis rentrée, j'ai allumé tout de suite le poste.
27:40 Et j'ai entendu le titre "L'honneur d'un professeur".
27:44 Alors j'ai voulu réagir aussitôt parce que là, je suis retraitée de l'éducation nationale.
27:49 J'ai maintenant 80 ans. J'ai 45 postes à mon actif en tant qu'auxiliaire d'abord, enfin bref, dans toute l'académie.
27:58 On m'a fait faire des choses pour lesquelles je n'étais pas qualifiée, notamment enseigner les langues anciennes alors que je ne les avais jamais étudiées.
28:07 On m'a dit "Vous vous débrouillerez".
28:10 On m'a fait enseigner le dessin alors que j'étais plutôt dans les lettres.
28:14 Bon, voilà. Alors le respect pour... le respect et l'honneur d'un professeur, je ne sais pas qui c'est qui peut en espérer.
28:22 Mais le pire que j'ai connu est combien de fois je suis sortie de mon établissement en faisant mon trajet retour pour aller chez moi, parfois à 70 km en larmes.
28:32 Parce que, par exemple, je vous cite un jour à la récréation, quand les enfants, heure après heure, changeaient de part et je leur demandais de laisser la classe propre et d'avoir du respect pour le personnel de nettoyage.
28:49 Une gosse avait balancé des papiers sous sa table, j'ai demandé de les ramasser.
28:55 Elle m'a dit "Non, c'est pas mon travail, il y a des femmes de ménage".
28:59 Je lui ai dit "Elles ne sont pas là pour toi, elles sont là pour ce qui est collectif, général, mais pas pour toi seulement".
29:05 Alors j'ai réitéré ma consigne.
29:09 Elle a pris ses affaires, elle est sortie.
29:11 C'était la récréation, il y avait 5-6 élèves là.
29:14 Je lui ai dit "C'est pas grave, je vais faire un rapport".
29:17 Ses copines sont allées vite lui rapporter qu'il y avait un rapport qui allait sortir.
29:22 Elle est revenue vite fait, elle m'a dit "Qu'est-ce que vous voulez ?".
29:27 Je lui ai demandé qu'elle ramasse ce qu'elle avait jeté.
29:30 Elle a refusé, mais pire, elle m'a dit "Va te faire enculer".
29:36 Alors je lui demande le respect, je lui demande des excuses, elle répète "Va te faire enculer".
29:43 Elle était beaucoup plus grande que moi, elle montait sur sa plante de pied, elle me dominait d'une demi-tête.
29:49 Une troisième fois, elle me dit encore "Va te faire enculer".
29:56 Pour faire bonne mesure, elle me dit "Salope".
30:03 Elle est sortie, il y avait un surveillant devant la porte qui avait tout vu, tout entendu,
30:06 qui me dit "Si vous faites un rapport, je le contresigne".
30:09 Je suis allée voir le principal Adjouin,
30:15 et quand je suis rentrée, parce que moi j'ai pris la peine de nettoyer ma classe avant de partir,
30:20 - Allez-y Jeanne, parce qu'on a beaucoup d'auditeurs, s'il vous plaît.
30:23 - Alors quand je suis arrivée auprès du principal, il m'a dit "Mais madame, quand on parle mal à ses élèves,
30:28 c'est pas étonnant qu'ils vous parlent mal".
30:30 - C'est formidable ça.
30:32 - J'ai trouvé ça formidable.
30:34 - Vous demandez à la personne de nettoyer, de ramasser les papiers qu'elle a laissés,
30:40 et elle vous dit d'aller se faire.
30:42 C'est très très intéressant.
30:44 Jeanne, merci Jeanne, mais je voudrais faire réagir là-dessus.
30:47 Vous voyez Frédéric Mortier, c'est intéressant, ça n'a rien à voir avec votre histoire,
30:52 mais c'est à dire qu'aujourd'hui, on est dans une époque,
30:56 et je dis ça, où effectivement, et ça doit arriver ça très souvent,
31:00 on l'envoie... Est-ce que vous avez aussi eu des insultes de ce genre ?
31:05 Non, je ne pense pas.
31:07 - Non mais enfin...
31:09 - Mais comment vous comprenez ça ?
31:11 - Tout ça existe toujours, et très vrai évidemment,
31:13 mais tout ça, ce discus, ce dialogue, il n'y a pas de...
31:17 On ne doit pas en arriver à des extrémités.
31:19 Le souci de mon affaire à moi, et de ce livre, c'est l'extrémité dans laquelle je me retrouve en fait.
31:24 On doit pouvoir en discuter en amont en fait.
31:26 - Mais qu'est-ce qui fait que...
31:28 - C'est un autre problème, mais quand même, qu'est-ce qui fait qu'aujourd'hui,
31:32 et d'ailleurs, on ne va pas parler de tous les problèmes de l'école,
31:35 c'est-à-dire qu'avant, les parents venaient, et si l'élève était...
31:38 Je ne dis pas que c'était bien ou pas bien,
31:40 en général, ils m'originaient leurs élèves, ils engueulaient leurs élèves.
31:43 Aujourd'hui, c'est... L'élève a raison, espèce de salaud de prof,
31:48 tu te conduis comme une ordure.
31:50 Il n'y a rien à ça.
31:51 - Peut-être que les parents des générations d'aujourd'hui
31:54 ont mal vécu finalement leur école, leur collège, leur lycée, j'en sais rien.
31:57 C'est une hypothèse.
31:59 En tout cas, il est très vrai, il est très très vrai aujourd'hui
32:02 que les parents d'élèves sont d'abord derrière leurs enfants
32:06 avant même d'avoir entendu ce que pouvaient dire
32:09 et l'établissement et le professeur.
32:11 - Il y a sûrement des faux d'autorité aujourd'hui, qui est très vrai.
32:14 - Mais il y a des professeurs qui se comportent mal, sûrement, aussi, ça existe.
32:17 - Ça existe forcément, on a toutes les professions.
32:20 - Il n'y a pas de profession d'ange, de profession de démon,
32:23 mais c'est vrai que quand on entend ce que dit Jeanne,
32:26 qui est malheureusement très courant,
32:28 alors ça c'est vraiment...
32:30 C'est quand même... ça pose problème.
32:32 Lucien.
32:33 - On remercie Jeanne pour son témoignage.
32:35 Et on accueille tout de suite Jean-Marc Denarbone.
32:37 Bonjour Jean-Marc.
32:38 - Bonjour Jean-Marc.
32:39 - Bonjour André, bonjour cher enseignant.
32:41 Si j'osais, je dirais que pour un catholique,
32:44 votre vie est devenue un chemin de croix.
32:46 - Un petit peu.
32:48 - Ils ont essayé de vous faire monter le Golgotha,
32:50 mais heureusement que vous êtes assez conscieux.
32:53 Vous n'êtes pas monté jusqu'en haut.
32:56 J'espère que vous avez trouvé quelques bons apôtres,
32:58 notamment votre famille et quelques gens autour de vous
33:00 qui vous ont aidés,
33:01 parce que je me doute que pour vous,
33:04 vous avez vécu des grands moments de solitude.
33:06 Des grands moments de solitude.
33:08 Ça paraît fou, ça paraît fou ce que vous dites.
33:12 Il y a peut-être 10 ou 20 ans de ça,
33:14 on n'aurait même pas imaginé
33:16 que 10% de ce que vous dites existe, mais ça existe.
33:19 Donc je voulais vous encourager, bien sûr,
33:23 à continuer à lutter, parce que vous avez fait un livre,
33:25 donc vous n'êtes pas un homme qui se laisse faire.
33:27 Heureusement, il faut être costaud dans ces moments-là.
33:29 J'ai vécu des moments de solitude dans ma vie.
33:31 Donc il faut être très costaud,
33:33 surtout quand on n'est pas d'accord avec l'ordre établi.
33:36 Donc je voulais vous féliciter, vous encourager.
33:39 - Merci.
33:40 - Ne baissez pas les bras, vous n'êtes pas où,
33:42 on m'a baissé les bras.
33:43 Heureusement qu'André est là pour recevoir les gens
33:45 qui sont comme vous.
33:46 - Je confirme.
33:47 - Merci beaucoup André.
33:48 Et vous, M. l'enseignant, continuez, continuez, continuez,
33:52 parce que vous avez fait un métier qui est très noble.
33:55 Continuez.
33:56 - C'est vrai.
33:57 Merci Jean-Marc, merci beaucoup.
33:58 - Je suis très heureux de pouvoir être accompagné auprès de vous,
33:59 et merci beaucoup.
34:00 - Merci à vous de vos encouragements Jean-Marc.
34:02 - C'est normal, c'est la moindre des choses.
34:03 - Merci beaucoup Jean-Marc.
34:05 Et on accueille Jacques de Cibourg.
34:07 Bonjour Jacques.
34:08 - Bonjour Jacques.
34:09 - Bonjour à tous les deux.
34:10 Je vais être bref.
34:11 En vous écoutant, ce parcours incroyable,
34:14 et tout le monde est ému d'entendre ce parcours,
34:18 quel rapprochement à faire avec la façon dont Samuel Paty,
34:23 ce sujet-là, a été traité ?
34:25 C'est-à-dire que d'un côté, malheureusement, il a perdu la tête,
34:28 et toute la France s'est émue.
34:30 Et s'il avait pas perdu la tête,
34:32 à mon avis, il aurait subi le même sort que vous.
34:34 Voilà, c'est ma question.
34:37 Qu'est-ce que vous en pensez ?
34:38 Et est-ce que vous avez eu ces rapprochements ?
34:40 Merci.
34:41 - Et pour dire, oui, je vois, sans interpréter du tout ce que dit Jacques,
34:44 en fait, est-ce qu'aujourd'hui, dans ce genre de...
34:48 C'est terrible, ne parlons pas...
34:50 Enfin, parlons, mais l'expérience Samuel Paty
34:52 est évidemment extrême et atroce,
34:54 mais est-ce qu'il y a aujourd'hui
34:56 une espèce de préjugé défavorable,
35:00 de présomption de culpabilité,
35:02 dès qu'il y a une affaire, vous en parlez,
35:04 présomption de culpabilité ou présomption d'innocence,
35:06 auprès d'un, par exemple, d'un professeur,
35:09 mais ça pourrait être dans d'autres métiers,
35:10 quand une affaire se déclenche,
35:12 automatiquement, d'abord,
35:14 c'est le professeur, je ne dis pas qui est coupable,
35:16 mais à qui on...
35:18 sur lequel règne l'air de soupçon.
35:20 - Probablement.
35:22 Probablement, et ça rejoint la question précédente,
35:25 probablement qu'aujourd'hui, l'enseignant qui n'a plus autorité,
35:28 il faut être très clair, qui ne fait plus autorité,
35:30 ou que très rarement,
35:32 et quand il fait autorité dans sa classe,
35:34 et c'est tant mieux, et c'est un minimum,
35:36 il a bien du mal à la faire,
35:38 cette autorité,
35:40 ou à en être purement responsable,
35:42 derrière, et on sent bien,
35:45 y compris dans nos établissements catholiques,
35:47 que lorsque un parent d'élève,
35:49 des parents d'élèves, viennent se plaindre,
35:52 c'est toujours d'abord leur parole qui est entendue,
35:55 avant même que l'enseignant ait pu se prononcer.
35:58 J'ai été directeur de collège et de lycée pour des élèves,
36:01 on va dire difficiles,
36:03 la Fondation Notoy, c'est tout près de ce studio,
36:06 vous la connaissez bien,
36:08 jamais à mon époque,
36:10 et on est en 2005-2010,
36:12 jamais à mon époque,
36:14 il y a cette suspicion en fait,
36:16 et quand bien même,
36:18 il y aurait eu cette suspicion,
36:20 on l'aurait traité d'une manière intelligente,
36:23 en discutant dans le bureau du directeur.
36:25 Non, aujourd'hui,
36:27 je pense qu'il y a vraiment ce problème qui existe,
36:30 cette autorité de l'enseignant,
36:32 qui sortie de sa classe,
36:34 même dans sa classe parfois, c'est extrêmement compliqué,
36:36 n'existe plus, n'est plus considéré,
36:38 et surtout n'est plus soutenu par sa hiérarchie.
36:41 Et je l'explique beaucoup dans ce livre,
36:43 c'est où sont passées nos institutions,
36:45 l'enseignement catholique, le rectorat,
36:47 et donc je ne fais pas de lien, bien sûr, avec Samuel Paty.
36:50 Alors, dans le livre de présentation,
36:53 cela existe parce que, encore une fois,
36:55 quand Ouest-France m'appelle la première fois,
36:57 on me demande de faire ce lien,
36:59 et c'est vrai que peut-être je réponds d'une manière un peu...
37:02 un peu maladroite,
37:04 en disant "j'espère que non".
37:06 Et du coup, c'est repris.
37:08 - Vous espérez ne pas être reuxi, bien sûr.
37:10 - Mais évidemment, ça, cette situation,
37:13 ou ce que je dis là, en veut nîmes un tout petit peu les choses,
37:15 ce que je regrette profondément aujourd'hui,
37:17 et sur quoi je ne veux pas faire de lien.
37:19 - Et vous, vous dites que, en tout cas,
37:21 l'autorité s'est perdue,
37:23 en tant que partie.
37:25 - En tout cas, l'institutionnel a perdu autorité,
37:27 mais ce n'est pas que chez l'enseignant,
37:29 c'est aussi chez nos forces de sécurité,
37:31 chez le politique.
37:32 Moi qui suis maire d'une île de 7000 habitants,
37:34 je peux vous dire que c'est tous les jours
37:36 que je m'aperçois que je ne fais plus autorité.
37:38 Bien sûr.
37:40 - Peut-être un dernier...
37:42 - Oui, un dernier, on a le temps de recevoir Hervé Dajan.
37:44 Bonjour Hervé.
37:46 - Bonjour, bonjour, bonjour,
37:48 bonjour M. Percoff,
37:50 je vous remercie pour votre émission.
37:52 Je vais être rapide.
37:54 Moi, je vous invite toutes et tous
37:56 à lire ou relire René Girard,
37:58 car ce qui arrive à ce professeur,
38:00 en fait, on comprend très bien
38:02 que c'est la réitération du bouc émissaire,
38:04 et l'ensemble de notre société,
38:06 soi-disant juive et euréo-chrétienne,
38:08 et l'ensemble de l'Église
38:10 n'a toujours pas compris
38:12 le message du Christ.
38:14 Voilà la victime innocente
38:16 qu'il faut toujours sacrifier
38:18 pour que les choses s'apaisent.
38:20 - Les bons samaritains.
38:22 Oui, merci Hervé.
38:24 C'est vrai,
38:26 le mot de la fin juste
38:28 pour le prof. Rédécke Mortier,
38:30 sans jouer au bouc émissaire,
38:32 etc. Mais il y a quand même
38:34 quelque chose qui me frappe
38:36 tout au long de cette émission,
38:38 et évidemment qui me frappe quand j'ai lu votre livre,
38:40 c'est qu'on a l'impression que tout ça s'avance
38:42 et qu'il n'y a pas, encore une fois,
38:44 de contre-pouvoir. Allez, la machine marche,
38:46 la machine dévore, la machine écrase,
38:48 et puis advienne coupura.
38:50 - C'est tout à fait ça, c'est tout à fait ce que je vis.
38:52 Et ça, c'est très inquiétant,
38:54 et je le disais à l'instant,
38:56 sur la chaîne de l'enseignement et sur ce qui m'arrive,
38:58 mais tous les sujets sont de la sorte,
39:00 et on ne sait plus très bien
39:02 ce qui va permettre de faire un stop,
39:04 un go, et de poser,
39:06 de se reposer les bonnes questions
39:08 de ce que l'on souhaite dans cette société.
39:10 - Vraies questions, en tout cas,
39:12 on continuera à se les poser,
39:14 vous le savez très bien, nous avons question à tout,
39:16 et on continuera.
39:18 - Merci beaucoup, chers auditeurs, d'être toujours aussi nombreux à nous écouter.
39:20 Merci à Frédéric Mortier pour son livre
39:22 "L'honneur d'un enseignant", édition Arteges.
39:24 Tout de suite l'émission de Brigitte Lay, à tout de suite sur Sud Radio.

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