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La fille aînée de François Bayrou, dévoile les violences qu'elle a subies dans les années 80 en tant que pensionnaire de l'établissement Bétharram. Écoutez le président de la commission d'enquête indépendante et Président de l'Institut Joinet, Jean-Pierre Massias, l'invité de RTL Soir.
Regardez L'invité de Yves Calvi du 23 avril 2025.

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Transcription
00:00RTL Soir, Yves Calvi et Agnès Bonfillon.
00:03RTL ID 18h18, bonsoir Jean-Pierre Macias.
00:06Bonsoir.
00:07Vous êtes professeur de droit public et vous présidez la commission d'enquête indépendante
00:10sur les violences sexuelles et physiques commises à Notre-Dame de Bétaram.
00:14Elle vient compléter la commission d'enquête parlementaire sur les violences
00:16dans les établissements scolaires qui, je le rappelle, entendra.
00:19François Bayrou le 14 mai prochain.
00:22Jean-Pierre Macias, nous venons d'entendre dans le journal l'émotion du Premier ministre
00:25dans une interview à Paris Match ainsi que dans un livre qui sort demain.
00:28sa fille Hélène Perlan relate les sévices qu'elle a subis à Notre-Dame de Bétaram.
00:33En tant que père de famille, ça me poignarde le cœur, a notamment déclaré le Premier ministre.
00:38Quelle est votre réaction ?
00:40Ma réaction, c'est que c'est un épisode de plus dans la longue série des violences
00:45qui ont été commises au sein de cet établissement.
00:47Et que c'est un épisode de plus et un épisode de plus dans la révolte
00:51et dans le dégoût qu'on peut avoir vis-à-vis de cette forme de violence.
00:54Je vais y revenir. Pendant 30 ans, elle n'a rien osé dire à personne.
00:58Comment expliquez-vous ce silence qui est d'ailleurs celui de beaucoup de victimes de cet établissement ?
01:03Parce que c'est un silence relativement classique.
01:06D'abord parce que c'est extrêmement traumatisant
01:08et que le premier réflexe qu'on va avoir, c'est d'essayer de se protéger
01:12et de faire une sorte de déni.
01:15Un psychiatre l'expliquerait bien mieux que moi.
01:17Et puis après, c'est difficile à avouer.
01:19C'est difficile à avouer parce que les gens ne parlent pas.
01:21Et c'est quand les gens commencent à parler, la parole entraîne la parole.
01:25Et c'est une sorte de cercle vertueux de la libération de la parole qui s'opère.
01:30Et Hélène Perlan participe de ce cercle avec l'énoncé des faits.
01:35Depuis que près d'un an, de très nombreuses victimes ont dénoncé des faits de violence à Bézharam.
01:39Je rappelle qu'elle avait 14 ans à l'époque.
01:41L'audition de François Bayrou, vous paraît-elle utile et souhaitez-vous entendre le Premier ministre ?
01:46Alors nous, on souhaitera évidemment entendre le Premier ministre.
01:48Ça nous paraît utile, mais pas plus utile, si j'ose dire, que d'autres acteurs.
01:53Pour nous, l'important, c'est d'essayer de comprendre à la fois comment ces violences ont eu lieu
01:57et de faire une espèce de, vous l'avez dit, de portrait robot,
02:00d'identifier les auteurs, les victimes, les moments, les périodes, etc.
02:05Essayer de comprendre cette violence, mais aussi évidemment de s'interroger
02:08sur l'espèce de non-dit et sur ce silence véritablement assourdissant
02:12qui a accompagné ces violences.
02:14C'est presque là le plus important.
02:16C'est de comprendre au fond à la fois comment un établissement religieux
02:19a pu se transformer en véritable système totalitaire
02:22et en même temps, comment toutes les structures périphériques de contrôle potentiel
02:27et j'allais dire toutes les structures sociales qui auraient dû être alertées
02:31ne l'ont pas été.
02:32C'est ça qui nous paraît le plus important
02:35parce que ça participe d'un crime véritablement systémique.
02:37C'est tout un système d'interaction sociale qui participe de ce non-dit
02:42et donc de cette impunité de la violence.
02:44Système totalitaire, nous disiez-vous, il y a quelques instants.
02:48Oui, parce que dans le...
02:50Alors, notre âme de Bétharam n'est pas globalement un système totalitaire
02:54mais je veux dire que la forme de violence qui a été exercée
02:57participe d'une violence qui s'appuie sur plein de vecteurs.
03:00A la fois l'autorité liée aux professeurs, l'autorité liée aux prêtres,
03:05l'autorité physique des prêtres qui s'imposent et ou des laïcs qui frappent les personnes
03:11et finalement des enfants qui sont complètement abandonnés, coupés de leur milieu familial
03:16parce que c'est souvent des pensionnaires.
03:17Bien sûr.
03:19Et donc voilà, on a des enfants qui sont complètement coupés dans un système
03:21où tout participe à leur écrasement et à leur domination.
03:25Votre commission est composée de dix personnalités
03:27qui vont tenter de comprendre comment ces violences ont pu être commises
03:31mais aussi étouffées pendant tant d'années, vous l'évoquiez il y a quelques instants.
03:34Alors, avocats, juristes, psychologues, comment allez-vous travailler ?
03:37Alors, on va travailler comme classiquement ce genre de commission.
03:41On s'inspire des modèles des commissions vérités
03:43telles qu'elles ont existé en Afrique du Sud ou au Canada pour des enfants autochtones.
03:47On va entendre beaucoup les victimes qui viendront nous parler.
03:50On va essayer également, enfin on va essayer, on va demander à beaucoup d'acteurs
03:53de nous parler, de témoigner, de nous raconter leur version des faits.
03:59On va évidemment travailler sur les archives.
04:01On a volontairement beaucoup insisté au prix de l'ordre de Betara
04:04en disant que nous n'acceptions la possibilité de travailler sur cette commission
04:09que si on avait un accès plein et total aux archives.
04:12On va d'ailleurs s'intéresser aux archives en France mais aussi en Italie
04:15et aller voir aussi à l'étranger parce que l'ordre de Betara met des sites à l'étranger
04:19et notamment on voudrait au moins vérifier dans deux sites en Centrafrique et en Thaïlande
04:24ce qu'il en est pour essayer de faire véritablement la...
04:28Vous avez des suspicions ? Pardonnez-moi, excusez-moi de vous interrompre
04:30mais vous avez des suspicions sur ces deux autres établissements ?
04:33Non, pas nécessairement des suspicions mais d'un point de vue, comment dirais-je,
04:37d'un point de vue logique, cette violence s'exerce surtout dans les endroits
04:43où les lieux, où les formes de domination sont plus importantes.
04:46Or on sait très bien que dans ces pays-là, on a eu des problèmes de domination
04:50et c'est pour ça qu'on va les voir.
04:52Mais si jamais on découvrait dans ces pays-là des violences qui ont été commises,
04:57il faudrait investiguer dans l'ensemble des 14 sites et pays gérés par Betarame.
05:04En même temps, ce qui nous paraît aussi important, peut-être, c'est de dire que
05:07évidemment on va travailler sur Betarame et sur la violence sexuelle dans l'Église
05:10mais ça renvoie à une forme de violence sexuelle plus diffuse,
05:13une forme de capacité ou d'incapacité, en l'occurrence, de la société française à l'époque,
05:20à faire front et à faire face à ces violences.
05:22Vous croyez qu'on peut dire à l'époque ?
05:25Je pense qu'on peut dire à l'époque aussi et que maintenant j'espère qu'on peut le dire un peu moins.
05:29Mais on a l'époque renvoyé un peu à la période post-MeToo
05:33où il y a eu une crise de conscience et il y a eu une affirmation.
05:37Au fond, MeToo, c'est un peu comme notre commission
05:39mais multiplié par des millions de personnes,
05:44c'est donner la parole, c'est montrer un fait social.
05:47Nous, cette commission ne sera pas une commission, ce n'est pas un tribunal bis,
05:51c'est au fond une commission qui a pour objet de montrer un fait social de violence,
05:55d'essayer de le comprendre et de proposer des politiques mémorielles et des politiques de réparation.
05:59Alors justement, vous êtes mandaté par la congrégation des Pères de Bétharame,
06:02certains pourraient penser que votre commission est une forme de contre-feu organisée par l'établissement.
06:07Que répondez-vous et avez-vous eu la garantie d'une totale indépendance dans votre enquête
06:11et surtout que vous auriez des réponses aux questions que vous avez à poser aux responsables ?
06:16Alors oui, évidemment, on peut penser que ça pourrait être un contre-feu.
06:20La théorie du contre-feu est très souvent utilisée autour de Bétharame
06:23et pas uniquement pour ma commission.
06:25On a évidemment demandé à pouvoir bénéficier au fond de trois choses.
06:29D'abord, la première, c'est la liberté totale de choisir les membres de la commission
06:32et on a véritablement voulu prendre des membres de la commission
06:35qui étaient différents scientifiquement,
06:37qui étaient reconnus internationalement
06:39et qui avaient déjà participé à ce type d'exercice,
06:42à la SIAZ, à la CIVIS ou à la commission sur les enfants réunionnais.
06:46La deuxième chose, c'est qu'on a prévenu
06:48qu'on n'accepterait aucune immixion de personnes
06:52dans la construction de notre rapport et dans la production de notre rapport.
06:57Ce rapport sera publié et les archives de la commission,
07:00et on a pris attache avec un laboratoire pour le faire,
07:03pour les classer le mieux,
07:04seront mises à disposition des chercheurs.
07:05Enfin, on a demandé à pouvoir avoir accès aux archives,
07:09à pouvoir interroger les gens, à pouvoir avoir des réponses.
07:11Alors, on n'est pas un tribunal,
07:13et même un tribunal ne peut pas a priori garantir à 100%
07:16d'avoir les réponses qu'il espère,
07:17mais en tout cas, si on ne les a pas
07:19et si on ne veut pas nous les donner, on le dira.
07:22Et si les conditions étaient véritablement trop difficiles,
07:24on arrêterait la mission immédiatement.
07:27Au moment où nous parlons,
07:28que savez-vous et que voulez-vous savoir ?
07:30Alors, ce qu'on sait,
07:31c'est que le nombre de violences a été extrêmement important.
07:35Ces violences ont été de deux natures,
07:38des violences sexuelles et des violences physiques.
07:40Évidemment, derrière, il y a des violences psychologiques.
07:43Ce qu'on voudrait savoir, c'est, au fond,
07:46quel est le profil des acteurs violents ?
07:48Est-ce qu'il y a un ciblage particulier
07:50des personnes qui ont été victimes ?
07:52Est-ce que, par exemple,
07:53les personnes qui ont été victimes
07:54sont des personnes qui sont socialement plus vulnérables ?
07:58Parce qu'on sait bien qu'à Bétharame,
07:59il y avait deux types d'élèves.
08:01Des élèves de ce qu'on pourrait appeler la bourgeoisie locale
08:04et des élèves en situation un peu de difficulté
08:07qu'on envoyait là-bas pour être repris en main.
08:10C'est un argument très fréquemment utilisé par les mamans
08:13de dire, si t'es pas sage, tu iras à Bétharame.
08:16Donc, ces gens-là qu'on envoyait pour être repris en main,
08:18ils étaient généralement d'extraction plus populaire.
08:20Ils étaient pensionnaires,
08:22contrairement aux autres qui ne l'étaient pas.
08:24Et donc, on voudrait voir s'il y a un croisement avec ça.
08:27On veut vraiment essayer de disséquer cette forme de violence
08:30pour savoir comment elle s'est déroulée
08:32et pourquoi elle s'est déroulée.
08:33Et puis vraiment ensuite, et j'insiste là-dessus,
08:36c'est la question de savoir pourquoi personne n'a rien dit.
08:38Pour nous, on est face à, je dirais, un triple crime.
08:41Le crime de ceux qui ont battu et violé les enfants,
08:44le crime de ceux qui étaient compétents pour les en empêcher
08:46ou les contrôler et qui n'ont rien fait,
08:48et le crime de ceux qui ont une forme d'environnement social
08:52qui devaient bien se douter
08:54ou qui ne pouvaient pas ne pas se douter
08:56qu'il se passait quelque chose,
08:57mais qui n'a fait preuve d'aucune véritable indignation.
08:59Merci infiniment Jean-Pierre Macias,
09:01président de la commission d'enquête indépendante
09:03sur les violences sexuelles et physiques
09:05commises à Notre-Dame de Bétarame.
09:07Dans moins d'un quart d'heure,
09:08nous évoquerons nos routes secondaires,
09:09départementales et communales,
09:11chaussées, figures et nids de poules,
09:12glissement de terrain.
09:13Le réseau est, je cite, au bord de la rupture
09:15selon l'association des maires de France.
09:18Son vice-président, Sylvain Laval,
09:20sera avec nous à 18h40.
09:22RTL Soir
09:23Yves Calvi

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