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Les communes et leurs intercommunalités n'ont plus les moyens d'entretenir les 717.000 kilomètres de routes dont elles ont la charge, alors que leur coût d'entretien augmente, notamment du fait du dérèglement climatique, a alerté mardi l'Association des maires de France (AMF). Écoutez Sylvain Laval, co-président de la commission transport à l'AMF et maire de Saint-Martin-le-Vinoux (38) pour tout comprendre.
Regardez L'invité pour tout comprendre avec Yves Calvi du 23 avril 2025.

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Transcription
00:00Yves Calvi et Agnès Bonfillon, RTL Soir.
00:04Bonsoir Sylvain Laval.
00:05Bonsoir.
00:05Vous êtes maire de Saint-Martin-le-Vinou en Isère, vice-président de la commission transport à l'AMF.
00:10Je rappelle qu'il s'agit de l'association des maires de France.
00:12Notre réseau routier qui s'étend sur près d'un million de kilomètres est aujourd'hui au bord de la rupture.
00:17Ses propos sont les vôtres, publiés hier au bord de la rupture.
00:21Expliquez-nous ce que vous entendez par là.
00:23Les communes et les intercommunalités sont propriétaires de 65% du réseau routier de France.
00:28On le sait peu. Ça veut dire qu'il nous revient à la responsabilité de les entretenir financièrement, de mener des travaux.
00:34Et aujourd'hui, au regard de tous les sujets sur lesquels nous devons faire face, nous ne sommes plus en capacité d'entretenir comme il faut ces routes.
00:41Parce qu'elles sont de plus en plus soumises aussi aux alers du climat.
00:45Il faut intervenir de manière plus structurante. C'est de plus en plus coûteux, de plus en plus fréquent.
00:49Et comme nous avons aussi d'autres enjeux auxquels il faut faire face, cela devient extrêmement compliqué.
00:53Quand je vous écoute, ça paraît incroyable qu'un pays comme la France soit dans de pareilles conditions.
00:57On a l'impression que vous parlez d'un pays en voie de développement.
01:00Nous avons effectivement des difficultés.
01:01C'est pour ça que nous voulons construire un nouveau modèle de financement pour pouvoir mener à bien l'entretien de ces routes
01:07et que nous ne soyons pas seuls en responsabilité sur la question.
01:10Vous ajoutez d'ailleurs que tout cela est dû à un modèle économique profondément déséquilibré.
01:16Là aussi, expliquez-nous pourquoi un modèle économique aussi déséquilibré ?
01:21C'est très simple. Nous n'avons absolument aucune ressource affectée, aucune aide financière pour faire face à cette responsabilité.
01:28Nous le prenons sur notre budget classique auquel nous devons aussi entretenir les écoles, mener un certain nombre de projets.
01:33Et nous sommes de plus en plus sollicités.
01:35Les communes aujourd'hui, on nous demande d'intervenir hors de notre champ de compétences.
01:38Par exemple, sur la santé qui est un sujet majeur pour nos habitants.
01:41Donc, on ne peut plus tout faire tout seul.
01:43Et comme il y a bientôt une conférence des financements et des mobilités qui va s'ouvrir,
01:46nous en appelons au gouvernement pour que ce sujet soit mis sur la table
01:49et qu'il puisse y avoir une ressource affectée pour ce faire.
01:52Donc, votre analyse aujourd'hui, c'est ce que nous avons pu assumer pendant très longtemps.
01:55Aujourd'hui, on ne peut plus l'assumer.
01:57Et c'est le cas, en tout cas, du réseau routier. Je vous ai bien compris.
02:00Absolument. La charge est trop lourde aujourd'hui.
02:01Mais, pardon d'insister, mais je conduis à peu près toute l'année sur les routes de France.
02:06Et je trouve qu'elles sont très bonnes, nos routes.
02:07Alors, vous avez le droit de me dire que je suis un Parisien, pro gâté avec son périphérique.
02:11Je vous dirais que ça dépend sur quelles routes vous conduisez.
02:13Sur les autoroutes, ils sont très bien entretenus.
02:15Sur les routes nationales, c'est plus relatif.
02:18Et puis, il y a aussi les départements.
02:19Mais, encore une fois, nous parlons des routes des communes et des intercommunalités,
02:22les plus petites, mais celles qui représentent le plus grand nombre de kilomètres de réseau.
02:26C'est vraiment le réseau souvent secondaire.
02:28Et notamment, il y a aussi évidemment des disparités entre les communes,
02:31entre une grande agglomération urbaine et des zones plus rurales.
02:34Ce n'est pas la même chose.
02:34Et paradoxalement, plus la commune est petite, plus son réseau est étendu
02:37et plus la charge est lourde en proportion.
02:39Et c'est aussi cela le sujet.
02:41Nous avons des collègues qui sont en plein désarroi sur cette question.
02:44Comment expliquez-vous cette dégradation de notre réseau routier ?
02:47À qui la faute, finalement ?
02:48C'est un modèle qui n'a pas été suffisamment construit et équilibré
02:53et sur lequel le temps fait son œuvre.
02:54Puisqu'il y a besoin maintenant de plus intervenir que par le passé.
02:58Parce que d'abord, nous avons trop attendu avant de faire des entretiens structurants, lourds.
03:02Je prends l'exemple des ouvrages d'art.
03:03Les ponts, les murs de soutènement se dégradent depuis des décennies.
03:06Et maintenant, lorsqu'il faut intervenir, c'est très lourd et c'est donc très coûteux.
03:10Et puis, le deuxième sujet, c'est la question du changement climatique
03:13qui fait que nous voyons bien les évolutions sur les voiries.
03:15Il y a des fissures, il y a des glissements de terrain, il y a des inondations.
03:18Donc, il faut intervenir de manière plus forte qu'avant et beaucoup plus fréquemment.
03:21Et donc, tout ça a un coût.
03:22Et plus nous attendons, plus le coût de réparation est important.
03:25Quelles sont les dégradations les plus fréquentes, les plus dangereuses que vous retrouvez ?
03:30Vous avez des routes qui guibougent.
03:32Nous voyons des fissures apparaître au début et puis ensuite, c'est un petit glissement de terrain.
03:36Nous pouvons avoir des morceaux de route qui partent.
03:38Et donc, après, il faut refaire des structures de voirie, des murs de soutènement.
03:41Et donc, ce sont des interventions beaucoup plus lourdes qui peuvent parfois couper la voirie.
03:44Donc, ça peut avoir des conséquences pour nos habitants.
03:46Et qui, bien sûr, coûtent fort cher à mener comme travaux,
03:49qui souvent demandent des études préalables.
03:51Parfois même des autorisations administratives, environnementales, etc.
03:54C'est de plus en plus complexe d'intervenir.
03:56Il ne suffit pas juste de venir reboucher un trou au goudron, malheureusement.
03:59Ça peut arriver, mais il n'y a pas que ça.
04:01Est-ce que vous pensez que des morts sur les routes sont dues aujourd'hui
04:03à cet état de déliquets de sens que vous semblez décrire ?
04:08Je n'irai pas jusque-là parce que nous sommes pour la plupart des gens responsables.
04:12Et donc, lorsque nous voyons qu'une voirie est trop menacée
04:14et que nous ne sommes pas en capacité de la réparer tout de suite,
04:16nous en sommes responsables.
04:18Donc, nous prenons des mesures de fermeture, de déviation, d'allègement de trafic,
04:21de limitation de tonnage, d'alternat.
04:23Et donc, nous faisons évidemment des éléments préventifs
04:26pour ne pas mettre les usagers en insécurité.
04:27Et pourtant, en juin 2024 à Roubaix, il y a une jeune femme de 36 ans qui est décédée,
04:32écrasée par un camion après être tombée de sa trottinette.
04:34Une chaussée dégradée serait à l'origine de sa mort, selon sa famille.
04:38Et craignez-vous d'ailleurs que ce genre de drame se reproduise ?
04:40Alors, ça peut évidemment arriver et ça peut être un risque
04:43si nous ne faisons rien, effectivement,
04:45et si nous ne nous donnons pas des moyens plus structurels pour pouvoir intervenir.
04:48C'est un risque, mais on ne peut pas dire aujourd'hui que c'est non plus une généralité.
04:51Et dans ce cas-là, dans ce cas dramatique de cette jeune femme,
04:56est-ce que la responsabilité d'un maire peut être engagée ?
04:58Bien sûr, ne vous inquiétez pas.
05:00Tous ceux qui cherchent des responsabilités commencent toujours par se retourner
05:03contre le maire, contre la collectivité, l'intercommunalité.
05:07Et quoi qu'il en soit, nous engageons notre responsabilité.
05:09C'est pour ça que nous tirons aujourd'hui la sonnette d'alarme,
05:12parce que nous ne pouvons pas faire face seul à un tel niveau d'importance.
05:15D'abord pour nos usagers au quotidien, parce que c'est aussi leur élément pour se déplacer,
05:19et parce que ça engage notre responsabilité.
05:21Quelle est l'urgence, là ? Qu'est-ce qu'il faut faire tout de suite, selon vous ?
05:25Ce qu'il faut faire tout de suite, encore une fois,
05:26c'est ne plus laisser un certain nombre de collectivités toutes seules,
05:29dans le désarroi, démunies par rapport à leurs moyens,
05:32qui ne sont plus en capacité d'intervenir.
05:33Il faut affecter des ressources, très clairement construire ce modèle de financement.
05:37Nous avons fait des propositions sur ce sujet.
05:39Il pourrait y avoir une partie de la recette des concessions des péages d'autoroutes
05:43qui pourraient être affectées aux communes, aux intercommunalités.
05:45Nous souhaitons aussi pouvoir bénéficier de la recette des amendes de police de circulation.
05:49Nous mettons, via nos policiers municipaux, nos gardes-champettes des amendes,
05:52mais nous n'en touchons pas à la recette qui revient à l'État.
05:54Ça, les Français le savent peu.
05:56J'imagine que nous remplissons nos caisses de cette manière-là.
05:58Ce n'est pas le cas, parce que c'est le système administratif français.
06:01Il serait logique que là où nous verbalisons, nous puissions encaisser l'amende
06:04pour l'utiliser, pour entretenir les voiries.
06:05Et nous faisons aussi une autre proposition.
06:07C'est tout ce que nous appelons les concessionnaires réseau
06:10qui interviennent sur les voiries pour les réseaux d'électricité, de téléphone, de gaz, de fibre,
06:14qui interviennent, c'est normal, qui rebouchent souvent,
06:16mais qui ne surent pas les réparations de structures de chaussée
06:18qui nous incombent, in fine.
06:20Et donc, nous pensons qu'ils pourraient aussi mieux contribuer
06:21pour pouvoir participer aux travaux de rénovation.
06:24Chaque année, l'État perçoit plus de 50 milliards d'euros liés à la route.
06:28Quelle est la partie qui revient en collectivité pour améliorer le réseau ?
06:30Absolument aucune.
06:31Aucune ?
06:32Aucune.
06:32Les communes, les intercommunalités ne touchent rien.
06:34Les départements ne touchent rien.
06:35Et c'est le problème de 95% de cette recette qui reste aujourd'hui dans les caisses de l'État
06:39ou qui est réaffectée en partie pour les besoins de l'État,
06:42par exemple sur un certain nombre de travaux d'infrastructure,
06:44mais dont ils les pilotent.
06:45Et les collectivités n'ont aucune ressource affectée
06:48alors qu'elles ont encore une fois l'immense majorité du réseau en responsabilité.
06:51Et c'est cela que nous dénonçons aujourd'hui,
06:53sur lequel il nous faut trouver une solution viable.
06:56Concernant l'état des routes de nos voisins,
06:58est-ce que vous avez fait des études ?
06:59Est-ce que vous vous êtes penché sur ce sujet ?
07:02Pour comparer, peut-être ?
07:03Oui, le modèle est très différent parce que vous avez des pays
07:05où la situation est beaucoup plus décentralisée,
07:08elle est fédérale,
07:09où il y a évidemment un modèle de financement propre à l'État fédéré.
07:12Ce que nous n'avons pas.
07:13Nous avons fait une décentralisation,
07:15ce qui est intéressant sur un certain nombre de sujets,
07:17mais nous n'avons pas mis en face la réforme des financements
07:19pour les compétences que nous donnons.
07:21Et c'est tout le problème de notre pays.
07:22Nous ne pouvons pas continuer éternellement à transférer les responsabilités
07:25sans avoir en face les ressources affectées.
07:27Et je crois que là, nous sommes au cœur de ce sujet
07:29et que c'est vraiment la limite qui est touchée.
07:30Une dernière question, est-ce que vous faites confiance à l'équipe Bayrou pour entendre votre appel ?
07:34Écoutez, nous participerons à la conférence de financement,
07:36nous ferons nos propositions.
07:38J'espère que vous êtes en contact avec eux.
07:39Oui, oui, nous allons évidemment faire remonter cela,
07:41c'est l'objet de cette conférence,
07:42mais nous en attendons des solutions, des réponses concrètes,
07:45pas juste un grand débat, une grande discussion de tour de table comme on peut en connaître.
07:48Il faut maintenant que nous avançons.
07:49Ça commence le 5 mai.
07:51Le 5 mai, le grand débat commence ?
07:52Oui, à Marseille.
07:53Vous reviendrez nous voir à la fin de vos travaux ?
07:55Avec plaisir.
07:56Merci infiniment Sylvain.
07:57Merci à vous.
07:58La première de Saint-Martin-le-Vinou en Isère
08:00est vice-président de la commission transport à l'AMF,
08:02l'association des maires de France.
08:04Il est 18h51, dans un instant,
08:06le meilleur de Marc-Antoine Lebrette,
08:08avec le Breaking News.
08:09Yves Calvi et Agnès Bonfillon
08:11RTL Soir
08:14Merci à vous.

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