Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • hier
Chères lectrices, chers lecteurs,

Mardi 8 avril, nous avons eu le plaisir de recevoir M. Frédéric Vitoux (de l'Académie française) pour une soirée autour de son nouvel ouvrage, La mort du procureur impérial.

Discussion animée par Hélène Bihèry-Dupuy.

Vous souhaitant de belles lectures,

L'écume 🌊

🔎 La Quatrième :

Un ancien Procureur impérial, Fualdès, est assassiné dans la nuit du 19 au 20 mars 1817 : c’est le début de « l’affaire Fualdès », fait-divers retentissant du début du XIXème siècle qui donna lieu à deux procès retentissants (Rodez et Albi), une instruction bâclée, des témoins manipulés… et la décapitation de trois innocents.
Clarisse Manzon, accusatrice incohérente et séductrice virevoltante, devient vite la seule héroïne de cette ténébreuse affaire. Incarcérée un temps, elle signe de sa prison des Mémoires, un phénoménal succès de librairie en Europe.
Mais son véritable auteur est un certain Henri de Latouche, écrivain, dramaturge, journaliste : c’est lui qui rend compte des délibérations du procès, médiatise un crime dont le souvenir se perpétue d’un siècle à l’autre, tient la plume du livre signé Clarisse Manzon et fait d’elle, qui n’a cessé de mentir, un personnage de roman vrai, la rendant riche et célèbre avant qu’ils ne se brouillent.
Devenu critique et éditeur, Henri de Latouche jouera un rôle déterminant dans l’aventure romantique : il découvre et publie les manuscrits de Chénier, aide aux débuts de Balzac, noue avec Stendhal une profonde amitié, encourage Sand, bataille avec Hugo et Sainte-Beuve, traduit ou publie Goethe et Schiller, souffle Chatterton à Vigny, Séraphita à Balzac et Melle de Maupin à Gautier…
A travers le récit minutieux et l’élucidation probable d’un « cold case », Frédéric Vitoux revisite l’aventure du romantisme et réhabilite une figure oubliée de l’histoire littéraire.
Transcription
00:00:00Nous avons le feu vert de la caméra.
00:00:03Bonsoir à tous.
00:00:04Merci d'être si nombreux avec nous ce soir.
00:00:08Merci surtout à vous, Frédéric Vitoux, d'avoir accepté notre invitation.
00:00:11On est très heureux de vous accueillir avec une des pages.
00:00:13C'est un honneur et un privilège.
00:00:16Frédéric Vitoux, vous êtes académicien,
00:00:19vous êtes président de la Commission pour l'enrichissement de la langue
00:00:22qui dépend, je crois, du ministère de l'Éducation ou de la Culture,
00:00:25ou peut-être un peu des deux.
00:00:27Du Premier ministre.
00:00:28Du Premier ministre.
00:00:29Parce que la langue française est l'article 2 de la Constitution.
00:00:34L'article 2 est...
00:00:35Donc la langue française appartient d'abord,
00:00:38non pas à tel ou tel ministère,
00:00:40mais au gouvernement tout entier.
00:00:43En tout cas, on ne pouvait avoir meilleur président pour cette Commission
00:00:45que vous, pour cet enrichissement de la langue,
00:00:47car en vous lisant, un premier plaisir saute aux yeux,
00:00:50c'est le plaisir de la langue et de la très belle langue.
00:00:53Vous êtes académicien, président de cette Commission,
00:00:55mais vous êtes surtout un homme de passion,
00:00:58un homme passionné par, je vais dire,
00:01:01pêle-mêle, l'Italie, les chats,
00:01:04l'opéra, Rossini, Stendhal,
00:01:06l'île Saint-Louis, je l'ai dit déjà,
00:01:08l'Italie, je l'ai dit déjà,
00:01:09et la littérature,
00:01:10et aussi l'histoire, on va le découvrir avec ce dernier roman
00:01:13qui s'appelle La mort du procureur impérial,
00:01:15publié aux éditions Grasset,
00:01:17qui est un livre magnifique dans lequel vous nous apprenez mille choses.
00:01:21Je n'avais jamais entendu parler, je le confesse,
00:01:23de cette affaire Földes.
00:01:26Et j'aimerais, pour commencer,
00:01:28que vous nous disiez ce qui vous a incité à vous y intéresser,
00:01:31à écrire ce roman.
00:01:33A l'origine, c'est moins l'affaire Földes
00:01:40que l'homme qui a contribué à la médiatiser,
00:01:43comme on ne disait pas en 1817,
00:01:45lorsque ce crime qui a marqué les esprits
00:01:48a eu lieu dans la ville de Rodez.
00:01:51Donc, c'est l'homme qui a contribué à la faire connaître,
00:01:56qui s'y est intéressé,
00:01:57pour des raisons sans doute politiques au départ.
00:01:59Ce tome s'appelait Henri de Latouche.
00:02:03Il était un inconnu, sauf de quelques journalistes
00:02:05ou de quelques personnes qui avaient vu sa première pièce de théâtre,
00:02:09qui avait été jouée au théâtre de l'Odéon,
00:02:10qui s'appelait à l'époque le théâtre de l'impératrice sous l'Empire.
00:02:14Et c'était un homme qui était un libéral
00:02:15et qui allait contribuer à fonder un mouvement important
00:02:19qui est le romantisme.
00:02:21Mais il a été un romantique libéral,
00:02:25donc plutôt républicain,
00:02:26avec des nostalgies bonapartistes.
00:02:29Et cet homme a cru que ce crime était un crime politique.
00:02:35Pourquoi ?
00:02:35Parce que, comme le nom de mon livre l'indique,
00:02:39on avait assassiné sauvagement
00:02:41un ancien procureur impérial de l'époque de Napoléon,
00:02:44en 1817, c'est-à-dire en gros deux ans après la restauration,
00:02:48dans des conditions abominables.
00:02:50On a vu son corps égorgé, saigné à blanc,
00:02:52qui dérivait dans l'Aveyron
00:02:53et qui avait sans doute été tué dans la ville de Rodez.
00:02:56Et on a pensé que c'était peut-être un règlement de compte tardif
00:03:01des royalistes qui voulaient se venger d'un homme
00:03:04qui avait été autrefois membre du tribunal révolutionnaire.
00:03:07S'il n'avait pas le choix, comme tout notable de province,
00:03:09il devait être membre du tribunal révolutionnaire pendant quelques mois.
00:03:12Et surtout, voilà, un juge de l'époque avant.
00:03:19Donc, l'épuration, c'est une vieille habitude française.
00:03:22Et donc, on avait pensé qu'il avait pu être assassiné
00:03:25par des gens qui avaient été autrefois ses adversaires politiques
00:03:28et donc qui avaient pu souffrir de ses jugements.
00:03:31Et Latouche pense que c'est une affaire politique.
00:03:34C'est pour ça qu'il s'y intéresse.
00:03:36Il s'intéresse à un procès qui va être...
00:03:38Et c'est peut-être la première fois dans l'histoire de France.
00:03:42C'est pour ça aussi que ce crime m'intéresse.
00:03:45Car je crois que c'est la première fois dans l'histoire de la France
00:03:48qu'un crime est à ce point médiatisé.
00:03:52C'est-à-dire que non seulement ce crime,
00:03:54par ses conditions mystérieuses,
00:03:57fait naître de folles rumeurs dans la ville de Rodez.
00:04:01Pratiquement, c'est des habitants qui se forgent
00:04:03à une image romancée et qui pensent réelle de ce crime.
00:04:07Mais ça va tellement frapper les esprits
00:04:11qu'une chanson, par exemple, très célèbre,
00:04:12la balade de Fualdès,
00:04:14va être chantée dans toute la France.
00:04:17Elle va être imprimée, chantée.
00:04:19Elle est tellement connue, figurez-vous,
00:04:21que c'est quand même incroyable.
00:04:22C'est que j'ai un de mes confrères de l'Académie française
00:04:25à qui je parlais il y a quelques mois
00:04:26de cette affaire Fualdès.
00:04:28Il me dit, ah oui, la balade de Fualdès,
00:04:29il commence à me la chanter par cœur.
00:04:30Je dis, attends...
00:04:32Il s'appelle Michel Zin,
00:04:34qui est un grand médiéviste
00:04:35que probablement beaucoup d'entre vous connaissent,
00:04:38qui était professeur au Collège de France,
00:04:39mais c'est un fanatique des chansons.
00:04:41Mais je dis, mais comment tu connais cette chanson ?
00:04:43Il m'a dit, j'avais trouvé cette chanson
00:04:44dans un vieux recueil des chansons
00:04:45les plus célèbres de France.
00:04:47Et ça m'avait frappé.
00:04:48Il a une mémoire colossale.
00:04:50Il pouvait me chanter 3, 4, 5 couplets.
00:04:53Vous voyez, donc cette médiatisation est incroyable.
00:04:55Il y a eu des pièces de théâtre.
00:04:56Il y a même des tragédies en Italie, en Espagne.
00:04:59Et les écrivains français vont donner un écho considérable.
00:05:06À 7 ou 8 reprises, en tout cas au moins 6 ou 7, je crois,
00:05:09Balzac, il fait allusion dans ses romans
00:05:13de la comédie humaine.
00:05:15Oui, la comédie humaine, pardon.
00:05:18Et aussi Hugo dans Les Misérables.
00:05:22Et aussi Flaubert dans Beauvoir et Pécuchet,
00:05:25où les Beauvoir et Pécuchet parlent encore,
00:05:27c'est 50 ans après, de « Ah, qui a tué l'affaire ? »
00:05:30Ils se demandent qui a tué Faldès.
00:05:32Et ils discutent de ça.
00:05:34Donc c'est incroyable.
00:05:35Et donc la touche s'y intéresse pour des raisons politiques.
00:05:39Et vous, c'est la touche qui vous intéresse ?
00:05:41Au départ, la touche m'intéresse parce que c'est un homme
00:05:43qui est totalement inconnu.
00:05:45Et pourtant, c'est l'homme qui, juste après l'affaire Faldès,
00:05:49va tomber sur des brouillons que lui donne un libraire et un éditeur.
00:05:53On les a achetés, mais qu'est-ce qu'il faut en faire ?
00:05:54On ne sait pas.
00:05:55Est-ce qu'il faut les jeter ?
00:05:56Et il regarde, c'était des brouillons écrits par le frère
00:05:59d'un écrivain très connu,
00:06:01qui était membre de l'Académie française,
00:06:03qui est l'auteur du chant du départ,
00:06:04qui s'appelait Marie-Joseph Chénier.
00:06:06Et il dit, ben oui, c'est des brouillons de son frère.
00:06:08Qu'est-ce qu'on en fait ?
00:06:09Je ne sais pas.
00:06:09Ça vaut le coup, on les jette ou quoi ?
00:06:12Et il regarde, il dit, mais attendez, c'est extraordinaire, ça.
00:06:15Mais c'est une poésie inouïe qu'on n'avait jamais entendue comme ça.
00:06:19Il dit, moi, je m'en fous de Marie-Joseph Chénier,
00:06:21qui était mort quelques années plus tôt, d'ailleurs.
00:06:23C'est ça qu'il faut publier.
00:06:24Et il va passer des mois, juste après l'affaire Faldès,
00:06:27qui va couvrir, comme on dit aujourd'hui sur le plan journalistique,
00:06:30il va publier pour la première fois les œuvres d'André Chénier.
00:06:33Sans la touche, Chénier serait, au sens strict du terme,
00:06:36l'être morte.
00:06:37Et puis, il va continuer à avoir une passion amoureuse pour une jeune femme.
00:06:43Donc, il va publier la première véritable grande édition,
00:06:46qui est pour moi l'un des grands amours de la touche,
00:06:49qui s'appelle Marceline Zéborg-Valmor.
00:06:52Et puis, je pourrais citer à l'infini.
00:06:54Il aide Balzac pour son premier grand roman, qui est L'Échouant.
00:06:57Il va se lier avec Vigny, qui a beau être royaliste,
00:07:03et lui plutôt républicain,
00:07:04« Il appelle mon cher ennemi, mais il s'estime beaucoup ».
00:07:07Et un jour, il lui donne un poème qu'il a écrit sur un poète inconnu du 18e siècle,
00:07:11qui est mort à 19 ans, s'il s'est suicidé,
00:07:13qui s'appelait Chatterton.
00:07:15Et lui, ça devrait t'intéresser ?
00:07:16Et Vigny écrit une pièce de théâtre, Chatterton,
00:07:18qui va être un des plus grands succès du théâtre français du 19e siècle,
00:07:22et va lancer, comme on dit, Vigny.
00:07:24Et je pourrais continuer cette liste indéfiniment.
00:07:27Ce Latouche est d'origine d'une bérie.
00:07:29Et un jour, il voit une jeune fille qui s'est divorcée,
00:07:33qui vient à Paris pour essayer de gagner sa vie,
00:07:36et qui vivote en faisant des peintures à l'aquarelle.
00:07:40Bon, elle peint en particulier les abat-jour.
00:07:42C'est amusant, c'est décoratif.
00:07:44Et il lui dit, non, non, mais il faudra peut-être écrire.
00:07:46À l'époque, Latouche dirige un journal
00:07:48qui est une petite feuille de chou
00:07:51de quelques centaines d'exemplaires à peine,
00:07:53qui s'appelle Le Figaro.
00:07:54Donc, voilà, la suite, on la connaît plus ou moins,
00:07:57mais c'était le premier Figaro que dirige Latouche.
00:08:00Et il va l'aider, il l'a fait travailler durement,
00:08:03elle va raconter après qu'il était impitoyable,
00:08:05il faisait recommencer la copie, ça ne va pas du tout, etc.
00:08:08Et puis, finalement, elle l'apprend un peu grâce à lui,
00:08:11et elle fait un roman.
00:08:12Elle lui donne à lire, oh, c'est très mauvais,
00:08:13c'est une copie de Balzac.
00:08:15Et puis, elle part dépité,
00:08:17et puis, dans la nuit, il relit attentivement le manuscrit.
00:08:20Et le lendemain matin, elle lui envoie un petit mot,
00:08:21ah, mon enfant, comme je suis content de vous.
00:08:24Et elle publie son premier roman, ça s'appelle Indiana.
00:08:26Et l'auteur, ça signe Georges Sand.
00:08:29Et donc, Georges Sand doit tout à Latouche, quand même.
00:08:32C'est lui qui lui donne le même pied à l'étrier,
00:08:35et qui va, bon, puis voilà, je pourrais encore en continuer.
00:08:37Vous dites, il est injustement oublié de l'histoire littéraire.
00:08:40Oui, parce que c'est un homme qui avait du talent,
00:08:41mais pas de génie.
00:08:43Et puis, surtout, c'est un homme qui aimait l'ombre,
00:08:47qui aimait être une éminence grise, comme on dit aujourd'hui, vous voyez.
00:08:51Il signait très rarement ses pièces de théâtre, ses livres,
00:08:54c'était sous pseudonyme, ou même sans signature du tout.
00:08:58Il aimait comme ça.
00:08:59Et puis, il a eu un grand défaut,
00:09:03c'est qu'il a écrit un jour un article effrayant.
00:09:05Effrayant pour les autres, j'entends.
00:09:07C'était à la fin des années 1920.
00:09:08Il a écrit un livre qui s'appelait...
00:09:10Il a écrit un article qui s'appelait
00:09:12De la camaraderie littéraire.
00:09:13Et il dénonçait une pratique qui est courante
00:09:16depuis que la littérature existe,
00:09:18c'est-à-dire ce qu'on n'appelait pas encore à l'époque
00:09:21le renvoi d'un censeur.
00:09:24Et donc, il regarde le scénacle romantique
00:09:27et était affolé par les compliments hyperboliques
00:09:32que les uns se renvoient aux autres.
00:09:34Je ne sais pas, moi, c'est Victor Hugo
00:09:36qui, en parlant d'une traduction de Musset,
00:09:40d'une oeuvre de théâtre, lui dit
00:09:41« Maintenant, je sais, vous êtes légal,
00:09:43sinon l'équivalent du grand William. »
00:09:45Enfin, Shakespeare, il ne faut pas exagérer.
00:09:47Et l'autre lui répond une lettre
00:09:48« Permettez-moi d'embrasser l'Orient et l'Occident
00:09:51de votre tête qui est un monde. »
00:09:53Vous voyez, donc c'était dans le...
00:09:54On faisait très fort dans les compliments.
00:09:56Le problème, c'est qu'ils avaient du talent,
00:09:58les romantiques.
00:09:59Et malgré tout,
00:10:00et Latou, dans son article,
00:10:02qui a un retentissement colossal
00:10:04que Stendhal va adorer,
00:10:06Stendhal qui est son grand ami,
00:10:07à qui, entre parenthèses,
00:10:08il va donner le sujet de son premier roman,
00:10:10qui s'appelle Armance.
00:10:13Voilà, et donc,
00:10:14ils ne lui pardonneront jamais les romans.
00:10:16Et Victor Hugo dira,
00:10:18interdira à tous les membres du scénacle romantique,
00:10:21par exemple Charles Naudier,
00:10:22qui était un grand ami de Latou,
00:10:23« Ne fréquentez pas cet homme
00:10:25qui n'aspire que de...
00:10:28qui recèle,
00:10:29qui sointe la haine pour les autres,
00:10:31ce qui était absolument faux, d'ailleurs. »
00:10:32Oui, on pourrait le soupçonner d'un vertu.
00:10:33Donc, quand Hugo fait Hernani
00:10:38Latouche,
00:10:39malgré qu'il est républicain
00:10:42et qu'à l'époque,
00:10:43quand même les premiers romantiques
00:10:46comme Hugo et les autres
00:10:46sont outrageusement réactionnaires,
00:10:49religieux, monarchistes,
00:10:51les jeunes France, etc.,
00:10:53il s'en fiche,
00:10:54il défend Hernani.
00:10:55Mais comme il a écrit cet article,
00:10:57quand deux ans ou trois ans plus tard,
00:10:58il publie une pièce de théâtre
00:10:59qui se passe à la comédie française,
00:11:04qui s'appelle « La Reine d'Espagne »
00:11:06et dans...
00:11:06C'est moi, ça ?
00:11:09Oui, ça serait gentil
00:11:10de couper les téléphones portables
00:11:11si possible.
00:11:12Voilà.
00:11:13Et quand il lance cette pièce de théâtre,
00:11:15tous les romantiques
00:11:16viennent pour le siffler
00:11:17et ils sont du mauvais camp, là.
00:11:19Ils ne sont pas des gens
00:11:21qui sifflent Hernani,
00:11:22ils empêchent l'autre
00:11:23d'avoir du succès
00:11:24et ils...
00:11:25Ah non, c'était...
00:11:25Voilà.
00:11:26Donc, je vous parle dans le désordre,
00:11:28mais si vous voulez,
00:11:31on peut revenir au livre.
00:11:33On peut partir du bandeau.
00:11:35Voilà.
00:11:35On pourrait partir du bandeau
00:11:36que l'éditeur a mis sur le livre,
00:11:38sans doute avec votre accord
00:11:39et peut-être même...
00:11:40Sur ma suggestion.
00:11:41Sur votre suggestion.
00:11:42un très beau dessin
00:11:44à la plume,
00:11:46à l'encre et au lavis
00:11:47de Géricault,
00:11:49le peintre fameux,
00:11:51qui représente
00:11:52l'enlèvement de Foualdès.
00:11:55Vous parliez tout à l'heure
00:11:56du retentissement incroyable
00:11:57de cette affaire,
00:11:58non seulement en France,
00:11:59mais ça a franchi les frontières,
00:12:01toute l'Europe s'y est intéressée,
00:12:02tout le monde s'y est intéressé,
00:12:04Louis XVIII s'est passionné
00:12:05pour l'affaire
00:12:06et Géricault, lui aussi,
00:12:07qui est un jeune homme
00:12:08de 26 ans, je crois,
00:12:09au moment de l'affaire Foualdès,
00:12:11tout à coup se dit
00:12:12je tiens le sujet
00:12:13d'un très grand tableau
00:12:14et se met à travailler
00:12:16sur ce sujet.
00:12:17Qu'est-ce que vous pouvez nous dire
00:12:18de ce qu'il a laissé
00:12:19de trace de cette affaire Foualdès ?
00:12:20Voilà, ce que je veux vous dire,
00:12:20c'est que comme Latouche
00:12:22qui s'est emparé de l'affaire
00:12:24en pensant qu'il tenait
00:12:25une affaire politique
00:12:25et qui va donc publier
00:12:27l'intégralité du...
00:12:30Pour la première fois
00:12:31dans l'histoire
00:12:32du journalisme en France,
00:12:34il va non pas donner
00:12:35un avis sur l'affaire
00:12:36comme, mettons,
00:12:37Voltaire avait pu se passionner
00:12:40pour l'affaire Calas
00:12:41ou l'affaire du chevalier
00:12:42de la Barre.
00:12:42Non, il va dire
00:12:44je vais raconter le procès,
00:12:46tout le procès,
00:12:47comme un sténographe.
00:12:48Donc, l'information en continu,
00:12:51exactement,
00:12:51c'est ce qu'il invente.
00:12:52Mais il pense que l'affaire
00:12:53va révéler, au fond,
00:12:55la manipulation royaliste
00:12:57derrière le crime de Foualdès.
00:12:58Il soupçonne
00:12:59qu'il y a une manipulation politique,
00:13:01ça va être un scandale retentissant
00:13:03qui va affaiblir
00:13:04le pouvoir monarchique
00:13:05et Louis XVIII en particulier,
00:13:06bien sûr.
00:13:07Et Géricault,
00:13:10à la même période,
00:13:11entend,
00:13:12comme tout le monde
00:13:13parlait de l'affaire,
00:13:14il dit,
00:13:14là, je tiens aussi
00:13:15un grand tableau historique,
00:13:18je vais faire le tableau
00:13:18du crime de Foualdès
00:13:20et tout le monde
00:13:21lira,
00:13:22verra,
00:13:23en voyant le tableau,
00:13:24de manière,
00:13:24je dirais,
00:13:25plus ou moins cachée,
00:13:27verra le message politique
00:13:28d'un procureur impérial
00:13:30assassiné deux ans
00:13:32après la restauration,
00:13:34sans doute par des royalistes.
00:13:35Donc, ce sera un grand tableau politique.
00:13:37Alors, il fait six ou sept esquisses
00:13:39comme ça,
00:13:39comme vous l'avez dit,
00:13:40voilà, au crayon,
00:13:41à la vie,
00:13:42à la vie,
00:13:42etc.,
00:13:43qui racontent
00:13:43les différents épisodes
00:13:44du procès
00:13:45tel qu'on le croit réel.
00:13:48Ou même les différents épisodes
00:13:49de l'affaire,
00:13:50c'est-à-dire
00:13:50la fameuse maison bancale
00:13:52où on en parlait.
00:13:53Voilà, exactement,
00:13:54le lieu présumé
00:13:54de l'assassinat,
00:13:56comment on traîne
00:13:56le cadavre,
00:13:58comment on l'égorge,
00:13:58parce qu'on racontait
00:13:59qu'on l'avait égorgé
00:14:00sur une table
00:14:00dans cette maison,
00:14:01qu'on l'avait égorgé,
00:14:03qu'il y avait même un cochon
00:14:03qui, dans un bac,
00:14:05buvait le sang
00:14:06de Fualdès.
00:14:07Oui, c'est un crime
00:14:08absolument sordide.
00:14:09Voilà.
00:14:09Tout ça, c'est faux.
00:14:10Tout ça, c'est des fantasmes.
00:14:12Des évécubrations.
00:14:13Et, à un moment donné,
00:14:14Géricault,
00:14:14qui est un peintre
00:14:15qui a une vision
00:14:17parfois hallucinée
00:14:19de la réalité,
00:14:20mais l'hallucination,
00:14:21ce n'est pas le mensonge,
00:14:22c'est la déformation
00:14:23de la réalité
00:14:24par une vision
00:14:25exacerbée comme ça,
00:14:27mais il se rend compte
00:14:28que tout ça est incertain,
00:14:30tout ça est mystérieux,
00:14:31que ce crime, au fond,
00:14:32est-ce qu'il a vraiment
00:14:32eu lieu là ?
00:14:33On n'en est pas sûr.
00:14:34Donc, il ne tient pas
00:14:35une certitude
00:14:36sur laquelle il va pouvoir
00:14:37faire un grand tableau.
00:14:39Et donc, il laisse tomber,
00:14:40il reste cinq, six esquisses,
00:14:41ou six,
00:14:42je crois qu'il y en a quatre
00:14:43qui sont lourdes.
00:14:44Il y en a deux,
00:14:45dont l'un appartient,
00:14:46donne des esquisses,
00:14:47appartient à mes amis de classe,
00:14:48d'ailleurs,
00:14:49qui est un grand collectionneur.
00:14:51Et voilà.
00:14:52Donc, il laisse tomber
00:14:53et il va faire
00:14:53un autre grand tableau politique
00:14:55que tout le monde connaît.
00:14:56C'est le Radeau de la Méduse,
00:14:58évidemment,
00:14:59où là aussi,
00:14:59il y a un message...
00:15:00Il s'en parle d'une autre histoire.
00:15:01C'est aussi un autre pièce,
00:15:05un autre grand tableau d'histoire
00:15:06avec un message politique
00:15:08parce que le Radeau de la Méduse
00:15:10est dû à l'impéritie,
00:15:12à l'incompétence
00:15:12du commandant de l'escadre,
00:15:15qui était un royaliste
00:15:17qui avait été parti en exil,
00:15:18qui était un peu gâteux,
00:15:19qu'on a nommé à cette mission
00:15:21pour récupérer le Sénégal
00:15:25pour la France
00:15:26et qui va,
00:15:27à suite de fausses manœuvres
00:15:28et d'imbécilité totale,
00:15:29arriver à catastrophe,
00:15:31échouer son bateau,
00:15:32partir avec les gens
00:15:33et laisser sur un radeau...
00:15:35Quelques planches...
00:15:37C'était une horreur
00:15:39qui a frappé
00:15:40toute la...
00:15:42C'est vraiment le fait divers,
00:15:43le fait divers réel,
00:15:44j'entends,
00:15:45par criminel.
00:15:46Très documenté.
00:15:46Très documenté.
00:15:47C'est un tableau formidable
00:15:49qui est un des plus grands tableaux
00:15:51de l'histoire
00:15:52et du romantisme pictural.
00:15:55C'est un peu éloigné de Rodez.
00:15:56J'aimerais qu'on revienne à Rodez,
00:15:58non pas dans la nuit du 19 au 20 mars,
00:16:00la nuit où ce pauvre Faldès
00:16:01a perdu la vie,
00:16:02dans des circonstances
00:16:03qui restent aujourd'hui encore mystérieuses
00:16:04parce que non seulement
00:16:06vous écrivez un roman
00:16:07qu'on pourrait dire historique,
00:16:08mais vous écrivez aussi un roman
00:16:09qui pourrait presque être
00:16:11un roman policier.
00:16:11C'est une enquête.
00:16:12Et l'enquête n'est pas finie.
00:16:14Et peut-être qu'on y travaille encore.
00:16:16Certains y travaillent encore.
00:16:17Oui.
00:16:18Mais est-ce qu'on peut revenir à Rodez
00:16:19et voir ce qui se passe
00:16:20dans les jours qui suivent
00:16:23et arriver jusqu'à ce fameux procès
00:16:25qui est quand même
00:16:25un exemple de procès
00:16:29bâclé,
00:16:31c'est peu de le dire,
00:16:32incroyable procès ?
00:16:34C'est un procès
00:16:36qui est incroyable,
00:16:37qui prouve quand même
00:16:38qui prouve à la fois
00:16:41l'incurie de la justice
00:16:43et la peur aussi peut-être
00:16:45des magistrats instructeurs à Rodez
00:16:47d'aller contre l'opinion publique.
00:16:48L'opinion publique,
00:16:49c'est fixer
00:16:50deux coupables principaux,
00:16:54des amis
00:16:54d'anciens procureurs.
00:16:56Ils pensent qu'ils aient eu des coupables,
00:16:57mais en même temps,
00:16:58le crime est tellement criminel
00:17:01de, comme je dirais,
00:17:02de jouer,
00:17:03ce n'est pas un crime raffiné.
00:17:05C'est presque crapuleux.
00:17:06Voilà, c'est crapuleux.
00:17:08Ils ne comprennent pas.
00:17:09Ils ne comprennent pas.
00:17:10Et l'instruction, au fond,
00:17:15ne veut pas contrarier
00:17:16l'opinion publique.
00:17:17Mais il y a pire.
00:17:18Il y a pire.
00:17:19C'est qu'on ne trouve pas,
00:17:22semble-t-il,
00:17:23trace d'un grand complot
00:17:24ourdi par des personnalités
00:17:26royalistes de premier plan.
00:17:28Donc, on ne tient pas
00:17:29une affaire politique.
00:17:30Mais il y a quand même
00:17:30cette méfiance de dire
00:17:31que c'est peut-être
00:17:32un crime politique.
00:17:34Et par conséquent,
00:17:35le parquet va dire,
00:17:40bon, c'est un peu presque
00:17:42Ponce Pilate, quoi.
00:17:43Il dit, bon,
00:17:44il est peut-être innocent,
00:17:45mais on ne va pas aller
00:17:46contre l'opinion publique
00:17:47de tout le monde
00:17:50on va le condamner.
00:17:52Et donc,
00:17:52les pouvoirs judiciaires
00:17:54à Rodès,
00:17:55j'oublie cette comparaison
00:17:57qui est totalement inopportune,
00:17:58pardonnez-moi.
00:17:59Mais le pouvoir politique,
00:18:03au fond,
00:18:03ça les arrange.
00:18:05Et ils vont tout faire
00:18:06pour que les innocents,
00:18:07c'est évidemment des innocents,
00:18:09pour qu'ils soient condamnés
00:18:11et exécutés
00:18:12pour boucler l'affaire,
00:18:14autrement dit,
00:18:15pour boucler
00:18:16toutes les rumeurs
00:18:17qui continuent à persister
00:18:19et qui pourraient
00:18:20laisser soupçonner
00:18:21un crime politique.
00:18:22Donc,
00:18:22le crime politique
00:18:23n'est pas avéré,
00:18:24mais ce qui est avéré,
00:18:25et on le voit
00:18:26par les correspondances
00:18:27entre le ministère
00:18:28de la Justice
00:18:28et les magistrats
00:18:30de l'Aveyron
00:18:31et même après du Tarn,
00:18:32quand il y a
00:18:33un deuxième procès
00:18:34qui va avoir lieu
00:18:34quelques mois plus tard
00:18:35parce qu'il y a eu
00:18:35des vices de forme
00:18:36dans le premier procès,
00:18:37on les voit
00:18:38qui donnent
00:18:39des instructions
00:18:39pour faire à tout prix
00:18:40condamner ces innocents,
00:18:42pour boucler l'affaire
00:18:43et qu'on n'en parle plus
00:18:44et qu'il n'y ait plus
00:18:45ce soupçon
00:18:46qui est peut-être fondé,
00:18:47d'ailleurs.
00:18:48On n'en sait rien.
00:18:49Et c'est ça
00:18:50qui rend cette affaire
00:18:51déchirante.
00:18:53Déchirante !
00:18:54C'est de voir
00:18:54comment
00:18:55la manipulation
00:18:57des témoins,
00:18:58le chantage,
00:19:00tous les procédés
00:19:02sont utilisés
00:19:03par la justice
00:19:04pour les faire condamner.
00:19:05Il y a un procureur
00:19:07assistant
00:19:08qui n'est pas convaincu
00:19:09tout à fait
00:19:10de la culpabilité
00:19:11des prévenus
00:19:13et le procureur
00:19:14responsable
00:19:16lui dit
00:19:16« Cher ami,
00:19:16écoutez,
00:19:17je pense qu'autant
00:19:18vous retirer de l'affaire,
00:19:19vous n'avez pas
00:19:19la conviction
00:19:20qu'il faut
00:19:21pour supposer
00:19:22que je tombe malade,
00:19:22alors vous ne pourriez
00:19:23pas m'aider
00:19:25pour me remplacer
00:19:26parce que je vous sens
00:19:27un peu flottant. »
00:19:28Évidemment qu'il était flottant,
00:19:29il avait regardé
00:19:29l'affaire de près,
00:19:30il y avait des incohérences,
00:19:32aucun témoignage direct,
00:19:34rien que des rumeurs,
00:19:35des flottements,
00:19:36c'est monsieur un tel
00:19:36qui a vu un tel
00:19:37qui a vu monsieur un tel
00:19:38qui m'a dit que
00:19:38c'était à peu près ça
00:19:39l'instruction.
00:19:40Donc c'est hallucinant.
00:19:42Et c'est ça
00:19:42qui va faire
00:19:44ce climat
00:19:45d'inquiétude
00:19:46qui va
00:19:47hanter
00:19:49le siècle,
00:19:51je crois.
00:19:52Et Latouche
00:19:53s'y intéresse aussi
00:19:55parce que
00:19:56comme
00:19:56il a déjà
00:19:58ce tempérament romantique
00:19:59qui va se développer
00:20:00plus tard,
00:20:01il voit dans cette affaire,
00:20:02et là on va parler
00:20:03si vous voulez
00:20:04d'une femme
00:20:06qui devient
00:20:06l'héroïne du procès,
00:20:08il voit dans cette affaire
00:20:10et dans les prévenus
00:20:11et surtout
00:20:12dans l'un des témoins
00:20:13dont on peut peut-être
00:20:14dire un mot,
00:20:15il voit
00:20:15comme les prémices
00:20:17d'une sorte
00:20:17de roman gothique.
00:20:19C'est-à-dire
00:20:19Il va romancer
00:20:23en fait
00:20:23le récit
00:20:24et les audiences.
00:20:25Il va
00:20:25décrire
00:20:26Rodèze
00:20:27comme une ville
00:20:28fantomatique,
00:20:29gothique,
00:20:29noire.
00:20:30C'est extraordinaire.
00:20:31Le passage
00:20:31qui décrit Rodèze
00:20:32est certainement
00:20:33un de ceux
00:20:33que je préfère.
00:20:34Je l'ai noté ici.
00:20:35Alors j'ai noté juste
00:20:36votre recension à vous,
00:20:37c'est-à-dire qu'il y a
00:20:38de grandes citations
00:20:39de Latouche.
00:20:39Oui, bien sûr.
00:20:40Vous rendez vraiment justice
00:20:41à cet auteur.
00:20:41Grande citation du procès,
00:20:43des minutes du procès.
00:20:44Exactement.
00:20:44Mais vous faites
00:20:46en quelques lignes,
00:20:47je vais lire rapidement.
00:20:48Le rouer isolé
00:20:49est volontairement
00:20:50tenu à l'écart du royaume.
00:20:51Des routes abominables
00:20:53pour parvenir à Rodèze.
00:20:54Aucun relais de poste
00:20:55dans le département.
00:20:56Les rues de la préfecture
00:20:57envahies par des troupeaux
00:20:58de cochons
00:20:58qui viennent pètre
00:20:59entre les pavés.
00:21:00Une puanteur généralisée
00:21:01par toute la ville.
00:21:02Des femmes peu favorisées
00:21:03par la nature,
00:21:04sans grâce
00:21:05et des hommes
00:21:05aux sourcils épais
00:21:06et surtout des nuées
00:21:08de chauves-souris
00:21:08en plein jour
00:21:09dans les rues
00:21:09à se demander
00:21:11de quoi ou de qui
00:21:12Latouche se moquait.
00:21:13C'est très, très drôle.
00:21:15Ces descriptions à lui,
00:21:17vous les découvrirez
00:21:18dans le livre,
00:21:18elles sont extraordinaires.
00:21:20Parce qu'il veut faire
00:21:21de Rodèze
00:21:21quand il la décrit
00:21:23pour ses lecteurs,
00:21:24il veut faire de Rodèze
00:21:25le décor d'un roman
00:21:26comme les Anglais
00:21:28avaient fait des romans...
00:21:28Il parle des clochers gothiques,
00:21:29par exemple.
00:21:30Il n'y a pas l'ombre
00:21:30d'un cloché gothique.
00:21:32Évidemment,
00:21:32les habitants de Rodèze,
00:21:34je ne sais pas
00:21:35si tout le monde vous le savait,
00:21:36on les appelle
00:21:36les ruthénois.
00:21:37Les ruthénois, par exemple.
00:21:38Je vous l'apprends
00:21:38si vous ne le savez pas tous.
00:21:39Les ruthénois
00:21:41sont les habitants de Rodèze
00:21:42sont, à juste titre,
00:21:44effarés par ça.
00:21:46Il y a même
00:21:46un petit libelle
00:21:47qui paraît
00:21:47pour protester
00:21:48contre la description
00:21:50complètement funambulée,
00:21:52enfin,
00:21:52abracadambresse,
00:21:53tout ce que vous voulez,
00:21:54de la touche.
00:21:55Et voilà.
00:21:56Et puis,
00:21:56c'est là où il va
00:21:57quasiment tomber amoureux
00:21:59d'une femme.
00:22:00Ce qui est fascinant
00:22:01chez la touche,
00:22:02c'est qu'au départ,
00:22:02il est, comme vous le dites,
00:22:04envoyé spécial à Rodèze,
00:22:05mais un envoyé spécial à Rodèze
00:22:07qui ne met pas
00:22:07les pieds à Rodèze.
00:22:08Non, non.
00:22:08Il ne va pas tout de suite.
00:22:09Donc, il reçoit
00:22:10les minutes du procès.
00:22:11Voilà.
00:22:12Il les retranscrit,
00:22:13il les écrit,
00:22:13il les organise.
00:22:13Il les monte,
00:22:14il efface le ski-opat.
00:22:15C'est intéressant.
00:22:16Il trouve un éditeur
00:22:16qui, lui,
00:22:17se dit la bonne affaire,
00:22:19qui publie les...
00:22:20Le procès,
00:22:21tel qu'il paraît
00:22:22à raison de 2-3 livraisons
00:22:24en moyenne par semaine,
00:22:26ça arrache par...
00:22:27Tout le monde l'arrache.
00:22:28Tout le monde veut suivre
00:22:29quasiment en direct ce procès.
00:22:31Parce qu'on a tout.
00:22:32Les témoignages,
00:22:33les dialogues entre les...
00:22:35C'est vraiment
00:22:35la sténographie,
00:22:37les minutes du procès intégral,
00:22:38que Latouche fait paraître
00:22:40et parfois,
00:22:41parfois,
00:22:43il fait des commentaires
00:22:43imaginaires sur la ville
00:22:45pour créer ce climat
00:22:47d'atmosphère,
00:22:48oui, je peux dire,
00:22:49gothique ou pré-romantique.
00:22:50Latouche est un homme
00:22:51qui a contribué
00:22:52à faire connaître Walter Scott,
00:22:54qui a traduit...
00:22:55Il a lu un rat qui...
00:22:55Oui, qui a joué un rôle
00:22:56de passeur,
00:22:58je n'en ai pas parlé,
00:22:58mais considérable aussi.
00:23:00Il a traduit Schiller,
00:23:02il a fait connaître
00:23:03le romantisme allemand,
00:23:04connaître les romans gothiques
00:23:06anglais de la fin
00:23:07du 18e siècle,
00:23:08etc.
00:23:09Il joue un rôle
00:23:09déterminant aussi
00:23:11de passeur de culture
00:23:12pour ce climat
00:23:15qui va permettre
00:23:16l'éclosion
00:23:16du romantisme français.
00:23:18Et donc,
00:23:19vous le disiez,
00:23:19dans ce procès,
00:23:20va apparaître
00:23:21tout à coup
00:23:21dans les débats
00:23:22une créature incroyable,
00:23:24une ruthénoise,
00:23:26une jeune femme
00:23:27de la bonne société.
00:23:29Son père est procureure
00:23:31de la cour pré-votale.
00:23:33Exactement.
00:23:33en Jaleron,
00:23:35si ma mémoire est bonne.
00:23:36Parfaitement.
00:23:37Elle s'appelle
00:23:37Clarisse Manzon,
00:23:38c'est une femme mariée
00:23:39mais qui vit seule.
00:23:40Elle s'est un peu éloignée
00:23:41de son mari,
00:23:41elle le trouve un peu
00:23:42en milieu, je crois.
00:23:43Il préfère la campagne,
00:23:44il préfère la ville.
00:23:46Elle élève donc
00:23:47seule son enfant
00:23:48et elle a
00:23:49beaucoup,
00:23:50beaucoup,
00:23:51beaucoup d'imagination.
00:23:52C'est plus que ça.
00:23:56C'est une femme
00:23:57qui va être
00:23:58en fait
00:23:58la clé du procès
00:23:59parce que
00:24:01toute la ville
00:24:02part du procès.
00:24:04Elle est
00:24:04un peu fragile
00:24:06psychiquement.
00:24:07Elle dira un jour
00:24:07au préfet
00:24:10de l'Aveyron
00:24:11qu'elle voit
00:24:11je suis presque aliénée.
00:24:13Elle dira.
00:24:14Parfois,
00:24:15elle a des éclairs
00:24:15de lucidité
00:24:15où elle se rend compte
00:24:16du désordre
00:24:17de son esprit.
00:24:18Mais elle veut absolument
00:24:19faire son intéressante
00:24:20ou attirer la lumière.
00:24:22Elle est courtisée
00:24:23par un officier
00:24:25du point
00:24:26qui n'a aucun intérêt.
00:24:28Et tout le monde
00:24:29parle du procès
00:24:30et on dit
00:24:32oui,
00:24:32c'est passé
00:24:33dans cette fameuse maison
00:24:34qu'on appelle
00:24:34la maison bancale
00:24:35qui est formidable.
00:24:35La maison s'appelle
00:24:36la maison bancale.
00:24:37C'est une sorte
00:24:38de maison
00:24:39un peu plus ou moins
00:24:40mal famée
00:24:43où on fait
00:24:43un peu de contrebande,
00:24:44etc.
00:24:44Et je ne sais pas pourquoi
00:24:44toute l'imagination
00:24:46se fixe sur cette maison bancale
00:24:47où on pense
00:24:47qu'on a égorgé
00:24:48le malheureux Foualdès.
00:24:49Et tout le monde se dit
00:24:52mais il y avait peut-être
00:24:52des témoins
00:24:53on parle d'une femme
00:24:53qui était là.
00:24:55Il lui dit
00:24:55le militaire
00:24:56on se demande
00:24:56qui c'est
00:24:56on parle de Mme X
00:24:57ou Mme Y
00:24:58et alors la malheureuse
00:24:59Clarisse
00:24:59et pourquoi ce ne serait pas moi
00:25:01alors ?
00:25:02Et avancez-vous
00:25:03et le militaire
00:25:05va aussitôt
00:25:06le soir même
00:25:07aller voir ses officiers
00:25:09et dire
00:25:09mon amie
00:25:10Mme Clarisse
00:25:11m'a dit
00:25:11qu'elle était
00:25:12dans la maison bancale.
00:25:13Aussitôt
00:25:13elle est convoquée
00:25:14et elle est le centre
00:25:15de tout le monde.
00:25:16Tout le monde
00:25:17la voit,
00:25:18l'éclair,
00:25:18elle prend la lumière
00:25:19si je puis dire
00:25:20et elle est
00:25:22au comble du bonheur.
00:25:23Et donc
00:25:25le juge
00:25:27le président du tribunal
00:25:29va jusqu'à lui dire
00:25:30quand elle
00:25:30quand elle vient
00:25:31comme témoin principal
00:25:32c'est quand même
00:25:33Madame
00:25:34vous êtes l'ange
00:25:35de la providence
00:25:36par laquelle peut-être
00:25:37les présumés coupables
00:25:39vont être condamnés.
00:25:40Car même le juge
00:25:41se rend compte
00:25:41qu'il n'y a aucun témoin
00:25:42qui peut affirmer
00:25:43que les autres
00:25:43ont tué.
00:25:45Donc
00:25:45sauf Mme
00:25:46Mme Bancal
00:25:48qui
00:25:48on lui dit
00:25:49si vous ne dites pas
00:25:49que le crime
00:25:50a eu lieu chez vous
00:25:50vous serez guillotiné.
00:25:52S'il vous le dit
00:25:52que c'est chez vous
00:25:53on vous attrae la vie
00:25:54sauf des chantages
00:25:55comme ça.
00:25:56Il y en a d'autres
00:25:57bien sûr.
00:25:58Mme Bancal
00:25:58le crime
00:26:00se serait passé
00:26:00chez elle
00:26:01et elle dit
00:26:01qu'elle ne sait rien.
00:26:02Bien sûr.
00:26:03Elle est là
00:26:03mais elle n'a rien vu
00:26:04et elle entend rien.
00:26:04Donc
00:26:05cette femme
00:26:06elle est très
00:26:06heureuse
00:26:09d'attirer les lumières
00:26:10mais
00:26:12au moment
00:26:12du premier procès
00:26:13elle se rétracte
00:26:15elle dit
00:26:15non non
00:26:15je n'y étais pas
00:26:16c'est pas vrai
00:26:16mais elle crée
00:26:17des mensonges
00:26:18hallucinants.
00:26:19Voilà
00:26:19et il y a
00:26:19je vois ici
00:26:20debout
00:26:23derrière tout le monde
00:26:25mon ami Raphaël Gaillard
00:26:26à qui j'avais
00:26:26un jour
00:26:27posé la question
00:26:28en tant que grand psychiatre
00:26:30qu'il est
00:26:30et je lui avais dit
00:26:31mais comment caractériser
00:26:32une personne
00:26:33comme cette femme
00:26:35et sa réponse
00:26:36j'espère que je ne le trahis pas
00:26:37ses paroles
00:26:38ses propos
00:26:39ses réponses
00:26:40étaient
00:26:41on aurait peut-être parlé
00:26:43au
00:26:43ton charcot
00:26:44de l'hystérie
00:26:45mais
00:26:45c'est ce qu'on appelle
00:26:46en psychiatrie
00:26:47m'a-t-il dit
00:26:48une personnalité
00:26:48histrionique
00:26:49c'est une personnalité
00:26:50c'est-à-dire
00:26:50qui veut attirer la lumière
00:26:51qui est prise
00:26:51entre des injonctions
00:26:52contradictoires
00:26:53et qui s'évanouit réellement
00:26:56qui veut attirer la lumière
00:26:57mais au dernier moment
00:26:57elle ne supporte pas
00:26:59quand on la met en face
00:27:01de ses contradictions
00:27:02alors vous y étiez
00:27:02vous y étiez pas
00:27:03elle s'évanouit
00:27:05elle s'évanouit
00:27:06mais s'évanouit réellement
00:27:07c'est pas du tout
00:27:07du chiquet
00:27:08donc cette femme
00:27:09fascine tout le monde
00:27:11fascine tout le monde
00:27:12mais au point
00:27:14qu'entre les deux procès
00:27:16il y a un premier procès
00:27:17à Rodez
00:27:18puis un deuxième
00:27:19à la fin du premier procès
00:27:21Latouche
00:27:23qui est quand même
00:27:23fascinée par ce personnage
00:27:25qui est une jeune femme
00:27:25qui n'est pas
00:27:26qui n'est pas sans grâce
00:27:28contrairement à la description
00:27:29non non
00:27:29qui est assez gracieuse
00:27:30jeune
00:27:31elle a 30 ans
00:27:32elle a l'âge de Latouche
00:27:32en gros
00:27:33elle a 32 ans
00:27:35elle est
00:27:36pas désagréable
00:27:37et
00:27:38il ne mesure pas bien
00:27:40il a le sentiment
00:27:42que peut-être
00:27:43elle est manipulée
00:27:44par les uns
00:27:44par les autres
00:27:45qu'elle est un esprit
00:27:46sans doute fragile
00:27:47mais manipulé
00:27:48par d'autres
00:27:49et il est séduit
00:27:51par cette femme
00:27:52et il va
00:27:54aller à Rodez
00:27:54le procès
00:27:56à peine fini
00:27:56c'est là où il va faire
00:27:57cette description
00:27:57absolument ridicule
00:27:59de Rodez
00:27:59ou remarquable
00:28:00parce qu'il brosse
00:28:02le décor
00:28:02d'un roman
00:28:03et il va la voir
00:28:05cette femme
00:28:06parce qu'à l'époque
00:28:06à la fin du procès
00:28:07excédée par ces revirements
00:28:09où elle disait
00:28:10oui je les ai vus
00:28:11mais non c'est pas eux
00:28:12mais non c'était une autre femme
00:28:13mais enfin bon
00:28:14enfin j'y étais
00:28:15mais j'y étais pas
00:28:16finalement excédée
00:28:17à la fin du procès
00:28:18où elle n'a pas
00:28:18catégoriquement dénoncé
00:28:21parce qu'elle ne pouvait pas
00:28:22elle est arrêtée
00:28:24pour essayer de l'intimider
00:28:25en quelque sorte
00:28:26elle est arrêtée
00:28:27et il va la voir
00:28:27dans sa prison
00:28:28et alors là
00:28:29on est au comble
00:28:30du romanesque
00:28:31c'est à dire
00:28:31qu'une héroïne innocente
00:28:33dans une prison
00:28:34qu'il décrit
00:28:35comme une geôle
00:28:35sous un temps d'humidité
00:28:36alors que dans une chambre
00:28:38dans un couvent
00:28:39qui est plutôt pas mal
00:28:40il lui fait écrire
00:28:43un poème
00:28:44sur les murs
00:28:45et en fait
00:28:46ce poème
00:28:47pas du tout
00:28:47c'est lui
00:28:47qui l'a écrit
00:28:48c'est une copie
00:28:49d'un poème
00:28:49d'une élégie
00:28:51d'un poète Florian
00:28:52sur Marie-Stoir
00:28:53alors c'est n'a rien
00:28:54la malheureuse
00:28:54elle ne connaissait même pas
00:28:55Florian
00:28:56ni l'élégie
00:28:57sur Marie-Stoir
00:28:58de Florian
00:28:58mais donc tout est
00:28:59tout est bidon
00:29:00tout est inventé
00:29:01mais ce livre
00:29:02ce livre va avoir
00:29:04alors un succès
00:29:04de librairie
00:29:05vous dites ce livre
00:29:05parce qu'il lui fait
00:29:06écrire ses mémoires
00:29:07il va l'avoir en prison
00:29:10il lui prend des services
00:29:11elle fait mille grâces
00:29:13elle est aguicheuse
00:29:15elle est heureuse
00:29:16elle va avoir
00:29:16une célébrité
00:29:18grâce à lui
00:29:19exceptionnelle
00:29:20il est très content
00:29:21elle est très contente
00:29:22il publie ses mémoires
00:29:24les mémoires
00:29:24de Clarisse Manzon
00:29:25en fait c'est lui la plume
00:29:26il fait une introduction
00:29:27de 25 pages
00:29:28qui ne lui plaît pas
00:29:29finalement
00:29:29parce qu'il prend trop
00:29:30l'importance
00:29:31il voudrait qu'elle soit
00:29:32seule à briller
00:29:34il n'empêche que ce livre
00:29:36est l'un des plus gros
00:29:37succès de librairie
00:29:38de l'époque
00:29:39traduit dans le monde
00:29:40pas dans le monde entier
00:29:41le monde c'est l'Europe
00:29:42disons en gros
00:29:43traduit en Russie
00:29:44traduit en Anglais
00:29:45traduit en Allemand
00:29:45traduit en Italien
00:29:46traduit en Espagnol
00:29:47c'est une star
00:29:49à Saint-Pétersbourg
00:29:50cette réimpression
00:29:51en un an
00:29:52ce qui fait rêver
00:29:52tous les éditeurs
00:29:53et tous les auteurs
00:29:54cette réimpression
00:29:55en un an
00:29:55c'est un récent
00:29:56oui oui
00:29:57c'est incroyable
00:29:58le préfet de l'Aveyron
00:30:01qui a participé au procès
00:30:02qui a raconté
00:30:03ses rencontres
00:30:03avec cette femme
00:30:04qui lui disait
00:30:04des choses invraisemblables
00:30:06quand il revient
00:30:08à Paris
00:30:10pour la fin de l'année
00:30:121817-1818
00:30:14il me dit
00:30:15j'étais arrêté
00:30:16à tous les relais de poste
00:30:16par tous les responsables
00:30:18des relais
00:30:19alors Mme Manzon
00:30:20elle est coupable
00:30:20ou non
00:30:21vous l'avez vu
00:30:21qu'est-ce que vous en pensez
00:30:22et quand il va voir Louis XVIII
00:30:23alors Mme Manzon
00:30:24mais c'est pas du tout lui
00:30:26pour des raisons politiques
00:30:26c'est comme une midinette
00:30:28qui veut savoir
00:30:28comment elle était
00:30:29alors elle a vraiment
00:30:30tué quelqu'un
00:30:30non non Monsire
00:30:31je pense pas
00:30:32qu'elle soit venue
00:30:32dans la maison bancale
00:30:33pour qui que ce soit
00:30:34lui répond prudemment
00:30:36le préfet
00:30:37c'est quelqu'un
00:30:39d'incroyable
00:30:40cette femme
00:30:40et
00:30:41curieusement
00:30:42elle vole la vedette
00:30:45à Faldès
00:30:47qui est un personnage
00:30:48relativement
00:30:48sans grand intérêt
00:30:50Faldès
00:30:51mais elle vole
00:30:52la vedette
00:30:53au coupable
00:30:55ou au faux coupable
00:30:56et ce qui est très troublant
00:30:58c'est que
00:30:58et c'est ça qui me trouble
00:30:59beaucoup dans cette affaire
00:31:00Faldès
00:31:00c'est que son père
00:31:01est un procureur
00:31:03de la restauration
00:31:04de la cour
00:31:05et
00:31:06quand il voit
00:31:07il doit connaître sa fille
00:31:09il doit savoir
00:31:09qu'elle a une tête
00:31:10un peu esservelée
00:31:11pour être prudent
00:31:12et
00:31:13il devrait
00:31:15il pousse
00:31:17sa fille
00:31:18à dire
00:31:19qu'elle était dans la maison
00:31:20donc il pousse sa fille
00:31:21à la compromettre
00:31:22parce que c'était quand même
00:31:23compromettant
00:31:23d'arriver dans une maison
00:31:25même si on l'a tiré de force
00:31:26parce qu'elle passait dans la rue
00:31:27ça me paraît un peu gros
00:31:28et
00:31:29pourquoi veut-il
00:31:31la pousser
00:31:31à témoigner
00:31:32parce que je pense
00:31:33que comme
00:31:34magistrat
00:31:35de la restauration
00:31:36il veut qu'on liquide
00:31:37ce procès
00:31:38et il dit
00:31:38si ma fille
00:31:39peut dire
00:31:40désigner les coupables
00:31:41terminé
00:31:42l'affaire est réglée
00:31:43on les guillotise
00:31:44on n'en parle plus
00:31:44et la fille
00:31:46est quand même plus
00:31:47plus tragiquement malade
00:31:49mais pas
00:31:50elle n'est pas cohérente
00:31:52elle dit oui
00:31:54puis après
00:31:54elle se reprend
00:31:55non je ne peux pas
00:31:55quand même le dire
00:31:56alors elle dit le contraire
00:31:56mais ce qui est intéressant
00:31:58dans cette affaire
00:31:58c'est pourquoi
00:31:59le père de cette femme
00:32:01la presse
00:32:02là aussi
00:32:04si tu ne dis pas
00:32:05que tu y étais
00:32:06parce que le militaire
00:32:07l'a dit
00:32:08si tu dis le contraire
00:32:09du militaire
00:32:09tu bafous l'honneur
00:32:11de l'armée
00:32:12parce que l'armée
00:32:13un militaire a dit
00:32:14qu'il t'a entendu
00:32:16dire que tu y étais
00:32:17si tu dis qu'il n'y est pas
00:32:18le militaire
00:32:20disait la vérité
00:32:21quand il t'a entendu
00:32:22ça sera l'armée
00:32:23qui sera bafouée
00:32:24enfin des arguments
00:32:25et il lui dit aussi
00:32:26si tu ne dis pas
00:32:27que tu as vu
00:32:29les coupables
00:32:29les deux hommes
00:32:30les amis proches
00:32:32de
00:32:32Jozion et Bastille
00:32:33qui s'appellent Bastille
00:32:34et Jozion
00:32:34si tu ne le dis pas
00:32:36tu ne reverras jamais
00:32:37ton enfant
00:32:37tu ne reverras
00:32:38donc on lui fait
00:32:39un chantage
00:32:40ah oui
00:32:40non mais
00:32:40tous les moyens
00:32:41sont bons
00:32:43est-ce que la clé
00:32:43de l'affaire
00:32:44ne serait pas
00:32:45ce fameux
00:32:46enjahlerant
00:32:47justement
00:32:47peut-être
00:32:48peut-être
00:32:49en tout cas
00:32:49c'est l'homme
00:32:51le plus
00:32:52troublant
00:32:53qui soit
00:32:54parce que
00:32:55c'est l'homme
00:32:55qui va jusqu'à
00:32:57comment dire
00:32:58déconsidérer
00:32:59moralement sa fille
00:33:00en la forçant
00:33:01à dire
00:33:01qu'elle s'est retrouvée
00:33:02dans sa maison
00:33:02de mauvais lieu
00:33:03même si elle n'a pas tué
00:33:04tout le monde le sait
00:33:04donc c'est une affaire
00:33:07vraiment passionnante
00:33:08je trouve
00:33:09cette affaire
00:33:09Valdez
00:33:10et pour vous donner
00:33:12un autre exemple
00:33:12de manipulation
00:33:13de la justice
00:33:14dans le deuxième procès
00:33:16il était question
00:33:17dans le récit
00:33:19fantasmatique
00:33:21de ce crime
00:33:22que les assassins
00:33:23c'est-à-dire
00:33:23des contrebandiers
00:33:24des gens
00:33:26un peu
00:33:26des bafons
00:33:30si je puis dire
00:33:30de Rodez
00:33:31accompagnés
00:33:33par les deux instigateurs
00:33:34bourgeois
00:33:36confortables
00:33:37qui était Bastide
00:33:37qui était le beau frère
00:33:38de Fualdez
00:33:40et Josion
00:33:42aurait égorgé l'homme
00:33:44puis avec des brancards
00:33:45aurait descendu
00:33:46le corps sanguinolent
00:33:48enveloppé
00:33:48dans une couverture
00:33:49jusqu'au bas
00:33:50de l'Aveyron
00:33:50par un chemin
00:33:51qui est décrit
00:33:52avec des plans
00:33:52j'ai fait ce chemin
00:33:54et c'est en pleine nuit
00:33:56une nuit
00:33:57où il n'y avait pas
00:33:57de lune
00:33:58c'était une nuit sombre
00:33:59en plein jour
00:34:00j'ai failli
00:34:01me casser la gueule
00:34:01quatre fois
00:34:02et ma femme
00:34:04n'a jamais osé
00:34:05à juste titre
00:34:06pour l'emprunter
00:34:07un sentier à pic
00:34:08il est impossible
00:34:10et ni l'un ni l'autre
00:34:11vous ne portiez
00:34:11de corps
00:34:12sans vie
00:34:12en pleine nuit
00:34:13porter
00:34:14un cadavre
00:34:16alors que
00:34:17ceux qui ne tenaient pas
00:34:18les brancards
00:34:20avaient des fusils
00:34:21d'après les témoins
00:34:22donc sans lumière
00:34:24c'est extravagant
00:34:25or pour le deuxième procès
00:34:27ils ont déniché
00:34:28je ne sais pas comment
00:34:29il n'avait jamais témoigné
00:34:31au premier procès
00:34:32un apprenti meunier
00:34:33qui disait
00:34:35qu'il avait pêché
00:34:36un peu
00:34:36de manière clandestine
00:34:38dans l'Aveyron
00:34:39cette nuit là
00:34:39et on lui a fait dire
00:34:41que
00:34:42quand il était remonté
00:34:44après ça
00:34:45il aurait croisé
00:34:46le cortège chouineb
00:34:48il serait caché
00:34:49à 100 mètres
00:34:50et ils l'auraient tous
00:34:51vus
00:34:51entendus
00:34:52reconnus
00:34:53malgré la noix
00:34:54quelque chose
00:34:54invraisemblable
00:34:55et
00:34:56après coup
00:34:58il a reconnu
00:35:00qu'en fait
00:35:00il n'avait rien vu du tout
00:35:01c'était absolument pas
00:35:02on lui avait forcé
00:35:04à le dire
00:35:04mais il l'avait accepté
00:35:05parce que
00:35:06c'était un jeune homme
00:35:08qui n'avait jamais
00:35:09quitté Rodez
00:35:09de sa vie
00:35:10et l'idée
00:35:10qu'on lui paye
00:35:11un voyage
00:35:12pour aller au deuxième procès
00:35:13qui se tenait
00:35:14à Albi
00:35:14c'est à dire
00:35:15une ville magnifique
00:35:16extravagante
00:35:17lointaine
00:35:17à 60 kilomètres
00:35:20de Rodez
00:35:22c'était
00:35:23le voyage
00:35:24de sa vie
00:35:24et donc
00:35:25pour le plaisir
00:35:26de faire ce voyage
00:35:27à Rodez
00:35:27il a accepté
00:35:28de dire
00:35:28oui oui je les ai vus
00:35:29je les ai vus
00:35:29alors qu'il n'avait rien vu du tout
00:35:30mais on lui dit
00:35:31mais pourquoi
00:35:31vous n'avez pas
00:35:32à témoigner au premier procès
00:35:34vous auriez dû le faire
00:35:34au premier procès
00:35:35ah oui mais j'avais peur
00:35:36qu'ils se mangent de moi
00:35:37je lui dis
00:35:38c'est pas plus au premier
00:35:39qu'au deuxième
00:35:39ils étaient sous les fers
00:35:41arrêtés en prison
00:35:42ça ne tenait pas debout
00:35:43et après il a reconnu
00:35:44que c'était pour faire
00:35:45le voyage à Albi
00:35:46et tout est de cette farine là
00:35:50tous les témoins
00:35:50sont à peu près
00:35:50de cette acadie
00:35:52tous les témoins
00:35:53et ils sont très très nombreux
00:35:54non
00:35:55les témoins vraiment
00:35:56vraiment compromettants
00:35:57ils étaient 4 ou 5
00:35:59et surtout les gens
00:35:59les gens du coin
00:36:00il y avait un idiot du village
00:36:01bon ça c'était
00:36:02il n'a rien compris
00:36:03il riait bêtement
00:36:05sans rien comprendre
00:36:07à ce qui s'est passé
00:36:07mais les autres
00:36:08non non
00:36:09les autres
00:36:10on les a forcés
00:36:12et tous ceux
00:36:13qui n'ont pas été guillotinés
00:36:14évidemment
00:36:14tous ont dit
00:36:16après coup
00:36:18je l'ai fait
00:36:20parce qu'on m'a fait
00:36:21du chantage
00:36:21on m'a offert
00:36:22un voyage
00:36:23et même
00:36:24la pauvre Clarisse
00:36:25qui est morte
00:36:26je ne sais pas si
00:36:26elle est morte jeune
00:36:28je ne sais pas
00:36:29si ce type d'infection
00:36:32entraîne une mort
00:36:35parce que
00:36:35après le procès
00:36:37elle va avoir
00:36:38une vie très triste
00:36:39parce qu'elle veut
00:36:40toujours avoir la vedette
00:36:40donc elle s'écrit
00:36:41de fausses lettres
00:36:41de menace
00:36:42par exemple
00:36:42elle écrit des fausses
00:36:43lettres de menace
00:36:44pendant le procès
00:36:44en disant
00:36:45voilà
00:36:46elle les montre
00:36:47au procureur
00:36:48voilà on veut
00:36:49ma mort
00:36:49regardez
00:36:50on me menace de mort
00:36:51si je ne dis pas
00:36:51que ceci
00:36:52ou si je sois cela
00:36:53et c'est seulement
00:36:54à la fin du 19ème siècle
00:36:56que des graphistes
00:36:57ont regardé l'écriture
00:36:59et ont dit
00:36:59c'est de l'écriture
00:37:00de madame Manzon
00:37:00c'est évident
00:37:01donc elle faisait
00:37:01des fausses lettres
00:37:02pour montrer un peu
00:37:03son dérèglement psychique
00:37:05mais cette femme
00:37:07peu de temps
00:37:09avant sa mort
00:37:10elle va
00:37:10un
00:37:11se confesser
00:37:12parler à un prêtre
00:37:13parler à des amis
00:37:14et dire
00:37:15je n'ai jamais été
00:37:16de ma vie
00:37:16dans la maison bancale
00:37:17et là
00:37:18peut-être
00:37:19on peut la croire
00:37:19parce qu'elle meurt
00:37:20elle fait cette confession
00:37:22quelques moments
00:37:23avant sa mort
00:37:23et alors qu'elle est retombée
00:37:25dans l'anonymat
00:37:25le silence
00:37:26c'est à dire
00:37:26ce qu'il y a de plus
00:37:27abominable pour elle
00:37:28donc le pire
00:37:29c'est pour ces deux
00:37:30pauvres condamnés
00:37:31absolument innocents
00:37:32qui ont été vivement
00:37:33guillotinés
00:37:34Josillon et Bastille
00:37:35c'est déchirant
00:37:37moi quand j'ai été
00:37:38avec mon épouse
00:37:39à Rodez
00:37:39je me suis surtout
00:37:41intéressé à Bastille
00:37:42le malheureux
00:37:42il avait une
00:37:43comment dire
00:37:45il avait
00:37:45une caractéristique
00:37:46qui était grand
00:37:47il faisait à peu près
00:37:481m90-91
00:37:49qui était quand même
00:37:50très grand
00:37:50surtout pour l'époque
00:37:51et les gens
00:37:54qui prétendaient
00:37:54avoir vu une silhouette
00:37:55près de la maison bancale
00:37:57avaient découvert
00:37:58un homme grand
00:37:58alors ça était
00:38:00forcément lui
00:38:01mais comme la maison bancale
00:38:02il ne s'est probablement
00:38:03rien passé
00:38:03par exemple
00:38:04au deuxième procès
00:38:05on a retrouvé
00:38:07la trace
00:38:07des gens
00:38:08qui étaient locataires
00:38:09dans cette maison
00:38:09qui louaient
00:38:10au-dessus du crime
00:38:11c'était des planches
00:38:12mal jointes
00:38:13et c'était
00:38:15un couple
00:38:16d'un magistrat
00:38:18espagnol
00:38:19en exil
00:38:20peut-être avait-il fui
00:38:20parce qu'il avait été
00:38:21compromis peut-être
00:38:22avec les troupes
00:38:22napoléoniennes
00:38:23au moment de l'invasion
00:38:24de l'Espagne
00:38:25par les troupes
00:38:25de Napoléon
00:38:26c'est possible
00:38:27il était réfugié
00:38:28avec sa femme
00:38:29
00:38:30et il vivait
00:38:30au-dessus
00:38:31et quand on a retrouvé
00:38:33sa trace
00:38:33il a dit
00:38:34il ne s'est rien passé
00:38:35moi je me suis couché
00:38:36à 9h ou 10h du soir
00:38:37je n'ai pas entendu
00:38:38un bruit
00:38:38et alors là
00:38:39on a voulu
00:38:40on a voulu absolument
00:38:42pratiquement l'arrêter
00:38:42et il s'est mis en colère
00:38:44je sais ce que c'est
00:38:46qu'un serment
00:38:46j'ai été magistrat
00:38:47à Madrid
00:38:48je sais ce que c'est
00:38:49ça suffit
00:38:49si je vous dis ça
00:38:50j'ai rien à gagner
00:38:51ni à perdre
00:38:51c'est comme ça
00:38:53le Bastide
00:38:55c'était un homme
00:38:56qui était
00:38:57on a été
00:39:00même se promener
00:39:01avec mon épouse
00:39:01dans la ferme
00:39:03où il avait été
00:39:05où il séjournait
00:39:05la nuit du crime
00:39:06et je ne veux rien dire
00:39:08mais c'est une ferme
00:39:09qui respire
00:39:10le calme
00:39:11la quiétude
00:39:12sa femme
00:39:13ses domestiques
00:39:14tout le monde
00:39:15disait mais non
00:39:16il n'a jamais quitté
00:39:17cette maison
00:39:18il était là cette nuit
00:39:19mais ça ne comptait pas
00:39:22la femme ne comptait pas
00:39:22il avait une défense
00:39:23d'ailleurs très bien construite
00:39:24il était très convaincante
00:39:25oui oui bien sûr
00:39:25il était balayé
00:39:26et après il se promène
00:39:27au petit matin
00:39:29au matin
00:39:29vers 8h du matin
00:39:30il quitte sa maison
00:39:32et à 3 km
00:39:33sur le chemin
00:39:34on y a été aussi
00:39:35il y a la maison
00:39:35d'une femme
00:39:36qui était sa bonne amie
00:39:37qui était une
00:39:38qui s'appelait
00:39:39Charlotte Arlabos
00:39:40je me souviens du nom
00:39:41et qui était
00:39:42une fille gentille
00:39:43qui avait des bontés
00:39:45pour cet homme
00:39:46comme on disait autrefois
00:39:47et qui
00:39:48elle a témoigné
00:39:51on l'a arrêté
00:39:53on l'a mis en prison
00:39:54parce qu'elle témoignait
00:39:55qu'elle avait vu
00:39:56le malheureux Bastide
00:39:58le matin
00:39:59la voir
00:40:00rester peut-être
00:40:00une heure ou deux
00:40:01avec elle
00:40:01je ne sais pas
00:40:02avant de regagner
00:40:03Rodèze
00:40:04mais bien après le crime
00:40:05donc
00:40:06tout était utilisé
00:40:07la menace
00:40:09la menace d'emprisonnement
00:40:10le chantage
00:40:11on destituait
00:40:14les magistrats
00:40:15qui étaient plutôt
00:40:16douteux
00:40:18de la culpabilité
00:40:19ça a été vraiment
00:40:20une
00:40:21la magistrature française
00:40:23c'est pas illustré
00:40:24à ce moment là
00:40:24dans l'aplatissement
00:40:26pour plaire au pouvoir
00:40:28au frontement d'Inie
00:40:29voilà
00:40:29c'est peut-être une tradition française
00:40:30je ne sais pas
00:40:31je crois qu'à l'époque
00:40:33justement
00:40:33quand vous faites ce voyage
00:40:34à Rodèze
00:40:34avec votre épouse
00:40:35vous avez un guide
00:40:36très particulier
00:40:37à qui vous dédiez
00:40:38votre livre
00:40:39oui
00:40:39est-ce qu'on peut dire
00:40:40quelques mots
00:40:40avec plaisir
00:40:42avec plaisir
00:40:43parce que
00:40:44cet homme s'appelle
00:40:45Jacques Miquel
00:40:46quand j'ai été à Rodèze
00:40:47j'avais écrit
00:40:48au directeur
00:40:50du musée
00:40:50de Rodèze
00:40:51le musée FENAC
00:40:52qui est un musée
00:40:52d'histoire
00:40:53de la ville de Rodèze
00:40:54qui avait consacré
00:40:55en 2017
00:40:58donc pour le deuxième
00:40:59bicentenaire
00:41:00de l'affaire
00:41:01une grande exposition
00:41:05sur l'affaire
00:41:06FENAC
00:41:06donc je lui avais écrit
00:41:07un petit mot
00:41:08et à l'homme
00:41:09qui avait été
00:41:09le co-commissaire
00:41:10de l'exposition
00:41:11avec lui
00:41:11qui s'appelait
00:41:12Jacques Miquel
00:41:12je ne les connaissais pas
00:41:13je leur écris
00:41:14comme ça
00:41:14pour leur dire
00:41:15je viens à Rodèze
00:41:15je serais heureux
00:41:16de parvarder avec eux
00:41:17de connaître
00:41:18un peu leurs sentiments
00:41:18et les deux
00:41:19ont été charmants
00:41:20le conservateur
00:41:23qui s'appelait
00:41:24Aurélien Pierre
00:41:24m'a sorti
00:41:25de ses réserves
00:41:27toutes les pièces
00:41:28qui avaient servi
00:41:29à l'exposition
00:41:29dessins, gravures, estampes
00:41:32des condamnés
00:41:33de Madame Manzon
00:41:36et de tout le monde
00:41:37et même une maquette
00:41:38de la maison
00:41:39fameuse maison bancale
00:41:40où on se rendait compte
00:41:41que c'était impossible
00:41:42de tenir à plus de 6 ou 7
00:41:43dans la pièce
00:41:44à un moment donné
00:41:44vu les témoins
00:41:45ils se rendaient 25
00:41:46ce que c'est quand même fou
00:41:47et puis surtout
00:41:49ce Pierre Miquel
00:41:50qui est un homme retiré
00:41:52historien
00:41:53qui c'est curieux
00:41:55mais il s'est passionné
00:41:56depuis des décennies
00:41:57et des décennies
00:41:58pour cette affaire
00:41:59il a tout épluché
00:42:01tout regardé
00:42:02il m'a passé
00:42:05les éditions originales
00:42:06qu'il avait en double
00:42:07des mémoires
00:42:08de Madame Manzon
00:42:10des estampes
00:42:11de l'époque
00:42:11des portraits
00:42:12des prévenus
00:42:14etc
00:42:14et c'est lui
00:42:16qui m'a emmené
00:42:16sur les traces
00:42:17de la fameuse
00:42:19descente
00:42:20soit disant
00:42:21soit disant
00:42:22descente
00:42:22du reste
00:42:23c'est amusant
00:42:23que fera au début
00:42:24du 20ème siècle
00:42:25un écrivain important
00:42:27c'est Maurice Barès
00:42:28Maurice Barès
00:42:29dans un livre
00:42:30qui s'appelle
00:42:30Le voyage à Sparte
00:42:31qui n'a évidemment
00:42:32rien à voir
00:42:32avec l'affaire
00:42:33Svaldez
00:42:33il raconte
00:42:34comme ça
00:42:35à un moment donné
00:42:35qu'il va à Rodez
00:42:37parce qu'il voulait
00:42:37absolument prouver
00:42:38que ce n'était pas
00:42:38les royalistes
00:42:39qui étaient coupables
00:42:40mais sans doute
00:42:40les francs-maçons
00:42:41parce que c'était possible
00:42:42parce que Svaldez
00:42:44faisait partie
00:42:45d'une loge maçonnique
00:42:45qui était là
00:42:46on n'en sait rien
00:42:47mais il raconte
00:42:49qu'il a fait aussi
00:42:50la descente
00:42:50la fameuse descente
00:42:51il l'a fait aussi
00:42:52mais il ne conclut pas
00:42:54que c'était impossible
00:42:54de la faire
00:42:55dans les conditions
00:42:56évoquées par le procès
00:42:58voilà
00:42:59écoutez je ne veux pas
00:43:00vous en dire trop
00:43:00parce que
00:43:01oui c'est ça
00:43:01il faut garder un peu
00:43:03de mystère
00:43:03c'est une affaire mystérieuse
00:43:05qui garde tous ses mystères
00:43:06Jacques Michel
00:43:07le découvrira peut-être
00:43:09un jour
00:43:09Jacques Michel a été
00:43:10pour moi un homme formidable
00:43:11formidable
00:43:12et j'aimerais qu'on revienne
00:43:15justement sur
00:43:15la touche
00:43:16auteur
00:43:17injustement oubliée
00:43:19par l'histoire de la littérature
00:43:20et qu'on reparle
00:43:21peut-être pour clore
00:43:22cette conversation
00:43:22de ce mouvement romantique
00:43:24dont il a ouvert la voie
00:43:25on peut dire
00:43:26si vous voulez
00:43:27pour moi
00:43:28tout a commencé
00:43:28à l'âge de 16 ans
00:43:31où dans ma bibliothèque
00:43:32familiale
00:43:33personnelle
00:43:34dans l'appartement
00:43:35que je continue
00:43:36à occuper d'ailleurs
00:43:37il y avait un livre
00:43:38que j'avais vu
00:43:38j'avais un grand-père
00:43:39qui était médecin
00:43:40et qui était un médecin
00:43:41bibliophile
00:43:42et il y avait
00:43:43une association
00:43:44des médecins bibliophiles
00:43:45dont il était membre
00:43:46et qui avait
00:43:47comme caractéristique
00:43:48chaque année
00:43:49de publier
00:43:49un très beau livre
00:43:50d'un auteur oublié
00:43:55ou d'un titre oublié
00:43:56de la littérature française
00:43:57et il y avait un roman
00:43:58qui s'appelait
00:43:58Fragoletta
00:43:59par Henri de Latouche
00:44:00et je ne connaissais pas
00:44:02ce livre
00:44:02je lis à 16 ans
00:44:04sans rien savoir
00:44:05de cet auteur
00:44:05évidemment
00:44:06je n'étais pas le seul
00:44:06et je lis ce livre
00:44:08avec délectation
00:44:09pour moi
00:44:10c'est un des
00:44:10très bons livres
00:44:12qui marquent
00:44:13l'histoire
00:44:13du romantisme français
00:44:15dans le roman
00:44:16si vous voulez
00:44:17c'est un des grands romans
00:44:18d'une époque romantique française
00:44:19avec des histoires échevelées
00:44:21un peu un côté gothique
00:44:22là aussi
00:44:22avec des conspirateurs
00:44:24des ruines
00:44:24ça se passe à Naples
00:44:25ça se passe à Naples
00:44:26et à Paris
00:44:27en 1799
00:44:28au moment de la république
00:44:30parthénopéenne
00:44:31c'est-à-dire
00:44:31la révolte
00:44:32des napolitains
00:44:34contre les bourbons
00:44:35au Sicile
00:44:36le roi Ferdinand
00:44:37et la reine Marée Caroline
00:44:38qui le chassent
00:44:39aidé par les troupes françaises
00:44:41du général championnet
00:44:42qui aussi libère
00:44:44et bat les troupes
00:44:45royalistes
00:44:46et il y a
00:44:48cette histoire
00:44:49d'un officier français
00:44:50voilà
00:44:50un officier français
00:44:51qui tombe amoureux
00:44:53au cours de ces histoires
00:44:54très échevelées
00:44:56d'une très jeune femme
00:44:58qu'il appelle Fragoletta
00:44:59qui est une mystérieuse
00:45:00jeune femme italienne
00:45:02qui est pour les mouvements
00:45:04semble-t-il
00:45:05de l'émancipation
00:45:07des napolitains
00:45:08et elle-même femme très libre
00:45:10voilà
00:45:10qui est une femme assez libre
00:45:11mais il n'est pas son amant
00:45:13elle s'esquive à chaque fois
00:45:15et quand il revient à Paris
00:45:18peu de temps après
00:45:19il est marqué par cette femme
00:45:20il retrouve sa sœur
00:45:21qui elle a découvert
00:45:22à Paris
00:45:22un jeune garçon
00:45:24absolument magnifique
00:45:25superbe
00:45:25elle lui en parle
00:45:27avec les larmes aux yeux
00:45:28très émue
00:45:29et finalement
00:45:30il les retrouve
00:45:32et c'est la même personne
00:45:33autrement dit
00:45:34c'est un hermaphrodite
00:45:35c'est un hermaphrodite
00:45:37c'est un être
00:45:37qui a les deux sexes
00:45:38qui habite tantôt en homme
00:45:39tantôt en femme
00:45:39et qui exerce
00:45:40la même séduction
00:45:41irréfutable
00:45:42sur le frère
00:45:43ou sur la sœur
00:45:44et ça c'est un thème
00:45:45ce thème
00:45:45très contemporain
00:45:46oui
00:45:47mais c'est un thème
00:45:49qui va marquer
00:45:50le romantisme
00:45:50si vous voulez
00:45:51parce que
00:45:51c'est pas
00:45:52Seraphita
00:45:54de Balzac
00:45:54ou bien
00:45:55Mlle de Maupin
00:45:57ou Chevalier Maupin
00:45:59je ne sais plus jamais
00:45:59si c'est Chevalier Maupin
00:46:00de Théoplie Bautier
00:46:05tout ça
00:46:07c'est des thèmes
00:46:08qui vont être récurrents
00:46:09du thème romantique
00:46:10le thème de la confusion
00:46:11et vous pensez qu'ils avaient lu
00:46:12Fragoletta
00:46:12oui parce que
00:46:13ça a eu beaucoup de succès
00:46:15il y a même une adaptation théâtrale
00:46:16à l'époque
00:46:16ça a été un gros succès
00:46:17il le sort en même temps
00:46:18que Les Chouans
00:46:19de Balzac
00:46:20et Les Chouans
00:46:20ramassent un échec total
00:46:22et La Touche
00:46:24va avoir beaucoup de succès
00:46:25avec son livre
00:46:26ce qui va fâcher
00:46:27beaucoup Balzac
00:46:28bon mais ça c'est un autre problème
00:46:29mais
00:46:29et donc c'est un livre
00:46:31qui a beaucoup marqué
00:46:32oui oui
00:46:32je pense que
00:46:33les romantiques l'avaient lu
00:46:34parce que tout le monde
00:46:34connaissait La Touche
00:46:35c'était un homme de long
00:46:36mais qui
00:46:36qui travaillait dans plein de journaux
00:46:38qui était
00:46:41et puis qui très vite
00:46:42va être mis à l'écart
00:46:43et ça va être très triste
00:46:45il dira de lui
00:46:46à la fin de sa vie
00:46:47j'ai fait comme on l'a dit
00:46:48plus d'auteurs
00:46:49que d'ouvrages
00:46:50alors c'est vrai
00:46:52qu'il est
00:46:53plus connu
00:46:54pour avoir fait
00:46:55beaucoup d'auteurs
00:46:56enfin fait
00:46:58on ne fait pas un auteur
00:46:59on le découvre
00:47:00l'auteur
00:47:00c'est pas lui
00:47:01qui a le talent
00:47:02de Georges Sand
00:47:04ou le centre de la poésie
00:47:06de Marceline Desbanval-Mort
00:47:07ou c'est pas
00:47:08c'est pas Stendhal
00:47:09même s'il était très très lié
00:47:10et dans le journal de Stendhal
00:47:12parfois on voit
00:47:12je viens à Paris
00:47:13voir La Touche
00:47:14parce qu'ils avaient été
00:47:15très très complices
00:47:16La Touche et Stendhal
00:47:17donc c'est pas ça
00:47:19mais il a écrit
00:47:20beaucoup de choses
00:47:21à la fin de sa vie
00:47:23pas toujours très bonnes
00:47:24oui comme vous dites
00:47:24du talent
00:47:25mais pas de génie
00:47:25voilà
00:47:26du talent
00:47:26et pas de génie
00:47:28il rimait
00:47:28avec une facilité déconcertante
00:47:30mais c'était pas Victor Hugo
00:47:31voilà
00:47:32ni Musset
00:47:34ni Lamartine
00:47:34quand on se trouve
00:47:35à la même période
00:47:36c'est difficile
00:47:37et puis en plus
00:47:38c'était un homme
00:47:39qui n'était pas un homme
00:47:39d'équipe
00:47:40c'était un homme seul
00:47:41or pour réussir
00:47:43je sais pas pour réussir
00:47:44mais souvent
00:47:46les grands mouvements littéraires
00:47:47c'est des groupes
00:47:48quoi
00:47:48on vend les surréalistes
00:47:51il n'y a pas
00:47:52que bretons
00:47:53le groupe fait force
00:47:55et fait masse
00:47:56et les romantiques
00:47:57le génie des grands romantiques
00:47:59de la génération des gens
00:48:00nés en 1802
00:48:01alors que La Touche
00:48:02est né en 1785
00:48:04au moment de l'affaire Foualdès
00:48:05ne l'oublions pas
00:48:06Victor Hugo a 15 ans
00:48:07Théophile Gautier a 13 ans
00:48:09et Dumas à peu près le même âge
00:48:11et lui a déjà
00:48:12il est le précurseur
00:48:14mais voilà
00:48:15et les autres
00:48:16à part certains
00:48:17comme Nodier ou d'autres
00:48:19la plupart vont lui tourner le dos
00:48:20sans même lui avoir
00:48:21la moindre gratitude
00:48:22de tout ce qu'il a fait
00:48:23pour lancer cette sensibilité là
00:48:26en tout cas sans la résoudre
00:48:28vous nous faites connaître
00:48:29une affaire chabuleuse
00:48:31des procès absolument ahurissants
00:48:35et vous mettez en majesté
00:48:38ce La Touche
00:48:38donc quelque chose me dit
00:48:40que vous n'en avez pas fini avec lui
00:48:42bien on le dira
00:48:43je vais vous dire la vérité
00:48:44quand j'ai commencé ce livre
00:48:46je vous ai dit
00:48:47c'était La Touche
00:48:48qui m'avait intéressé
00:48:50je voulais faire un livre sur La Touche
00:48:51un livre invendable
00:48:52qui va s'intéresser à un inconnu
00:48:53dont l'oeuvre n'est pas
00:48:55une oeuvre considérable
00:48:57passionnante
00:48:58mais pas considérable
00:48:59donc c'était un peu
00:49:00une entreprise
00:49:02un peu
00:49:02sur le plan commercial
00:49:04du moins suicidaire
00:49:05de quoi décourager
00:49:06un éditeur aussi
00:49:06bon
00:49:07mais je commence
00:49:09à m'intéresser à La Touche
00:49:10donc à l'affaire Fövaldès
00:49:11et j'écris 250 pages
00:49:13rien que sur l'affaire Fövaldès
00:49:14au fond je tiens là un sujet
00:49:15et dans un premier temps
00:49:17j'ai dit
00:49:17je vais continuer un peu
00:49:18La Touche quand même
00:49:19et j'écris encore 130 pages
00:49:20140 pages sur La Touche
00:49:21et après réflexion
00:49:23je me suis dit
00:49:23non ça va pas
00:49:24il faut que j'en reste
00:49:27le vrai sujet
00:49:28que j'ai abordé
00:49:28dans ce livre
00:49:29c'est l'affaire Fövaldès
00:49:30et de montrer
00:49:31juste simplement
00:49:32comment l'affaire Fövaldès
00:49:34ce crime
00:49:35cette horreur
00:49:36cette injustice
00:49:37ce sentiment d'inquiétude
00:49:39va se distiller
00:49:41dans tout le siècle
00:49:42et va créer
00:49:43va contribuer aussi
00:49:45à créer ce climat
00:49:46d'inquiétude
00:49:47Clarisse Manzon
00:49:48devient la première
00:49:49héroïne gothique
00:49:50de la littérature française
00:49:52quand juste
00:49:54quelques mois
00:49:55à peine
00:49:56après l'affaire
00:49:57Fövaldès
00:49:58La Touche découvre
00:50:00par miracle
00:50:00les brouillons
00:50:01de ce qui va devenir
00:50:02la première édition
00:50:04la première édition
00:50:05des oeuvres de Chénier
00:50:06évidemment
00:50:08l'image
00:50:09de Chénier
00:50:10guillotiné
00:50:11trois jours avant Robespierre
00:50:13c'est pas la même chose
00:50:14que les guillotinés
00:50:15de la restauration
00:50:15bien sûr
00:50:16mais va contribuer
00:50:18à donner cette image
00:50:19un peu crépusculaire
00:50:20sanglante
00:50:21injuste
00:50:22inquiète
00:50:22au siècle
00:50:23et c'est ça
00:50:25qui m'intéressait aussi
00:50:26de montrer comment
00:50:27cette affaire
00:50:28par le retentissement
00:50:29qu'elle a
00:50:29et qui continue
00:50:30de nourrir
00:50:31encore une fois
00:50:32tout l'imaginaire
00:50:32du 19ème siècle
00:50:33c'est ça qui est incroyable
00:50:34dans cette affaire
00:50:35Fövaldès
00:50:35et même au 20ème siècle
00:50:36je sais pas
00:50:39moi il y a
00:50:40en 1975
00:50:42non 87 je crois
00:50:43il y a eu
00:50:44une émission entière
00:50:45de la télévision française
00:50:46de la deuxième chaîne
00:50:48ou de la première chaîne
00:50:49je ne sais plus
00:50:49de Pierre Belmar
00:50:50uniquement sur
00:50:51l'affaire Fövaldès
00:50:51il fait tourner
00:50:52un téléfilm
00:50:53sur l'affaire Fövaldès
00:50:54dans la fiction
00:50:56de l'image
00:50:56inventée
00:50:58de la maison bancale
00:50:59du type égorgé
00:51:00etc
00:51:00le sang
00:51:01le cochon
00:51:01et tout ce qu'on veut
00:51:02et après
00:51:04après le téléfilm
00:51:05qui va séduire
00:51:07parce que Pierre Belmar
00:51:08était quand même
00:51:08l'un des animateurs
00:51:09les plus populaires
00:51:10de la télévision française
00:51:11dans ces années là
00:51:13il va faire un appel
00:51:14à témoins
00:51:14en disant
00:51:15est-ce qu'à Rodez
00:51:16il y a des gens
00:51:17dont les parents
00:51:17les grands-parents
00:51:18les arrières arrières
00:51:19à grands-parents
00:51:19ont entendu parler
00:51:20de cette affaire
00:51:20est-ce que vous avez
00:51:21des documents
00:51:22des témoignages
00:51:23il espère beaucoup
00:51:24résoudre l'affaire
00:51:25le malheureux
00:51:25mais il se ramasse un bide
00:51:27parce que personne
00:51:28personne ne veut témoigner
00:51:30et les ruthénois
00:51:33sont à la fois
00:51:34je ne dirais pas
00:51:35fiers de l'affaire
00:51:36mais ça contribue
00:51:38à les identifier
00:51:40mais en même temps
00:51:41ne font pas
00:51:42un titre de gloire
00:51:43non plus
00:51:43et il n'y a pas de quoi
00:51:44donc les ruthénois
00:51:47ce sont
00:51:47comme les gens
00:51:49de la Lausère
00:51:49sont des taiseux
00:51:50comme on dit
00:51:51donc ça ne marche pas
00:51:53mais il n'empêche
00:51:54que l'idée
00:51:55que la télévision française
00:51:56il y a 50 ans
00:51:58à peine
00:51:59consacre une émission
00:52:00entière
00:52:01à Fualdès
00:52:02à Fualdès
00:52:03qu'en 1950
00:52:04un dramaturge français
00:52:06qui s'appelait Marion
00:52:06je me suis en train de dire
00:52:08son prénom
00:52:09il était assez connu
00:52:10fait une grande
00:52:11pièce de théâtre
00:52:12nouvelle sur Fualdès
00:52:13qui est jouée
00:52:14à l'Odéon
00:52:14non
00:52:16pardon
00:52:16au Vieux Colombier
00:52:17je crois
00:52:18excusez-moi
00:52:18c'est pas la même chose
00:52:19du tout
00:52:19mais ça prouve quand même
00:52:22que cet imaginaire
00:52:24persiste
00:52:25et pas seulement
00:52:27mon ami Michel Zinck
00:52:28qui peut me chanter
00:52:28la balade de Fualdès
00:52:29par cœur
00:52:30et d'ailleurs vous dites
00:52:31à la fin de votre livre
00:52:32et en bonne académicien
00:52:33évidemment
00:52:33vous n'employez pas vous
00:52:34cette expression
00:52:35mais vous dites
00:52:36c'est un cold case
00:52:37ça n'est donc pas un cold case
00:52:40ça n'est pas une affaire
00:52:42froide ou gelée
00:52:44oui une affaire gelée
00:52:45c'est peut-être une affaire dormante
00:52:46non oui c'est vrai
00:52:47parce que vous parliez
00:52:48de la commission
00:52:48d'enrichissement
00:52:49en langue française
00:52:49on a eu à essayer
00:52:51de traduire
00:52:51certains termes anglais
00:52:52comme le mot
00:52:53cold case
00:52:54qu'on voit sans arrêt
00:52:55dans toute la presse
00:52:56bon alors
00:52:57après réflexion
00:52:59avec tous mes confrères
00:53:00de la commission
00:53:01et même
00:53:02les hauts fonctionnaires
00:53:03du ministère de la justice
00:53:04etc
00:53:05on s'est dit
00:53:05on pourrait très bien
00:53:06avoir un mot
00:53:07comme affaire dormante
00:53:09ou affaire gelée
00:53:10parce que cold case
00:53:11ça veut dire seulement
00:53:11une vieille affaire
00:53:12alors que si on dit
00:53:14affaire gelée
00:53:14ou affaire dormante
00:53:15c'est plus précis
00:53:16parce qu'une affaire dormante
00:53:17c'est une affaire
00:53:17pour l'instant
00:53:18elle est au point mort
00:53:19elle dorme
00:53:20mais on y pense encore
00:53:21et peut-être
00:53:21qu'on va réussir
00:53:22à la réveiller
00:53:22alors qu'une affaire gelée
00:53:24c'est une affaire
00:53:25où on reste
00:53:26sur un sentiment d'échec
00:53:27sauf miracle
00:53:28en principe
00:53:30on n'y arrivera pas
00:53:30sauf miracle
00:53:31mais il y a des miracles
00:53:32ça existe
00:53:33voilà
00:53:34si jamais
00:53:34un ADN mystérieux
00:53:36qui déboule
00:53:37et qui va peut-être
00:53:38permettre
00:53:39à résoudre
00:53:39alors à la fois
00:53:40c'est une affaire
00:53:42on pourrait croire
00:53:43gelée
00:53:43depuis 1817
00:53:44mais mon ami
00:53:46Michael me dit
00:53:46ah oui
00:53:47il y a encore
00:53:47peut-être des pistes
00:53:48à sauver
00:53:50on va peut-être
00:53:51y arriver
00:53:51moi comme je m'amuse
00:53:53c'est un jeu
00:53:54à la fin
00:53:55je donne une hypothèse
00:53:56voilà
00:53:57qu'on ne révélera pas ici
00:53:58mais je le dis
00:54:01avec le sourire
00:54:02votre livre arrivera
00:54:03peut-être
00:54:04je l'espère
00:54:05entre les mains
00:54:06d'un lycéen
00:54:07de Rhodes
00:54:08de 17 ans
00:54:08qui va s'enflammer
00:54:10pour cette histoire
00:54:11et qui sera le futur
00:54:12Pierre Belmar
00:54:12de nos médias
00:54:13à venir
00:54:14et peut-être
00:54:15qu'il réussira
00:54:16on peut l'espérer
00:54:17on peut l'espérer
00:54:19en tout cas
00:54:21merci infiniment
00:54:21Frédéric Vitoux
00:54:22pour ce livre magnifique
00:54:23je vous encourage
00:54:24évidemment
00:54:24à le lire
00:54:25et on va demander
00:54:27si vous avez des questions
00:54:29pour vous
00:54:29oui d'accord
00:54:30et avant de vous
00:54:33libérer
00:54:34et peut-être
00:54:35vous signerez
00:54:36quelques livres
00:54:37on va installer
00:54:37une table
00:54:38à peu près
00:54:39vers le milieu
00:54:39de la librairie
00:54:39avez-vous des questions
00:54:41pour notre invité
00:54:42monsieur
00:54:46oui
00:54:46écoutez
00:54:54je n'en fais pas état
00:54:56dans mon livre
00:54:56mais j'ai été voir
00:54:57j'ai été sur sa maison natale
00:54:58sur
00:55:00qui est un village
00:55:01une petite ville
00:55:03du nord
00:55:04de la
00:55:04de l'Aveyron
00:55:05qui s'appelle
00:55:06Mur de Barès
00:55:07dans le bourg
00:55:09il y avait sa première étude
00:55:11comme avocat
00:55:12c'est un homme
00:55:13semble-t-il
00:55:16relativement modeste
00:55:18et assez éteint
00:55:19pas une lumière
00:55:20parce qu'il a essayé
00:55:20de faire des affaires
00:55:21tout ce qu'il a fait
00:55:22il n'a pas réussi
00:55:24vraiment
00:55:24ses affaires
00:55:25il a été membre
00:55:27du tribunal révolutionnaire
00:55:28mais il n'avait pas le choix
00:55:28en tant que magistrat
00:55:29il était requis
00:55:30forcé
00:55:31donc il a fait trois mois
00:55:32mais au moment
00:55:32dans ces trois mois
00:55:33pratiquement le tribunal
00:55:34n'a jamais
00:55:35vraiment exercé
00:55:37donc il est rentré
00:55:38sans faire grand chose
00:55:39mais je crois quand même
00:55:40je crois quand même
00:55:41qu'il a été
00:55:43il a voté la mort du roi
00:55:44je crois
00:55:45je crois
00:55:45je crois
00:55:46ce qui faisait
00:55:47que les royalistes
00:55:48ne pouvaient peut-être pas
00:55:48le porter très haut
00:55:50dans leur cœur
00:55:50mais je ferai que je vérifie
00:55:53j'ai un trou de mémoire
00:55:53parce que ce livre
00:55:55est déjà un petit peu loin
00:55:56donc cet homme
00:55:58oui après la guerre
00:55:59il a été
00:56:00après la guerre
00:56:01après la chute de l'Empire
00:56:03il a retrouvé son club
00:56:05son groupe
00:56:06sa loge
00:56:07de francs-maçons
00:56:08et ce que je n'ai pas évoqué
00:56:10parce que ça a été
00:56:11des rumeurs aussi
00:56:12c'est qu'il y avait
00:56:13il y a eu beaucoup
00:56:13à la fin
00:56:14de l'Empire
00:56:16des mouvements royalistes
00:56:18et là
00:56:19dans le sud
00:56:19de la France
00:56:20dans cette région-là
00:56:21il y avait ce qu'on appelait
00:56:22les chevaliers de la foi
00:56:23qui étaient un groupe
00:56:24de royalistes
00:56:25qui voulaient lutter
00:56:25pour hâter
00:56:26la chute de Napoléon
00:56:28et donc
00:56:28on avait pensé
00:56:29à un moment donné
00:56:30que ces chevaliers de la foi
00:56:31voulaient créer une armée
00:56:33et avaient délégué
00:56:34des gens
00:56:35pour attaquer
00:56:35un fourgon
00:56:37qui porte
00:56:38c'est-à-dire
00:56:39un espalillon
00:56:39qui transportait
00:56:41des sommes
00:56:42pour les
00:56:42payer les fonctionnaires
00:56:44etc
00:56:45ils l'avaient attaqué
00:56:46et il y avait
00:56:47un gendarme
00:56:48qui a tué
00:56:48un des insurgés
00:56:50délégué
00:56:51par les chevaliers
00:56:52de la foi
00:56:53qui a tué un gendarme
00:56:53d'ailleurs
00:56:54qui a été arrêté
00:56:55mais
00:56:56il devait retrouver
00:56:58après il a retrouvé
00:56:59dans sa loge franc-maçonne
00:57:01des anciens chevaliers
00:57:01de la foi
00:57:02trois ans après
00:57:04ça n'avait plus de sens
00:57:04de tuer un homme
00:57:05tout était fini
00:57:07c'était
00:57:07c'était pas
00:57:08la chaleur
00:57:09la chaleur
00:57:11des règlements de comptes
00:57:12par exemple
00:57:13Latouche
00:57:13à la fin
00:57:14de la
00:57:16de l'épopée napoléonienne
00:57:19même au moment
00:57:19des cent jours
00:57:20il est nommé
00:57:20sous-préfet
00:57:22mais avant
00:57:23il a accompagné
00:57:23le maréchal Brune
00:57:24il avait été nommé
00:57:25par Carnot
00:57:26pour accompagner
00:57:27le maréchal Brune
00:57:27faire une tournée
00:57:28dans la France
00:57:30pour je sais pas
00:57:31évaluer les ressources
00:57:32en armes
00:57:33je sais pas trop quoi
00:57:33et Brune va être
00:57:36à ce moment là
00:57:36sauvagement attaqué
00:57:38et dépecé
00:57:40à Avignon
00:57:40par une foule
00:57:41manipulée par des royalistes
00:57:42ça a été une horreur
00:57:43la mort du maréchal Brune
00:57:44a été une horreur
00:57:45sans nom
00:57:45dans les conditions
00:57:47où ça avait fait
00:57:47les formes de police
00:57:50n'ont pas pu lutter
00:57:51contre lui
00:57:52contre les insurgés
00:57:53l'ont pris
00:57:54l'ont massacré
00:57:55l'ont dépecé
00:57:56l'ont arraché
00:57:56les membres
00:57:57l'ont jeté dans l'eau
00:57:57l'ont tiré
00:57:58avec un coup de fusil
00:58:00sur le cadavre
00:58:00dans le Rhône
00:58:01ça a été une horreur
00:58:02absolument
00:58:03de folie meurtrière
00:58:05manipulée
00:58:05créée par une manipulation
00:58:07royaliste
00:58:08mais en 1817
00:58:09c'était un peu retombé
00:58:10tout ça
00:58:10c'était un peu retombé
00:58:12donc je
00:58:13et en plus
00:58:13Valdez
00:58:14n'avait pas laissé
00:58:15la mémoire
00:58:16d'un homme
00:58:17forcené
00:58:18c'était
00:58:19voilà
00:58:19c'était un bourgeois
00:58:21un peu
00:58:21un peu pépère
00:58:23que ses amis
00:58:25dont les deux
00:58:26inculpés
00:58:27avaient essayé
00:58:28de renflouer
00:58:28ses affaires
00:58:29sans grand succès
00:58:30parce qu'il n'était
00:58:30pas très doué
00:58:31au fond
00:58:34comme souvent
00:58:35c'est pas
00:58:35la victime
00:58:36qui est intéressante
00:58:37c'est les soi-disant
00:58:38assassins
00:58:39et ceux qui ont intérêt
00:58:40la victime
00:58:41voilà
00:58:43elle est victime
00:58:44point à la ligne
00:58:45elle est morte
00:58:45donc elle s'est intéressée
00:58:47à ce moment là
00:58:48le passé de Valdez
00:58:50n'est pas assez intéressant
00:58:51ou riche en rebondissements
00:58:52pour
00:58:53simplement
00:58:54je pense que
00:58:55une des pistes possibles
00:58:56c'était que
00:58:57le fameux gendarme
00:58:58le fameux gendarme
00:58:59qui avait
00:58:59non
00:59:00le fameux insurgé
00:59:01qui avait tué un gendarme
00:59:02en 1814
00:59:04avait été arrêté
00:59:06libéré
00:59:06sous la restauration
00:59:08puis réemprisonné
00:59:10au moment des 100 jours
00:59:11et je pense
00:59:13qu'il avait été jugé
00:59:14par Valdez
00:59:15et comme par hasard
00:59:18ce gendarme
00:59:21ce fameux type
00:59:25était devenu gendarme
00:59:27à son tour
00:59:27était devenu
00:59:28gendarme à son tour
00:59:30et avait fait
00:59:30des malversations
00:59:31à nouveau
00:59:32et avait été libéré
00:59:33six jours
00:59:34avant
00:59:34l'assassinat
00:59:36de Valdez
00:59:36ça me semble bizarre
00:59:38souvent quand on lit
00:59:39un roman policier
00:59:40vous savez
00:59:40c'est classique
00:59:41quand on lit
00:59:42dans n'importe quel roman policier
00:59:43c'est le B.A.B.
00:59:44d'un policier
00:59:45quand un avocat
00:59:46ou un magistrat
00:59:47est tué
00:59:47on recherche
00:59:48les affaires précédentes
00:59:50où des gens
00:59:51auraient pu
00:59:51avoir se venger
00:59:53parce que
00:59:53soit qu'ils avaient été jugés
00:59:54par lui sévèrement
00:59:55et sont sortis de prison
00:59:56soit parce que l'avocat
00:59:57avait voté
00:59:57d'autres parties
00:59:59il avait contribué
01:00:00à les faire condamner
01:00:00donc c'est assez banal
01:00:02dans ce cas là
01:00:03ce fameux
01:00:04albinque
01:00:04qui avait tué un gendarme
01:00:06puis était devenu gendarme
01:00:07avait fait à nouveau
01:00:08des malversations
01:00:09et avait été libéré de prison
01:00:10huit jours avant
01:00:11l'assassinat
01:00:12ça me paraît
01:00:13une hypothèse
01:00:14c'est curieux
01:00:16quoi
01:00:16voilà
01:00:16et lui
01:00:17était quand même
01:00:18c'est pas le haut de gamme
01:00:20dans la
01:00:21sociale
01:00:22c'est pas les grands
01:00:23théoriciens du royalisme
01:00:25qui pouvaient
01:00:25avoir intérêt
01:00:26à lutter contre Napoléon
01:00:27à la fin de l'Empire
01:00:28y a-t-il une autre question
01:00:31pour Frédéric Vitou
01:00:33ou est-ce qu'on vous libère
01:00:34et on vous propose
01:00:35de dédicacer votre livre
01:00:37voilà
01:00:38et bien merci infiniment
01:00:39merci Frédéric
01:00:40merci
01:00:41merci
01:00:43merci
01:00:43bravo
01:00:44merci
01:00:45merci
01:00:46merci

Recommandations