Samedi 22 mars 2025, retrouvez Margaux Dhery (fondatrice, Le Cercle de l'Art), Marlène Schiappa (ex-ministre et présidente, Actives) et Marie-Christine Mahéas (présidente, Think Thank “Ateliers de l’entreprise et Mixité”) dans SMART WOMEN, une émission présentée par Marie-Claire Capobianco.
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00:00Bonjour, bienvenue dans Smart Women, l'émission qui donne le pouvoir aux femmes, en prenant la nécessité de leur juste place dans toutes les sphères de pouvoir économique, politique, médiatique, sans oublier bien sûr le domaine scientifique avec notamment l'enjeu tout à fait essentiel de la tech et de l'intelligence artificielle.
00:25Alors on voit bien que confrontés aux défis grandissants de nos sociétés, nous avons grandement besoin de davantage de femmes en responsabilité, c'est à la fois une question d'équilibre mais c'est au moins autant une question à la fois de performance économique et de capacité de progrès.
00:42Alors aujourd'hui pour en parler je vais accueillir tout d'abord Margot Derry qui est à la fois entrepreneur et artiste et qui a créé le Cercle de l'art pour permettre l'émergence de talents féminins dans ce domaine.
00:54Je recevrai ensuite Marie-Christine Maéas qui est la directrice diversité et inclusion du groupe Forbis Mazar et qui est également présidente d'un fin de temps qui s'appelle les ateliers de l'entreprise Emixité et donc ces différentes positions lui permettront de nous brosser un tableau de la position des femmes et de nous parler notamment du sujet du rapport des femmes au pouvoir.
01:19Et enfin je recevrai Marlène Schiappa bien connue, ex-ministre mais qui a également beaucoup d'autres casquettes et qui vient récemment de lancer une ONG et qui en est présidente donc fondatrice d'Activ et qui a produit le Next Women 40 voilà donc un beau programme et tout de suite je vais accueillir Margot Derry.
01:41Bonjour Margot Derry.
01:47Bonjour.
01:48Bienvenue dans Smart Women.
01:49Merci de m'accueillir.
01:50Merci.
01:51Alors vous avez créé le cercle de l'art et vous êtes vous-même artiste donc bon c'est pas le thème habituel de mon émission mais justement j'ai trouvé intéressant de vous inviter parce que vous finalement de façon assez originale vous conjuguez à la fois amour de l'art et pragmatisme économique ce qui vous permet d'ailleurs de lutter enfin de chercher à lutter contre la précarité financière des femmes artistes.
02:15Donc pour qu'elles puissent faire une carrière et développer à la fois leur talent et en vivre.
02:23Alors au départ vous avez d'ailleurs démarré par un diplôme de l'ESCP, vous avez fait du conseil d'entreprise, vous avez d'ailleurs créé vous-même une start-up qui était spécialisée dans tout ce qui est accompagnement, la levée de fonds, la phase d'amorçage bon bref donc un parcours plutôt financier.
02:41Bon alors expliquez-nous première question pourquoi vous avez bifurqué vers l'art et qu'est-ce qui s'est passé et comment vous avez fait ?
02:47Merci beaucoup, en effet moi j'ai commencé par des études d'économie ensuite je suis allée à l'ESCP où j'ai fait un master de business, j'ai toujours aimé la peinture, c'est une histoire familiale, c'est une histoire de coeur et je pense qu'au démarrage je n'avais pas conscience que c'était une carrière possible justement ayant grandi dans un environnement plutôt parisien élitiste on va dire, j'avais pas compris qu'il y avait une possibilité d'être artiste.
03:16Le jour où j'ai compris, ça a changé pas mal de choses dans ma vie et petit à petit j'ai essayé de faire un virage qui a pris 2-3 années.
03:26Vous avez repassé un diplôme d'ailleurs ?
03:27J'ai repassé un diplôme, je suis partie étudier en Angleterre parce que j'étais trop âgée en France, j'ai étudié à Londres, à Central Saint-Martin, c'est au Royal College de la peinture et j'ai commencé en fait cette nouvelle vie d'artiste.
03:40Quand on est en école d'art, on nous dit souvent il faut à peu près 10 ans en tant qu'artiste pour vivre de son travail et moi comme j'avais déjà entre guillemets perdu quelques années, c'est quelque chose qui me faisait très peur donc je me suis dit comment je vais trouver une solution pour que cette passion soit vivable économiquement.
03:59Alors là c'est typiquement entrepreneurial parce que quand quelqu'un se dit il y a une question, il y a un problème et j'apporte une solution, c'est un entrepreneur donc vous êtes une entrepreneur sans nul doute.
04:09Parlez-nous du cercle de l'art, qu'est-ce que c'est, en quoi ça consiste ?
04:13L'idée d'ailleurs s'inspire de plusieurs choses bien sûr mais notamment de startups américaines comme Patreon qui permettent aux auteurs de se faire payer mensuellement pour leur travail.
04:24Je me suis dit voilà comment trouver un moyen pour que l'artiste ait au moins une sécurité financière par une planification de ses revenus.
04:34Donc le cercle de l'art consiste en fait en une exposition qui permet aux artistes un mois par an de vendre les oeuvres avec un paiement en 12 mensualités.
04:45Donc grâce à ça les acheteurs ou collectionneurs comme on dit dans le milieu de l'art en fait peuvent potentiellement acheter une oeuvre de manière plus souple et l'artiste en cumulant les ventes se crée un revenu mensuel.
04:59C'est vraiment le coeur du projet, c'est cette notion de revenu mensuel pour pouvoir comme toute personne notamment qui habite dans une grande ville anticiper pour payer son loyer, son matériel etc.
05:11Alors vous vous êtes entouré forcément d'une équipe parce que pour pouvoir faire ça il faut garantir le fait que le paiement soit effectif.
05:16Donc vous vous êtes entouré d'une équipe avec quelles compétences ?
05:20Oui tout à fait. On a mis en place tout un aspect juridique avec des bons dépôts qui sont sécurisés, on a aussi un assureur d'art.
05:30Mais en réalité comme il y a un lien qui se crée particulier entre les acheteurs et les artistes, aujourd'hui le projet a permis de vendre plus de 2000 oeuvres.
05:402000 oui c'est beau.
05:42On n'a jamais eu de problème particulier de défaut de paiement, on a eu 2-3 cas et ça a été réglé assez souplement.
05:49Et alors 2000 oeuvres ça correspond à combien d'artistes ? Vous accompagnez combien d'artistes ? Vous avez accompagné combien d'artistes depuis le départ ?
05:55Alors à ce jour depuis le lancement effectif en 2021, on a accompagné je crois 188 artistes qui sont des artistes femmes.
06:04Oui bien sûr vous avez fait le choix d'avoir des femmes.
06:07En fait c'est venu à moi puisque quand j'ai proposé ce projet au début vraiment au stade de l'idée, plus de 80% des personnes qui ont répondu à l'appel à candidature étaient des femmes.
06:18D'accord, ça prouve sans doute qu'il y avait un sujet un petit peu plus prégnant de leur côté.
06:24De plus grande précarité probablement.
06:26Exactement, et alors aujourd'hui ça fait 4 ans que vous avez lancé donc finalement en quelques mots quels sont les objectifs, les nouveaux objectifs que vous vous donnez, comment vous allez les faire évoluer ?
06:37Parce que tout ça on n'a pas précisé mais il y a un abonnement donc annuel puisque c'est sur une année au départ, il y a un abonnement mensuel qui fait que le modèle économique peut tourner par rapport aussi aux frais engagés, c'est bien ça ?
06:49Exactement et le modèle c'est pas seulement cette exposition qui a lieu au mois d'avril pour présenter les oeuvres, le cercle de l'art c'est aussi pour les artistes qui participent, des résidences.
06:58Là on a enregistré, chaque artiste a contribué à l'enregistrement d'un épisode de podcast, on a aussi des rencontres que les artistes organisent pour se connaître, il y a tout un programme, les années précédentes on a fait des cours, c'est un programme qui est évolutif.
07:16La suite du projet, je suis en train de penser vraiment une manière de diffuser un petit peu plus largement la méthode que j'ai inventée pour qu'on puisse finalement accueillir plus d'artistes femmes parce qu'à ce jour, justement dans une volonté de démarrage en douceur, le projet c'est cette année 50 artistes femmes.
07:38D'accord, écoutez bravo, bravo pour tout ça, écoutez en tout cas on va arrêter là, on aurait envie d'en parler davantage parce que c'est un sujet assez particulier, merci d'avoir partagé cette approche qui est originale parce que là vous n'opposez pas du tout l'art et l'économie comme parfois on peut l'entendre et au contraire vous proposez des parcours artistiques sur base économique ce qui est finalement un levier d'émancipation pour les femmes donc bravo et merci pour tout ça.
08:02Merci beaucoup.
08:03Merci beaucoup Margot.
08:09Bonjour Marie-Christine Maéas.
08:10Bonjour Marie-Claire.
08:11Merci de votre présence dans Smart Women.
08:14Alors Marie-Christine nous allons bien sûr comme je le disais en introduction parler de la position des femmes mais avant finalement je voulais démarrer par une question qui est directement issue de l'actualité.
08:24Vous êtes directrice au sein du groupe Forbis Mazar, vous êtes directrice diversité et inclusion c'est-à-dire exactement la fonction que le gouvernement américain a entrepris de détruire.
08:37Donc première question, qu'en pensez-vous ? Comment voyez-vous l'évolution des choses ? Qu'est-ce que vous constatez dans les groupes que vous connaissez ? Comment vous voyez ça ? Est-ce que c'est très inquiétant ou est-ce qu'on va pouvoir s'en sortir ?
08:49Il y a quelques motifs d'inquiétude.
08:51Effectivement je pense que les fonctions de directeur et directrice d'IANA ne sont pas menacées en tout cas en Europe.
08:58En revanche il y a de vrais reculs aux Etats-Unis, je ne vous apprends rien.
09:02Il y a l'exemple emblématique d'Accenture qui a vraiment choqué puisqu'ils étaient particulièrement avancés sur le sujet.
09:10Il y a évidemment toutes les entreprises en particulier qui travaillent dans le secteur public qui sont très touchées.
09:16Donc là c'est catastrophique ou bien ça touche également des entreprises qui en Europe ont des parts de marché importantes aux Etats-Unis.
09:26Autrement ce que l'on observe quand même et qui est plus rassurant c'est une certaine discrétion.
09:31On ne change rien, on continue d'avoir des objectifs, on continue d'avoir des feuilles de route mixité mais on ne communique plus ou alors on n'utilise plus le mot diversité.
09:41Donc ça on le voit beaucoup ou bien encore officiellement on a arrêté c'est-à-dire qu'on ne communique plus, on n'utilise plus le mot diversité mais on continue.
09:50Je vois, je ne le citerai pas mais l'exemple justement d'une entreprise très emblématique qui a annoncé tout arrêter et qui sur le marché français quand on leur demande
09:59mais qu'est-ce qui se passe vous n'allez même pas arrêter finalement ressortent la feuille de route initiale et l'ancienne version du site internet.
10:06Voilà donc il y a des effets d'annonce et puis il y a aussi les entreprises qui n'ont absolument rien changé dans la communication et dans les initiatives
10:15et même je dirais davantage des entreprises qui au contraire ont renforcé leur feuille de route, leurs objectifs parce qu'ils y ont vu une sorte de menace à cet équilibre qui est en train de se faire autour de la diversité
10:30et sous la menace finalement ont décidé de se renforcer, il y a même eu une tribune dans les échos de chefs d'entreprise, voilà donc il n'y a pas de menace je pense en revancard.
10:42On retient qu'on peut être un petit peu rassuré malgré tout. Bon alors venons-en maintenant à votre perception de la position des femmes, je sais que vous avez juste eu une séance du club des dirigeants
10:52au sein du think tank que vous présidez donc l'atelier de l'entreprise Emixité, donc quelle a été la teneur et qu'est-ce que vous retenez principalement de ces entretiens que vous avez eus ?
11:05Alors oui effectivement c'est intéressant parce que ça permet de voir quelles sont les problématiques à leur niveau, vraiment au niveau des dirigeants, ce sont des dirigeants de grands groupes,
11:14de grandes organisations privées, publiques. Et pardon je vous coupe mais il y a des femmes et des hommes ? Il y a des femmes et des hommes, effectivement, ils sont une vingtaine et une minorité de femmes, nous avons les deux.
11:25Et bien tout d'abord, alors évidemment ils sont là parce que pour différentes raisons, soit ils ont été encouragés par leurs équipes, soit ils sont engagés de manière naturelle, ce n'est pas le cas pour tous,
11:37mais d'une façon ou d'une autre s'ils n'étaient pas totalement engagés, ils le sont devenus au contact de leurs collègues en s'appropriant des éléments de langage, des attitudes et un engagement justement qu'ils n'avaient pas forcément.
11:50Donc nous sommes biaisés puisqu'ils sont particulièrement engagés mais néanmoins ils ont eu tous le même constat qui est que de leur côté ils gardent le cap concernant la diversité et l'inclusion.
12:05Certains ont eu des commentaires par leurs homologues américains, mais pourquoi as-tu fait ce commentaire, etc. Ça ne les a pas empêchés finalement, grosso modo, de continuer sur leur feuille de route et leur engagement en changeant le vocabulaire, comme je le disais, donc une certaine prudence mais un cap qui est gardé.
12:27Donc ça c'était vraiment dans le tour de table à l'unanimité la position.
12:31Ensuite, leur préoccupation principale à leur niveau c'est le groupe des hauts potentiels, les femmes qui vont accéder à leur comité exécutif ou à leur équipe dirigeante et ça c'est un vrai souci pour eux de chaque instant puisque c'est aussi là-dessus qu'ils seront jugés.
12:56Ils y travaillent de différentes manières, d'abord ils sont tous, en l'occurrence dans ce groupe Mentor, une haute potentielle qui appartient à une organisation autour de la table, donc c'est vraiment un dirigeant ou une dirigeante avec une très haute potentielle et c'est un système qui fonctionne puisque l'on voit que ces femmes, toutes hautes potentielles qu'elles sont, ont vraiment des freins qu'on imagine mal à ce niveau.
13:26C'est ça qui est parfois inquiétant et désespérant si je puis dire puisque ces freins existent vraiment chez toutes les femmes, y compris celles qui sont surdiplômées, surcompétentes mais bon le Mentorat fonctionne bien et leur autre préoccupation c'est quel suivi doit-je effectuer de ce groupe de femmes qui va arriver et devenir dirigeante et là la question n'est pas résolue.
13:54C'est-à-dire qu'ils pensent à différentes solutions, c'est un peu des expérimentations qui ne fonctionnent pas toujours mais en tout cas l'idée c'est d'avoir un suivi très rapproché de ce vivier de talents et certains disent bien on est allé trop loin en fait, on les a trop suivis et ça a découragé certaines qui ont dit que c'était chez moi.
14:20Parce que le temps passe malheureusement vite. Pour en revenir à un thème que vous avez évoqué quand on a parlé ensemble avant la réunion qui était que justement parmi les freins il y avait l'image du pouvoir. Alors dites-nous, il nous reste une minute trente en gros, mais dites-nous c'est quoi les freins en relation au pouvoir, comment vous le percevez ?
14:37Oui la question de l'image du pouvoir est arrivée sur leur table si je puis dire parce qu'on parlait du sujet de l'opting-out donc les femmes qui font un pas de côté et dans les raisons de l'opting-out il y avait cette image du pouvoir qui était un peu repoussante pour les femmes.
14:52Là où on en est, là où ils en sont de cette réflexion c'est qu'il faut absolument redéfinir ce qu'est le pouvoir, à savoir que le pouvoir défini par un homme ou le pouvoir défini par une femme n'est pas le même et on ne souhaite pas y accéder pour les mêmes raisons donc ça c'est vraiment important pour les dirigeants de comprendre qu'est-ce qui va attirer les femmes vers le pouvoir.
15:16Et puis il faut qu'on travaille aussi sur les mythes et les réalités, c'est-à-dire que le pouvoir est parfois diabolisé par des hommes et par des femmes entraînant la non-envie d'y accéder donc il y a tout un travail à faire sur l'image du pouvoir, le côté boys club, le côté il va falloir que je me batte si j'arrive dans cette arène-là et donc ils essaient, on est vraiment dans une démarche, ils sont dans une démarche de mettre en avant tout ce qu'il y a de positif dans le pouvoir.
15:45Toutes les raisons de jouir du pouvoir qui pourront peut-être finalement attirer davantage de femmes.
15:52Bon on va s'arrêter là mais c'est un thème très intéressant le thème du pouvoir et de la façon dont les femmes le perçoivent.
15:58D'ailleurs j'avais reçu Cécile Béliot qui est la directrice générale du groupe Bell qui avait justement expliqué de façon très intéressante la conception du pouvoir au départ elle n'avait pas envie du pouvoir et puis après elle s'est rendue compte que le pouvoir ce n'était pas une fin en soi c'était un moyen de faire des choses et comme elle avait envie de faire des choses du coup elle a trouvé le pouvoir tout à fait intéressant et elle l'a assumé.
16:21Merci beaucoup. Je pense que je vais continuer d'ailleurs à parler de ce sujet avec mon invitée d'après puisque c'est Marlène Schiappa et elle est également très sensible à ce thème-là.
16:28Absolument.
16:29Merci Marlène Christine.
16:34Bonjour Marlène Schiappa.
16:35Bonjour Marie-Claire.
16:36Ravie de vous accueillir sur le plateau de Smart Women.
16:38Merci.
16:39Alors Marlène je vais vous présenter parce que vous êtes quand même très connue après 7 ans même plus d'exercice de la fonction de ministre et puis vos engagements sont connus à la fois pour la cause des femmes notamment où vous avez depuis longtemps beaucoup investi sur ce thème-là mais vous êtes également écrivaine, conférencière, vous êtes et vous avez été entrepreneur et entrepreneur dans la tech c'est quand même un point important parce qu'on ne l'a pas suffisamment dit enfin bref des casquettes très diverses et aujourd'hui vous avez rejoint le groupe Tilder.
17:09Donc vous vous occupez de communication et d'accompagnement d'entreprise et vous avez récemment lancé une nouvelle initiative qui est la création donc d'actifs donc on va bien sûr en parler mais avant de parler de ça je voulais vous poser la première question finalement qu'est-ce qui s'est passé à partir de quand vous vous êtes intéressée, vous avez pris conscience, vous avez eu envie de vous engager et vous avez commencé à vous engager sur la cause des femmes ?
17:30C'est vrai qu'il n'y a pas un matin où je me suis réveillée en me disant tiens je suis féministe mais l'observation de petites inégalités moi je suis d'une famille méditerranéenne, j'ai un père corse, une mère italienne donc avec des traditions les garçons font les cabanes et les filles préparent le repas mais c'est vraiment quand je travaillais chez Avas quand j'avais 22-23 ans et j'attendais ma fille je voyais que ce n'était pas la même chose pour les hommes et les femmes d'avoir un enfant et c'était vraiment ça le point de départ de mon engagement de l'association Maman Travail que j'ai créé voir que les femmes mangeaient un sandwich au-dessus de l'ordinateur en programmant des rendez-vous médicaux et qu'elles étaient toujours en train de courir en partant
18:00alors que les hommes avaient l'air d'avoir beaucoup de temps libre même ceux qui avaient des familles nombreuses c'était une interrogation en fait à la base qui est une observation de cette injustice qui a fondé mon engagement.
18:10D'accord donc tout est parti de là et à partir de là vous avez commencé à avoir des actions qui allaient dans le sens de les aider justement.
18:16Exactement, alors j'ai commencé à me dire on va pouvoir peut-être être solidaire, faire un réseau, Maman Travail c'est le premier réseau des mères actives et puis me dire en fait il y a des problèmes de politique publique, de déficit de place en crèche, de manque de transparence, d'inégalité de salaire femmes hommes
18:29et puis peut-être aussi nous dans notre comportement peut-être qu'on induit quelque chose de l'ordre de cette inégalité professionnelle et donc j'ai voulu qu'on agisse sur ces questions-là associativement et politiquement.
18:40Alors vous savez que moi mon thème, alors moi je suis sur un parti vraiment plutôt économique, pas du tout le côté violence qui malheureusement est aussi un vrai sujet mais je ne le traite pas
18:48et donc vous savez que j'ai ce thème de la juste place des femmes dans les sphères de pouvoir je précise donc est-ce que ce concept vous le reprendriez à votre compte ?
18:58Qu'est-ce que vous en pensez ?
18:59Complètement, moi je pense que c'est un concept extrêmement intéressant parce qu'on est toujours en train, d'abord en France on est très philosophique, je rentre d'un déplacement à New York et dans les entreprises à New York
19:08les femmes me disent nous ici on est pragmatiques sur la question de l'égalité femmes hommes, en France c'est vrai qu'on aime réfléchir et moi j'aime bien ce côté à la française
19:15où on réfléchit, on intellectualise un petit peu les choses et on essaye de trouver finalement une mixité femmes hommes, comment on peut partager un même espace de pouvoir, de responsabilité
19:25et trouver une juste place, une place juste ça me semble évidemment ce qui est souhaitable pour les femmes et pour les hommes aussi d'ailleurs
19:30Oui, pour l'équilibre global de la société d'ailleurs, ce que je disais en introduction. Alors vous avez entendu Marie-Christine Maéas donc avant vous
19:37qui elle mentionnait notamment ce frein important qui est l'image du pouvoir, la relation des femmes au pouvoir, alors qu'est-ce que vous en pensez, qu'est-ce que vous observez sur ce sujet-là ?
19:45J'ai trouvé très intéressant ce qu'elle a dit et moi je dirais même plus loin qu'il y a un genre de backlash contre les femmes qui réussissent et on le sait c'est dans l'inconscient collectif
19:53j'ai sorti un livre qui s'appelle « Nos six petites ambitions », je raconte dedans le syndrome de l'Oscar, c'est-à-dire le fait que quand les femmes ont une récompense, elles divorcent, elles sont quittées
20:01l'Inède a montré que quand une femme gagne plus que son mari ou son compagnon, elle a plus de probabilité d'être quittée par son compagnon
20:07et ce ne sont que des exemples de la vie personnelle pour montrer que je pense que nous avons intériorisé le fait qu'une femme qui réussit et qui est visible
20:14elle va le payer d'une manière ou d'une autre à un moment. Donc ce côté le pouvoir qui rebute, je suis persuadée qu'inconsciemment on a au fond de notre réflexion
20:23on a vu tellement des femmes réussir et s'en prendre plein la figure en retour de cette réussite que nous avons intériorisé une partie de cela je pense.
20:31Oui parce qu'on voit effectivement des femmes qui elles-mêmes finalement en position de dirigeante qui ont les mêmes réactions et qui finalement ne sont pas forcément...
20:40D'ailleurs il y a le sujet des quotas, ça rejoint un petit peu... Bon moi je suis très intellectuellement contre et pragmatiquement très pour comme beaucoup à la française
20:50et on a toujours en plus le besoin de l'exprimer ce qui est quand même bizarre. Bon les quotas c'est vrai que la loi a quand même fait beaucoup progresser les choses
20:58Copé-Zimmermann, la loi Marie-Pierrick-Sein, comment vous voyez cette évolution et finalement au sein de vos différentes activités puisque encore une fois vous avez touché à plusieurs mondes
21:07qu'est-ce que vous voyez comme différence, comment vous voyez les choses ?
21:10Moi je pense que c'est un mal nécessaire les quotas, je vous rejoins. On dit souvent c'est vexant pour une femme d'être nommée parce qu'on est un quota
21:16Ce que je trouve plus vexant ce n'est pas être nommée, c'est que je suis souvent en train de vider de la vaisselle avec le téléphone qui ne sonne pas en se disant mince je serai une formidable administratrice d'entreprise
21:23mais personne ne m'appelle. Heureusement je ne suis pas un quota, je ne suis pas certaine qu'on se dise ça. Marie-Josée Zimmermann c'est la marraine de l'ONG Active donc on travaille beaucoup ensemble
21:31et là on vient de publier une étude dans le magazine Challenge avec l'ONG Active dans laquelle on pose la question spontanément aux femmes
21:38quel est le trait le plus négatif qui soit associé aux femmes de pouvoir et les femmes répondent les quotas
21:43et c'est très surprenant parce que d'un côté mathématiquement les quotas ont fait preuve de leur efficacité et en même temps il y a cette espèce de défiance
21:50et donc on ne veut surtout pas être associé à la politique de quotas donc nous éprouvons nous-mêmes en tant que femmes dirigeantes un paradoxe vis-à-vis de cette question des quotas efficace
22:00mais l'étiquette que nous n'avons pas envie d'avoir.
22:03Et donc dans les différents mondes que vous avez côtoyés et que vous côtoyez encore aujourd'hui, est-ce que vous voyez des différences ?
22:10Est-ce qu'il y a des endroits où c'est plus facile ou plus difficile ou plus évident ?
22:14Oui il y a des différences mais moi je dirais qu'il y a des différences femmes-hommes qui sont flagrantes.
22:18Ça fait un an et demi maintenant que j'accompagne des dirigeants et des dirigeantes, les femmes et les hommes ne réagissent pas de la même manière face au pouvoir et à la visibilité.
22:24D'abord je peux vous dire que quand je fais une proposition à un dirigeant, je vais partir du rendez-vous avec une réponse.
22:29L'homme dirigeant va me dire oui ça m'intéresse ou non je ne vais pas le faire.
22:32La femme dirigeante veut toujours faire valider par quelqu'un.
22:35Elle doit en parler à son board, à son dire-com, à son mari parfois.
22:39Je ne pars pas avec une décision.
22:42Et de la même manière quand je propose une visibilité, un homme dirigeant l'acceptera, toujours, sans exception.
22:47Une femme dirigeante soit va commencer par la refuser, soit va vouloir avoir le moindre détail.
22:53L'ensemble des questions, la visibilité, préparer, faire des réunions de préparation.
22:57Ce syndrome un peu de la bonne élève mais aussi de la peur de la visibilité parfois
23:01qui empêche de se mettre en avant et de faire savoir tout ce qu'on fait
23:05et qui est un élément important pour progresser dans sa carrière.
23:08Néanmoins on peut malgré tout se réjouir, il y a quand même des évolutions qui sont assez marquées.
23:13Comment vous jugez justement l'évolution et finalement aujourd'hui le chemin qui est encore devant nous, comment vous le qualifiez ?
23:21D'abord il y a des évolutions qui sont incommensurables.
23:24Ma grand-mère qui vit encore en deux générations ne pouvait pas travailler, ne pouvait pas avoir de chéquier, ne pouvait pas voter, avoir de contraception, etc.
23:31Donc ça donne le vertige si on se dit qu'en deux générations on a quand même conquis des droits de manière incroyable.
23:38Ceci étant, le haut de la pyramide et les patronnes du CAC 40 qui est un sujet qui m'intéresse,
23:44ça m'intéresse parce que je trouve que c'est vraiment le parangon de ce qui ne va pas.
23:48Et du fait qu'on a accepté qu'en haut de la pyramide ce n'était pas si grave.
23:52Comme si on se disait finalement travaillons sur l'égalité salariale pour les messieurs du soin, etc.
23:58Mais abandonnons le haut de la pyramide, ce n'est pas grave si des hommes dirigent.
24:01Moi je trouve ça grave, en fait je pense que la question de la justice et de l'égalité, c'est une question qui ne souffre pas d'exception.
24:07Il n'y a aucune raison qu'il n'y ait que 3 ou 4 femmes patronnes du CAC 40 et 36 ou 37 hommes.
24:12Alors cela étant dit, il y a un chemin parce que bon, évidemment comme on vient d'années et d'années, donc il faut que ça se limite.
24:20J'essaie de rester positive sur le sujet en me disant qu'on accélère quand même, donc c'est pas mal, mais il faut accélérer.
24:25Et c'est vrai que parfois on peut se demander si les générations montantes ont la même perception.
24:31Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce qu'il n'y a pas le risque qu'ils aient l'impression que finalement c'est fait ?
24:35Alors il y a la gender fatigue d'un côté chez les hommes, et puis de l'autre il y a des jeunes femmes qui considèrent peut-être que c'est fait.
24:41J'ai l'impression que c'est très différent à chaque fois qu'on parle de la jeunesse, je trouve qu'il y a plusieurs jeunesses.
24:46Tu vois moi mes filles qui ont 18 ans et 13 ans, moi j'ai toujours été la féministe de service du gouvernement,
24:51et auprès de mes filles je pense qu'elles imaginent que je suis une tradwife réactionnaire,
24:55parce que comparée à elles et à l'engagement de leur génération, je suis plutôt traditionnelle dans ma vie personnelle.
25:01Donc j'ai l'impression qu'on est un peu poussé en avant par cette jeune génération,
25:04et en même temps il y a d'autres parts de cette jeunesse qui n'est pas monolithique,
25:08il y a d'autres parts pour lesquelles effectivement il y a un recul, c'est ce que disent certaines études,
25:12notamment avec l'influence des réseaux sociaux, des représentations très stéréotypées,
25:17très basées sur le physique, l'apparence des jeunes filles et des jeunes garçons aussi.
25:22Moi je suis préoccupée par la montée de certaines sphères sur les réseaux sociaux,
25:27avec des hommes qui se vantent d'interdire à leurs fiancées telle ou telle pratique.
25:31Là, pour le coup, on est revenus à l'époque de la jeunesse de ma grand-mère.
25:35Bien sûr, bien sûr.
25:36Alors bon, pour lutter contre cela, vous avez lancé donc votre ONG Active,
25:41parlez-nous d'Active, qu'est-ce qu'elle fait, quels sont ses projets ?
25:44C'est une ONG qui fonctionne en bénévolat à 100%,
25:47on a un board avec une trentaine de femmes qui sont activistes, engagées dans des associations, dirigeantes,
25:51et notre action phare parmi d'autres, c'est le lancement du Next Women 40,
25:56qui est donc une liste de femmes aptes à devenir patronnes du CAC 40,
25:59parce que j'en avais vraiment marre d'entendre des actionnaires, des comités de nomination,
26:03mais aussi des chasseurs de tête me dire « j'aurais adoré nommer une femme, mais hélas, je n'en ai pas trouvé ».
26:08C'est la fameuse phrase de Christine Lagarde.
26:09Exactement, la femme qu'on n'a pas trouvée, c'est la femme qu'on n'a pas cherchée.
26:12Moi, j'ai voulu démontrer qu'avec un jury, avec la patronne de LinkedIn, des chasseurs de tête,
26:16la présidente d'Air France, etc., mais tout le monde bénévole,
26:19on pouvait passer en revue des centaines de profils de femmes, membres de Comex, patronnes de gros ETI, etc.,
26:24et trouver ses futures patronnes du CAC 40.
26:27D'ailleurs, l'une d'elles, Inda Garbi, est devenue vraiment patronne du CAC 40.
26:30Entre temps, il y a eu le changement de catégorie.
26:33Entre temps, le CAC 40 est rentré, voilà, on n'y est pour rien, mais Bureau Veritas est rentré au CAC 40.
26:38Donc, de fait, on est passé de 3 à 4, mais ça montre aussi le sérieux de notre liste
26:41et le fait que les 39 autres sont fondés à devenir patronnes du CAC 40 dans les années à venir.
26:46Et alors, au-delà de cette liste que vous allez actualiser, comment vous allez faire ?
26:49Il nous reste une minute, mais comment vous allez faire désormais pour le faire vivre ?
26:53Alors, c'est une vraie difficulté parce que ce n'est pas si évident d'avoir des critères objectifs
26:57qui s'appliquent aux femmes comme aux hommes, de ne pas avoir plus de critères pour les femmes.
27:00Elles ont toutes été reçues à l'Élysée.
27:02La liste est parue dans les échos, et donc on va continuer, bien sûr.
27:06Il y aura une prochaine édition en novembre pour toujours mettre en valeur ces femmes.
27:09On est la seule ONG où des femmes, bénévolement, donnent de leur temps pour propulser la carrière d'autres femmes
27:13que parfois on ne connaît même pas, mais on estime que leur talent et la cause en vaut la peine.
27:18Donc, on regardera, et au fur et à mesure que vous cocherez des cases de femmes qui, de la liste, deviendront,
27:25ça sera une preuve.
27:26Absolument.
27:28On peut se le souhaiter, de toute façon, largement.
27:31Arriver à une mixité, au moins, dans le CAC 40.
27:32Oui, un équilibre, non, non, mais c'est pour ça qu'il n'est pas du tout question d'aller dans l'autre sens,
27:35mais l'équilibre est tout à fait important.
27:37On a encore une bonne marge, donc, voilà, on peut avancer.
27:40Bon, écoutez, en tout cas, merci beaucoup pour votre action, et merci de continuer tout ça.
27:44Notre émission est terminée, donc merci de l'avoir suivie, et je vous donne rendez-vous au mois prochain.
27:50Merci.