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00:0013h-14h, Europe 1-13h, vous écoutez Céline Géraud sur Europe 1 et Céline 13h18 lors d'accueillir vos deux chroniqueurs politiques pour décrypter l'actualité, Jean-Claude Lassier et Olivier Darstel.
00:10Avec mon tandem du jeudi, bonjour les amis !
00:13Bonjour !
00:13Eh bien bonjour !
00:14Bienvenue ! Alors dans les 40 prochaines minutes, on va décortiquer proprement, délicatement l'allocution empruntée de gravité d'Emmanuel Macron.
00:21Comment financer ce réarmement ? Notre industrie de défense est-elle prête ?
00:26Beaucoup de questions et des réponses bien sûr que vous allez nous apporter dans quelques instants.
00:30Mais tout de suite, j'ai très envie de commencer par le ton grave, voire dramatique d'Emmanuel Macron, très proche de celui qu'il utilisait lors des premières heures du confinement face au Covid.
00:42Et je vous propose justement d'écouter Emmanuel Macron lorsqu'il a parlé de menaces russes.
00:46La Russie a déjà fait du conflit ukrainien un conflit mondial.
00:49Elle a mobilisé sur notre continent des soldats nord-coréens, des équipements iraniens, tout en aidant ces pays à s'armer davantage.
00:58Et la Russie, dans le même temps, continue de se réarmer.
01:01Qui peut donc croire, dans ce contexte, que la Russie d'aujourd'hui s'arrêtera à l'Ukraine ?
01:05La Russie est devenue, au moment où je vous parle et pour les années à venir, une menace pour la France et pour l'Europe.
01:12Voilà, Emmanuel Macron, solennel, grave. Est-ce qu'il n'en fait pas trop ?
01:15C'est en effet l'extrait le plus important de l'intervention présidentielle d'hier soir, suivi par 15 millions de personnes.
01:23Je veux prendre à témoin une jeune femme de 22 ans, de ma famille proche, qui m'a appelé ce matin pour me dire « mais est-ce qu'il va y avoir la guerre ? ».
01:38Et je pense que cette intervention présidentielle, qui nous avait été présentée comme une réponse aux angoisses françaises, a amplifié et nourri dangereusement ce sentiment d'angoisse.
01:50Avec un président présentant presque la Russie de Poutine à Sedan et aux portes de notre pays, ce qui n'est absolument pas le cas.
02:00Les troupes russes ont avancé de 300 kilomètres dans le Donbass en deux ans.
02:05Alors qu'on puisse depuis Helsinki, depuis la Finlande, qu'on puisse depuis les Pays-Baltes, avoir la crainte ici et maintenant de l'expansionnisme russe, bien évidemment.
02:16Mais il y avait donc une gravité qui m'a fait « mais c'est une martingale l'Ukraine ! » pour le président Macron.
02:28Il a été réélu sur le dossier ukrainien sans campagne présidentielle en 2022.
02:34Et alors qu'on se demandait, il y a encore un mois, s'il pouvait aller raisonnablement jusqu'au bout de ce mandat, il revient d'une manière spectaculaire dans le champ politique.
02:42C'est un coup politique et de communication réussi pour lui.
02:45Jean-Claude Dassier.
02:46Oui, je suis d'accord avec ça. Je crois, quoi de mieux pour un responsable politique qui se cherche un nouveau rôle, et Dieu sait que c'est la situation du président de la République, qu'une menace de guerre réelle ou non réelle ?
03:02Il en fait trop pour vous ou pas ?
03:04Quelle est la réalité de la menace russe sur l'Europe telle qu'on la connaît ?
03:11Moi, je veux bien admettre, si vous voulez...
03:13Vous en avez vu quand même pas mal, Jean-Claude Dassier. Est-ce que depuis le général de Gaulle en 1960, on avait assisté à un tel discours solennel d'un chef d'État ?
03:22Je veux bien, à la limite, si vous voulez, accepter l'idée qu'un président de la République, ce n'est pas tout à fait un personnage comme les autres,
03:31et qu'il soit tenu, obligé de prendre un certain nombre de précautions, notamment dans ce domaine de guerre, d'une menace, d'une situation internationale devenue quasiment indéchiffrable,
03:44pour qu'on ne lui reproche pas dans 5 ans, dans 10 ans, dans 15 ans, de ne pas avoir préparé le pays.
03:50Cette réserve mise à part et cette concession à la posture qui a été celle du président hier soir, moi je...
03:58Dans l'immédiat, je ne vois pas où est la gravité de la menace, justifiant l'intervention d'hier soir, encore une fois.
04:06Et le Kremlin, Jean-Claude Dassier, dit ce matin, cela donne le sentiment que la France veut que la guerre continue.
04:10Oui, bien sûr.
04:11Ils ont trouvé le discours très conflictuel à l'égard d'Armée.
04:14Réponse dure de Lavrov, notamment sur la dissuasion nucléaire, en disant que la France était donc aujourd'hui une menace pour la Russie,
04:23et surtout, on n'en parle pas suffisamment d'après moi depuis hier soir, Emmanuel Macron a laissé tomber Zelensky.
04:31Puisqu'il ne s'appuie pas sur la demande de Zelensky d'une paix avec des conditions sérieuses de sécurité pour l'Ukraine,
04:42il n'en a pas été question hier soir, ce qui donne totalement la main aux Russes et aux Américains pour construire à eux deux une paix sur le dos des Ukrainiens.
04:53D'accord ou pas d'accord, Jean-Claude Dassier ?
04:56Je crains qu'on soit parti pour ça. Je comprends même l'inquiétude réelle dont on me parle depuis ce matin des Français,
05:04qui se disent, mais est-ce qu'on va vers un nouvel affrontement ? Est-ce qu'on va vers une nouvelle guerre ?
05:09Honnêtement, je ne le crois pas, mais peut-être que je me trompe complètement.
05:13La Russie ne voulait pas lui reprocher depuis des mois de ne pas avoir été foutu de vaincre en Ukraine,
05:21et de considérer que c'est une menace absolument ingérable par 27 États européens qui vont se réunir à Bruxelles en ce moment même.
05:29Ce n'est pas très sérieux.
05:30Justement, la stratégie de la peur.
05:32Hervé Morin, ancien ministre de la Défense, a critiqué cette façon de faire d'Emmanuel Macron.
05:37Il était hier sur BFM TV.
05:39Aller dire que la menace aux frontières, c'est la menace russe, c'est une menace.
05:44De là à dire que les Russes sont aux frontières de la France, ils ne sont même pas capables d'écraser les Ukrainiens.
05:51Considérer qu'ils seraient capables d'écraser l'ensemble du bloc occidental, ça n'existe pas cette histoire.
05:59La menace russe, elle existe à travers l'armatomie.
06:02Mais aller dire que les Russes peuvent arriver aux frontières, j'allais dire même de l'Allemagne, tout ça est faux.
06:08Et c'est excessivement inquiétant, comme s'ils voulaient dramatiser à des fins quasiment de politique nationale.
06:15C'est le sentiment que ça donne.
06:16Voilà, c'est l'analyse d'Hervé Morin qui est très pertinente.
06:19Et qui d'ailleurs, Pascal Praud le disait ce matin, était le seul hier soir à justement relever cette stratégie de la peur.
06:25La recherche d'un nouveau rôle, important, que le pays prenne tant compte.
06:30On va écouter, regarder ce que dit Macron, parce qu'il dénonce un risque de guerre incontestable.
06:36Je pense en effet qu'il y est allé un peu fort hier soir.
06:39Il y a beaucoup de choses qui m'ont un peu interrogé, voire choqué dans son discours.
06:43Notamment par exemple, quand il parle de la dissuasion, il n'a même pas été capable de citer le général de Gaulle.
06:48C'est pas bien de sa part.
06:50Franchement, on rend aux mains.
06:51Heureusement, il a convenu que l'armée française commençait à exister.
06:56Ou existait même, par rapport à ce qui se passe chez un certain nombre de nos voisins.
07:01Mais enfin, c'est grâce au général.
07:02Et grâce à sa capacité, contre beaucoup d'avis à l'époque, de créer la force de dissuasion.
07:08Qui nous met quelque part un peu à l'abri.
07:10Alors après, il y a le débat sur est-ce que cette force de dissuasion doit servir à l'ensemble des pays européens ou non.
07:15Ce qui est sûr, c'est que l'essentiel est préservé.
07:18C'est qu'il n'y en a qu'un qui peut appuyer le bouton.
07:20Et le seul qui puisse le faire, c'est le président de la République française.
07:23Et est-ce qu'il ne porte pas là son meilleur costume, finalement ?
07:26Celui du pourfendeur, du défenseur de la souveraineté européenne ?
07:30Nous verrons.
07:31Il conclut en disant, la patrie a besoin de vous.
07:34Et il renvoie ceux qui ne partageraient pas sa vision, en les qualifiant ou de vatanguers ou de défaitistes.
07:40Et ça me fait penser à ce moment du macronisme qui revient aujourd'hui.
07:44Qui était de dire, nous sommes à nous seuls le camp de la raison.
07:47Et ceux qui ne partagent pas notre vision du monde ou de la société sont donc déraisonnables.
07:52Et il se replace au centre du jeu.
07:54Oui, c'est vrai.
07:57Mais je n'aime pas la politique, notamment quand c'est le chef de l'État qui use de ce moyen-là.
08:04En allant sur les peurs et sur un effet de sidération.
08:09Parce que la stratégie de la peur et de la sidération ne permet pas de penser la complexité du monde.
08:15On se sent le dos dans les cordes.
08:18Et donc il est en train là de jouer sur quelque chose qui certes peut avoir son efficacité sur le moment immédiat.
08:26Mais il faudra voir la manière dont la société française évolue sur ce terrain-là.
08:31On va voir comment les choses vont se passer cet après-midi.
08:33Il y a 27 pays quand même, tout le monde est là.
08:35On va en parler dans quelques instants justement de ce Conseil Européen.
08:38Et justement de ces questions qu'on se pose aussi.
08:41Comment financer ce réarmement ? Notre industrie de défense est-elle prête ?
08:44C'est une vraie question.
08:46Le Premier ministre vient de dire que ça ne peut pas se faire sur le modèle social.
08:49On ne touche pas au modèle social.
08:52On ne touche à rien mais on va trouver quelques milliards de plus.
08:57On se retrouve dans quelques instants. A tout de suite.