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Ce lundi après-midi, Donald Trump deviendra le 47e président des États-Unis. On en parle avec Jérôme Cartillier, chef du bureau de l'AFP à Bruxelles, ex-correspondant à la Maison Blanche de 2014 à 2021.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 20 janvier 2025.

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Transcription
00:00RTL Matin
00:03Avec Amandine Bégaud et Thomas Soto
00:05Il est 8h17, Donald Trump, ce sont ceux qui l'ont approché qui en parlent le mieux.
00:09Amandine, en ce jour d'investiture du président américain, vous avez donc choisi de recevoir quelqu'un
00:13qui a travaillé à son contact pendant des années, puisqu'il a été correspondant de l'agence France Presse à la Maison Blanche.
00:18Il s'appelle Jérôme Cartillier. Bonjour et bienvenue à vous.
00:21Bonjour Jérôme Cartillier.
00:23Allô ?
00:24Alors, on a un petit souci technique. Vous êtes en ligne avec nous depuis Bruxelles
00:29puisque vous êtes désormais chef du bureau de l'agence France Presse à Bruxelles.
00:34Après, on le disait, avoir passé 7 ans comme correspondant à la Maison Blanche.
00:38C'était entre 2014 et 2021.
00:41Sous la présidence de Barack Obama, celle de Donald Trump et puis de Joe Biden.
00:47Vous m'entendez Jérôme Cartillier ?
00:49On a un petit problème de liaison.
00:51Alors, on a visiblement un petit problème de liaison.
00:53Donald Trump qui fait la une de la plupart des journaux ce matin.
00:55Un sud-ouest, le monde aux défis de Trump.
00:57Trump 2 pour le populaire du centre.
00:59Trump, un second mandat qui s'annonce plus radical.
01:02On en parlait tout à l'heure, Amandine, il va signer une centaine et même peut-être 200 ordonnances.
01:07C'est ce que dit la chaîne Fox News, que ça pourrait aller jusqu'à 200 décrets.
01:12On a eu un petit aperçu cette nuit avec ce tout dernier meeting de campagne
01:18avant donc cette cérémonie d'investiture qui fait différent, se passera à l'intérieur du Capitole.
01:24Jérôme Cartillier, est-ce qu'on vous a retrouvé ?
01:26Bonjour.
01:27Oui, bonjour.
01:28Merci beaucoup d'être en direct avec nous.
01:30Vous étiez, je le disais, à Washington il y a 8 ans pour la première cérémonie d'investiture de Donald Trump.
01:35Quelle est la différence avec celle qu'on va vivre aujourd'hui ?
01:38Le contraste est saisissant.
01:41D'abord, d'un point de vue simplement météo.
01:43C'est-à-dire que cette cérémonie d'investiture aura lieu à l'intérieur en raison du froid.
01:47Et puis surtout par le parcours de Donald Trump.
01:51Aujourd'hui, c'est la journée d'un combat historique dans l'histoire politique américaine.
01:55C'est-à-dire un homme élu en 2016, battu en 2020 et puis de nouveau élu en 2024.
02:00Qui était élu, certes, en 2016, mais qui n'était pas avec autant de pouvoir que sans doute il en aura pour ce deuxième mandat.
02:09Oui, bien sûr. Aujourd'hui il arrive, c'est un peu l'heure du triomphe pour lui à Washington.
02:13Il n'y a pas vraiment d'opposition, il a une majorité au Congrès.
02:16La Cour suprême penche clairement de son côté.
02:19Il a la main mise sur son parti, le Parti républicain.
02:22Et surtout, ce qui est assez frappant, c'est que les démocrates, ses adversaires, sont groguis.
02:27Un peu silencieux, inaudibles, un peu démoralisés ou résignés.
02:31Donc c'est assez frappant, effectivement.
02:33Il arrive avec une forme de puissance à Washington.
02:38La cérémonie, vous le disiez, ne sera pas en plein air, comme c'est la tradition.
02:41Mais donc à l'intérieur de ce Capitol.
02:43Capitol, on s'en souvient, qui avait été pris d'assaut par les pro-Trump,
02:47qui contestaient la victoire de Joe Biden, c'était en janvier 2021.
02:50C'est un sacré pied de nez quand même ça, non ?
02:53Oui, c'est assez incroyable de revoir, si on superpose un peu les images,
02:57de cet assaut qui est véritablement, comment dire, symboliquement pour la démocratie américaine.
03:04Ça a été un moment, une journée très très sombre.
03:06Et aujourd'hui, au même endroit, Donald Trump peut prêtre un serment.
03:10C'est assez frappant de se dire aussi qu'il y a 4 ans,
03:14je vais vous lancer sur l'histoire du comeback, il y a 4 ans, il semblait perdu quand même Trump.
03:18Moi je me souviens, j'étais dans les jardins de la Maison-Blanche au moment de son départ,
03:21avec sa cravate rouge, il a dit au revoir à tout le monde.
03:24Et tout le monde était persuadé à ce moment-là qu'il ne remettrait plus jamais les pieds à la Maison-Blanche.
03:28Il était un peu comme un paria.
03:30Il y avait les menaces judiciaires liées justement à l'assaut du Capitol.
03:33Il avait refusé de reconnaître sa défaite.
03:35Et puis il est là aujourd'hui, 4 ans plus tard.
03:37Vous le disiez, vous étiez sur la pelouse ce jour-là, quand il quitte la Maison-Blanche.
03:40Vous l'avez suivi pendant tout ce premier mandat.
03:43Vous étiez correspondant, on le disait pour l'agence France Presse, à la Maison-Blanche.
03:47Ça veut dire au plus près, un tout petit groupe de journalistes, le pool comme on l'appelle,
03:52qui voit le président américain tous les jours, qui voyage avec lui.
03:56Est-ce qu'il est finalement, comme on le voit d'ici, vu de France,
04:00c'est-à-dire quelqu'un d'extravagant, sans limite, au quotidien, vous comme journaliste ?
04:04Est-ce que vous avez observé ou pas ?
04:06Oui, il a assez peu de filtres, finalement, Donald Trump.
04:09Celui qu'on voit de loin est à peu près celui qu'on voit de près.
04:13À quelques nuances près, quand même, notamment une question intéressante,
04:17c'est sur les journalistes, dont il dit beaucoup de mal, qu'il attaque en permanence.
04:21Et en même temps, quand on est au quotidien, qu'est-ce qu'il fait ?
04:23Il recherche le contact avec les journalistes,
04:25parce qu'il cherche l'exposition maximale, le moment de télévision.
04:29Donc il est très agressif envers les médias, et c'est de plus en plus marqué.
04:34Et en même temps, au quotidien, il veut savoir où sont les journalistes,
04:37il veut leur parler, et il leur parle beaucoup.
04:39Sympa, vous diriez ?
04:41Non, je ne dirais pas sympa, non.
04:43Je dirais toujours à la recherche de la lumière médiatique.
04:47Qu'est-ce que vous, le spécialiste, vous allez scruter dans le discours de ce soir,
04:52surveillé ? L'attitude, les mots ?
04:55Oui, les mots. Son premier discours, il y a huit ans,
04:59était d'une agressivité inouïe.
05:01Il avait parlé de carnage américain,
05:03il avait dressé un tableau extraordinairement sombre des États-Unis,
05:07et donc ça va être intéressant de voir ce qu'il fait aujourd'hui,
05:10est-ce qu'il reste sur cette tonalité,
05:12ou est-ce qu'il adopte un ton un peu plus consensuel, un peu plus rassembleur ?
05:16Je pense que c'est vraiment le sujet, sachant qu'il a prévenu,
05:20il a annoncé une rupture marquée avec les quatre dernières années.
05:25Donc la tonalité rassembleuse, ou plutôt division,
05:28l'art de la division, c'est quand même l'arme maîtresse de Donald Trump.
05:31On dit beaucoup de choses depuis sa réélection,
05:35il y a ceux qui sont fans, en tout cas fascinés par le personnage,
05:39et puis il y a aussi beaucoup d'inquiétudes.
05:41Ertel publie ce matin un sondage BVA,
05:4462% des Français se disent inquiets du retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.
05:48Est-ce qu'ils ont raison, d'après vous,
05:50qui aujourd'hui, d'ailleurs, est à Bruxelles ?
05:53Vous avez donc une vision européenne de tout ça.
05:55Est-ce que les Français ont raison d'avoir peur ?
05:58Ce qui est certain, c'est qu'on rentre dans une période d'incertitude,
06:01de grande incertitude pour la politique américaine,
06:04parce que c'est un président, on l'a dit, qui fait un comeback,
06:07qui fait un comeback aussi avec un goût de revancheur.
06:09Il y a quelque chose de revancheur dans l'attitude de Donald Trump,
06:12qui, je le rappelle, est élu dans une élection
06:15dont il n'a pas reconnu le résultat précédent.
06:18Et il a clairement dit qu'il s'entendait s'en prendre à ses adversaires politiques.
06:22Donc d'un point de vue de la démocratie américaine,
06:25il se pose la question de savoir où il va aller.
06:28Après, il a fait beaucoup, beaucoup de promesses,
06:30de déclarations, comme toujours en campagne.
06:32Et ce qu'il faudra regarder de près,
06:34c'est lesquelles il tient, lesquelles il pousse jusqu'au bout,
06:38et celles qui resteront à être mortes.
06:40Et je pense que c'est à cette aune qu'on pourra mesurer
06:42les éventuelles secousses sur la démocratie américaine.
06:46Il a raison d'avoir peur.
06:48Quel regard porte-t-il vraiment sur l'Europe ou encore sur la France ?
06:51On s'en souvient de sa visite express lors de la réouverture de Notre-Dame.
06:55Il avait accordé une interview à Paris Match.
06:57Il évoquait à plusieurs reprises son amour pour la France,
07:00ne tarissait pas des loges pour Emmanuel Macron.
07:02Il aime vraiment la France, Donald Trump ?
07:04Oui, il aime bien la France. Il aime tous les symboles de la France.
07:07Il a beaucoup aimé cette invitation et cette visite à Notre-Dame.
07:11A l'inverse, et c'est très frappant, il n'aime pas du tout l'Union européenne.
07:14Il ne s'en cache pas. Il n'aime pas ce qu'elle représente.
07:17Il n'aime pas les idées qu'elle porte.
07:19Il préfère, il l'a toujours préféré, il le dit, les relations bilatérales.
07:22Cette organisation de plusieurs pays entre eux qui se mettent ensemble,
07:27ce n'est vraiment pas sa tasse de thé.
07:30C'est intéressant d'ailleurs, un petit détail, il a invité la première ministre italienne,
07:33Giorgia Meloni, pour la journée d'aujourd'hui.
07:36Une femme fantastique, comme il l'appelle.
07:38Et il n'a invité aucun représentant des 27 et de l'Union européenne.
07:42Il préfère les réunions et les relations bilatérales.
07:46Ça veut dire qu'Emmanuel Macron a intérêt à négocier, à cultiver la relation qu'il a avec lui.
07:53On se souvient de ses poignées de main.
07:55Ça a fait beaucoup rire et sourire.
07:57Mais ce n'est pas anodin, ça ?
07:59Oui, tous les dirigeants tentent de cultiver ces relations bilatérales
08:03parce qu'ils savent que c'est le mode de fonctionnement de Donald Trump.
08:06Pour l'Europe, du coup, ça va être un défi.
08:08C'est-à-dire comment cultiver ces relations-là tout en essayant de parler d'une seule voix.
08:14On voit déjà que ça s'annonce un peu compliqué.
08:17Vous nous parliez de Donald Trump tel que vous.
08:20Vous l'avez connu, Jérôme Cartillier,
08:23c'est-à-dire cet homme qui vomit, j'allais dire, sur les médias
08:27et qui essaye en même temps d'entretenir des relations particulières avec les journalistes
08:31pour être dans la lumière.
08:32Est-ce qu'il est moins fou qu'il n'y paraît ?
08:34Quand on parle de Donald Trump, les gens disent, beaucoup de gens disent qu'il est fou.
08:38Est-ce qu'il est moins fou en réalité ?
08:40Fou, je ne sais pas.
08:42La seule certitude, c'est qu'il a une énergie d'une part
08:48et une passion pour ce qui est l'objet de la campagne électorale absolument hors normes.
08:53Et que c'est dans ces moments-là, avec toutes ces outrances et ces provocations et ces excès,
08:57mais c'est dans ces moments-là vraiment qu'il arrive à galvaniser les troupes.
09:02Donc à cet égard, il y a quelque chose d'intéressant qui se profile,
09:05c'est qu'il a fait sa dernière campagne, Donald Trump.
09:08Il ne pourra plus jamais être candidat, c'est son deuxième mandat.
09:12La Constitution limite à deux mandats pour un président.
09:17Et donc, est-ce qu'il va réussir à s'adapter à cette nouvelle réalité ?
09:20Ce n'est pas sûr. En tout cas, ce sera un handicap pour lui.
09:22Je me souviens très bien, dès son arrivée au pouvoir en 2017,
09:25il parlait déjà de la prochaine échéance, en permanence.
09:28C'est-à-dire que la campagne, on a parfois l'impression
09:30qu'il est plus à l'aise en campagne qu'au pouvoir.
09:32Donc là, il se retrouve dans une situation un peu paradoxale.
09:35Il ne pourra plus faire campagne, en tout cas pour lui.
09:37Comment il va s'adapter à cette nouvelle réalité ?
09:39Ce sera une des très nombreuses inconnues des semaines, des mois et des années à venir.
09:44Et c'est ce qu'on surveillera.
09:45Merci beaucoup, Jérôme Cartillier.
09:47Je signale cette bande dessinée que vous avez co-écrite avec Karim Lebourg,
09:51en coulisses avec Obama, Trump et Biden, qui a été publiée aux éditions Delcourt.
09:56Merci à vous et très bonne journée.

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