Mayotte dévastée : pénurie d'eau, de nourriture, de médecins : alors que le nombre de victime augmente d'heure en heure, le gouvernement craint une crise sanitaire majeure. Genneviève Darrieusecq, ministre de la Santé et de l'Accès aux soins, est l'invitée de Amandine Bégot.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 19 décembre 2024.
Regardez L'invité d'Amandine Bégot du 19 décembre 2024.
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00:00RTL Matins, avec Amandine Bégaud et Thomas Soto.
00:05Il est 8h16, l'interview d'Amandine Bégaud alors que la situation sanitaire semble empirer de jour en jour à Mayotte avec le problème majeur de l'eau qu'on évoquait.
00:12Amandine, vous avez choisi d'interroger ce matin la ministre de la Santé et de l'accès aux soins et là pour le coup les mots accès aux soins prennent tout leur sens.
00:19C'est Geneviève Darrieussecq, bonjour et bienvenue à vous.
00:22Bonjour Madame la Ministre et merci d'être avec nous ce matin sur RTL. Cette crise à Mayotte, elle nous préoccupe tous.
00:29Et très sincèrement, on est tous extrêmement choqués ce matin quand on entend les témoignages qu'a pu recueillir l'envoyé spécial de RTL sur place.
00:36Son sentiment aussi à lui concernant le problème de l'eau. Je voudrais vous faire entendre un extrait de son reportage qu'on a diffusé tout à l'heure et vous réagirez juste après.
00:45En sortant de l'aéroport, un homme s'avance vers moi, le regard agarde et cerne sous les yeux. Cela fait plusieurs jours qu'il n'a pas bu.
00:52Ils sont des dizaines dans ce cas-là. A quelques kilomètres d'ici, sur la route encore janchée de troncs d'arbres et de morceaux de tôle,
01:00des femmes portent des packs d'eau sur leur tête. Dans les mains de Jimmy, deux petites bouteilles en plastique.
01:05C'est très difficile pour boire parce qu'il faut aller d'abord dans les communes où on peut s'en procurer parce qu'il y a des communes qui sont coupées d'eau.
01:13Des dizaines de gens qui n'ont pas bu une goutte d'eau depuis des jours. On entendait aussi tout à l'heure sur les hauteurs de Mamoudzou
01:20des enfants qui faisaient la queue pour avoir de l'eau. Comment se fait-on qu'un pays comme la France ne soit pas capable d'acheminer suffisamment d'eau Madame la Ministre ?
01:30Nous acheminons de l'eau en permanence par des Norias venant de la Réunion et sans savoir que d'abord l'aéroport avait présenté des difficultés d'accès.
01:44Il ne pouvait atterrir que certains types d'avions militaires. Aujourd'hui maintenant l'atterrissage de plus gros porteurs va être possible.
01:51Donc l'acheminement va pouvoir être plus fluide. Et il y a un navire qui arrive avec des conteneurs d'eau dans les prochaines heures venant aussi de la Réunion.
02:03Mais il faut quatre jours en bateau pour faire l'acheminement. Donc on est dans une situation effectivement très difficile.
02:10Bien sûr que personne ne boit pas d'eau pendant plusieurs jours, ça n'existe pas. On a besoin de l'eau tous les jours pour pouvoir vivre.
02:17Mais le problème c'est qu'il est certainement consommé de l'eau non potable, de l'eau saumâtre.
02:25Et j'encourage vraiment, nous avons à disposition sur l'archipel des pastilles de chlore.
02:35Il faut véritablement que cette distribution de pastilles de chlore se fasse massivement la difficulté.
02:41Mais elles sont distribuées ces pastilles madame la ministre ? Quand on voit l'état, pardon, des paysages, ces dégâts, on a l'impression qu'il y a encore plein d'endroits complètement inaccessibles.
02:51Elles arrivent ces pastilles ?
02:53Il y a beaucoup d'endroits inaccessibles, bien entendu. Il n'y a pas les relais non plus.
02:58Il y a quelques fois, alors les véhicules et la circulation des véhicules recommence à être possible.
03:04C'est vraiment une situation cataclysmique qui a été, il y a eu des anticipations dans certains domaines.
03:11Mais une destruction d'une telle ampleur n'était pas, rend les choses très très difficiles.
03:19Moi je comprends les populations, vraiment je les comprends. Je comprends leur inquiétude, je comprends même leur récrimination parce que c'est normal.
03:28Ils ont vécu un stress terrible et ils ont en plus ce sujet d'accès à l'eau, ce sujet d'accès à l'alimentation quelquefois.
03:37Donc nous avons, tout est mis en oeuvre pour approvisionner le plus rapidement possible avec les moyens que nous avons à disposition et les capacités de pouvoir les distribuer.
03:49Est-ce que vous pouvez nous garantir ce matin sur RTL que personne ne va mourir de soif à Mayotte ?
03:53Personne ne va mourir de soif. Il y a sur le plan sanitaire, nous avons un établissement hospitalier qui fonctionne dans des modes dégradés mais qui fonctionne.
04:05Et qui accueille des malades, qui peut accueillir des malades.
04:09Nous avons également, heureusement, pu remettre en activité 4 centres médicaux répartis à Mayotte pour accueillir les personnes.
04:20Les personnes qui se sentent en difficulté, il faut qu'ils aillent vers ces centres médicaux pour pouvoir avoir du soutien.
04:26Notamment s'ils se sentent déshydratés, fatigués, il faut véritablement qu'ils aient ce réflexe.
04:32Il y a des centaines de personnes dont on est toujours sans nouvelles.
04:36Des gens ici en métropole qui sont sans nouvelles de leurs proches parce que les télécommunications sont extrêmement difficiles.
04:41Est-ce que 5 jours après le passage de ce cyclone, vous espérez toujours retrouver ces personnes ?
04:45Bien sûr. Bien sûr. Je donne un exemple au niveau de l'Agence Régionale de Santé et des agents de l'Agence Régionale de Santé.
04:56Il y a à peu près 40% des personnes dont on n'a pas de nouvelles pour l'instant.
05:0040% ? C'est énorme !
05:02Oui, mais ce sont des personnes qui n'ont peut-être plus de téléphone, n'ont pas de réseau, n'ont pas d'électricité pour recharger le téléphone.
05:12Donc si vous voulez, on ne pense pas forcément qu'au pire.
05:16On pense surtout qu'ils sont très isolés et qu'ils n'ont pas pu être contactés.
05:21Donc ce travail est fait en permanence pour essayer d'avoir des liaisons avec ces personnes.
05:27Geneviève Dariussec, le dernier bilan donné hier soir par le ministère de l'Intérieur, 31 morts, 1373 blessés.
05:33Bilan loin d'être définitif, vous le disiez vous-même ce matin dans les colonnes du Parisien.
05:37Ça veut dire quoi ? Que vous redoutez à l'arrivée des centaines de morts, peut-être des milliers comme le disait le préfet ?
05:42C'est quelque chose qu'on ne peut pas aujourd'hui, en l'état actuel de la situation, évaluer.
05:50Ce qui est certain, c'est que le travail se fera au fur et à mesure bien sûr,
05:55et au fur et à mesure de la situation, des débléments, de l'avancée des secours.
06:00Mais ce qui est certain, c'est que moi je suis aussi très très vigilante à l'état sanitaire de la population,
06:07au risque d'épidémie qui pourrait se déployer.
06:11Le choléra notamment ?
06:13En particulier, le choléra qui était présent à Mayotte au printemps dernier,
06:17qui a été enrayé au mois de juillet à peu près.
06:22Et c'est pour cela que nous avons de toute façon d'abord pris attache avec l'OMS,
06:28l'Organisation Mondiale de la Santé.
06:31J'étais avec le directeur général de l'OMS mardi dernier à Lyon,
06:35et nous avons pris attache avec l'OMS pour qu'il déploie leur veille sanitaire aussi à Mayotte.
06:41Il n'y a pas de cas de choléra ces derniers jours ?
06:43Aujourd'hui, non. Il n'y a pas de cas de choléra aujourd'hui.
06:46Mais je veux être dans l'anticipation, et j'ai demandé que l'on prépositionne
06:51non seulement bien sûr des tests et des capacités à faire des tests,
06:55des médicaments bien sûr qui sont sur place,
06:57mais que l'on prépositionne également des doses de vaccins,
07:01afin, s'il y avait le moindre démarrage, que l'on puisse vacciner la population.
07:05Combien de doses de vaccins ?
07:06Alors aujourd'hui, nous allons prépositionner 10 000 doses de vaccins,
07:11et nous verrons, en fonction des besoins, comment l'évolution pourra se faire.
07:1510 000 pour un département qui, on le rappelle, en compte un peu plus de 300 000,
07:18ça sera suffisant ?
07:19Oui. La stratégie n'était pas de vacciner tout le monde.
07:22Au printemps dernier, la stratégie était de vacciner les personnes
07:25qui étaient dans des zones à gros risques,
07:28et donc il y a eu une stratégie vaccinale qui se mettra en oeuvre,
07:30mais d'autres doses seront acheminées en fonction des besoins.
07:33On sait qu'il y a eu un certain nombre d'évacuations sanitaires vers la Réunion,
07:37une cinquantaine...
07:38Cinquantaine.
07:39Dernier point, on est à 55 aujourd'hui, ça va se poursuivre ces évacuations ?
07:43Ça va se poursuivre.
07:44Les personnes que nous évacuons sont majoritairement des personnes
07:48qui ont des maladies chroniques graves et qui nécessitent des soins,
07:51notamment les dialyses rénales, qui nécessitent des soins particuliers.
07:57Ceci est fait pour soulager le système de soins de Mayotte,
08:00qui est bien sûr en mode dégradé, je vous l'ai dit,
08:04et je veux vraiment saluer nos soignants de Mayotte qui ont besoin de relève.
08:11Ils sont éprouvés ?
08:12Ils sont très éprouvés.
08:13Ils ont besoin de relève.
08:15La relève est là et arrive avec les réservistes qui sont sur place.
08:19Il y a une grosse centaine de réservistes qui sont arrivés.
08:22Certains sont arrivés, je crois, avec le Président de la République,
08:25et je veux aussi saluer l'implication de la Réunion dans cette crise.
08:32Le Président de la République est arrivé sur place il y a quelques minutes.
08:34Il va rester combien de temps Madame la Ministre ?
08:37Je pense qu'il va rester la journée et qu'il a un programme qui l'amène après à Djibouti.
08:44Djibouti avec un retour a priori à Paris pas avant dimanche,
08:48ça veut dire pas de gouvernement avant la fin de la semaine.
08:51Vous souhaitez rester Ministre de la Santé ou pas ?
08:55Écoutez, c'est un domaine que j'affectionne.
08:58C'est un domaine que je connais.
09:00C'est un domaine où la valse des ministres commence à être pénible pour l'écosystème.
09:08Il y a eu sept ministres je crois en deux ans.
09:11Alors, je ne sais pas si je suis la bonne personne.
09:13Ce que je sais c'est que nous avons besoin d'un budget rapidement.
09:17Nous avons besoin d'une stabilité pour pouvoir prévoir l'avenir de notre système de santé,
09:23l'avenir de son financement et restructurer notre système de santé
09:28qui en a bien besoin devant le vieillissement de la population,
09:31devant le besoin de soins et devant surtout le besoin de prévention.
09:35Donc tout ça est quelque chose qui demande du temps.
09:39La réponse est donc oui.
09:41Moi je suis à disposition et partout je serai.
09:45De toute façon, j'essaierai d'être utile.
09:47Merci beaucoup Geneviève Tariossec, Ministre de la Santé et de l'accès aux soins.
09:51Merci à vous.
09:52La Maillotte est dans une situation cataclysmique.
09:54Je comprends les récriminations de la population
09:56et la difficulté d'accès à l'eau et à l'alimentation.
09:58Il n'y a pas, cela dit, de cas de choléra aujourd'hui à Maillotte
10:01mais on prépositionne 10 000 doses de vaccins à titre préventif,
10:04vous a annoncé la Ministre de la Santé.