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"Il n'y a pas de drogue du viol, mais il y a des violeurs qui utilisent des drogues."

Dans son enquête Félix Lemaître s'est penché sur les viols ou agressions sexuelles par soumission chimique. Pensant que ces actes étaient souvent dans un contexte festif, il s'est aperçu que la majorité des cas ont lieu dans le contexte privé. Un travail qui fait tristement écho au procès des viols de Mazan. Il raconte.

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Transcription
00:00On s'est focalisé sur le GHB, qu'on a surnommé la drogue du viol ou du violeur,
00:05ce qui je pense est une très grosse erreur parce qu'en fait il n'y a pas deux drogues du viol ou drogue du violeur,
00:12mais il y a des violeurs qui utilisent des drogues ou même pas des drogues, des médicaments ou de l'alcool.
00:17La majorité des cas de soumission chimique ont lieu dans le contexte privé,
00:20donc à 42,6% d'après les chiffres de l'agence du médicament et seulement à 19,5% dans le contexte festif,
00:29alors qu'on s'est d'abord focalisé là-dessus.
00:31Mon enquête m'amène à comprendre ça, c'est qu'il faut sortir de cette obsession pour les boîtes de nuit et le GHB
00:37et regarder autour de nous parce qu'en fait c'est beaucoup plus banal que ça.
00:42Dans ton livre, tu montres qu'en fait le GHB, ce n'est pas forcément la substance la plus utilisée.
00:47Il y a plein d'autres cas de soumission chimique finalement.
00:50Bien sûr, pour reprendre les chiffres de l'agence du médicament,
00:53la substance la plus utilisée dans les cas de soumission chimique, ce sont en fait les médicaments à 56%,
00:59que ce soit des opioïdes, des benzodiazépines ou des antihistaminiques,
01:03donc ça peut être autant un somnifère qu'un anxiolytique ou un médicament contre des allergies.
01:10C'est quelque chose qu'on trouve assez facilement dans un placard à pharmacie en France.
01:14Exactement, des choses qu'on a souvent.
01:16Et puis il y a aussi le dark web qui permet de se procurer soit des fausses ordonnances,
01:21soit des médicaments directement via des revendeurs un peu scrupuleux.
01:25Le problème en numéro 1, c'est donc les médicaments.
01:28En numéro 2, la MDMA.
01:30Et en numéro 3, c'est l'alcool.
01:32L'alcool est à la fois le vecteur de la soumission chimique,
01:35ça veut dire que c'est là où on va mettre la drogue pour violer.
01:39C'est aussi une des substances avec laquelle on soumet chimiquement.
01:43Et c'est aussi une substance qui est utilisée pour la vulnérabilité chimique.
01:49C'est la plus utilisée, c'est-à-dire qu'on va profiter de l'état d'ivresse d'une personne,
01:54donc sous alcool, pour violer.
01:56On s'est focalisé sur les substances illégales,
01:59alors que les substances psychoactives légales ont une part très importante dans la soumission chimique.
02:04Dans ton livre, tu écris
02:13Ça fait beaucoup écho aussi avec le procès qui s'est ouvert le 2 septembre,
02:16celui de Dominique Pellicot qui est accusée d'avoir drogué sa femme
02:19et de l'avoir fait violer par des hommes recrutés sur Internet.
02:22Ces hommes, ils sont infirmiers, sapeurs-pompiers, journalistes,
02:26ils sont jeunes, ils sont vieux.
02:28En gros, dans ce procès, ce dont on se rend compte, c'est qu'il n'y a pas de profil type.
02:32Il y a quelque chose du mal ordinaire de la domination masculine dans ce procès
02:37parce qu'on voit très bien qu'en fait, ce ne sont pas des marginaux,
02:40des rôdeurs qui sont dans des ruelles ou dans des clubs ou des boîtes de nuit.
02:45En fait, tout simplement, ce sont des pères de famille,
02:49des gens même qui peuvent travailler dans le domaine du care,
02:52c'est-à-dire de l'attention à autrui comme les pompiers ou les infirmiers.
02:56Et effectivement, du coup, on comprend que ce sont des gens insérés socialement.
03:01Ton enquête, elle commence par un constat que tu dresses dans les milieux festifs.
03:05Elle te mène d'abord dans des bars.
03:07Elle te mène jusque sur le dark web.
03:10Et au final, on se rend compte que l'issue,
03:13c'est d'aller vérifier dans la sphère privée.
03:15Pour trouver des agresseurs, j'ai eu envie,
03:18ça a peut-être été le réflexe de beaucoup de gens,
03:20c'est d'aller voir dans les bars, dans les boîtes de nuit,
03:22de regarder en rencontrant des médecins, des docteurs en pharmacovigilance
03:27qui m'ouvrent les yeux sur le fait que c'est aussi dans la sphère privée,
03:33dans le cadre de la famille, du couple, des amitiés.
03:36C'est ça qui rend compliqué de saisir toute l'ampleur de la soumission chimique
03:42comme phénomène.

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