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Il se décrit lui-même comme un "dictateur cool"... Cette semaine dans "La grande histoire", Hugo Baiardi raconte comment Nayib Bukele, le très autoritaire président du Salvador, s'est attaqué aux gangs, quitte à mettre en péril l'état de droit

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00:00El Salvador estaba con metastasis.
00:01Ibamos a salir sanos,
00:03ya sin el cancer de las pandillas.
00:05Il se décrit lui-même comme un dictateur cool.
00:08C'est quelqu'un de très très ambitieux.
00:09Cuento contigo.
00:10C'est vraiment un pays qui a profondément évolué
00:12depuis l'arrivée au pouvoir de Bukele.
00:14Cette semaine dans La Grande Histoire,
00:15je vous raconte comment Naïb Bukele,
00:17le très autoritaire président du Salvador,
00:19s'est attaqué au gang,
00:21quitte à mettre en péril l'état de droit.
00:30Nous sommes au Salvador,
00:33un petit pays d'Amérique centrale de 6 millions d'habitants.
00:36C'est un pays avec peu de ressources.
00:40C'est un pays aussi en transition démographique.
00:43Il y a une part de la jeunesse qui est très importante
00:45et qui n'a pas de travail.
00:46Au début des années 90,
00:48le pays sort d'une longue guerre civile
00:50qui a fait plus de 75 000 morts.
01:01Des accords de paix sont signés
01:03entre le FMLN, une guérilla marxiste,
01:06et le gouvernement salvadorien,
01:08soutenu par les Etats-Unis.
01:09Et vous aviez énormément de jeunes qui étaient partis
01:12immigrer, se réfugier,
01:13seuls ou avec leurs parents aux Etats-Unis principalement.
01:17Ces jeunes ont eu beaucoup de mal à trouver leur place là-bas
01:20et ont fini par faire des groupes.
01:22Et ces groupes ont fini par faire de la délinquance.
01:24Aux Etats-Unis, la Mara Salvatrucha,
01:27un gang plus connu sous l'abréviation MS-13,
01:30se développe dans les quartiers de Los Angeles.
01:33Dans mes quartiers, c'est comme ma famille.
01:36Parce que quand tu n'as pas de famille,
01:39ils t'aident quand tu as besoin de quelque chose,
01:41quand tu te sens seul.
01:43Mara, la signification est directement liée à l'action violente.
01:46Et donc ça donne le nom des gens,
01:48Mareros,
01:49les gens qui appartiennent au Maras.
01:51On pourrait dire des gangsters si on était en mode anglais
01:53ou des mafieux si on était en mode italien.
01:55Les nouveaux membres sont tatoués et passés à tabac
01:58en guise de rites d'initiation.
02:00Reconnaissables à leurs tatouages distinctifs et leurs signes de main,
02:04les Mareros exercent diverses activités criminelles.
02:07Que ce soit le racket, la kidnapping
02:09ou le commerce de substances illicites.
02:13On ne parle pas d'un corps homogène,
02:14il y a des factions, des gangs différents
02:19dont les jeux d'alliance évoluent.
02:21Dans les quartiers latinos de Los Angeles,
02:23le MS-13 et la Mara-18 se livrent une guerre sans merci
02:27pour le contrôle du territoire.
02:30Au milieu des années 90,
02:32le gouvernement américain décide d'agir
02:34contre les gangs d'Amérique centrale.
02:36Les Mareros emprisonnés sont expulsés massivement
02:39vers leur pays d'origine.
02:42Le Salvador, qui se remet difficilement de la guerre civile,
02:45voit débarquer sur son sol des dizaines de milliers de membres de gang.
02:51Ils ont reproduit sur place ce qu'ils avaient là-bas, aux Etats-Unis.
02:55Donc ils ont reproduit leur gang,
02:56ils ont reproduit leur méthode
02:58et ils ont reproduit bien sûr la délinquance.
03:02Le nombre d'homicides explose.
03:052 800 en 2002, 4 000 en 2010 et plus de 6 000 en 2016.
03:14Le Salvador devient le pays en paix
03:16avec le taux d'homicides le plus élevé au monde.
03:22En 2015, Ney Bukele, 33 ans,
03:25devient maire de la capitale San Salvador.
03:28Il est élu sous l'étiquette du FMLN,
03:30le parti de gauche qui domine la vie politique.
03:33Il parlait d'inclusion, il parlait d'égalité, de non-discrimination,
03:37il parlait aussi d'embellir la ville, etc.
03:39Deux ans plus tard, Ney Bukele devient maire de la capitale de San Salvador.
03:44Il est élu sous l'étiquette du FMLN,
03:47le parti de gauche qui domine la vie politique.
03:50Deux ans plus tard, Ney Bukele est poussé à la démission
03:53et exclu de son parti,
03:55notamment pour avoir jeté une pomme au visage d'une conseillère municipale.
03:59Et ça l'a énormément vexé.
04:01Et donc il a fourbi pendant deux ans sa vengeance.
04:04Et sa vengeance, c'est je me présente comme candidat
04:07en fondant mon propre parti en 2019.
04:10Sous les couleurs de Nuevas Ideas,
04:12il s'allie à un parti de droite
04:14pour se présenter à l'élection présidentielle.
04:17Son thème de campagne, lutter contre la corruption de la classe politique.
04:40Il a à peu près l'âge moyen de la population salvadorienne.
04:43Il est assez représentatif, il comprend les choses.
04:46Il a parfaitement compris le code des médias sociaux.
04:51Il fait campagne sur les réseaux sociaux,
04:53ce que les autres candidats ne font pas vraiment ou très mal.
04:56Et ça, dans une population jeune, ça marche.
05:00A seulement 37 ans, Ney Bukele est élu président du Salvador.
05:08En public et sur ses réseaux sociaux,
05:10il s'affiche casquette à l'envers et dévoile sa vie privée.
05:17Il veut créer un décalage par rapport à la classe politique traditionnelle
05:21et notamment les anciens guerriers héros du front Farabundo Marti.
05:26Il a toujours voulu se montrer comme l'homme politique le plus connecté du monde
05:31en prenant y compris des selfies devant l'Assemblée Générale des Nations Unies.
05:36C'est le début d'une nouvelle histoire,
05:38avec un plan de contrôle territorial qui récupère la sécurité nationale
05:43et qui réduit les homicides et d'autres crimes comme jamais.
05:48Franchement élu, Ney Bukele promet au peuple salvadorien
05:52de s'attaquer à la violence des gangs.
05:54Mais sans majorité au Parlement,
05:56il n'y a pas eu d'élection,
05:58et il n'y a pas eu d'élection,
06:00il n'y a pas eu d'élection,
06:03Mais sans majorité au Parlement,
06:05le jeune président voit son champ d'action limité.
06:08C'est qu'il s'est retrouvé avec un Parlement,
06:10pendant deux ans,
06:11qui était absolument opposé à ses idées
06:13et où il avait peu d'alliés.
06:15Vous pensez bien que les partis n'allaient pas lui faire cadeau.
06:17En 2020, le Congrès lui refuse des financements
06:20pour son plan de lutte contre la criminalité.
06:23Le président pénètre alors dans le palais législatif
06:26escorté par des militaires
06:28et menace de dissoudre l'Assemblée.
06:30Je veux prendre l'occasion d'offrir 43 nouvelles patrouilles policières.
06:36La vision que nous avons pour la police nationale civile est beaucoup plus grande.
06:40Vous la connaissez.
06:42À ce moment-là, à l'étranger,
06:44on a dit la séparation des pouvoirs,
06:46quel scandale, etc.
06:47Mais les Salvadoriens, dans leur immense majorité,
06:50ont trouvé qu'il avait eu drôlement raison.
06:52Il s'est rendu compte, ce jour-là,
06:54qu'il pouvait exercer un pouvoir peut-être un peu plus fort
06:57que ce qu'il avait imaginé.
06:59En 2021, le président fait révoquer les juges de la Cour suprême
07:03qui lui sont hostiles.
07:05L'opposition dénonce une tentative de butch.
07:07Dans sa bio Twitter,
07:09Ney Bukele se définit lui-même comme un dictateur cool.
07:13Vous pouvez demander aux gens.
07:15Dites-leur.
07:16Qu'en pensez-vous du Salvador ?
07:18Qu'en pensez-vous de ce gouvernement ?
07:19Qu'en pensez-vous de la supposée dictature ?
07:21Arrêtez de croire en les,
07:23qu'ils soient dans un bureau loin de ce pays,
07:25qu'ils ne connaissent même pas.
07:27En parlant de ce qu'ils ne savent pas.
07:29Après trois ans de présidence,
07:31Ney Bukele a presque réussi son pari.
07:33La criminalité a drastiquement reculé.
07:36Arrêtez de tuer immédiatement,
07:38ou c'est vous et vos hommes qui paierez directement les conséquences.
07:41Le 26 mars 2022,
07:43le Salvador connaît sa journée la plus meurtrière depuis 20 ans.
07:4762 personnes ont été tuées,
07:49et plus d'un milliard d'hommes ont été tués.
07:51Le président de la Cour suprême,
07:53le président de la Cour suprême,
07:55le président de la Cour suprême,
07:57le président de la Cour suprême,
07:59le président de la Cour suprême,
08:01le président de la Cour suprême,
08:0462 personnes sont assassinées en 24 heures,
08:0787 en deux jours.
08:09Selon le média indépendant El Faro,
08:11cette vague meurtrière serait liée
08:13à la rupture d'une trêve secrète
08:15entre les gangs et le gouvernement.
08:18Tout ça est vraiment du registre de l'officieux.
08:20Il y a eu une rupture d'un accord tacite
08:22entre ces différentes organisations, l'État.
08:25Une des raisons qui a été évoquée,
08:27c'est que les Maleros avaient l'habitude de gérer leur prison.
08:30Et c'était une prison,
08:32une aile de prison par Malas.
08:34Et le gouvernement aurait décidé,
08:36suite à des désaccords,
08:38de mélanger tout le monde
08:40dans les mêmes cellules.
08:42Alors là, ça, c'était absolument inacceptable.
08:44Les Maleros auraient-ils considéré
08:46qu'il y avait rupture de la parole ?
08:48Et donc, pour rappeler au gouvernement
08:50qu'ils étaient capables de semer le chaos,
08:52réponse, ils n'avaient pas anticipé
08:54que le gouvernement réagirait encore plus fort.
08:56En réaction à cette vague de violence,
08:59Les policiers sont désormais soumis
09:01à des quotas d'arrestation
09:03et peuvent interpeller des individus sans motif.
09:15Les personnes emprisonnées n'ont pas le droit
09:17de faire appel à un avocat,
09:19n'ont pas le droit de contacter leur famille
09:21et doivent attendre entre 6 et 8 mois
09:23avant d'être présentées devant un juge.
09:25Les membres de gangs sont jugés
09:28lors de procès collectifs.
09:30Selon les ONG locales,
09:32près de 25% des personnes arrêtées
09:34sous l'état d'urgence seraient innocentes.
09:57Il est de plus en plus difficile
09:59de s'exprimer, et je pense notamment
10:01à ces médias tels que El Faro
10:03qui subissent une pression politique
10:05et judiciaire de plus en plus importante.
10:23En deux ans, 75 000 personnes
10:25sont placées derrière les barreaux.
10:27Près de 2% de la population
10:29est en prison.
10:31Le Salvador est désormais le pays au monde
10:33avec le plus grand nombre de détenus
10:35par habitant.
10:43En février 2023,
10:45Ney Bukele inaugure en grande pompe
10:47une méga prison pour gangsters
10:49pouvant enfermer jusqu'à 40 000 personnes
10:51dans des cellules collectives.
10:53La plus grande prison du continent américain.
10:57Sur ces images tournées par les équipes gouvernementales,
10:59les maréros sont attachés,
11:01alignés et mélangés.
11:23Il n'y a plus le cancer des gangs.
11:47La constitution salvadorienne
11:49interdit au président de briguer un second mandat.
11:51Mais grâce à l'avis favorable
11:53de la course suprême désormais acquise
11:55à sa cause,
11:57Ney Bukele est autorisé à se représenter
11:59après avoir préalablement démissionné.
12:05Sans surprise, il est réélu largement
12:07et revendique plus de 85% des voix.
12:21Les salvadoriens ont le droit de voter
12:23pour qui ils veulent.
12:25C'est ça une démocratie aussi,
12:27que ça nous plaise ou pas.
12:29Le problème c'est les conditions
12:31dans lesquelles tout ça se fait.
12:33Une partie de l'opposition
12:35dénonce des fraudes électorales.
12:37De son côté,
12:39Ney Bukele promet la prolongation
12:41de l'état d'urgence.
12:51Quant aux Mareros encore en liberté,
12:53ils ont fui les grandes villes
12:55pour les campagnes
12:57ou se sont exilés vers d'autres pays d'Amérique centrale.
12:59Et c'est d'ailleurs pour ça qu'il prétend,
13:01à juste titre, que le travail n'est pas fini.
13:03Ce qui prouve bien qu'il y a quand même
13:05des soucis qui ne sont pas résolus.
13:07Il faudra quand même là aussi
13:09trouver un jour la vraie question.
13:11C'est peut-être non pas qu'est-ce qu'on fait des Mareros
13:13mais pourquoi il y en a.
13:17Voilà, j'espère que vous y voyez un peu plus clair
13:19sur la situation au Salvador.
13:21Si vous avez aimé cette vidéo, n'hésitez pas
13:23à mettre un like, c'est super important pour nous.
13:25Vous pouvez aussi me poser des questions
13:27en commentaire, j'y répondrai avec plaisir.
13:29Et me suggérer des idées de sujets
13:31pour les prochaines semaines.
13:33En tout cas, si cette vidéo vous a intéressé,
13:35je vous mets le lien vers celle que j'ai faite sur l'équateur
13:37il y a quelques semaines. C'est un pays qui vient de connaître
13:39un épisode de violence assez inédit.
13:41Et je vous mets également le lien vers la vidéo
13:43consacrée à Emma Coronel,
13:45la femme d'El Chapo Guzman.
13:47Un dernier mot pour remercier toutes les équipes de Brut
13:49qui m'ont aidé à réaliser cette vidéo.
13:51Et je vous dis à la semaine prochaine
13:53pour une nouvelle grande histoire.

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