"C’est 850 000 civils qui vont être au cœur d'une bataille où il y a 2 millions d'hommes qui s’affrontent."
80 ans après, Françoise Passera raconte comment les civils français ont vécu le Débarquement.
80 ans après, Françoise Passera raconte comment les civils français ont vécu le Débarquement.
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00:00À partir du 6 juin le matin jusqu'au 7 juin au soir et même un peu plus tard, le 8 et le 9,
00:06il y a eu de très nombreuses villes qui ont été bombardées.
00:09Caen a été bombardé à peu près à 70%.
00:13Le centre de la ville a été détruit.
00:15C'est 850 000 civils qui vont être au cœur d'une bataille où il y a 2 millions d'hommes qui s'affrontent.
00:22Donc ils vont subir au quotidien les affres de la guerre.
00:25Les impacts très concrets, c'est 20 000 morts.
00:28La majorité part des bombardements mais ils sont aussi victimes des mitraillages,
00:34des combats qui se déroulent à proximité de leurs habitations ou de leurs refuges.
00:41Un convoi allemand est mitraillé, les populations en exode sont sur la même route.
00:46Elles font partie des dommages collatéraux.
00:48Les bombardements et les mitraillages sont souvent le fait des soldats alliés
00:54mais en revanche, les exécutions sommaires sont perpétrées par l'armée allemande
01:00et elles sont assez nombreuses.
01:01Au-delà des morts, il y a un exode assez massif de la population.
01:04Dans un premier temps, les civils pensent que c'est un bombardement,
01:08les libérateurs vont arriver demain puisqu'ils sont déjà sur les plages.
01:11En réalité, les bombardements recommencent le soir du 6 juin et dans la nuit du 6 au 7
01:19et là, on assiste à un exode massif des populations.
01:22Beaucoup cherchent à se réfugier dans le sud du département,
01:26du côté de l'Île-et-Vilaine pour la Manche et puis vers l'Orne plutôt pour le Calvados
01:31mais très vite, ces départements-là vont être saturés de réfugiés.
01:35On les accueille dans les écoles, dans les églises, dans les salles des fêtes
01:40mais les autorités n'ont pas assez de moyens pour les garder
01:44et donc les réfugiés sont contraints d'aller plus loin
01:47et certains d'entre eux vont partir et s'arrêter en Charente, dans les Pays de Loire, donc très loin.
01:54Dès que les combats sont passés, les populations cherchent à rentrer chez eux le plus vite possible
02:00mais ce n'a pas toujours été possible puisque parfois leur village est miné par exemple,
02:06parfois les eaux sont contaminées et donc les populations ne peuvent pas toujours rentrer tout de suite
02:11d'autant plus que pour un grand nombre d'entre elles, elles vont être sans abri et sans toit.
02:16C'est ça qui a été assez ambigu justement pour les Normands,
02:19c'est qu'à la fois ils devaient être heureux que la France soit libérée et que les Allemands s'en aillent
02:24et en même temps ils ont tout perdu aussi, il y en a qui ont tout perdu avec ce débarquement et ces bombardements.
02:29Oui, oui, tout à fait, je me souviens, alors la première commémoration en hommage aux civils
02:34qui a eu lieu en 2014 avec François Hollande,
02:37il l'avait dit à l'oral, il y avait une certaine confusion des sentiments.
02:42Alors même que derrière les clameurs et parfois les joies se mêlait le goût âcre des deuils des disparus dans la bataille.
02:50C'est ce mélange des sentiments tout au long de ces jours du mois de juin 1944 jusqu'au mois d'août,
02:59à la fois cette délivrance, cette espérance enfin accomplie
03:06et en même temps cette souffrance et cette persévérance pour aller jusqu'au bout.
03:12Et effectivement, autant dans une ville comme Bayeux qui n'a absolument pas été détruite,
03:18les alliés sont accueillis avec des drapeaux, on pavoise, on leur offre du site, du calvados,
03:24ils sont accueillis à bras ouverts, autant à Caen, lorsqu'ils sont arrivés dans la ville,
03:31ils ont trouvé des gens déjà épuisés par un mois de siège, fatigués, sous-alimentés et qui avaient tout perdu.
03:41Alors il y a eu des mouvements de colère, mais enfin, qu'est-ce que vous avez fait ?
03:47Pourquoi vous nous avez bombardés ? On ne comprend pas.
03:51Malgré tout, cette colère, elle s'apaise.
03:54Les gens ont estimé que c'était le prix à payer pour retrouver sa liberté.
03:59Ces premières commémorations, en 2014, 70 ans après les événements,
04:04ont été particulièrement importantes et très appréciées, je crois, des populations à Caen, en Normandie,
04:11parce que c'était la première fois qu'on rendait hommage à la souffrance des civils.
04:20Et c'était donc une étape importante dans l'histoire et la mémoire de la souffrance endurée par les populations.